1Les Italiens ont été les premiers à réintroduire la musique dans l’horrible tragédie du coronavirus, évidemment à Naples, début mars 2020. Pour conjurer le sort et chanter depuis leur pas-de-porte et leur balcon, en utilisant tous les instruments à leur disposition. Depuis, d’autres pays ont suivi, jusqu’à mélanger applaudissements et musique de toutes sortes.
2Quel plus bel hommage à la musique et à son universalité ? Vivre, c’est chanter, danser, jouer des instruments. Conjurer les malheurs, célébrer, crier ! La musique est omniprésente dans toutes les sociétés, à tous les âges, dans tous les milieux. C’est sans doute, avec la cuisine, l’activité la plus universelle et, finalement, la plus réussie de cette mondialisation qui, par ailleurs, est un rouleau compresseur des identités et de la diversité. La musique, avec toutes ses ambiguïtés commerciales, culturelles, politiques, demeure un des liens humains les plus forts.
3Voilà la raison de ce numéro d’Hermès. Essayer de comprendre comment la musique, malgré toutes les différences, contradictions et inégalités, reste la communication universelle par excellence. Peut-être la première figure de l’universalité, la première expérience du rapport à l’autre. La mondialisation a facilité toutes les expressions, joie, colère, émancipation, innovation, profit, inventions, identités. La musique est un des plus grands identifiants de l’humanité des mémoires, créations, partages et inventions. Elle échappe à tous les déterminismes et il est impossible d’en faire le tour, impossible de la rationaliser, encore plus impossible d’en faire une théorie. Si ce n’est qu’elle est finalement plutôt du côté de la liberté, de la révolte et de l’émancipation. Elle est une des expressions les plus anarchistes de la capacité créative des hommes pour s’exprimer, résister, inventer, retrouver l’autre.
4Aucune hiérarchie n’est finalement possible dans ces innombrables expressions et instrumentalisations. Simplement, il est impossible de s’en passer, comme d’en faire le tour et d’en donner une explication rationnelle. Les industries musicales illustrent cette contradiction en gérant constamment ces deux dimensions : la concentration et la diversité. Tout se conjugue, se mélange, se dépasse et se retrouve dans ces innombrables formes d’expression musicale. Et l’on retrouve ainsi les individus, les communautés, les sociétés. C’est pour cela qu’il faut parler, au-delà de toutes les différences, de l’universalité de la musique. Au singulier, et non au pluriel. La musique ? Ce qui est le plus au cœur du désir de partage et de solidarité. Le moyen d’apprivoiser l’altérité. La figure la plus emblématique de la communication et de la condition humaine. C’est-à-dire la recherche du lien entre soi et l’autre.