Demandée par la complexité des problèmes à traiter, exigée par les bailleurs internationaux et renforcée par la création de filières pédagogiques spécialisées, la professionnalisation touche toutes les grandes ONG internationales. Dès lors, ce que nous avions décrit pour les seules ONG humanitaires, il y a plus de 20 ans (Dacheux, 1998), se généralise à l’ensemble des secteurs (environnement, droits humains, solidarité internationale, etc.) : une contradiction entre la fin (prendre soin du monde) et les moyens (recours à des techniques de communication pensées pour tirer profit du monde). Pour le dire autrement, les professionnels de la communication, souvent recrutés dans les écoles de commerce, utilisent, en interne, les techniques de management pour animer la vie de l’organisation et recourent, en externe, principalement au marketing (recherche de fonds) ou au lobbying (plaidoyer) pour faire connaître et reconnaître leurs actions. Ces approches sont très coûteuses et déstabilisent un peu plus l’identité malmenée de ces organisations, qui se retrouvent prises entre le marteau de la mondialisation économique et l’enclume de l’instrumentalisation étatique. Pourtant, en délaissant cette approche gestionnaire de la communication, il est possible de renforcer les capacités d’agir de ces organisations de la société civile. Comment ? C’est l’objet de ce texte qui se développera en deux parties : montrer que ce que l’on nomme les ONG, et que nous préférons nommer les Organisations de mouvements sociaux, sont des actrices politiques œuvrant à l’émancipation démocratique et non des entreprises spécialisées gérant des problèmes sociaux (I)…