CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Aux yeux de nombre de leurs défenseurs, la mise à distance de la sociologie apparaît comme l’une des conditions d’affirmation des Sic [1]. Au-delà de l’argument stratégique – pour exister il est nécessaire de se constituer en adversaire, s’opposer pour se poser – ce rejet est motivé par deux grandes séries de constats épistémologiques. La sociologie, après les années 1960 marquées par l’essoufflement progressif des recherches menées dans la mouvance lazarsfeldienne, serait tout d’abord frappée d’une véritable cécité à l’égard de ces objets emblématiques de la modernité que sont les objets communicationnels, à l’inverse des Sic dont le projet serait justement de saisir le monde nouveau. Il existerait par ailleurs une véritable incompatibilité de nature entre la communication, processus ambigu, jamais fermé, et les concepts et méthodes des sciences sociales, fondés sur la clôture, la catégorisation et une dialectique simple entre des appartenances sociales et des cultures. Il s’agirait au total de rejeter une tradition à visée englobante mais ignorante de la spécificité du communicationnel, objet trop corrosif pour une vieille discipline positiviste.

2Je vais tenter de montrer que ce double constat relève largement du malentendu et qu’il ne tient pas devant un examen des positions effectivement occupées par les chercheurs. Pour le dire clairement, si la sociologie a échoué pendant une grande partie des années 1970-1980 à couvrir l’espace communicationnel, elle a depuis plus d’une dizaine d’années renoué avec ce dernier, de façon encore insuffisante au regard de l’importance des enjeux mais de façon significative. Plus fondamentalement, le moment positiviste de la sociologie est aujourd’hui daté et l’absence de la question communicationnelle de son projet relève du mythe: cette dernière est en réalité l’un de ses éléments fondateurs. Il ne fait pas de doute que la communication se prête aux renouvellements théoriques d’une science en perpétuel dépassement d’elle-même, particulièrement apte à décrire le monde contemporain. Je nuancerai d’autre part la modernité des recherches revendiquant l’appellation de Sic, en comparant ces dernières avec l’autre grand ensemble de travaux qui a bousculé les sciences sociales dans le domaine de la communication, les Cultural Studies anglo-saxonnes. Ceci non dans le but d’invalider une démarche Sic qui serait fondée sur la découverte de nouveaux terrains, avec la liberté que permet une approche littéraire, et/ou sur un rapprochement avec les méthodes des sciences sociales, mais dans le but de critiquer une démarche qui serait rigoureusement inverse, peu ouverte de fait aux objets communicationnels contemporains et revendiquant l’appellation de discipline scientifique en se segmentant des sciences sociales.

Sociologie et communication : de la première à la seconde modernité

3Il ne fait aucun doute qu’une certaine sociologie a échoué à penser la communication. Cette sociologie s’était donné pour tâche d’expliquer la première modernité (dans ce texte, « modernité » renvoie à la définition fournie par Ulrich Beck), marquée par la constitution des États-Nations, du travail industriel, de la famille nucléaire patriarcale et des classes sociales comme systèmes de domination, de classement et de pensée. Elle abordait prioritairement la question du sens collectif par le constat de l’effacement supposé progressif de la croyance dans les mondes contemporains, ce que l’on nomme « sécularisation » ou « désenchantement ». Dans leur diversité, les projets des Pères fondateurs excluaient pour la plupart tout ce qui pouvait apparaître comme perturbateur pour l’analyse de cette première modernité, tout ce qui semblait trop labile, trop trivial ou trop contraire au constat d’une perte du sens, en premier lieu les médias de masse, alors même que chacun de ces auteurs avait l’intuition des transformations communicationnelles et des méthodes pour les appréhender (Maigret, 2003). Marx est journaliste et lit Eugène Sue mais verse la problématique de la communication de masse dans la catégorie de la fausse conscience. Weber écrit un programme complet d’étude de la presse sans jamais l’appliquer. Durkheim balaie les présupposés sur les effets pathologiques des médias mais n’attache pas de réelle importance au développement de ces derniers. Les héritiers de ces Classiques, jusqu’aux plus contemporains, conservent leur double distance à l’égard des objets médiatiques, pourtant familiers à tout un chacun mais rendus trop exotiques par un processus actif de refoulement, et à l’égard du processus communicationnel, objet de méfiance et de défiance.

4Pour être plus précis, la sociologie classique n’a évidemment échoué qu’à moitié. Elle a aussi fourni des cadres d’analyse pour ceux qui faisaient de la communication nouvelle une interrogation majeure. L’opposition entre Théorie Critique et Fonctionnalisme Empiriste a permis d’infirmer les théories des effets directs, de mettre à distance les présupposés à l’origine des paniques morales, de critiquer le déterminisme technologique et la cybernétique, et d’explorer les rapports entre appartenances socio-économiques, domination idéologique et consommation médiatique. Cette recherche a accompagné la transition d’un monde fondé sur la tradition, sur des formes religieuses de communication, vers un monde se donnant pour référent ses propres valeurs humaines. L’opération typique des penseurs semi-modernes, pour reprendre l’expression de Beck, est de substituer à une vision ancrée dans la naturalité des choses matérielles et des traditions la vision d’un univers de référents sociaux sui generis. Il faut dénaturaliser pour culturaliser ou sociologiser. Le problème est que ce mouvement indispensable a conduit à l’évocation d’une seconde nature, le « social », celui des sociétés industrielles, devenu aussi rigide que les traditions théologico-politiques, déconstruites quant à elles. C’est le moment où la sociologie se pense positiviste ou structurale, capable d’enserrer le monde dans les filets étroits des indicateurs quantitatifs ou des homologies de situations. La sociologie de Pierre Bourdieu, qui revendique de façon heuristique une prétention à la synthèse des trois grands courants fondateurs (marxiste, durkheimien, wébérien), achevant de ce fait un parcours séculaire, décrit de façon exemplaire les sociétés contemporaines comme des univers de traditions implacables où l’emporte la reproduction de positionnements et de qualités bien définis … alors que ces sociétés sont les plus instables de l’histoire ! Elles organisent en effet la coexistence de régimes d’actions pluriels et souvent conflictuels au sein et entre les individus et les groupes. De façon significative, l’une des limites les plus visibles de ce courant est sa difficulté à saisir le médiatique et le populaire, réduits à des pratiques vides de sens.

5La prise en compte des insuffisances de cette vague de sociologie a appelé une correction, un « tournant communicationnel » aux formes nationales très variées dont le dénominateur commun est la prise en compte de la dimension créative de tout acte humain. Le bannissement de la communication de l’espace sociologique, au profit des courants philosophiques et sémiologiques a alors été renforcé par la montée en puissance des discours critiques de la culture de masse qui, de l’intérieur de la première modernité, s’opposent à l’existence d’une industrie culturelle vue comme culture industrielle. Pour de multiples raisons (demandes étatiques et sectorielles, fertilisation de courants …), sous des formes et des appellations diverses (sociologie du journalisme, usages des technologies …), la sociologie a cependant renoué avec la question de la communication depuis les années 1980, en France en particulier. De fait, il apparaît que les deux revues les plus citées et les plus appréciées dans l’espace français de l’enseignement et de la recherche en communication sont Hermès et Réseaux, fondées sur des projets de sciences sociales (Maigret, 2001).

6Plus important encore, c’est du point de vue paradigmatique que la sociologie a redécouvert la communication comme question fondatrice. Cette redécouverte emprunte à mon sens trois grandes voies, celle des recherches sur le concept d’espace public, celle des métissages avec les Cultural Studies, enfin celle des théories de la réflexivité. Le geste audacieux de Jürgen Habermas de détacher au moins partiellement l’agir communicationnel des pures interactions sociales (traduisons : celles de la première modernité) a été suivi d’un long débat sur la normativité de ses analyses de l’espace public contemporain. Il a néanmoins permis d’intégrer le problème de l’intercompréhension dans des schémas qui visaient jusque-là son élimination. En dégageant une dynamique démocratique qui ne s’interrompt jamais véritablement, cet auteur a ouvert la voie à une réflexion sur les médias en terme de dialogue et non simplement de production-réception (Macé, 2001). Ce modèle que l’on pourrait qualifier de « polyphonique » est partagé par les courants les plus récents de Cultural Studies qui abordent la communication sans préjuger de la valeur des œuvres ni des publics étudiés, en mettant l’accent, au-delà de la question du pouvoir, sur le caractère pluriel et contradictoire des actions humaines dans le sillage de la linguistique bakhtienne et du marxisme gramscien. Il a sa place également dans les macro-sociologies qui, depuis les années 1970, fournissent une vision de la constitution des sociétés ancrée dans le conflit et l’expérience (Touraine et Dubet) ou dans la réflexivité (Giddens et Beck).

7La convergence de ces approches, encore incomplète, a ceci d’intéressant qu’elle se fait en direction d’un pôle de recherches négligé depuis longtemps, réunissant les travaux des micro-sociologues européens de la modernité, Simmel et Tarde, et ceux des penseurs pragmatistes américains, Peirce, Dewey et Mead – ces « autres » Pères fondateurs des sciences sociales. Habermas, le premier, parlait d’effectuer un retour aux auteurs pragmatistes. On peut considérer que ce retour a été opéré avec succès par Hans Joas qui évoque la montée du paradigme de l’agir créatif (au sens de Dewey). La sociologie américaine de la culture s’approprie les Cultural Studies en ne reniant pas son inspiration interactionniste, elle-même issue des courants pragmatistes. La sociologie française des médias se rapproche de l’interactionnisme américain, à la façon de Dominique Pasquier, ou propose des rencontres assez équivalentes entre théorie de la légitimité et théorie de l’hégémonie (Glévarec et Pinet, 2003). Au-delà, c’est l’ensemble de la sociologie qui se rapproche d’une vision du lien social dans une optique simmelienne (de Singly et Kaufmann) ou tardienne (Latour). Le but n’est pas tourner le dos aux sociologies de la modernité industrielle et de renoncer aux méthodologies qui ont fait leur succès mais de les prolonger par des sociologies de la seconde modernité, plus attentives aux oscillations identitaires, de revenir ce faisant à l’inspiration des premiers penseurs de la communication en démocratie. La question de l’échange n’est plus celle de l’adéquation à la structure mais celle de l’élaboration et du va-et-vient entre des structures, non plus celle de l’imposition de schèmes ou de résistance à la domination mais celle des médiations, qui suppose attention réciproque, reconnaissance, compréhension de soi et des autres, avec incertitude des effets.

Sociologie, Sic et Cultural Studies : discipline et terrains

8Deux nouvelles, l’une bonne, l’autre moins, nous parviennent donc du processus de reconfiguration en cours. La bonne nouvelle est que la sociologie de la communication n’est plus cette discipline au sens foucaldien, dont la tendance première était l’enfermement des acteurs dans des identités et des positions. Sa mission n’est pas remise en cause par la description des états communicationnels : de même que les mirages et les feux follets n’invalident pas les sciences physiques, l’instabilité, l’oscillation identitaire et les représentations à multiples niveaux n’invalident pas les sciences sociales. Mais elle s’éloigne d’une conception impérialiste de la recherche qui ferait du chercheur et de sa discipline les juges indépendants, détachés des réalités mondaines, étiquetant les autres sans rendre de comptes. Après avoir dénaturalisé puis culturalisé, il s’agit de pluraliser les objets, les paroles et les méthodes, en inscrivant à son tour le chercheur dans les collectifs démocratiques en voie de constitution. Les paroles des uns et des autres n’ont pas nécessairement le même poids, elles ne peuvent prétendre en tout cas à la vérité immédiate, seulement à l’interprétation laborieusement constituée. Certains noteront que le nom même de cette tradition de recherche pourrait être revu puisqu’il n’y a plus nécessité de faire discipline, de serrer les rangs autour du drapeau positiviste en évoquant un social qui serait de l’ordre de la substance. Sociologie réflexive, sciences sociales de la communication, théorie de la créativité, des actes communicationnels ou des actes démocratiques pourraient faire l’affaire qui autorisent la reconnaissance d’une démarche plurielle. Il reste que l’inscription dans une tradition de recherche à deux orientations (durkheimienne-marxiste-wébérienne/pragmatiste-interactionniste) a l’avantage d’établir une continuité que les discours sur l’irruption d’un monde de communication radicalement prométhéen ne saurait faire disparaître par enchantement.

9La mauvaise nouvelle est en effet que les étapes scientifiques encore à franchir n’effacent pas les précédentes. Penser la communication dans un cadre réflexif nécessite la mise en relation de savoirs de plus en plus nombreux, y compris les anciens, sans que la clé de l’interaction entre ces savoirs ne soit encore fournie. Pour le dire avec le vocabulaire de Habermas, sans suivre ses préceptes, la pensée communicationnelle ne débute pas avec l’étude de l’intercompréhension, en faisant abstraction des niveaux antérieurs, elle inclut également la connaissance des modes instrumentaux et des interactions sociales. Pour le dire avec le vocabulaire de Peirce, communication et tiercéité ne sont pas consubstantiels, chacun des trois moments, chacun des trois mondes dit quelque chose de l’acte d’échange – sans parler de la relation de chacun des mondes avec l’autre. Ainsi, pour comprendre le moment de la réception d’un programme télévisuel comme le paysage social et les dispositifs techniques dans lequel il s’inscrit, et surtout la relation entre les trois, doivent être tissés dans une même analyse des objets, des usages, des interprétations, des identités genrées, des relations familiales, des idéologies et des effets de distanciation à l’égard de ces divers éléments. L’analyse peut se donner pour but l’intégration, sans rêver d’une illusoire totalisation, sur un mode socio-historique, par le recueil des traces « imprimées » à chacun des niveaux. Elle peut toujours porter sur un seul des niveaux mais cela doit alors se faire sans naïveté à l’égard des présupposés véhiculés par le choix de ne pas s’arrêter aux deux autres niveaux, car ces derniers travaillent toujours sous forme d’impensés.

10C’est ici que la position des Sic apparaît délicate. Les chercheurs en communication qui visent la rupture de principe avec les sciences sociales, avec ce qui fait discipline en elles au bon sens du terme, celui de la méthodologie et de la cumulativité, s’exposent au reproche de légèreté. Le manque d’ancrage théorique et méthodologique se paie le plus souvent par une dérive purement subjective des interprétations au nom du principe devenu intangible selon lequel « la communication ne se réduit pas au social » (certes, mais le social ne se réduit plus au social !). La pensée communicationnelle devient alors l’habit neuf des lectures immanentes des années 1960, de l’analyse en chambre érigée en principe scientifique exclusif. Faire abstraction des méthodes centrées sur la rencontre avec les autres (de l’analyse quantitative à l’observation participante, en passant par les entretiens), balayer les apports des théories sociologiques revient à rapatrier clandestinement des points de vue sur les acteurs sociaux et à faire une sociologie implicite des mondes contemporains qui prend généralement la direction de la critique ou du technicisme par un tropisme que l’on qualifiera de français.

11Ces remarques ne sont pas émises dans le but de décourager des initiatives ou de défendre une tradition dont j’ai dit les mutations anti-corporatistes, mais dans le but opposé de rappeler l’ambition de tout projet novateur. L’amnésie scientifique des Sic n’est pas nécessairement un handicap car elle peut servir une stratégie audacieuse d’exploration de terrains encore peu abordés par les écoles de pensée rigidifiées dans leurs principes et leur champ d’action. De même que la sociologie anglo-saxonne de la culture a subi la contestation des Cultural Studies qui lui reprochaient son immobilisme, l’amenant peu à peu à revoir ses terrains et à repenser ses concepts, on peut imaginer des recherches françaises en communication qui représentent une alternative parfois brouillonne mais bouillonnante. Or, pour une interdiscipline émergente, décomplexée, les Sic manquent encore singulièrement d’audace lorsqu’on les compare avec les Cultural Studies[2]. Elles privilégient avant tout la production de postures philosophiques, l’étude des genres médiatiques, la communication d’entreprise, la médiation culturelle, certains programmes télévisuels et les Tic – c’est-à-dire les territoires les moins illégitimes, en affinité avec le marché balisé des compétences professionnelles ou les plus immédiatement accessibles à des chercheurs issus des traditions sémio-philosophiques, à côté des spécialistes des nouvelles technologies. Sont assez largement ignorés les lieux juvéniles de narration (le cinéma, la bande dessinée), la télévision dans ses aspects les plus prosaïques, le médium corporel, les identités de genre, les micro-politiques et le transnational, qui représentent pourtant les points d’interrogation majeurs de notre nouvelle modernité (Macé, 2003, sur les enjeux de la politique des genres, qui travaillent en profondeur les médias). Ce qui se joue dans les interstices devrait attirer sans retenue et non repousser. Dans des sociétés complexes fondées sur le changement social, les marges sont souvent très porteuses de sens comme l’a démontré le débat tronqué sur la pornographie initié par le rapport Kriegel, qui a permis de se rendre compte qu’il n’existait pas en France de recherche sur des sujets a priori exotiques, prêtant à plaisanterie, en réalité devenus centraux. Le biais institutionnel, professionnalisant et linguistique des Sic, explique que la question des publics, par définition de plus en plus massive en démocratie, soit encore largement ignorée sauf sur un mode incantatoire. Il est pourtant difficile de parler de « publics », même hypothétiques et déconstruits, si l’on ne cherche pas à les appréhender empiriquement d’une façon ou d’autre.

Pour une convergence

12Les atouts des Sic résident certainement dans une inversion partielle des tendances observées, dans une ouverture assumée aux sciences sociales dans leur diversité, non comme modèles mais comme socle évident, et dans une acceptation de la validité scientifique des objets les plus surprenants, les plus dérangeants. L’évolution est déjà engagée puisque de nombreuses études commencent à allier des analyses de dispositifs et des études de réception dans un contexte comparatif (l’exemple de Big Brother est le plus frappant, Lochard et Soulez, 2003). Mais il est certainement possible de voir au-delà, en tenant compte des apories actuelles de la recherche. Après avoir critiqué la critique et réhabilité les récepteurs, les analyses des médias butent actuellement sur un double obstacle. Tout d’abord celui de la production, encore insuffisamment appréhendée comme un terrain pour l’ethnographie. Ensuite celui de la description esthétique des contenus de la communication de masse, toujours pensés comme des supports d’appropriation idéologique mais très largement ignorés dans leurs dimensions poétiques. C’est ici que la spécificité française, à savoir la proximité avec les traditions sémiologiques et philosophiques, peut s’avérer très enrichissante. En proposant une esthétique et une rhétorique des mondes contemporains les plus communs (au double sens de l’adjectif), il serait possible de présenter un programme original qui ferait se rejoindre des traditions abusivement opposées. Des sciences sociales attachées à la formation complexe des identités, y compris esthétiques, des courants littéraires qui ne se donnent plus pour horizon l’univers culturel consacré, sans verser dans le mythe de la création artistique pure. Attachons plus d’importance au respect des méthodologies et des traditions théoriques dans leur cumulativité. Laissons l’indiscipline gagner les terrains, les objets.

Notes

  • [1]
    Cette distance réunit des ensembles par ailleurs très différents, repérés par Bernard Miège (1998), en particulier la médiologie et les multiples courants qui placent le « communicationnel hors du social » dans la tradition de la communication homme-machine et de la cybernétique. Nous pourrions ajouter les sémiologies hostiles à toute mutation en socio-sémiologies. La position de Miège est elle-même très ambiguë puisque cet auteur se dit opposé à la « majorité des théories contemporaines » en Sic, qui tiennent « le communicationnel à l’écart du social », mais il ajoute que la sociologie n’apporte qu’une « contribution inégale et qui ne se révèle pas décisive » sur la question de la communication. N’adoptant pas une position hostile à l’égard de la sociologie, il en présente néanmoins un bilan peu flatteur, qui tourne au constat d’échec. En se choisissant comme adversaire la défunte sociologie lazarsfeldienne, il est assez aisé de conclure à cet échec et, par ricochet, de valoriser un courant tel que celui de l’économie politique de la communication.
  • [2]
    La comparaison entre les sujets couverts dans les Sic et dans les Cultural Studies peut se faire à partir de la lecture des actes des congrès nationaux de la Sfsic et de ceux des conférences Crossroads in Cultural Studies.
Français

Sociologie et science(s) de la communication ne peuvent plus être construites à partir d’une opposition simple comme cela a été le cas dans les décennies précédentes. Il faut plutôt penser un rapprochement entre des traditions qui pourraient viser la description des mondes communs, y compris dans leur dimension esthétique.

Mots-clés

  • sociologie
  • communication
  • cultural studies

Références bibliographiques

  • Beck, U., La Société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, Aubier, 2001.
  • En ligneGlévarec, H., Pinet, M., « La radio. Un espace d’identification pour les adolescents », in Donnat, O. (dir.), Regards croisés sur les pratiques culturelles, Paris, La Documentation française, 2003.
  • Habermas, J., Théorie de l’agir communicationnel, Paris, Fayard, 1987.
  • Joas, H., La Créativité de l’agir, Paris, Le Cerf, 2000.
  • Lochard, G., Soulez, G. (dir.), « Les métamorphoses de Big Brother », Média Morphoses, 2003.
  • Macé, E., « Le piège de la cause des femmes. Éléments pour un mouvement anti-sexiste post-féministe », Cosmopolitiques, n° 4, 2003.
  • En ligneMacé, E., « Qu’est-ce qu’une sociologie de la télévision ? Esquisse d’une théorie des rapports sociaux médiatisés », Réseaux, 104-105, 2001.
  • Maigret, E., Sociologie de la communication et des médias, Paris, Armand Colin, 2003.
  • Maigret, E., « La communication en revues. L’enquête sur les revues menée par le ministère de la Recherche », Hermès, n° 30, Paris, CNRS Éditions, 2001.
  • En ligneMiège, B., « Le communicationnel et le social : déficits récurrents et nécessaires (re)-positionnements théoriques », Loisir et Société, n° 21-1, 1998.
  • En lignePasquier, D., La Culture des sentiments. L’expérience télévisuelle des adolescents, Paris, éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1999.
Éric Maigret
Université de Paris 3
Laboratoire communication et politique, CNRS, Paris
Éric Maigret, maître de conférences à l’université de Paris 3, sciences de l’information et de la communication. Sociologue des médias de masse. Chercheur au laboratoire communication et politique, CNRS, Paris.
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
Mis en ligne sur Cairn.info le 12/11/2013
https://doi.org/10.4267/2042/9433
Pour citer cet article
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