1La bande dessinée participe à la création du lien social en Afrique de deux manières au moins :
Elle permet de créer des communautés artistiques
2Pour mieux promouvoir le neuvième art tant en Afrique qu’à l’étranger, certains bédéistes, bédéphiles ou « bédélogues » se sont regroupés dans des associations ayant comme objectif principal de faire connaître la BD africaine et initier les jeunes aux techniques et langage de la BD.
3À Madagascar, on peut citer : l’association A-Mi ou Arista Miaray (les artistes associés) animée par R. Rabesandratana, en collaboration avec des spécialistes de la narration graphique comme R. Max, Roddy et Barry ; Abédéma (Association des bédéistes malgaches) créée en 1985 sous la direction de Zazaly et d’A. Ramiandrisoa, après le festival de Nairobi ; Soimanga (petit passereau malgache dont le mâle porte un plumage à reflets bleu), une association créée en 1987 par A. Ramiandrisoa, dont l’objectif est la promotion de la BD et de l’image. En 1993, la jeune génération a créé Mada-BD, une association de dessinateurs de bande dessinée de Madagascar dont l’objectif principal est la redynamisation de la BD malgache en déclin depuis 1990.
4En RDC (Congo Kinshasa), l’Atelier de création, recherche et initiation à l’art (Acria) a été fondé en 1990 par Barly Baruti. Cette association a publié le magazine Afro-BD et elle a organisé à partir de 1991 cinq éditions du Salon africain de la BD et de la lecture pour la jeunesse. La toute dernière association est Kin Label, créée en 2008. Celle-ci regroupe une dizaine de jeunes artistes autour d’Asimba Bathy et publie le magazine Kin Label qui en est aujourd’hui à son sixième numéro.
5En Côte d’Ivoire, signalons l’existence de Tache d’encre. Créée le 11 décembre 1999, par Zohore et Mendozza, Tache d’encre publie l’hebdomadaire Gbich ! Le Journal d’humour et de BD qui frappe fort.
6Au Cameroun, il y a eu le Mouvement d’auteurs camerounais de bande dessinée (Mac BD), basé à Douala, et Coup d’Crayon qui est un collectif des dessinateurs de presse du Cameroun. Le dernier né est Trait Noir, Association des illustrateurs et auteurs de bande dessinée. Il a vu le jour au mois de juin 2005 et publié le Bulletin de Trait Noir qui essaye de répondre aux questions que l’on se pose aujourd’hui sur la BD camerounaise.
7À signaler également les associations créées dans d’autres pays : Bénin Dessin (Bénin) et Association Farafin’c (Burkina Faso) dont l’objectif reste et demeure la promotion de la BD africaine.
8Les bédéistes africains, vivant en Europe, se sont eux aussi regroupés au sein d’associations : Afrobulles, créée en 2001 par Alix Fuilu, a déjà organisé plusieurs manifestations, notamment Les Rencontres de la BD africaine et publie la revue Afro-bulles. Afrique Dessinée a été créée en 2001 par des dessinateurs et des scénaristes sensibles aux réalités africaines. Il s’agit d’une plateforme internationale d’échanges pour les artistes (dessinateurs et scénaristes) dont les membres ont publié quelques albums, notamment : Une éternité à Tanger, de Faustin Titi (Côte d’Ivoire), Imboa, de Didier Randriamanantena (Madagascar), édités par Laï Momo (Sasso Marconi) ; Rwanda 1994, Descente aux enfers, de Pat Masioni (République Démocratique du Congo), chez Albin Michel.
C’est un média au service de la société
9En tant que langage, la BD africaine entretient un rapport avec les médias. D’abord, la presse écrite (quotidienne, hebdomadaire, magazine) est restée le lieu d’éclosion de la BD africaine. Beaucoup de dessinateurs y ont publié leurs premières planches et d’autres y ont commencé comme caricaturistes.
10Ensuite, bien qu’ayant eu ses débuts dans les médias, la BD elle-même est à comprendre aussi comme média au service de la société. Elle remplit les trois fonctions traditionnelles des médias : informer, former et divertir ses lecteurs. Elle explique parfois aux lecteurs ce qui se passe dans leur société ; elle éduque en leur montrant ce qu’il ne faut pas faire ou les attitudes à adopter ; elle divertit, en tant que moyen ludique.
11En Afrique la BD est « un médium pour toutes les couches de la population, y compris pour celles qui n’ont pas la culture de la lecture ou qui n’ont pas la télé » [1]. C’est ainsi que dès ses origines en Afrique, situées au début des années 1950, la BD était utilisée par les missionnaires comme média éducatif, comme moyen pour édifier, éveiller les vocations et évangéliser. En tant que média éducatif, elle a une portée pédagogique et elle utilise la vertu persuasive pour sensibiliser et vulgariser.
12Ceci justifie le développement de la bande dessinée éducative ces dernières années en Afrique. Elle est souvent financée par des organismes travaillant dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la culture ou des droits de l’homme, car ils sont conscients de l’importance que les jeunes attachent à la bande dessinée. Sans prétendre à l’exhaustivité, les thèmes suivants sont développés : la lutte contre le Sida, l’excision ou la toxicomanie ; les personnages historiques ; l’immigration et les problèmes liés à l’environnement et à l’urbanisme.
Note
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[1]
« La BD peut être un grand médium pour toutes les couches sociales », Africultures, n° 32, 2000, p. 27.