CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1En cette nouvelle période de crise identitaire des organisations médiatiques, caractérisée par l’essoufflement du paradigme du journalisme d’information, le réseau Internet nous est souvent présenté comme le moyen idéal de renouveler et de réassurer une profession mise en abîme par tant de siècles de critique sociopolitique et d’emprise économique. Cependant, la solution proposée n’est pas sans risques : le journaliste, pris dans une Toile qu’il aura contribué lui-même à tisser, deviendra-t-il un nœud parmi d’autres, catalysant et canalisant la transmission de données digitales, ou l’un des pionniers de l’art encore en friche de conquérir le cyberespace ? Sa résistance et sa recomposition professionnelles permettront-elles d’éviter que l’information ne devienne la première victime de la société qui en porte ironiquement le nom ?

2Aujourd’hui, les incidences de l’Internet sur la profession journalistique sont repérables à un double niveau : celui des procédures de travail (nouveaux outils de recherche et de partage des informations dans les organisations) et celui des supports de diffusion (production en ligne sous la forme de sites Web). Mais si cette double incidence est effective dans notre paysage médiatique depuis la deuxième moitié des années 1990, s’agit-il pour autant de modifications en profondeur susceptibles de bouleverser l’identité et le savoir-faire de la profession ?

3Pour répondre de façon pertinente à cette question, il semble primordial de définir ce que l’on pourrait attendre d’un journaliste ayant fait de l’Internet son instrument privilégié. Il s’agit donc d’esquisser, en s’appuyant sur des travaux récents, l’idéal-type du cyberjournalisme. Avant de confronter ce dernier à la réalité des pratiques observées.

Hypertexte, navigation, interaction : un triptyque de référence

4Selon les théoriciens du cyberespace, ces trois principes constituent l’édifice conceptuel le mieux à même de garantir une utilisation optimale des réseaux numériques. Pour certains d’entre eux, comme Jean-Louis Weissberg [1], le journalisme gagnerait, dans ses conceptions comme dans son mode de fonctionnement, à s’en inspirer au mieux.

5La première condition, la maîtrise de l’écriture hypertextuelle, renvoie à une double compétence. D’une part, celle de créer les artefacts technologiques qui, une fois activés par un clic de souris, permettent de cheminer d’un texte journalistique vers d’autres textes. D’autre part, cette interface technique se double d’une interface sémantique : liens « internes » permettant aux textes de certaines rubriques (politiques, économiques, culturelles, etc.) de renvoyer vers d’autres textes figurant dans d’autres rubriques ; liens « externes » proposant aux visiteurs de cheminer vers d’autres sites dans la perspective d’approfondissement d’une problématique (originaux des textes de loi, sources institutionnelles à l’origine d’une décision, etc.). Dans d’autres travaux [2], nous avons qualifié cette double compétence de techno-encyclopédique : il s’agit, pour le journaliste, de proposer un traitement contextuel, référentiel et récursif des informations reposant sur une « mise en boucle » rétroactive et généralisée de celles-ci. Cette faculté repose à la fois sur une habilité technique et sur une intelligence de la complexité des interactions avec l’environnement.

6La deuxième condition, la conception de circuits de navigation, consiste à s’affranchir des limites posées par le modèle classique du texte littéraire, pour évoluer vers la réalisation de cartes sans territoires, ou « hypercartes [3] ». Concrètement, sa mise en œuvre oriente l’activité journalistique dans trois directions. La première est celle de la réalisation multimédia, ou plutôt hypermédia, qui implique la déclinaison des informations sur des supports à la fois différents, convergents et intégrés (textes, sons, images fixes et animées). La deuxième renvoie à la mise en place calculée et sélective de balises de navigation destinées à faciliter le parcours de l’internaute. Elle vise à programmer le cheminement de celui-ci, tout en lui donnant paradoxalement un sentiment d’autonomie renforcée. La dernière, enfin, vise l’émancipation du journaliste vis-à-vis de la territorialité liée aux médias de masse. Il s’agit de produire une information appropriée à un public diasporique, pouvant satisfaire les besoins fugaces et spéculaires de communautés virtuelles déconnectées de la matérialité d’un espace géographique déterminé.

7La troisième condition, la participation à des dispositifs d’interaction, nous renvoie également à trois pistes différentes. Tout d’abord, celle de la personnalisation. Dans une perspective de démassification du public et de revalorisation des relations interpersonnelles (one-to-one) offertes par Internet, le journaliste fournira au lecteur une information à la carte (on demand). Ensuite, le journaliste s’efforcera de diffuser sa production en temps réel, en intégrant dans son travail les changements organisationnels induits par cette contrainte forte. Cela permettra au public d’être informé sur un événement pratiquement au moment où il se produit. Enfin, la véritable interaction [4], à la différence d’une interactivité qui se limiterait à un clic de souris (celle annoncée par les discours publicitaires…), suppose un apprentissage mutuel entre partenaires de l’échange. Elle conduira le lecteur à devenir coauteur des textes journalistiques. Cela signifie une meilleure et plus rapide prise en compte des remarques et suggestions du public, qui sera facilitée par un investissement du journaliste dans le domaine de la communautique (messageries et forums de discussion). Dans une dynamique d’espace public partiel, cela implique aussi la mise en place de dispositifs adaptés de coconstruction communautaire de l’information diffusée (voir ce que font actuellement certains webzines par le biais du logiciel SPIP [5]).

8Si ces trois conditions normatives sont réunies, partiellement ou totalement, on pourra alors commencer à parler de cyberjournalisme. Et de changements qualitatifs dans la profession.

Une norme de qualité dans le cyberespace ?

9Dans une société de l’information, le journaliste n’a plus le monopole du traitement de ce qui est devenu la denrée économique et stratégique de premier ordre. Bien que cette prophétie à vocation autoréalisatrice ne se soit pas encore accomplie, notons tout de même que « sur le Web, le journaliste n’est plus, à lui tout seul, l’information » [6]. Les entreprises de presse sont aujourd’hui concurrencées sur ce terrain par les acteurs les plus divers [7] : administrations centrales, collectivités locales, grands groupes des industries culturelles et énergétiques, opérateurs de télécommunications … sans oublier les créateurs militants de webzines et autres start up à vocation informationnelle (city guides, par exemple). Or, ces acteurs ont un point commun : à quelques exceptions près, ils n’emploient pas de journalistes formés aux canons du professionnalisme.

10Une vision pessimiste de ces transformations pourrait nous amener à déplorer, sur le mode nostalgique, cette dilution de la fonction référentielle de la profession journalistique dans un espace-continuum de communication plus englobant marqué par le poids des stratégies marketing des organisations [8]. On peut aussi appréhender autrement ces bouleversements, en considérant, avec Peter Dalhgren [9], que le journaliste pourrait en tirer profit, à la condition toutefois de préserver son identité et son savoir-faire professionnels, hérités d’une histoire complexe qui lui a conféré une position sociale riche, originale et paradoxale. En conservant un certain sens de l’intérêt général, une distanciation systématique vis-à-vis de ses sources, la pratique du recoupement des informations, etc., le journalisme professionnel attribuera alors un label qualité à la production informationnelle en-ligne. Conscientes de ce fait, les organisations marchandes actives sur le réseau n’hésitent plus désormais à utiliser les textes journalistiques comme des produits d’appel destinés à générer du trafic en vue de ré-acheminer les internautes vers des produits à vocation plus ouvertement commerciale.

11Pour éviter cette dérive, les organisations de presse gagneraient à s’impliquer davantage dans un processus de certification de la qualité des informations en-ligne. Sinon, d’autres le feront à leur place, avec leurs propres critères, qui ne sont pas nécessairement ceux de l’intérêt général. Cela revaloriserait, chez le journaliste, sa fonction sociale d’éclaireur de la réalité et de consultant en complexité, mais surtout de promoteur d’un nouvel espace public dans un cyberespace que l’on est en droit d’espérer plus ouvert et démocratique.

12Une fois défini cet idéal-type du cyberjournalisme, il nous reste à le confronter à la réalité des pratiques observées dans les entreprises de presse et parfois en dehors d’elles. On s’appuiera, à cet effet, sur les résultats de trois années d’enquêtes menées par un réseau transnational de chercheurs spécialisés dont nous étions [10]. Pour simplifier leur présentation, nous distinguerons quatre niveaux d’interactions susceptibles d’avoir été modifiés par le développement d’Internet dans la profession de journaliste : les relations aux sources, au public, aux pairs et au produit.

Relations aux sources : une revalorisation partielle de la fonction documentaire

13En tant qu’assistant de recherche du journaliste, Internet revalorise a priori cette fonction, liée à la collecte de l’information. Il facilite l’accès aux bases de données, aux archives, à la littérature spécialisée. Parmi les outils à sa disposition : des listes de diffusion, des sites spécialisés ou des serveurs de mise en relation avec des experts. Sans oublier les nouveaux systèmes de poussée (push technologies) permettant de faire « remonter » en temps réel l’information de la source vers le médiateur. Cependant, le temps passé sur le Web signifie-t-il nécessairement, sur un plan plus qualitatif, une diversification des sources et une meilleure distanciation vis-à-vis de ces dernières ? Les travaux réalisés sur l’information locale et régionale montrent le contraire. Ils concluent plutôt à un renforcement de la dépendance du journaliste vis-à-vis des sources institutionnelles, dominantes sur le cyberespace car produites et contrôlées par les administrations publiques et les grands groupes de l’industrie communicationnelle. Le journaliste local, par exemple, peut espérer, par le biais de relations interpersonnelles stables et fécondes avec ses sources, espérer obtenir de celles-ci des informations non filtrées. En revanche, ce qui lui est donné à voir sur Internet est bien souvent imprégné d’une langue de bois institutionnelle toujours plus calibrée à son intention. En outre, les journalistes interrogés reconnaissent utiliser Internet avant tout comme un générateur d’accès facilité aux sources « crédibles » [11] sur le plan international et national. C’est-à-dire aux agences de presse et aux grands médias, mais aussi aux sites des institutions publiques et des firmes. Cela traduit chez eux une certaine prudence (peur d’être confrontés, sur des sites plus « alternatifs », à un déficit de « crédibilité ») mais aussi, parfois, des lacunes en matière de recherche d’information. Dès lors, la diversité des sources en-ligne demeure souvent virtuelle : seule une petite minorité de journalistes, qui possède des capacités heuristiques plus développées, fait des efforts pour l’actualiser.

Relations au public : interactivité et effets d’annonce

14Internet a-t-il vraiment transformé la position de médiateur du journaliste, dans une perspective de recomposition de l’espace public ? Rien n’est moins sûr. Les dispositifs proposés au public traduisent le plus souvent, comme l’a remarqué Daniel Thierry [12], une priorité donnée à l’interactivité de débit sur l’interactivité de contenu. Ces dispositifs, selon lui, « n’offrent pas beaucoup plus de fonctionnalités que la commande d’un magnétoscope ou d’un téléviseur [13] ». Le plus souvent, le lecteur est contraint par les interfaces multimédias à parcourir un circuit en fonction de balises bien calculées, lui donnant très rarement la possibilité de coconstruire l’information avec le journaliste. On objectera que la plupart des sites proposent aujourd’hui des systèmes parfois avancés de personnalisation de l’information. Mais, pour l’internaute, cela signifie en priorité le remplissage d’un questionnaire destiné aussi à analyser ses préférences en vue d’opérations marketing ultérieures ; et pour le citoyen, cela se traduit parfois par l’appauvrissement d’une information formatée à l’aune des seuls besoins consuméristes de l’individu. Quant aux forums de discussion, leur généralisation ne signifie pas nécessairement qu’ils aient changé en profondeur la relation journaliste-lecteur. Dans de nombreux cas étudiés, ils se présentent davantage comme des gadgets, des faire-valoir techno-politiques. Le contenu des échanges se distingue rarement par sa valeur ajoutée, les problèmes de modération et de renouvellement sont fréquents. En outre, on assiste depuis peu à un phénomène de baisse de fréquentation du public, alors que les journalistes eux-mêmes s’investissent beaucoup moins dans l’animation de ces espaces de discussion qui, un temps, avaient retenu toute leur attention. Se pose enfin la question de la diffusion en continu des informations. Si un certain nombre de sites observés ont effectivement fait le choix de diffuser leur production en temps réel, ces informations de type agence de presse coexistent avec des nouvelles rafraîchies en fonction d’une périodicité multiple, arythmique et aléatoire. Roselyne Ringoot évoque à ce sujet une information permanente, mélange de flux continu et de périodicités variables, et « qui immobilise le temps plus qu’il ne l’accélère [14] ».

Relations aux pairs : une réorganisation en cours des structures de production

15En effet, on pouvait attendre d’Internet qu’il suscite un processus de re-ingeneering dans les organisations de presse, en favorisant en leur sein la mise en place d’un modèle managérial moins hiérarchique, plus flexible, ouvert et surtout participatif. Or, peu de changements effectifs ont bien eu lieu. Et lorsque cela a été le cas, la réorganisation en question n’a pas souvent été favorable aux journalistes professionnels : création de filiales multimédias déconnectées du reste de la rédaction et générant souvent une dissonance cognitive entre deux catégories de personnels ; interpénétration grandissante entre services rédactionnels et services publicitaires ; accentuation d’un mouvement actuel de précarisation de pigistes de plus en plus amenés à se délocaliser ; et surtout nouvelle division du travail (nous avons évoqué à ce sujet un processus de néo-taylorisation des tâches) qui tend à placer le journaliste « en bout de chaîne ». Devenu simple fournisseur de contenus (souvent réexploités par d’autres acteurs) ou à l’inverse supersecrétaire de rédaction mettant en forme une information dont la provenance lui échappe (son travail se limite alors à des opérations de copier-coller), ce nouveau « stakhanoviste de la production symbolique » voit ainsi son métier se sédentariser et se bureaucratiser [15]. Lui restent alors, pour diversifier son activité, des missions extérieures d’opérateur technico-commercial destinées à la rentabilisation de son activité. Ces évolutions, le plus souvent observées en Amérique du Nord mais déjà présentes en France, sont d’autant plus compréhensibles que l’introduction d’Internet dans les rédactions n’a pas vraiment été préparée, négociée, et que la généralisation de son usage reste souvent un non-pensé dans les relations sociales internes.

Relations au produit : une information faiblement renouvelée

16A priori, Internet permet au journaliste de remettre en cause son statut d’auteur tout-puissant, lequel se concrétise notamment dans sa fonction de magistère : en vertu de celle-ci, il s’agit moins de décrire la réalité et de rapporter un événement que de dire au public ce qu’il faut en penser, en vertu d’une ligne éditoriale et d’un certain angle d’attaque des problèmes. Selon Marc Deuze [16], par exemple, Internet a donné ainsi la possibilité aux journalistes, de par ses performances métadiscursives, de fournir au public les moyens de construire sa propre opinion sur tel ou tel événement. Nous serions alors en présence d’un modèle plus objectiviste de l’information. De fait, nous retrouvons un tel modèle lorsque nous constatons que tel grand journal, à l’image de Libération ou du Monde Diplomatique, offre aux cyberlecteurs un ensemble de liens directs vers des sources parfois antagoniques (par exemples, sources serbes, albanaises et américaines pendant le conflit de Yougoslavie) ou des originaux de textes juridiques (exemple : traité de Rambouillet au moment de ce conflit). Mais de telles pratiques demeurent rares et disparates. Les travaux de Jean-Michel Utard montrent au contraire, dans les sites d’information en-ligne, une résistance du modèle canonique textuel de la presse écrite et du dispositif énonciatif éditorial qui fait du journaliste un auteur laissant transparaître sa subjectivité [17]. Il est vrai aussi que les possibilités hypertextuelles liées au réseau Internet ne sont pas forcément actualisées par les journalistes. Nous avons ainsi évoqué, dans d’autres études, la pauvreté hypertextuelle de nombre de textes journalistiques mis en-ligne : les liens internes sont très disparates, et concernent surtout les banques d’archives, le plus souvent payantes ; quant aux liens externes, ils apparaissent encore plus rares, et renvoient essentiellement aux entreprises et institutions liées au site par des accords de syndication, de bartering et de commerce électronique. Nous sommes loin, dans ces conditions, d’une conception désintéressée et encyclopédique de l’information.

Un changement de paradigme ?

17Selon nous, Internet, en tant qu’accélérateur de paradoxes, pousse à ses limites la double contrainte suivante : soit les journalistes professionnels refusent de jouer le jeu des contraintes de l’édition en-ligne, au risque de se voir marginalisés par l’arrivée actuelle de nouvelles professions sur le marché ; soit ils décident de s’investir, d’accepter de nouvelles règles, avec la menace de voir leur spécificité disparaître, mais aussi de faire moins bien que d’autres catégories, mieux préparées, auxquelles ils serviront alors de faire-valoir.

18Pour les premiers, Internet reste rarement considéré avec hostilité. Mais il demeure un outil parmi d’autres, essentiellement utilisé pour ses fonctions de courrier électronique et de navigation sur les sites les plus « notables ». Pour cette catégorie de journalistes, a priori dominante, Internet n’a pas du tout modifié en profondeur la profession. Ces choix révèlent la persistance, dans les représentations identitaires, du paradigme du journalisme d’information [18].

19En revanche, pour la minorité active de professionnels qui ont fait le second choix, les changements sont plus significatifs. Ils se traduisent par une évolution de la profession de journaliste vers celle de fournisseur d’accès (version pauvre) ou celle d’expert en traitement de l’information. C’est d’ailleurs ainsi que se définissent certains journalistes en-ligne interrogés par nos soins, sachant que l’information devient, dans leur discours, une denrée réexploitable à l’infini. S’il y a changement de paradigme [19] dans la profession, c’est bien à ce niveau-là qu’il se situe. Davantage qu’un journalisme « de communication », nous avançons l’hypothèse que le réseau Internet favorise l’émergence d’un journalisme d’expertise, modèle qui renvoie à un traitement de type techno-bureau-cratico-commercial de l’information. Mais peut-on encore, en ce cas-là, parler de journalisme ?

20D’où l’opportunité de sortir des frontières du journalisme dit « professionnel » pour mieux mesurer les changements induits. Vu de l’extérieur de la profession par des acteurs qui revendiquent néanmoins une mission journalistique (c’est le cas des rédacteurs de certains webzines), ces changements apparaîtront peut-être plus clairement. Dans ces structures parfois innovantes, les pratiques semblent évoluer vers une forme de cyberjournalisme plus avancée : dispositifs de coécriture et de partage de l’information (interactivité de contenu), modèles managériaux moins hiérarchiques et plus participatifs, valorisation des hyperliens permettant un approfondissement de l’information, etc. Mais ces structures, qui reposent essentiellement sur l’engagement militant de leurs promoteurs, se pérenniseront-elles ? Cela ouvre alors le chemin de nouvelles enquêtes [20]. Et confirme la pertinence du principe d’incomplétude[21] en vertu duquel il est fréquemment indispensable de se détacher d’un système pour mieux comprendre son fonctionnement.

Notes

  • [1]
    Weissberg, J.-L., Présences à distance, Paris, L’Harmattan, 1998.
  • [2]
    Pélissier, N., Ruellan, D., « La Compétence encyclopédique, Un défi épistémologique pour la formation au journalisme », in Rieffel, R., Wattine, T. (dir.), Les Mutations du journalisme en France et au Québec, Paris, Éditions Panthéon-Assas, 2002, p. 57-81.
  • [3]
    Cf. Pagès, D., Pélissier, N. (dir.), Territoires sous influences, Paris, L’Harmattan, 2 vol., 2000 et 2001.
  • [4]
    Agostinelli, S. (dir.), Du CD-Rom a l’Internet : comment penser la communication des connaissances ?, Paris, L’Harmattan, 1999.
  • [5]
    Système de Production d’Information Partagée. Sur la dynamique communautaire des webzines, voir Rebillard, F., « Webzines, e-zines, quels nouveaux medias ? », Médiamorphoses, n° 4, mars 2002, p. 57-63.
  • [6]
    Pélissier, N., Ruellan, D., « Le journaliste pris dans la toile, Les réseaux numériques, accélérateurs paradoxaux ? », Acres du 16e Congres International de l’Association Française de Marketing, Montréal, Canada, 18-20 mai 2000, p. 645-655.
  • [7]
    Ruellan, D., « Le local sur Internet, Enjeux de la mise en-ligne de l’information », in Thierry, D. (dir.), Nouvelles technologies de communication : nouveaux usages nouveaux métiers, Paris, L’Harmattan, 2000, p. 191-219.
  • [8]
    Charron, J., De Bonville, J., « Le paradigme du journaliste de communication. Essai de définition », Communication, vol. 17, n° 2, décembre 1996, p. 51-96.
  • [9]
    Dalhgren, P., « Cyberespace et logique médiatique. Repositionner le journalisme et ses publics », in Proulx, S., Vitalis, A. (dir.), Vers une citoyenneté simulée, Médias, réseaux et mondialisation, Rennes, Apogée, 1999, p. 73-98.
  • [10]
    Il s’agit du programme « PQR en-ligne et local sur Internet », pilote par l’IUT de Lannion (ONTICM/CRAP/ CNRS), sous la direction de Denis Ruellan, et associant 15 chercheurs ayant étudie six pays différents (France, Brésil, États-Unis, Canada, Mexique, Roumanie). Pour les publications de ces travaux, voir B. Damian, R. Ringoot, D. Thierry, D. Ruellan (dir.), [Inform@tion.local], Paris, L’Harmattan, 2002. Cf. aussi le dossier « La presse en-ligne », n° 4 de la revue Médiamorphoses (INA/PUF), mars 2002, coordonne par J.M. Utard. Cf. enfin N. Pélissier et al., « Cyberjournalisme : la révolution n’a pas eu lieu », Quaderni, n° 46, février 2002, p. 5-27.
  • [11]
    Cf. Pélissier, N., « De la compétence encyclopédique à la communauté herméneutique. Vers une résolution des contradictions identitaires du journaliste en-ligne », in B. Damian, et al., op. cit., 2002, p. 219-233.
  • [12]
    Thierry, D., « Le cyberjournal sera-t-il interactif ? », Médiamorphoses, n° 4, p. 88-93.
  • [13]
    Idem, p. 89.
  • [14]
    Ringoot, R., « Périodicité et historicité de l’information locale en-ligne », Médiamorphoses, n° 4, p. 74.
  • [15]
    Cf. Pélissier, N. et al., 2002, op. cit.
  • [16]
    Deuze, M., « Journalism and the Web. An Analysis of Skills and Standards in an Online Environment », Gazette, 61 (5), octobre 1999, p. 373-390.En ligne
  • [17]
    Cf. le dossier « Presse en-ligne » de la revue Médiamorphoses, op. cit., p. 83-88.
  • [18]
    Mathien, M., « Le journalisme professionnel face aux mutations de l’information et de la communication. Déroute des valeurs ou réaction ? », Quaderni, n° 37, hiver 1999, p. 11-42.En ligne
  • [19]
    Au sens que donnent à ce concept les chercheurs québécois, J. Charron et J. De Bonville.
  • [20]
    Dans le cadre d’un nouveau programme de recherche sur « L’hybridation des genres médiatiques » lancé à Québec en avril 2002 par le Département d’Information et Communication de l’université Laval, nous avons initié à cet effet, avec la collaboration de Florence Le Cam et Valérie Jeanne-Perrier, une nouvelle étude portant sur les webzines, e-zines, et autres weblogues…
  • [21]
    Que le professeur Alan Sokal nous pardonne d’avance cette importation probablement incongrue des mathématiques de monsieur Gödel…
Français

Le cyberjournalisme existe-t-il vraiment et correspond-il à un nouveau paradigme dans la profession ? Nous esquissons d’abord l’idéal-type du cyberjournalisme et la façon dont il pourrait être une possible norme de qualité pour l’information véhiculée sur le Web. Puis nous avons confronté cet idéal à la réalité des pratiques observées dans de récents travaux de terrain, à au moins quatre niveaux de l’activité journalistique : les relations aux sources, au public, aux pairs et au produit fabriqué. Notre constat est le suivant. Il ne semble pas qu’Internet, depuis son introduction dans les rédactions des entreprises de presse, ait changé le métier de journaliste en profondeur, tant pour les procédures que pour la substance. Certes, Internet favorise l’émergence d’un journalisme d’expertise, modèle qui renvoie à un traitement de type techno-bureaucratico-commercial de l’information. Mais peut-on encore, dans ce cas, parler de journalisme ? Oui, à la condition de réinterroger l’identité de cette profession par la bande, c’est-à-dire en acceptant de repenser ses frontières à l’occasion du nouvel « accident systémique » généré par l’Internet.

Mots-clés

  • journalisme
  • Internet
  • technologies de l’information
  • identité professionnelle
  • sources
Nicolas Pélissier
Nicolas Pélissier, docteur en Sciences politiques, maître de conférences en Sciences de l’information et de la communication à l’université de Nice-Sophia Antipolis, chercheur au Centre de Recherches en Information et Communication, LAMIC ; directeur de la collection « Communication et Civilisation » aux Éditions L’Harmattan ; coordonnateur de deux ouvrages et auteur d’une quinzaine d’articles scientifiques sur les médias, le journalisme et l’espace public.
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
Mis en ligne sur Cairn.info le 08/09/2014
https://doi.org/10.4267/2042/9322
Pour citer cet article
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