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Hermès : Pour commencer par une question directe : peut-on faire confiance à l’auteur.e ? Dans vos livres, celui-ci n’est pas le mieux placé pour connaître la vérité sur ses personnages ; il peut aussi commettre des bévues, des impairs – sur la véracité, sur le style, sur l’intrigue. En somme, bien souvent, l’auteur.e se trompe et trompe le lecteur ?Pierre Bayard : Mes travaux se situent dans le cadre de ce que l’on pourrait appeler avec Sophie Rabau (2012) une critique contrauctoriale, consistant à remettre en cause ce que dit l’auteur.e. C’est par exemple le cas de l’une des méthodes que j’ai inventées, la critique policière, laquelle incite à contester la solution trouvée par l’enquêteur et l’auteur.e dans des romans policiers, et donc à montrer qu’ils se sont trompés sur le nom de l’assassin.
Ce type de lecture peut paraître paradoxal. Il n’est pourtant pas si nouveau. L’approche psychanalytique par exemple, qui ne date pas d’hier, revient à rechercher un autre texte derrière le texte apparent. Et toute la nouvelle critique des années 1960 reposait sur l’idée de dépasser la simple lettre pour percevoir des dimensions qui avaient échappé à l’auteur.e.
Il convient tout de même de préciser un point important. Ces lectures, qui peuvent en un premier temps sembler marquer une forme de défiance, manifestent en fait une grande confiance dans le texte littéraire, en tout cas quand il est de qualité, puisqu’elles reviennent à en dégager des éléments qui avaient échappé à l’auteur…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 16/12/2021

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