CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Michel de Certeau, né à Chambéry en 1925 et décédé en 1986, est un intellectuel français, auteur d’études historiques, plus spécifiquement d’histoire religieuse (surtout la mystique des xviie et xviiie siècles). Jésuite, il refuse de vivre « dans la communauté », tout en restant toujours fidèle à cette institution. Proche de Jacques Lacan, il est membre de l’école freudienne de Paris depuis sa création. En 1968, il s’engage en faveur des étudiants. Mystique, « convaincu d’expériences », à la manière de Michel Foucault, dont il fut un ami proche, il est une personnalité complexe. Il fut un des représentants français des Cultural Studies (à l’époque où celles-ci étaient essentiellement une distinction anglaise !) et il écrivit (avec Luce Giard) ce que l’on peut considérer comme son livre le plus populaire (du moins en communication) : L’Invention du quotidien, tome 1, « Arts de faire », et tome 2, « Habiter, cuisiner », Gallimard, 1990.

2Qui a lu de Certeau est familier avec l’idée du « braconnage culturel », qui assimile les « producteurs de biens culturels » à des propriétaires terriens qui imposent leur conduite au public (grâce à la réglementation des usages et des accès) et compare, par contre, les consommateurs à des « braconniers » qui viennent sur les terres voler des biens pour composer leur quotidien. Les propriétaires élaborent des stratégies, des actions de contrôle de l’espace, pour piéger les dominés qui, eux, mènent des actes de résistance (par exemple, zapper à la télévision, marcher dans la ville, lire et écrire, etc.) qui sont en quelque sorte des micro-libertés face au pouvoir.

3Pionnier des études sur les usages, maintenant à la mode, de Certeau considère qu’il n’y a rien de plus opaque que les analyses de la vie quotidienne. « Il faut s’intéresser non aux produits culturels offerts sur le marché des biens, mais aux opérations qui en font usage ; il faut s’occuper des manières différentes de marquer socialement l’écart opéré dans un donné par une pratique. »

Jean-Paul Lafrance
Jean-Paul Lafrance est professeur émérite à l’Université du Québec à Montréal, où il est cotitulaire de la Chaire Unesco-Bell en communication et membre du groupe de recherche Orbicom. Parmi ses divers champs de recherche, il faut citer l’articulation entre l’offre marchande et l’appropriation sociale des médias, ainsi que l’identité et la sociabilité dans les jeux vidéo. Sur ce thème, il a récemment publié Les Jeux vidéo, à la recherche d’un monde meilleur (Hermès - Lavoisier, 2006).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 01/11/2013
https://doi.org/10.4267/2042/24102
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