1Serge,
2En présence de ceux que tu as le plus aimés, ta famille, je t’écris aujourd’hui pour te dire ce que j’ai toujours pensé et que je ne t’ai pas assez dit depuis notre rencontre en 1991.
3J’ai tant appris de toi que je me sens infiniment redevable à ton égard. À tes côtés, j’ai su qu’on pouvait agir vraiment pour que les relations Nord-Sud, viciées par l’Histoire, deviennent plus justes, plus dignes, plus égalitaires. La diversité culturelle dont on parle tant, ce dialogue des cultures que nous savons si nécessaire, toi, Serge, tu les as fait avancer pas seulement avec des mots, mais avec tes actes et tes réussites.
4Dans le monde aride de la communication, tu as apporté ton idéalisme, ta gaieté contagieuse, ton énergie, ton imagination constructive, ton don de persuasion.
5Tu as apporté aussi ton engagement, forgé dès ta jeunesse, pour la défense des Droits de l’Homme et les luttes pour l’indépendance. Ainsi, juif de Tunisie, tu as toujours été l’ami des Palestiniens. Tu as appris de tes parents, Gladys et Georges, un internationalisme généreux, rayonnant, sans naïveté ni résignation. Cet engagement a été présent dans tout ton parcours.
6Ensemble, nous avons créé Écrans du Sud dans un vrai rapport fraternel entre créateurs du Sud et créateurs du Nord. C’est surtout André Rousselet, conseillé par Hervé Bourges et convaincu de la justesse de ta vision, qui t’a donné la chance de mettre en œuvre ton projet. Tous deux, vous avez su allier utopie et professionnalisme : Canal Horizons est né de cette rencontre.
7Ce fut, pour tous ceux qui la vécurent avec toi, une magnifique entreprise humaine et professionnelle, bien plus solide que ne le présageaient les observateurs. Ce ne fut pas de tout repos. Avec Olfa et Véronique, Majid et Nouredine, Jean-Christophe et les autres, nous étions parfois bousculés, un peu inquiets de tes initiatives, mais toujours subjugués par ta manière de surmonter tous les obstacles.
8En 1994, nous avons cru te perdre lorsque ton cœur t’a lâché à Abidjan. Mais tu as vaincu, et tu es revenu plus actif que jamais. C’est pour cela que, lorsque tu es tombé malade, nous avons pensé : cette fois-ci encore, Serge peut vaincre.
9Avoir partagé avec toi le tiboudiène chez Farah, écouté la Cora, inauguré Canal Horizons à Bamako, navigué sur le Niger, autant de souvenirs simples et heureux qui sont maintenant des trésors pour nous.
10Par la suite, ton projet a trouvé sa pleine mesure à TV5 où tu as insufflé une nouvelle ambition avec une réussite exemplaire.
11En remodelant l’information, en élargissant le rayonnement de cette chaîne, tu en as fait un outil remarquable et un acteur du dialogue des cultures. Tu as ainsi gagné la confiance de tes nombreux tuteurs, en particulier celle de Son Excellence Abdou Diouf, Secrétaire général de la Francophonie. Je sais l’amitié qui vous unit et qui t’a soutenu tous ces derniers mois.
12Il est vrai que tout vous accordait, car tu n’as jamais cessé de tisser, entre l’Afrique que tu aimais tant et les autres continents, des liens de compréhension et d’amitié, avec l’absolu respect des partenaires qui te caractérise.
13Tout cela, tu as pu le faire parce que tu y as mis toute ton énergie, ta force jusqu’au bout de tes forces, ton amour de la vie et des autres.
14Ta vision du monde, ta générosité, tu as su les transmettre à tes fils, Karim et Élias. Ce sera leur plus grande richesse. Je suis sûre qu’ils sauront continuer ton chemin.
15À chacune de tes étapes, j’ai été fière de toi comme je suis fière de notre compagnonnage affectueux.
16Tous ceux qui ont travaillé avec toi, tous ceux qui sont près de toi ce matin ici ou en pensée, te le disent, Serge, nous t’aimons et te respectons pour toujours.