En plus de ses écrits littéraires, ceux pour le cinéma et pour le théâtre, Jean-Claude Carrière a également publié plusieurs ouvrages faisant retour sur sa propre pratique de raconteur d’histoires. Il s’est particulièrement attardé sur son métier de scénariste, dont le livre Exercice du scénario (Carrière et Bonitzer, 1990) propose une approche assez singulière. Ce titre d’ouvrage pourrait paraître a priori fidèle au genre et dans la lignée des manuels qui l’ont précédé et de ceux le suivront, à savoir des considérations pratiques pour lesquelles le mot « exercice » prend tout son sens. Ces manuels sont souvent remplis de petits entraînements pratiques suggérés en fin de chapitre pour expérimenter les concepts élaborés en cours de lecture, nous aidant ainsi dans la construction du récit et de ses personnages. Mais dès le titre quelque chose diffère et, déjà, rend compte de la singularité de l’approche proposée : le mot « exercice » est au singulier ! Ce qui est alors un détail prend tout son sens : ce ne sont pas tant les astuces et autres séquences d’entraînement qui sont mises en avant mais bien la pratique du métier lui-même, la façon dont nous l’exerçons ou, plutôt, dont il doit être exercé. Et c’est précisément sur cet exercice que nous souhaitons nous attarder. « Savoir écrire, à l’évidence ne peut pas nuire, mais l’habileté, l’élégance, la densité de la plume n’est qu’une qualité parmi une bonne douzaine d’autres » (Ibid., p. 12). Si la maîtrise du littéraire se fond dans tant d’autres qualités, si elle n’est plus première, qu’est-il alors à penser en priorité dès lors qu’il est question d’écriture scénaristique …