Article
Hermès : On a pu associer la montée de la défiance dans la société et la montée en puissance des dispositifs numériques. Constatez-vous une relation entre les deux phénomènes ou estimez-vous qu’il s’agit d’une illusion ?Luc Wise : Il est indéniable que le déploiement massif du numérique dans nos vies a accéléré les phénomènes de défiance dans la société française, même s’ils existaient bien avant. Par exemple, dès 2007, les travaux d’Algan et Cahuc évoquaient une « société de défiance » en France. L’affaiblissement des structures historiques d’autorité et d’appartenance – les partis politiques, les syndicats, l’église, l’État-nation – constitue sans doute l’une des causes de ce phénomène, alors que certains historiens remontent à la débâcle de 1940 et l’Occupation pour expliquer les débuts de la perte de confiance des Français dans leurs institutions. La méfiance des Français envers les élites et les institutions n’est pas nouvelle en soi.
En revanche, l’essor du digital a indéniablement accéléré ces phénomènes de défiance de plusieurs manières.
La première est liée à la qualité de l’information à laquelle nous sommes exposés. « Infox », « fake news », « deep fakes », etc. : la propagation d’informations qui n’ont pas été vérifiées ou qui sont tout simplement fausses alimente un climat de défiance généralisé. Il me semble que nous avons tous notre part de responsabilité dans ce domaine : la propagation d’informations peu fiables n’est pas uniquement du fait de hackers malveillants ou de sociétés du type Cambridge Analytica…
Auteur
Sur un sujet proche
- Mis en ligne sur Cairn.info le 16/12/2021

Veuillez patienter...