CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Certains des étudiants qui avaient fréquenté le département de sociologie de l’université de Chicago dans les années 1920 décrivaient volontiers cette époque comme un « âge d’or ». Il est vrai que leurs souvenirs étaient sollicités beaucoup plus tard, après que Morris Janowitz, chef du département de 1967 à 1972, eut entrepris de reconfigurer ce passé comme celui, glorieux, où aurait fleuri « the Chicago School of Sociology » [1]. L’accord, toutefois, n’était pas unanime sur cette construction, car ceux des étudiants qui avaient choisi le parti de la sociologie quantitative se souvenaient d’une autre histoire. Un de ceux-là, Philip Hauser, racontait en 1967 :

2

« Il y avait des blocs parmi les étudiants comme parmi les professeurs. […] Au pique-nique annuel du département, même les deux équipes qui s’opposaient au match de baseball s’appellaient les “case studiers” et les “statisticians” »
(Hauser 1967 : 26-27)

3Quant à William Ogburn, le professeur recruté en 1927 pour développer à Chicago les méthodes statistiques en sociologie, il se souvenait surtout de combien les étudiants de l’autre bord étaient inconscients des changements qui étaient en train de se produire dans la discipline et qui allaient sonner le glas de la prééminence de Chicago [2].

4Ce contraste des souvenirs campe le cadre d’une histoire du programme de recherche conduit dans les années 1920 par Robert Park et Ernest Burgess sur « les communautés locales de Chicago », dont nous allons étudier ici les conditions institutionnelles : c’est cet ensemble de travaux qui fut ressuscité dans les années 1960 pour configurer l’« école de Chicago » comme une « sociologie urbaine ».

5Un aspect souvent inaperçu du conflit des méthodes ainsi mis en scène est sa précocité dans l’histoire des sciences humaines aux États-Unis. La croyance dans le chiffre comme garant de la scientificité a en effet pris son essor dans ces disciplines dès la fin des années 1920 et abouti dans la décennie suivante à une victoire durable et sans partage des « statisticiens ».

6Nous allons observer dans cet article les relations entre ce basculement méthodologique et trois autres phénomènes contemporains : un changement des objets de la recherche en sociologie, l’affaiblissement des interactions des sociologues avec les réformateurs locaux au profit des autorités politiques nationales et, enfin, un tournant dans les formes du gouvernement de la science à Chicago.

7Car, en effet, l’essor du programme de recherche de Park et Burgess comme son brutal démantèlement résultèrent de ce qui fut sans doute l’un des premiers dispositifs de financement de la recherche « sur projet » conçus comme tels : les initiatives de la Fondation Rockefeller dans le domaine des sciences sociales. Nous approcherons cet objet avec le souci de ne séparer les évolutions institutionnelles ni des logiques des acteurs et de leurs interactions, ni des contenus de science qui en résultèrent.

8Parmi ceux qui évoquaient un âge d’or, l’accord n’était pas complet sur la chronologie [3] mais, pour tous, le cœur de la grande époque coïncidait avec l’activité du Local Community Research Committee (LCRC), une institution destinée à financer la recherche en sciences sociales à Chicago, qui fut mise en place en 1923 et supprimée en 1930 [4]. Nous allons interroger dans cet article le rapport entre celle-ci et l’expansion du programme de recherche de Park et Burgess. Les archives qui permettent de le faire sont abondantes : conservées au Department of Special Collections de la Joseph Regenstein Library, elles comprennent celles du département, celles de la présidence de l’université et les papiers personnels des principaux protagonistes – notamment Burgess, Park, Ogburn et Merriam. Par ailleurs, le Rockefeller Archive Center, à Sleepy Hollow (État de New York), donne accès aux archives du LCRC, réunies à celles du Social Science Research Council (SSRC) qui lui a succédé en 1930 [5]. Ces fonds permettent de reconstituer de façon très détaillée comment furent élaborés et mis en œuvre le programme du LCRC et chacun des projets financés dans ce cadre. Sont aussi disponibles de précieux documents de travail produits au fil des enquêtes, ainsi que les minutes de réunions ou correspondances internes qui laissent voir accords et tensions entre les acteurs, jusqu’à la crise finale.

9On décrira d’abord les termes de l’accord qui s’est élaboré entre les chefs des départements de sciences sociales, la présidence de l’université et les dirigeants du Laura Spelman Rockefeller Memorial Fund, une des fondations de l’empire Rockefeller qui était en train de se spécialiser dans le financement des sciences sociales. Il résulta de cet accord la création du LCRC en 1923. On exposera ensuite de façon détaillée le projet « Local Communities of Chicago » que Burgess et Park conduisirent au sein du département de sociologie : si quelques-uns des travaux réalisés dans ce cadre acquirent, longtemps plus tard, le statut de « classiques » de la sociologie, l’ensemble dans lequel ils s’inséraient est aujourd’hui pratiquement oublié. Dans une troisième partie, on exposera comment un tournant de la politique scientifique de la fondation Rockefeller mit prématurément un terme à ce programme. On reviendra, pour conclure, sur la carrière de la notion de « communauté locale » dans les sciences sociales du Chicago des années 1920 – les raisons de son succès initial et celles de sa chute finale, qui entraînait celle des case studiers et signalait la prééminence des statisticians.

Réformer l’université, réformer la « communauté » : la création du Local Community Research Committee de l’université de Chicago (1923)

10En janvier 1923, les chefs des départements de science politique, de sociologie et anthropologie et d’économie politique demandèrent ensemble au président de l’université de Chicago, Harry P. Judson, de mettre en place une institution de recherche destinée à étudier « les problèmes de la communauté locale [the problems of the local community] » [6]. La création du Local Community Research Committee fut rapidement suivie de l’annonce d’une subvention importante par le Laura Spelman Rockefeller Memorial Fund [7]. L’initiative était donc double : elle fut prise de concert par des responsables universitaires et les dirigeants d’une fondation philanthropique, les deux parties affichant un objectif commun : réorganiser de façon radicale la recherche en « sciences sociales » à l’université autour du thème de la « communauté locale » [8].

11Tout au long de l’année précédente, plusieurs professeurs dotés d’une forte autorité institutionnelle avaient formulé diverses propositions [9] : le politiste Charles E. Merriam proposait la création d’un « institut de recherche sur le gouvernement [institute for governement research] », l’économiste Leon C. Marshall, doyen de la School of Commerce and Administration, préconisait d’organiser la « science sociale » sous une direction unique pour éviter la duplication des cours et promouvoir la recherche, le sociologue Albion W. Small, chef du département de sociologie et anthropologie, recommandait « une organisation autoritaire de l’ensemble de l’appareil » dans le cadre d’un « institut de recherche sociale [institute of social research] ». Small, dans un exposé de février 1923, illustrait sa proposition par la métaphore du tribunal scientifique : au centre se trouverait le groupe des enseignants, autour d’eux les doctorants et des rapports préliminaires seraient présentés. « Il ne s’agira pas de faire de simples commentaires en dilettante ou d’échanger des compliments. Ce sera plutôt comme une lutte entre juristes devant la cour suprême » (cité par Bulmer 1980 : 66). Bref, les chefs de file des différentes sciences sociales rivalisaient d’ardeur pour organiser ensemble la « recherche en coopération [co-operative research] » dans leur université.

12Au même moment, dans l’une des fondations philanthropiques de l’empire Rockefeller, on formulait les mêmes objectifs. De telles fondations, créées par de grands industriels ou financiers, étaient alors un phénomène récent [10]. Elles finançaient des œuvres sociales très diverses mais aussi, de plus en plus, des recherches scientifiques. Ainsi, par exemple, la Carnegie Institution (créée en 1902) avait en cours, au début des années 1920, un vaste programme international sur la guerre mondiale et un programme sur l’américanisation des immigrants, qui aboutit notamment à deux volumes signés par Park (Thomas et al. 1921 ; Park 1922). La Russell Sage Foundation (1907) avait à son actif la Pittsburgh Survey (1906-1914), la construction d’un new suburb (Forest Hills, 1910) et, en cours, le Regional Plan of New York and its Environs (1920-1929). À Chicago, des fondations locales de moindre importance soutinrent le LCRC, comme le Rosenwald Fund (1917) créé par l’homme d’affaires Julius Rosenwald ou le Commonwealth Fund (1918) créé par le club de même nom. Dans cet ensemble, la Rockefeller Foundation allait bientôt prendre la prééminence. L’université de Chicago avait vu le jour en 1892 grâce à une dotation de John D. Rockefeller Sr, mais la fondation (créée en 1913) finançait exclusivement des programmes en médecine et santé publique. C’est un autre organisme qui s’engagea dans le domaine des sciences sociales : le Laura Spelman Rockefeller Memorial Fund (LSRMF), créé en 1918 pour appuyer des œuvres sociales en faveur des femmes et des enfants. L’initiateur de cette nouvelle politique était Beardsley Ruml qui, âgé de 26 ans et titulaire d’un Ph.D. en psychologie obtenu à Chicago, fut nommé directeur du LSRMF en 1921.

13En octobre 1922, Ruml proposa aux trustees de soutenir le développement des social sciences.

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« Les dirigeants les plus compétents des organisations sociales [social welfare organizations] ont absolument conscience du besoin pratique pressant de mieux connaître les forces qui affectent le comportement des individus et des sociétés ; dans de nombreux cas, des départements [universitaires] de recherche ont été créés ou proposés pour tenter d’éclairer certains des problèmes les plus pressants. […] L’orientation de l’action en matière sociale est surtout gouvernée par la tradition, l’inspiration individuelle et la commodité, ce qui est normal étant donnée notre ignorance des forces sociales et individuelles » [11].

15Les universités, en effet, ne savent pas répondre à ce besoin :

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« […] les exigences de l’enseignement scolaire limitent de façon marquée la possibilité d’entrer en contact avec les réalités sociales. C’est pourquoi la production universitaire est largement déductive et spéculative, repose sur des observations de seconde main, des documents qui existent déjà et des observations anecdotiques. Il ne faut pas s’étonner que l’ingénieur social [social engineer] trouve cette science sociale abstraite et lointaine, et de faible secours pour la solution de son problème. »

17Nombreux et pressants, pourtant, sont « les problèmes de la vie des enfants, du temps libre et des loisirs, les problèmes d’orientation professionnelle, ceux qui affectent les immigrants, les personnes âgées et les pauvres, et les problèmes des rapports de voisinage ». Ruml proposait que ce programme fût mis en œuvre dans le cadre des universités, qui étudieraient la vie sociale et économique de leur communauté en étroite relation avec « les institutions et organisations engagées dans les activités pratiques, les œuvres sociales, les entreprises industrielles, les administrations de la ville et de l’État ». L’argument n’était pas tant que les universités devaient être plus sensibles aux besoins des œuvres sociales, mais qu’en étant plus pratiques et moins livresques, elles seraient plus scientifiques : telle était la croyance que partageaient les initiateurs du nouveau dispositif. C’était donc une double réforme qu’ils entendaient promouvoir : celle de l’action sociale et celle de la recherche universitaire.

18Au début de 1924, Ruml reprit cet argumentaire à propos du programme 1924-1927 du LCRC en justifiant, cette fois, le choix de la « communauté urbaine » comme objet :

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« L’objectif […] était de rassembler les capacités de recherche de l’université en science économique, sociologie et science politique et d’entreprendre, avec la coopération des institutions publiques et privées de la ville de Chicago, une étude systématique de la communauté de Chicago. On considérait […] que les institutions publiques et privées de la ville seraient aidées dans leurs programmes d’amélioration sociale par les études soigneuses et impartiales que ferait l’université. Plus fondamentalement, il s’agit d’une expérience quant à la possibilité pour une université d’assumer un rôle intellectuel dirigeant fondé sur la recherche scientifique dans les domaines qui concernent le bien-être de la communauté » [12].

20C’est ce même argumentaire que Burgess – qui représentait la sociologie au sein du LCRC – développa en juin 1924 devant la National Conference of Social Work. L’institution, fondée en 1874, réunissait chaque année les administrateurs et personnels spécialisés des organismes d’assistance publique, des institutions pénitentiaires et des sociétés privées de bienfaisance [13]. D’abord appelé National Conference of Charities and Correction, ce forum avait changé de nom en 1917 : l’introduction du terme social work, apparu aux États-Unis dans les années 1900, était l’indice sémantique de l’émergence d’une nouvelle identité professionnelle – social worker – que la conférence contribuait à consolider [14]. En 1924, la présidence de la rencontre était assurée par Grace Abbott, une grande figure du mouvement qui avait été appelée récemment au Children’s Bureau de Washington, après avoir fondé la School of Social Service Administration de l’université de Chicago, avec sa sœur Édith qui en assurait à ce moment la direction [15].

21Comment se fait-il qu’un professeur de sociologie de l’université soit venu parler devant cet auditoire ? Charles Henderson, jadis professeur au département de sociologie de Chicago, ministre baptiste et personnalité de premier plan du monde de la charité scientifique et de la réforme des prisons, avait été un pilier de la conférence. Les sociologues arrivés au département après lui y assistaient aussi, mais de façon plus épisodique. Park fit le voyage en 1918 (Kansas City), 1920 (New Orleans) et 1921 (Milwaukee). Chaque fois, il présenta une communication, tantôt pour conseiller les institutions de bienfaisance en matière de propagande (Park 1918), tantôt pour parler des immigrants (Park 1920, 1921). Burgess y participa plus souvent : en 1917 (Pittsburgh), 1924 (Toronto), 1926 (Cleveland), 1927 (Des Moines) et 1928 (Memphis) – chaque fois pour y parler dans une table ronde ou avec une communication (Burgess 1924b, 1926, 1928a, 1928b). Burgess, qui avait été recruté pour remplacer Henderson, est souvent décrit comme proche, depuis sa jeunesse, du monde du travail social et comme un fervent admirateur de Jane Addams, la fondatrice de Hull House à Chicago (Hughes 1967 : 2). Lorsqu’il était à l’université du Kansas, il avait réalisé une social survey pour le compte des organisations « civiques » locales (Blackmar et Burgess 1917) et sa première publication dans American Journal of Sociology après son retour à Chicago fut un article montrant l’intérêt de ce type d’enquête locale en vue d’objectifs réformateurs (Burgess 1916). Après avoir présenté en décembre 1923 le programme de recherche sur la ville qui démarrait dans son département devant ses pairs de l’American Sociological Society (Burgess 1924a), il venait maintenant plaider ce même programme devant les travailleurs sociaux (Burgess 1924b).

22Son exposé était intitulé : « Can Neighborhood Work Have a Scientific Basis ? » [« Le neighborhood work peut-il avoir un fondement scientifique ? »] C’était un papier dirigé vers un public de professionnels, mais aussi vers les sociologues universitaires, puisqu’il fut repris presque à l’identique l’année suivante dans The City, le livre-manifeste publié par Park, Burgess et McKenzie pour la réunion de l’American Sociological Society de 1925 (Burgess 1925) [16]. Burgess plaidait dans ce texte pour que les travailleurs sociaux se préoccupent d’étudier scientifiquement les neighborhoods qu’ils souhaitaient réformer et « organiser ».

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« Si le neighborhood work peut avoir un fondement scientifique, c’est parce qu’il y a des forces sociales dans la vie de la community […] qui peuvent être étudiées, décrites, analysées et finalement mesurées. Dans une série de projets de recherche en cours au Département de sociologie de l’université de Chicago, nous étudions les forces sociales de la vie de la community »
(Burgess 1924b : 407 et 1925 : 143)

24L’exposé se concluait par une présentation sommaire de quelques-unes des recherches entreprises par les étudiants qui travaillaient sous sa direction et celle de Park dans le « laboratoire » que constituait la ville de Chicago.

25On observe donc, lors de la création du LCRC, une convergence sur un même projet des responsables de l’université, des dirigeants de la fondation philanthropique et des principaux professeurs qui allaient ensuite bénéficier des financements. Sans doute peut-on discuter de qui a eu l’idée en premier (Bulmer 1980 : 73-74), mais l’essentiel n’est sans doute pas là : le point crucial est qu’il y avait beaucoup d’idées en commun entre ces partenaires. Ruml, certainement, joua un rôle important pour les faire circuler et converger sur un projet concret : il était en rapport étroit avec Merriam et avec le président de l’université, et il a probablement discuté du projet avec Marshall et Park. Ces hommes n’avaient pas les mêmes fonctions ni les mêmes objectifs, mais ils appartenaient au même monde social. Les principaux dirigeants universitaires étaient des personnalités locales de premier plan, engagées dans de nombreuses institutions réformatrices, parfois même dans la politique municipale – comme ce fut le cas de Merriam. Quant au personnel dirigeant des fondations, il avait été formé à l’université et souvent, à un moment ou l’autre de sa carrière, il y retournait. Pour n’évoquer que deux cas directement impliqués dans l’histoire racontée ici, après que Ruml eut quitté ses fonctions au Memorial en 1929, le nouveau président de l’université Robert Hutchins le nomma doyen (dean) de la nouvelle Division of Social Sciences (1931) et professeur d’éducation, tandis que George Vincent, qui fut président de la Rockefeller Foundation de 1917 à 1929, avait auparavant obtenu un Ph.D. en sociologie à Chicago (1896), été professeur au département de sociologie (1904-1910) et, enfin, président de l’université du Minnesota.

Une nouvelle organisation du travail : la « recherche en coopération »

26Grâce aux programmes du LCRC, une nouvelle division du travail de recherche fut mise en place. Au face-à-face entre professeurs et étudiants entre les murs de la salle de classe se substitua, dans les secteurs touchés par la réforme, une chaîne de production plus complexe comprenant un professeur responsable, des assistants de recherche (research assistants) à qui était attribuée une rémunération (stipend) renouvelée de semestre en semestre après examen des résultats obtenus. Dans certains cas, un supervisor of research coordonnait les assistants et dirigeait aussi les travaux d’étudiants non rémunérés [17]. Ce dispositif introduisait un changement notable par rapport à la situation qui prévalait alors dans les secteurs des sciences sociales universitaires – d’ailleurs relativement rares – où l’on se préoccupait de savoirs empiriques. Jusqu’alors, sociologues et anthropologues utilisaient des observations ou des statistiques collectées par des voyageurs, des administrateurs, des institutions publiques ou privées. La nouveauté qui se produisit à Chicago était que ceux qui collectaient les « faits » se trouvèrent placés sous le contrôle direct de ceux qui les commentaient. Sans doute, les professeurs de la génération de Park et Burgess ne faisaient pas eux-mêmes de field studies ; en outre, leurs étudiants et assistants récoltaient toujours une large part de leur matériel auprès des institutions plutôt que directement au sein des populations étudiées [18]. Néanmoins, les conditions furent peu à peu remplies pour que la génération suivante de professeurs – celle de Everett C. Hughes – s’engage elle-même dans le field work, inaugurant de nouvelles normes de la pratique professionnelle.

27Cette nouvelle organisation du travail de recherche s’appuyait sur d’importants moyens en matériel et personnel technique. Professeurs et assistants disposèrent d’abord d’un bâtiment commun sur Midway, qui fut remplacé en 1929 par le nouveau Social Science Research Building où se retrouvaient les chercheurs de toutes disciplines qui avaient des projets en cours avec le LCRC. C’est dans ces bâtiments que se trouvaient leurs équipements communs, « le cœur de leur laboratoire », comme le notait avec étonnement un sociologue français visitant Chicago à l’automne 1930 [19] : machines à calculer de divers types, annuaires et documents statistiques, salle des cartes. Le LCRC créa en 1924 une collection d’ouvrages à University of Chicago Press : « Studies in Social Science » (plus tard « Social Sciences Studies »), qui publia 21 titres en huit ans et s’ajoutait à « Sociological Series » qui en publia 19 dans la même période.

28Une intense sociabilité était cultivée entre professeurs et étudiants – elle est volontiers soulignée par les souvenirs de ceux des étudiants qui devinrent par la suite professeurs. Déjà favorisée par les cours en petits groupes et la disposition matérielle du campus, elle bénéficiait désormais de la fréquentation d’un bâtiment commun qui comprenait des bureaux pour les professeurs et pour les assistants de recherche. Une série d’institutions servait de cadre à de multiples rencontres : la Society for Social Research, fondée par Park en 1920, réunissait deux fois par mois étudiants et professeurs ; le Summer Institute rassemblait chaque année les sociologues du département et leurs anciens étudiants – ce qui consolidait le réseau national d’hommes de Chicago qui formait l’ossature de l’American Sociological Society [20] ; une Social Science Conference annuelle des enseignants des différents départements et un dîner trimestriel des professeurs et assistants de recherche étaient organisés par le LCRC.

29Par co-operative research, en effet, il fallait aussi entendre la promotion d’une collaboration entre disciplines, c’est-à-dire entre les différents départements qui, à Chicago, constituaient le cadre des études doctorales (graduate studies). Six d’entre eux étaient concernés par les programmes du LCRC : ceux d’économie politique, de science politique, d’administration de service social, de sociologie et anthropologie, et, dans une moindre mesure, ceux d’histoire et de philosophie. Le plus puissant était le Department of Political Economy, auquel était associée la School of Commerce and Administration : son premier chef, J. Laurence Laughlin, était à la tête de l’opposition à l’économie institutionnaliste et les relations furent dès l’origine difficiles avec le département de sociologie (Diner 1975 : 545-546). Le Department of Political Science, dirigé par Judson, le président de l’université, était de taille très réduite : en 1920, il ne comprenait que trois enseignants. Merriam, qui était un de ceux-ci, investit beaucoup le LCRC et en obtint des moyens considérables, puis joua un rôle majeur dans le nouveau Social Science Research Council (SSRC). Quant à la School of Social Service Administration, institution stabilisée depuis 1920 au sein de l’université, elle avait des liens historiques et des enseignants communs avec le département de sociologie. Sa directrice, Édith Abbott, parvint à obtenir du LCRC des ressources importantes.

30L’argument central des promoteurs de la « coopération » était que les problèmes concrets sont indifférents aux divisions disciplinaires et que leur solution impose une collaboration de toutes les spécialités, voire une disparition de celles-ci. Le propos n’était pas nouveau, puisqu’il était depuis longtemps avancé par les praticiens amateurs de la « science sociale » pour se défendre contre les universitaires organisés en disciplines qui prétendaient au monopole sur le savoir légitime (voir Haskell 1977, Ross 1991 : chap. 1 et 2). Mais cette fois, c’est du cœur même de l’université que venait l’offensive, conduite, par exemple, par Beardsley Ruml, l’homme de la fondation Rockefeller, qui parlait des « catégories anachroniques d’histoire, science économique [economics], sociologie, psychologie, etc. » et estimait que ces « vieilles catégories s’effondrent ou sont mises de côté » (Ruml 1930 : 104). Ogburn observait pour sa part : « Les problèmes sociaux d’une société vivante ne respectent pas les distinctions académiques et méthodologiques » (Ogburn et Goldenweiser 1927 : 9). Park, occupé à fonder the science of sociology, était sur ce point très réservé [21].

31Quoi qu’il en soit des intentions affichées, les projets communs à plusieurs départements furent extrêmement rares – ce qui devait bientôt servir d’argument à ceux qui voulaient retirer la direction du programme à ceux qui le réalisaient pour la confier à un groupe restreint décidé à concentrer les moyens sur un tout petit nombre de nouveaux thèmes de recherche. Dans ce tournant, Merriam et White, deux politistes, jouèrent un rôle décisif, au profit de la psychologie comportementaliste et de l’économétrie.

Le dispositif institutionnel

32Le Local Community Research Committee de l’université de Chicago était dirigé par un comité exécutif composé de représentants des départements concernés et doté d’un secrétaire (1924), l’économiste Harry A. Millis, puis d’un secrétaire exécutif à mi-temps (1926), le politiste Leonard D. White, qui joua un rôle crucial dans la restructuration finale du dispositif. La fondation subventionnait le LCRC et non directement les projets individuels. C’est donc le comité exécutif qui examinait ces derniers et distribuait les fonds, ce qui donnait une grande indépendance aux universitaires. La situation était néanmoins tout à fait nouvelle, car il fallait désormais annoncer et justifier les projets de recherche. Une chaîne d’argumentaires se mit ainsi en place : le chercheur qui proposait un projet devait le défendre auprès du comité exécutif, le comité exécutif auprès de la fondation et du président de l’université, le directeur de la fondation – quoi que de façon plus globale – auprès des trustees. On observe d’ailleurs une grande homogénéité des raisons mises en avant aux divers points de la chaîne.

33La première année (1923-1924), le programme démarra doucement, avec une subvention de 21 000 dollars. Un programme à trois ans (de 1924-1925 à 1926-1927) prit la suite : la subvention fut portée à 50 000 dollars par an, à quoi s’ajoutait le doublement de tout financement trouvé par ailleurs (matching funds) à l’intérieur d’un plafond de 25 000 dollars. Suivit un programme à cinq ans (de 1927-1928 à 1931-1932) [22], sur le même principe, mais à une échelle sensiblement accrue : 70 000 dollars plus 30 000 conditionnels. En outre, la fondation finança en capital la construction du Social Science Research Building, inauguré en décembre 1929. C’est à l’occasion de la préparation, en 1927, du programme à cinq ans que les premières tensions se manifestèrent au sein du LCRC. Comme nous allons le voir plus loin, elles aboutirent à une profonde réorientation du dispositif et des programmes, qui eut pour effet la marginalisation des sociologues et l’arrêt des projets de Burgess.

Un programme de recherche en sociologie : « Local Communities of Chicago »

34Entre 1923 et 1930, les financements du LCRC transformèrent le département de sociologie en une ruche d’étudiants et d’assistants de recherche qui développaient une activité incessante, fabriquaient des cartes, préparaient des « données » pour les machines à calculer, tenaient des réunions avec les professeurs. Les enquêtes de chacun s’inscrivaient dans un programme d’ensemble, les méthodes et les résultats étaient partagés et discutés.

35Lorsqu’on entreprend de décrire les objets, les méthodes, les résultats de ce programme, une difficulté surgit dès l’abord : les commentaires sur la période sont pléthoriques [23]. On a pris ici le parti de ne pas s’y confronter et d’appuyer l’exposé presque exclusivement sur des archives qui, par bonheur, sont abondantes. On décrira donc le programme de recherche intitulé « Local Communities of Chicago » dans les termes où celui-ci fut mis en forme et argumenté par les acteurs eux-mêmes – dans des interactions qui comprenaient en règle générale un professeur, un ou plusieurs étudiants et le comité exécutif du LCRC, auprès duquel les fonds étaient sollicités. L’unité élémentaire du programme était le « projet de recherche [research project] » auquel étaient associés un titre – qui pouvait changer au cours du temps –, le nom d’une ou plusieurs personnes – généralement un professeur responsable et un assistant de recherche ou un étudiant non rémunéré –, des dotations financières et des rapports d’étape régulièrement présentés au comité exécutif du LCRC. Il en résultait parfois, mais pas toujours, un ou plusieurs comptes rendus finaux – rapport à faible diffusion, mémoire universitaire, article de revue, ouvrage. Cette dernière catégorie de publication étant très rare, il est important de ne pas s’y limiter pour reconstituer ce que fut l’activité de ce groupe de sociologues. Nous avons identifié de façon exhaustive tous les projets et en avons suivi le cours, depuis la première mention écrite rencontrée dans les archives jusqu’à la publication ou l’interruption de la recherche [24].

36La formulation d’un programme sur la local community paraît avoir été précoce. Park se souvenait en 1939 avoir fixé cet objectif à la Society for Social Research dès la création de celle-ci en 1920 (Park 1939 : 3), la fabrication de cartes devint dès lors une activité routinière dans les cours de Park et Burgess (Burgess et Bogue 1964 : 3-6) et, dès décembre 1923, Burgess put présenter à la réunion annuelle de l’American Sociological Society un modèle de la croissance urbaine qui fit plus tard le tour du monde (voir illustration 1), mais qui fournit d’abord la matrice d’une grande partie du programme des années suivantes (Burgess 1924a). Burgess annonça ce jour-là que sept projets de recherche étaient déjà en cours – tous étaient financés par le LCRC.

Ill. 1

Ernest W. Burgess : « Chart I. The Growth of the City »

Ill. 1

Ernest W. Burgess : « Chart I. The Growth of the City »

Source : Burgess 1925 : 51.

Le projet d’ensemble : découper et cartographier Chicago (1924-1929)

37À l’automne 1924, Burgess présenta au comité exécutif du LCRC un projet d’ensemble intitulé « The Growth of the City and Social Surveys of the Individual Local Districts of Chicago », dans le cadre duquel devait s’insérer toute une série d’études monographiques. L’ambition était celle d’un grand projet cumulatif et comparatif fondé sur la division de Chicago en « communautés locales » et la collecte systématique de données selon un cadre uniforme. La définition des limites de ces unités spatiales était « pratiquement achevée » dès l’automne 1924 [25].

38En 1926, deux projets qui prolongeaient le précédent furent adoptés par le LCRC. Le premier était cartographique et statistique : Burgess entreprit de produire des fonds de plan pour chacune des dites communautés (« Base Maps of Local Communities of Chicago ») et de traiter le recensement de 1920 dans le même découpage spatial (« Statistical Data from the Census for Local Community Studies »). En décembre 1926, les données statistiques étaient prêtes pour la publication [26] et, en juin 1927, les cartes étaient achevées. L’autre projet (« Local Communities of Chicago ») ne visait rien moins qu’à réaliser des monographies qui devaient couvrir l’ensemble de la métropole : une assistante de recherche, Vivien M. Palmer, avait été recrutée dès juillet 1924 pour le mettre en œuvre. Il en résulta un manuel de méthodologie sur les « études de terrain [field studies] » (Palmer 1928), suivi, en janvier 1929, d’un rapport qui présentait un plan d’étude sur « l’histoire sociale des communautés locales » et annonçait un volume sur le North Side : « un recueil de données [sourcebook] sur le North Side […] sera d’une valeur inestimable pour quiconque est intéressé à promouvoir un programme civique ou social pour l’un de ses voisinages [neighborhoods] » (Palmer 1929).

39Un des moyens essentiels pour donner de la cohérence au projet était la cartographie et, tandis que les premiers assistants de recherche commençaient leurs enquêtes sur certains districts, Burgess entreprit de découper Chicago en « aires naturelles [natural areas] » destinées à servir de cadre à la suite du programme. Vivien Palmer rappelait : « Lorsque je fus recrutée par le Département, M. Burgess avait juste commencé à diviser la ville en aires écologiques [ecological areas] » [27]. Au terme de l’entreprise, Chicago se trouva découpée en 75 local communities, elles-mêmes divisées en plus de 300 neighborhoods.

40Pour établir cette carte des communautés locales, Burgess et Palmer s’appuyèrent sur l’observation du terrain, mais aussi sur la consultation des « organisations civiques [civic agencies] ». Un projet du LCRC réalisé par une étudiante du département d’administration de service social, Helen I. Clarke, avait pour titre : « A Study of Uniform Districts for the Social Agencies of Chicago », étude pour laquelle l’auteure obtint son M.A. en 1927. Elle signale que le découpage des « aires naturelles » fut négocié dans le détail avec les institutions sociales concernées :

41

« Peu à peu mais sûrement, cette carte est acceptée par les autres organisations de la ville et, chaque fois qu’elle est acceptée et utilisée comme cadre d’une étude ou d’un système d’archivage, cela fait autant d’informations supplémentaires qui s’ajoutent à nos dossiers centraux. » [28]

42Dès que le travail de délimitation des « communautés locales » fut terminé à la fin de 1924 (voir illustration 2), Burgess entra en négociation avec le bureau du recensement à Washington pour obtenir les données du recensement de 1920 dans le cadre de ces nouvelles divisions de la ville. En décembre 1926, la compilation statistique était terminée et sa publication ne dépendait plus que de la disponibilité de fonds. Le découpage de Burgess devait servir pour le recensement de 1930, mais il fut aussi repris par de nombreux organismes sociaux. Une fois établies les frontières des « communautés locales », Burgess entreprit de dresser une carte détaillée de chacune d’elles, qui devait servir de fond de plan à la monographie la concernant. Plus de la moitié de ces « Base Maps of Local Communities of Chicago » étaient prêtes vers la fin de 1926 [29] (voir illustration 3). Ainsi, le projet global disposait d’une infrastructure qui liait entre elles les monographies en fournissant un découpage territorial des aires naturelles de la ville, des données statistiques sur chacune d’elles, ainsi que des fonds de plans pour dresser toutes les cartes nécessaires à chaque projet particulier.

Ill. 2

Ernest W. Burgess : « Chart II. Urban Areas »

Ill. 2

Ernest W. Burgess : « Chart II. Urban Areas »

Source : Burgess 1925 : 55.
Ill. 3

« Local Community Base Map » (version 1929)

Ill. 3

« Local Community Base Map » (version 1929)

Source : JRL, Burgess Papers, Box 13, Folder 6 (avec la gracieuse autorisation de la Joseph Regenstein Library) ; l’échelle originale est 1 : 178 816.)

Des monographies dans un projet d’ensemble (1923-1929)

43C’est dès la phase initiale et expérimentale de ce programme – entre 1923 et 1925 – que des étudiants commencèrent à se voir assigner chacun l’étude de l’une des « aires naturelles » qui trouvaient place dans le modèle de Burgess. La plupart de ces enquêtes portaient sur la « zone de transition ». C’était le cas des projets « The Ghetto and Deutschland » (entrepris par Burgess en 1923 et repris par Wirth l’année suivante), « The Lower North Side : A Study in Community Organization » (1923 : Zorbaugh), « The Natural History of Vice Areas » (1923 : Reckless), qui aboutit à un Ph.D. en 1925 et à un livre en 1933 [30]. Trois projets n’aboutirent pas : « The Slum : An Area of Deterioration in the Growth of the City » (1923 : Anderson), « The Black Belt » (1924 : Green), « The Mexicans in Chicago » (1924 : Redfield) [31].

44Il convient de mentionner aussi d’autres projets qui ne portaient pas sur des « communautés locales » particulières mais sur des phénomènes ou problèmes qui étaient censés s’observer principalement dans la zone de transition : les bandes de jeunes (Thrasher), la désorganisation familiale (Mowrer), la prostitution (Reckless), la déliquance juvénile (Shaw et Leiffer), le suicide (Shonle), les salles de bal (Russell et Cressey) et les gangs criminels (Landesco) [32].

45Peu nombreuses furent les études de communautés locales qui portaient sur d’autres zones écologiques. Deux projets concernaient le quartier de l’Université, qui était caractérisé dans le schéma de Burgess comme un « district résidentiel privilégié [restricted residential district] » : « Primary Group Control in Hyde Park » (1924 : Roper), qui donna un Ph.D. en 1935 et « The Apartment House Dweller : A Study of Social Change in Hyde Park Community » (1925 : Conway), qui donna un M.A. en 1926 [33]. Un autre projet portait sur une petite ville industrielle de la lointaine périphérie, au-delà de la « commuters zone » : « The Town of Pullman » (1924 : Hughes), mais il n’aboutit pas, Hughes ayant choisi de consacrer sa thèse de Ph.D. (1928) à l’étude du Real Estate Board, l’association locale des agents et promoteurs immobiliers. À partir de 1926, les nouveaux projets ne furent plus définis par une localité particulière – si l’on excepte trois études sur des quartiers où se trouvaient des settlements, toutes entreprises à la demande de ceux-ci et dont aucune n’aboutit : « Leisure Time Activities of Young People in a Settlement Neighborhood » (1926 : Ireland), « Social Forces and Trends in Settlement Neighborhoods » (1926 : Tibbitts) et « Study of the Chicago Commons Neighborhood » (1926 : Burgess) [34].

46Tous les projets financés par le LCRC ne furent pas des succès. Si on laisse de côté les projets d’ensemble dont Burgess ou Palmer étaient responsables, pour ne retenir que les études monographiques assignées à un assistant de recherche, 24 sur 44 aboutirent à un rapport, un mémoire universitaire ou une publication, soit 55 % [35]. Les projets définis comme l’étude d’une aire naturelle particulière furent peu nombreux et restèrent peu visibles. Sur un total de 10 (soit 23 % de l’ensemble) que l’on peut classer sous cette rubrique, quatre seulement aboutirent, dont deux donnèrent lieu à la publication d’un livre : The Ghetto de Wirth en 1928 et The Gold Coast and the Slum de Zorbaugh en 1929 – en outre, seul ce dernier remplissait tous les canons méthodologiques recommandés par Burgess (voir illustration 4). Une forte majorité des projets portait, d’une façon ou d’une autre, sur des problèmes sociaux associés à la zone de transition ou de désorganisation sociale : c’était le cas de 27 d’entre eux (61 %), dont 9 (20 %) étudiaient spécifiquement la criminalité ou la délinquance. Quelques autres projets traitaient de l’écologie d’activités ou institutions caractéristiques de la grande ville : le commerce de détail, les médecins, les prix fonciers, les établissements de loisir. Un tout petit nombre, enfin, s’intéressent à certains des phénomènes de mobilité auxquels Park attachait une grande importance : le téléphone, l’automobile, les hôtels, la mobilité résidentielle.

Ill. 4

Harvey Zorbaugh : carte de la criminalité dans le Near North Side. Note : chaque point représente le domicile d’une personne arrêtée (pour tout type d’infraction) entre le 15 août et le 15 septembre 1924

Ill. 4

Harvey Zorbaugh : carte de la criminalité dans le Near North Side. Note : chaque point représente le domicile d’une personne arrêtée (pour tout type d’infraction) entre le 15 août et le 15 septembre 1924

Source : Zorbaugh 1929 : 157.

47Entre 1924 et 1927, des dizaines d’assistants de recherche furent donc mobilisés par le programme de Burgess. En juin 1927, au sommet de la courbe, Burgess et Park dirigeaient les travaux de 22 assistants dans le département de sociologie et Burgess partageait avec Édith Abbott la direction de 4 autres qui relevaient du département d’administration de service social. Les résultats s’accumulaient et, pour ceux dont nous pouvons connaître le contenu, offraient autant de confirmations du modèle des natural areas et, ainsi, une explication écologique globale des phénomènes de désorganisation sociale – tout particulièrement les études de Frederic M. Trasher sur les bandes de jeunes, de Clifford R. Shaw sur la délinquance juvénile, de Ernest R. Mowrer sur « l’écologie de la désorganisation familiale » ou de John Landesco sur les bandes criminelles [36]. En règle générale, les rapports se concluaient par des recommandations pratiques.

Une nouvelle politique de la fondation Rockefeller pour les sciences sociales et la fin du projet « Local Communities of Chicago »

48Le vaste projet ainsi intitulé avait donc pour ambition de centraliser les données disponibles sur chacune des communautés locales dans lesquelles la ville avait été divisée, de les compléter par des études de cas intensives et de comparer ces résultats pour en inférer des lois. Dans son manuel de 1928, Palmer avait soigneusement énuméré les basic data qui devaient être réunis pour réaliser une bonne monographie : étudier l’histoire du développement de la communauté et de ses différents voisinages depuis ses origines, réaliser des case studies approfondies de certains aspects de la vie contemporaine dans l’aire considérée, réunir des statistiques sur le développement de la communauté, en rassembler les social directories (les répertoires des institutions mondaines, civiques et sociales) et, enfin, établir la « comptabilité de communauté [community accounting] », c’est-à-dire étudier la distribution des « problèmes sociaux – comme la pauvreté, la délinquance juvénile et adulte, le divorce et l’abandon de famille, les suicides, les cinémas et les salles de danse, etc. » [37]. Les différences étaient minces entre ce programme sociologique et celui des social surveys des réformateurs épris de science, que formalisait à peu près au même moment Shelby M. Harrison, un dirigeant de la Russell Sage Foundation new-yorkaise (Harrison 1931).

Un projet inabouti

49Aucune publication d’ensemble ne résulta de cet effort considérable, sinon un rapport intermédiaire de Palmer (Palmer 1929) et une seule monographie répondant au programme fixé : celle de Harvey W. Zorbaugh sur le Near North Side (Zorbaugh 1929). En janvier 1930, un dernier rapport exposait à nouveau le plan d’ensemble et donnait des résultats sur le North Side, plus spécifiquement sur North Center [38]. Dans ses deux rapports successifs, Palmer annonçait une série d’ouvrages – intitulée d’abord « Local Community Blue Books of Chicago », puis « Social Backgrounds of Chicago’s Local Communities » – qui devait couvrir en huit volumes l’ensemble de la ville. Tout cela tourna court.

50Le travail de Palmer – et, à travers lui, celui de Burgess – fut l’un de ceux qui firent l’objet au LCRC des plus vives critiques. Dès la fin de 1928 commencèrent les attaques des autres départements contre le projet « Local Communities », dont les arguments ne devaient pas être très éloignés de ce jugement sans appel formulé dix ans plus tard par Merriam :

51

« Certaines des entreprises tournèrent mal, non qu’elles aboutirent à des résultats négatifs, mais elles ne menèrent nulle part. Parmi elles se signalaient particulièrement les études de Palmer en sociologie urbaine et les études de Marshall et Magee sur les industries de base » [39].

52Relevons que les deux projets incriminés avaient pour caractéristique commune de procéder par accumulation de données sur des unités d’analyse élémentaires – des territoires dans un cas, des industries dans l’autre – en préalable à une comparaison ou synthèse qui tardait à venir [40]. Mais ils étaient aussi tous deux confrontés à une critique radicale au sein de leurs disciplines respectives : celle que formulaient les tenants de la sociologie statistique et de l’économétrie.

53Malgré les arguments de Burgess qui faisait valoir que ce projet était « peut-être le meilleur instrument de contact et de coopération avec la communauté » [41] et malgré la mise en place en mars 1930 d’un comité de soutien de plus de 60 membres, le projet fut abandonné en même temps que le LCRC était démantelé. Un projet « Local Community Study » fut encore financé en 1930-1931 par le SSRC, mais uniquement au titre des matched funds, grâce à une source de financement extérieure. Burgess passa alors à d’autres thèmes, qui l’occupèrent tout au long des années 1930 : la criminalité et la famille [42]. Quant à Palmer, elle soutint un Ph.D. en 1932 (« The Primary Settlement Area as a Unit of Urban Growth and Organization ») en utilisant les matériaux d’histoire locale accumulés au cours du défunt programme.

54Mais l’échec du programme de Burgess n’était pas seulement le résultat de sa trop vaste ambition et de la mise en cause des field studies. Il tenait aussi à une réévaluation radicale de la pertinence analytique du neighborhood comme unité élémentaire de la vie urbaine et vecteur de la réforme de celle-ci. C’est en tout cas la conclusion, elle aussi sans appel, de l’étude de Marion W. Roper sur Hyde Park, le district du sud de Chicago où se trouve l’université, conclusion que Burgess lui-même exhuma en 1964 d’une dissertation de Ph.D. de 1935 :

55

« En ville, les groupes primaires continueront d’être la famille et les groupes polaires d’enfants, mais pour les adultes, ce type de rapports s’établiront autour d’intérêts comme les professions, les loisirs, etc., plutôt que par la proximité comme dans les zones rurales. On peut grandement douter que le mouvement de “retour au voisinage” [“back to the neighborhood” movement] ait beaucoup de succès dans la grande ville. Si nous devons résoudre les problèmes de la vie urbaine, il nous faut d’abord comprendre la nature de la vie en ville. »
(Roper 1964 : 244)

56Manifestement, on ne croyait plus dans l’université des années 1930 que l’étude des communautés locales et des voisinages permît de le faire.

Du Local Community Research Committee (1924) au Social Science Research Council (1929)

57Au-delà des projets incriminés, c’est tout le dispositif du LCRC qui était l’objet d’une critique radicale de la part d’un petit groupe d’universitaires proches de la direction de la Rockefeller Foundation : la crise s’ouvrit en 1927-1928 et se conclut en 1929 par une réforme en profondeur du dispositif (Bulmer 1980 : 101-104). Dès mars 1927, s’élevèrent en interne des critiques selon lesquelles les recherches étaient insuffisamment « intégrées ». Elles furent reprises par Max Mason, le président de l’université, et une série de projets peu importants furent supprimés en mai 1927 parce qu’ils n’impliquaient pas de « recherche en coopération ». Leonard D. White, le jeune secrétaire exécutif du LCRC de 1926 à 1930, formula une nouvelle ligne en octobre 1927. Il faut, dit-il, « un nombre très limité de projets significatifs et à grande échelle qui impliquent au moins deux disciplines ». White recommandait en outre d’adopter des méthodes résolument plus scientifiques :

« Il me semble très souhaitable que les projets que le LCRC approuve puissent être formulés sous la forme d’hypothèses susceptibles d’être vérifiées par la méthode scientifique [the scientific method] ; des études purement descriptives ou analytiques offrent beaucoup moins la possibilité de développer la technique de recherche [the technique of investigation] que celles qui peuvent être exprimées sous la forme d’hypothèses vérifiables » [43].
Un sous-comité fut alors chargé de redéfinir un programme, mais n’y parvint pas (rapport Merriam, novembre 1927) et c’est finalement un comité dirigé par White qui fit le nécessaire. Il préconisa (janvier 1928) deux grands projets : l’un sur les causes de la guerre, l’autre sur la personnalité, plus quelques autres plus modestes logés dans des départements [44]. Le seul sociologue évoqué dans le rapport était Ellsworth Faris, dont les travaux sur la personnalité étaient, aux yeux de White, les plus proches de ce qu’il considérait comme « l’approche scientifique des problèmes de science sociale » [45]. C’est à ce moment que le programme de Burgess, « Local Communites of Chicago », commença à subir ses premières critiques. En mars 1929, White écrivit confidentiellement à Merriam et à l’économiste Harry A. Millis : « Je considère que certains membres du comité sont influencés par leur souci de protéger leurs intérêts [self-protective considerations]. » Il proposait un comité moins nombreux qui ne fût plus composé des représentants des départements, mais des seuls Merriam, Millis et Ogburn [46] (Bulmer 1980 : 103). En décembre, White fit officiellement au comité des propositions de réorganisation, qui furent approuvées avec quelques amendements. Le Local Community Research Committe faisait place à un vaste Social Science Resarch Council de l’université, pris dans tous les départements, coiffé par un Research Committee de trois membres et un secrétaire exécutif (executive secretary) à plein temps, des comités consultatifs (advisory committees) étant associés aux principaux projets. Le lieu du pouvoir au sein de l’institution se déplaçait ainsi radicalement : la période où les fonds Rockefeller étaient en réalité gérés directement par les universitaires qui se les répartissaient entre eux prenait fin, une centralisation aux mains d’un petit nombre d’hommes jugés plus fermes sur les objectifs était mise en place. Les orientations scientifiques changeaient du même coup : le terme « local community » disparaissait du nom de l’institution, ce qui manifestait une double révision de l’échelle et des méthodes de recherche des sciences sociales.

Changement d’échelle, changement de méthodes : la carrière de la « communauté locale » à l’université de Chicago et la fin de l’« âge d’or » de la sociologie

58Il nous faut donc essayer de comprendre pourquoi le vocable « communauté locale » fut abandonné en 1929 par les dirigeants des sciences sociales à l’université de Chicago et, en premier lieu, pourquoi il avait été adopté sans discussion cinq ou six ans plus tôt pour exprimer l’orientation d’ensemble des recherches à entreprendre. Cet étiquetage, qui fut constamment défendu par Park et Burgess, mais longtemps aussi par Merriam pour la science politique et par Abbott pour le service social, fut, nous l’avons noté, au centre de l’argumentaire de Ruml.

59Les raisons de cette orientation sont multiples. Depuis le xixe siècle, tous les mouvements réformateurs qui avaient traversé les États-Unis – tout particulièrement au cours de « l’ère progressiste » des années 1880-1920 – avaient un caractère local marqué : les tâches réformatrices étaient définies à l’échelle de chaque ville et prises en charge par des groupes « civiques » locaux. Ainsi, au début des années 1920, les problèmes sociaux étaient regardés comme des problèmes « urbains », susceptibles d’être résolus à l’échelle de la « communauté locale », dont la municipalité était la forme politique souvent dévoyée et les élites réformatrices locales l’authentique expression civique et morale. La communauté – entendue tantôt comme la ville dans son ensemble, tantôt comme une division naturelle de celle-ci – était donc désignée comme le théâtre de la réforme, à commencer par celle des autorités publiques, jugée nécessaire depuis que les patriciats locaux avaient été évincés des municipalités par les « machines politiques » qui contrôlaient les vagues successives d’immigrés [47].

60C’est dans la « communauté locale » que s’était impliquée l’université de Chicago dès sa fondation (voir Diner 1980) et, plus concrètement encore, c’est là où agissaient les initiateurs du LCRC. La réforme, en effet, ce n’était pas simplement un air du temps, des idées partagées ou un programme, mais aussi des réseaux sociaux bien identifiables dans lesquels les universitaires étaient fortement insérés [48]. Ainsi, le sociologue Charles Henderson fut une figure locale et nationale de la charité scientifique, de la réforme de l’assistance publique et des prisons jusqu’à sa mort en 1915. Les philosophes George H. Mead et James H. Tufts – qui était vice-président de l’université dans les années cruciales 1923-1925 – furent des dirigeants du City Club, qui, depuis 1903, structurait les milieux d’affaires de Chicago. Le politiste Charles Merriam fut sans doute celui qui alla le plus loin en politique. Après un rapport au City Club sur les recettes fiscales de la municipalité (1906), il fut membre de plusieurs commissions de réforme de la charte municipale. Candidat au poste de maire (1911), il fut conseiller municipal (alderman) pendant six ans jusqu’à son échec électoral de 1917. Il quitta alors la politique active pour poursuivre la réforme municipale par d’autres voies : il fut l’initiateur du Chicago Bureau of Public Efficiency (1923) puis, au City Club, d’une Conference on Regional Organization. Il n’est pas jusqu’à Robert E. Park qui, malgré le dédain qu’il affichait pour les « do-gooders », n’avait un engagement réformateur local : il fut président de la Urban League, une association promouvant les intérêts et l’éducation des Afro-Américains, notamment ceux récemment immigrés du Sud.

61Les formes de l’implication locale des professeurs avaient néanmoins changé depuis les années 1890. Si Henderson avait été un ministre baptiste dont les investissements réformateurs comptaient sans doute beaucoup plus pour sa notoriété que sa très mince œuvre scientifique, Park, à l’inverse, était d’abord un professeur qui donnait une caution de savant à un mouvement de réforme. Une logique universitaire plus autonome s’était affirmée. À partir de la génération de Burgess, la plupart des professeurs faisaient des carrières complètes au sein de l’université et ceux qui avaient connu auparavant d’autres horizons se firent rares. Les profils sociaux devenaient plus homogènes et plus normés : entrés jeunes dans la carrière, les professeurs tendaient à mener une vie régulière à l’intérieur du territoire du campus, leurs sociabilités tendaient à se limiter à leurs collègues et étaient principalement rythmées par les événements de la communauté universitaire. Si la figure du professeur notable et réformateur local n’avait pas disparu pour autant, c’est un autre rapport que les sociologues qui nous intéressent ici cherchaient à établir avec la « communauté ».

62Bien ancrés dans l’université, ils proposaient au monde du travail social un pacte : reconnaissez que notre science est nécessaire pour identifier les forces qui gouvernent les quartiers où vous agissez, et nous étudierons scientifiquement les problèmes qui vous préoccupent. C’est ainsi que la sociologie trouvait à la fois son laboratoire et l’audience à laquelle elle aspirait. Toutefois, à la différence des professeurs réformateurs de la génération précédente, elle avait soin de dresser une barrière entre la science et son public : c’est le langage de l’écologie humaine qui jouait ce rôle et transmuait en énoncés scientifiques les diagnostics réformateurs [49]. Cette convergence des objectifs entre les savants et la « communauté » permettait à ceux qui contrôlaient les fonds Rockefeller de laisser la distribution de ceux-ci aux mains de professeurs : le LCRC était le dispositif organisationnel qui correspondait à une telle situation.

63L’engagement de l’université vis-à-vis de la communauté locale était rendu manifeste dans le cadre du LCRC par le dispositif des « matching funds » par lequel une partie de la subvention Rockefeller était subordonnée à l’obtention d’autres subventions des institutions locales. Six autres fondations contribuèrent (surtout le Commonwealth Fund), six clubs d’hommes d’affaires de Chicago, trois agences officielles, des firmes commerciales, un petit nombre de groupes d’intérêts particuliers. Ces financements étaient dispersés et limités en volume, mais ils témoignaient des services que l’université rendait à la « communauté » [50].

64Le LCRC abordait de diverses façons les « problèmes de la communauté locale ». Dans la tradition ancienne de la « science sociale » réformatrice, les travaux des sociologues sur les « zones de détérioration » portaient pour une large part sur des « problèmes sociaux », comme l’étude de la criminalité, thème sous lequel Burgess rangea une partie des travaux de ses assistants dès 1926 et sur lequel il put sans difficulté se replier lorsque son programme sur les « Local Communities » commença à rencontrer des difficultés [51]. Sur ces sujets, les hommes du département de sociologie et les femmes du département d’administration de service social étaient présents ensemble et parfois en concurrence [52].

65Pour les chercheurs d’autres disciplines, le terme « communauté locale » avait d’autres significations. Il pouvait désigner la ville considérée du point de vue de ses institutions politiques. Les hommes du département de science politique réalisèrent dans le cadre du LCRC une importante série de travaux sur les comportements électoraux, notamment sur l’abstention (Merriam et Harold F. Gosnell) [53], sur l’organisation de l’administration municipale et ses réformes souhaitables (Leonard D. White et les assistants de recherche Herman C. Beyle et Robert F. Steadman) [54], sur le modèle à combattre, enfin, celui des « machines politiques » (Gosnell) [55]. « Communauté » pouvait enfin référer à Chicago envisagée comme une agglomération, voire une région urbaine appelant un effort de planification. En 1923, Merriam avait proposé au City Club de prendre l’initiative de la conférence dont naquit la Chicago Regional Planning Association [56]. À partir de 1926-1927, un ensemble de projets du LCRC en découla, auquel, évidemment, Merriam contribua activement. Les deux départements les plus engagés dans cette entreprise furent celui de science politique, qui étudia l’organisation du gouvernement régional et celui d’économie politique, qui s’occupa de la « physiography » de la région en étudiant les tendances de la population et en établissant, lui aussi, une « base map » (John P. Goode), puis entreprit une vaste enquête sur Chicago sous la forme de monographies d’industries selon un modèle établi par Edward A. Duddy et Leon C. Marshall – ce qui témoignait de la résistance, dans les années 1920, d’une économie descriptive et institutionnelle, malgré le triomphe local de l’économie mathématique. Le département d’administration de service social fut à peine concerné par les travaux pour la planification régionale de Chicago, et les sociologues moins encore [57].

66Avec la réorientation globale du programme qui se fit jour à partir de 1928, les projets sans rapport avec la « communauté locale » se multiplièrent. C’était en particulier le cas des quatre grands projets nouveaux qui furent définis cette année-là : ceux de Louis L. Thurstone sur la mesure des attitudes, d’Henry Schultz sur l’économétrie, de Simeon E. Leland sur les finances publiques, de Quincy Wright sur les causes de la guerre – les trois premiers venaient d’être nommés « research professors » pour mener à bien ces projets. Ainsi, la nouvelle politique qui fut principalement promue par deux politistes, Merriam et White, profita à la psychométrie, à l’économétrie et à la science politique et administrative.

67L’accord initial des acteurs sur le thème de la « communauté locale » avait été ébranlé par une série de changements convergents, auxquels les dirigeants de la Fondation Rockefeller Foundation répondirent par un tournant radical de leur politique scientifique.

68De nouveaux rapports de force au sein des disciplines et entre celles-ci s’étaient développés. Si l’approche locale convenait bien aux sociologues et aux spécialistes du service social – aux historiens aussi, mais ils étaient marginaux –, elle correspondait moins aux cadres intellectuels des économistes. Dès février 1926, L. C. Marshall, alors chairman du comité exécutif, s’interrogeait : « Avons-nous fait une erreur en travaillant sur des problèmes “locaux” ? » et, en octobre de la même année, il proposait de supprimer « local community » du titre du comité, ce que les autres membres rejetèrent [58]. Les politistes oscillaient entre une étude des institutions locales et une perspective nationale. C’est finalement White, l’un d’entre eux, qui mit en œuvre la nouvelle orientation. Si les résistances furent faibles – à l’exception de celle de Burgess – c’est que les intérêts cognitifs étaient en train de changer avec, notamment, les lieux et les échelles des interventions expertes. Dès 1928, la présidence de Hoover ouvrit un nouvel espace national ou fédéral à l’activité réformatrice – qui s’élargit encore dans les années 1930 avec le New Deal. Merriam et Ogburn furent appelés en 1929 comme conseillers à Washington [59]. Dans le même mouvement, les critères de la scientificité tendirent aussi à changer, avec la montée en force des partisans d’une science durcie par le chiffre, notamment au sein des départements de sociologie, d’économie et de philosophie. Une anecdote peut être considérée comme significative du nouveau cours : on dit que c’est Ogburn qui avait fait graver sur le chambranle d’une fenêtre de la façade du nouveau Social Science Research Building inauguré en 1929 un aphorisme de Lord Kelvin : « Si vous ne pouvez pas mesurer, votre savoir est maigre et insatisfaisant » (Hunter 1980 : 218).

69Ainsi, deux modalités bien distinctes du gouvernement de la recherche peuvent être observées dans le Chicago des années 1920 et 1930 : l’une, administrée par les professeurs eux-mêmes et tournée vers les besoins supposés des groupes réformateurs locaux ; l’autre, centralisée dans un petit comité d’universitaires décidés à faire prévaloir une nouvelle ligne scientifique, une autre répartition des ressources entre disciplines comme au sein de chacune d’elles, enfin, une offre de recherche tournée vers des autorités politiques et des problèmes nationaux. La Grande Dépression avait permis l’émergence de nouveaux problèmes publics et la montée du « planning » : une autre expertise que celle qui s’adressait aux travailleurs sociaux pouvait désormais proposer ses services.

70Changement de méthode et changement d’échelle allaient de pair. L’un et l’autre s’imposèrent par le moyen d’une réorganisation drastique du dispositif de la recherche sur projet et l’abandon des travaux sur les « Local Communities of Chicago ». C’est ainsi que la trajectoire institutionnelle du LCRC et la trajectoire intellectuelle de la « communauté locale » coïncidèrent très exactement avec la chronologie communément attribuée à l’« âge d’or » de la sociologie de Chicago.

Notes

  • [1]
    Sur l’entreprise de Janowitz, voir Topalov 2004.
  • [2]
    W. F. Ogburn, Journal 3, 14 juin 1952 (JRL, Ogburn Papers, Box 47, Folder 1).
  • [3]
    Pour Robert L. Faris, « les années 20 » (Faris 1967 : 10) ou 1920-1932 (Faris 1970) ; pour Ruth S. Cavan, 1918-1933 (Cavan 1983). On parlera ici de « département de sociologie », bien qu’il s’agisse du « département de sociologie et d’anthropologie » jusqu’à séparation des deux disciplines en 1929.
  • [4]
    La création et le fonctionnement du LCRC ont déjà été étudiés par Bulmer 1980 et 1984 : chap. 8. L’apport spécifique du présent article, centré sur le département de sociologie, comporte trois aspects : le recensement exhaustif des projets de sociologie financés par le LCRC, la mise en rapport du cadre institutionnel avec le contenu des recherches et enfin, la mise en lumière de la crise finale, très euphémisée par Bulmer.
  • [5]
    Je remercie le Rockefeller Archive Center de m’avoir fourni les moyens de consulter ses fonds. Dans ce qui suit, JRL signifie « Department of Special Collections, Joseph Regenstein Libabry, et RAC « Rockefeller Archive Center ».
  • [6]
    Annual Report 1923-1924 of the Local Community Research Committee to the President and Board of Trustees of the University of Chicago, 15 janvier 1924, typescript, f. 1 (cité par Bulmer 1980 : 74).
  • [7]
    Sur ce fonds Rockefeller, voir Bulmer 1982.
  • [8]
    Social sciences (parfois social science) sont les termes utilisés dans la plupart des documents ; nous l’utiliserons donc aussi. Des nuances entre locuteurs, cependant, apparaissent parfois quand sont énumérées les disciplines (ou départements universitaires) qui constituaient cet ensemble.
  • [9]
    Voir Bulmer 1980 : 60-62.
  • [10]
    Sur les fondations, voir notamment Karl et Katz 1981, Parmet 2012, Zunz 2012 ; sur Russell Sage : Hammack et Wheeler 1994, Grocker 2006 ; sur Rockefeller : Fisher 1983 et 1993, Abrams 1993, Löwy et Zylberman 2000, Tournès 2008.
  • [11]
    « Extract from Mr. Ruml’s statement of policy » to the Memorial, 1923 (JRL, President’s Papers 1889-1925, Box 61, Folder 13). Les citations du paragraphe suivant proviennent du même document (citations traduites par l’auteur).
  • [12]
    Memorial Board of Trustees meeting, 26 février 1924, in « LSRM Policy in the Social Sciences » (JRL, Merriam Papers, Box CLVII, Folder 11).
  • [13]
    Sur la National Conference of Social Work, voir Bruno 1948, Lubove 1965, Chambers 1967 et 1973.
  • [14]
    S’agissant du tout début du xxe siècle, traduire ce terme en français par « travail social » serait un anachronisme. La dérivation de work est religieuse et, sans aucun doute, cette connotation était vivante pour nombre des locuteurs de l’époque : dans la tradition chrétienne – et particulièrement protestante – faith and works signifie « la foi et les œuvres ». Au même moment, le français « œuvres sociales » a exactement les mêmes propriétés, mais ce terme n’autorisait sans doute pas la même évolution sémantique : c’est sous la forme « service social » qu’il fut laïcisé, le mot « service » – bien que lui aussi de matrice chrétienne – pouvant exprimer la dimension professionnelle d’activités auparavant liées au bénévolat de la bienfaisance. L’introduction de social work en français sous la forme du calque « travail social » (d’où « travailleur social ») est plus tardif et ne doit pas faire oublier la signification originelle du terme anglais. Toutefois, l’apparition de National Conference « of Social Work » en 1917 et le développement de l’usage de social work et social worker dans des contextes qui affirment l’existence d’une profession autorise, pour ce qui concerne les années 1920 et la suite, à traduire ces mots par « travail social » et « travailleurs sociaux ».
  • [15]
    Voir Costin 1983.
  • [16]
    Sur le processus de fabrication de The City et le rôle de ce livre dans la promotion d’une « sociologie urbaine », voir Topalov 2008.
  • [17]
    Dans le cas du programme « Local Communities of Chicago », il s’agissait de Vivien M. Palmer, recrutée avec le titre de « coordinatrice du programme » (program co-ordinator).
  • [18]
    Ce point a été établi de façon définitive par Platt 1983 et 1994. Voir aussi Topalov 2014 : chap. 7. Sur le fait que les professeurs n’enquêtaient pas eux-mêmes, voir le témoignage de Hauser 1967 : 26 (qui ajoute perfidement que les étudiants faisaient le travail de Burgess, leur professeur, sans être payés pour cela…) et Prus 1996 : 118-119.
  • [19]
    Lettre à Yvonne Halbwachs, 15 octobre 1930, in Halbwachs 2012 : 139.
  • [20]
    Du moins jusqu’à la « révolte » de 1936, qui conduisit à la création de l’American Sociological Review et à la rupture du monopole de Chicago (voir Lengermann 1979).
  • [21]
    Voir par exemple : SSRC, Dartmouth Conference, Hanover, 1926, vol. 2 : 445 (JRL, Merriam Papers, Box CXXXVI, Folder 2).
  • [22]
    Voir des détails in Bulmer 1980 : 100.
  • [23]
    Voir le bilan bibliographique établi par Kurtz 1984, et la littérature n’a fait que grossir depuis (voir notamment le point par Abbott 1999 : ch. 1).
  • [24]
    On trouvera la liste complète des projets entrepris dans le département de sociologie, jusque-là inédite, dans Topalov 2014 : ch. 7.
  • [25]
    « Meeting of the Executive Committee, March 13, 1926 », f. 133-137 (JRL, SSRC Records, Box 1, Folder 1).
  • [26]
    Qui eut lieu quelques années plus tard aux Presses de l’université de Chicago (Burgess 1931).
  • [27]
    « The Study of the Growth of the Local Communities of Chicago », Memorandum by Vivian Palmer, 18 janvier 18, 1929. To S. P. L. Breckinridge, E. W. Burgess, M. W. Jernegan, C. E. Merriam, T. W. Smith, L. D. White, f. 9 (JRL, Burgess Papers, Box 13, Folder 1).
  • [28]
    « The Study of the Growth of the Local Communities of Chicago », ibid., f. 9.
  • [29]
    « State of Projects in Sociology (Park, Faris, Burgess) », s.d. [vers novembre 1926, corrections manuscrites janvier 1927] (JRL, Burgess Papers, Box 13, Folder 1).
  • [30]
    Voir Wirth 1926, 1927 et 1928, Zorbaugh 1926a, 1926b et 1929, Reckless 1926 et 1933.
  • [31]
    Les notes de Redfield sur ce projet ont fait récemment l’objet d’une publication en espagnol (Redfield 2008). Je remercie Claudia Zamorano pour cette information.
  • [32]
    Voir Thrasher 1927, Mowrer 1927, Reckless 1926, Shaw 1929 et 1930, Cavan 1928, Cressey 1932, Landesco 1964.
  • [33]
    Voir Roper 1964.
  • [34]
    Les settlement houses étaient des institutions éducatives créées par des universités ou des églises dans les quartiers populaires des grandes villes. Elles comprenaient des résidents permanents, jeunes femmes ou hommes qui s’établissaient pour quelque temps au milieu des pauvres, et des bénévoles qui venaient aider pour telle ou telle activité. Un personnel professionnel prit peu à peu le relai, ce qui fait que ces institutions peuvent être décrites comme le berceau du social work.
  • [35]
    Chiffres établis sur les projets adoptés par le LCRC entre 1923 et 1926-1927.
  • [36]
    Les publications furent parfois à l’origine de simples rapports, résumés ou rendus publics longtemps après par le recueil de Burgess et Bogue (Thrasher 1964, Shaw et McKay 1964, Mowrer 1964, Landesco 1964).
  • [37]
    « What is meant by “basic data” ? » in « Basic Data on Chicago and Local Communities », n.d. [1925], f. 5 (JRL, Burgess Papers, Box 13, Folder 1).
  • [38]
    « Social Backgrounds of Chicago’s Local Communities », mimeo (JRL, Burgess Papers, Box 12, Folder 9). North Center était le district contigu au Near North Side, qu’avait étudié Zorbaugh.
  • [39]
    C. E. Merriam, « Informal Memorandum of Social Research : University of Chicago » 2 mai 1938 (cité in Bulmer 1980 : 107-108).
  • [40]
    C’est peut-être le sort commun des grands programmes consistant à accumuler des monographies dans la perspective d’une synthèse finale que celle-ci n’arrive jamais. Mais, aussi pertinent soit-il, ce n’est pas cet argument qui était opposé à Burgess.
  • [41]
    E. W. Burgess to D. Schlesinger, 12 avril 1930. Voir aussi W.G. Walling to D. Schlesinger, 4 avril 1930 et E. W. Burgess to E. Faris, 14 avril 1930. Le comité de soutien promettait un concours de 5 000 dollars (JRL, Burgess Papers, Box 12, Folder 9).
  • [42]
    « Crime », programme LCRC commencé dès 1926-1927 et « Family disorganization », programme SSRC commencé en 1930-1931.
  • [43]
    L. D. White, « Memorandum to the Committee on the Future Program of the Local Community Research Committee », 10 octobre 1927 (cité in Bulmer 1980 : 103).
  • [44]
    Leurs thèmes : taxation, public welfare, linguistics and anthropology, history of the local community (seul titre qui retienne la notion de « communauté »).
  • [45]
    Rapport White, janvier 1928.
  • [46]
    Dans le comité, il y avait en outre à ce moment là Abbott (service social), Burgess (sociologie), Jernegan (histoire) et Smith (philosophie).
  • [47]
    Sur cette interprétation de la « political machine » et de sa critique réformatrice, voir notamment Shefter 1976, Hammack 1982.
  • [48]
    Comme le dit très bien Hunter : « La réforme n’était pas seulement un élément du milieu culturel de Chicago que beaucoup de ces hommes des sciences sociales absorbaient en respirant le même air en ville ; elle faisait corps en réalité par des contacts sociaux et personnels et par une participation active à la vie politique du moment. » (Hunter 1980 : 221) Sur les engagements réformateurs des sociologues de Chicago, voir en particulier Carey 1975.
  • [49]
    Thomas Gieryn (1983) parle excellemment à ce propos de « travail d’édification de frontière ». Voir aussi Gaziano 1996.
  • [50]
    Voir le tableau de ces subventions in Bulmer 1980 : 83.
  • [51]
    Voir projets pour 1926-1927 : « State of Projects in Sociology (Park, Faris, Burgess) », s.d. [vers novembre 1926, corrections manuscrites janvier 1927] (JRL, Burgess Papers, Box 13, Folder 1), projets en juin 1927 : « Report on Expenditures and Results of Research, as of June 30 1927 », dactyl. carbone, 21 f. (JRL, SSRC Records, Box 8, Folder 4) et projets pour 1927-1928 : « Appropriation # 811 […] » et « Appropriation # 812 […] », in « Meeting of the Executive Committee, October 27, 1927 », f. 233-234 (JRL, SSRC Records, Box 1, Folder 1).
  • [52]
    Il n’est pas facile de mesurer la répartition des projets du LCRC entre les départements, car l’unité « projet » est très instable du fait des changements fréquents de dénomination d’une même opération de recherche. Un indicateur grossier peut toutefois être calculé en prenant pour unité chaque mention de projet dans les différents documents recensant les projets en cours du LCRC entre 1924 (Meeting of the Executive Committee, 21 mars 1924, f. 8, JRL, SSRC Records, Box 1, Folder 1) et 1927-1928 (loc. cit. n. 51). Sur 373 mentions de projets, 323 sont attribuables à un département ; elles se répartissent ainsi : sociologie 39 % (plus 2% en commun avec service social), économie politique 25 %, service social 19 %, science politique 12 %, histoire 2 %, philosophie 1 % (la proportion de l’anthropologie est négligeable, le département ayant été créé en 1929 seulement).
  • [53]
    Voir Merriam et Gosnell 1924, Gosnell 1927 et 1930.
  • [54]
    Voir White 1927, Beyle 1928, White 1929, Steadman 1930, Lepawsky 1932, Merriam, Parratt et Lepawsky 1933.
  • [55]
    Ce qui, plus tard, aboutira à Gosnell 1937.
  • [56]
    « Preface », in Merriam, Parratt et Lepawsky 1933, cité par Hunter 1980 : 222.
  • [57]
    Contrairement à une opinion répandue (voir, par exemple, Fairfield 1992).
  • [58]
    LCRC Meetings of the Executive Committee, 9 février 1926 et 22 octobre 1926 (JRL, SSRC Records, Box 1, Folder 1).
  • [59]
    Ogburn coordonna un vaste projet intitulé « Recent Social Trends in the United States », dont les résultats d’ensemble furent publiés in Ogburn 1933.
Français

Le Local Community Research Committee, mis en place à l’université de Chicago par une des fondations Rockefeller en 1923 et fermé en 1930, est sans doute un des premiers dispositifs de recherche sur projet conçu comme tel. Il fut mis en place autour d’un accord entre les professeurs et les autorités de l’université et de la fondation pour réformer la recherche en sciences sociales en vue de la rendre utile aux élites réformatrices de la « communauté ». C’est dans cette perspective que objets de recherche de Park, Burgess et leurs assistants furent choisis. Mais l’accord fondateur fut bientôt mis en cause : les problèmes étaient désormais définis à l’échelle de la nation et non plus de la ville et les méthodes devaient être fondées sur le chiffre et la mesure. La « communauté locale » cessait donc d’être un objet pertinent. Pour imposer cette nouvelle approche, la gestion du programme fut retirée aux départements et confiée à un petit comité qui concentra les ressources sur de nouveaux thèmes. Ainsi fut-il mis un terme à ce qui est communément regardé comme un « âge d’or » de la sociologie de Chicago.

Repères biographiques sur les personnages évoqués

  • Les personnes sont rangées par ordre de leur date de naissance, sauf lorsque celle-ci est inconnue ; les repères fournis ne concernent que les activités à l’université de Chicago ; la notion de « professeur » est entendue au sens large (assistant professor aussi bien que full professor).
  • 1/ Professeurs et autorités

    • Charles R. Henderson (1848-1915) – professeur de sociologie (1892-1915).
    • Harry P. Judson (1849-1927) – chef (head) du département de science politique (1894-1906), président de l’université de Chicago (1907-1923).
    • J. Laurence Laughlin (1850-1933) – chef du département d’économie politique (political economy) (1892-1916).
    • Albion W. Small (1854-1926) – chef du département de sociologie (1892-1926).
    • Jane Addams (1860-1935) – fondatrice de Hull House (1889).
    • John Paul Goode (1862-1932) – professeur de géographie (1903-).
    • James H. Tufts (1862-1942) – chef du département de philosophie (1906-1930), vice-président de l’université de Chicago (1923-1925).
    • George H. Mead (1863-1931) – professeur au département de philosophie (1894-1931), « un des fondateurs de la psychologie sociale ».
    • Robert E. Park (1864-1944) – chargé de cours (lecturer) (1914-1923), puis professeur de sociologie (1923-1933).
    • George E. Vincent (1864-1941) – professeur de sociologie (1904-1911), doyen des facultés d’art, littérature et science (1907-1911), président de l’université du Minnesota (1911-1917), président de la Rockefeller Foundation (1917-1929).
    • Harry A. Millis (1873-1948) – professeur d’économie politique (1916-1938), secrétaire du LCRC (1924-1926), chef du département de science économique (1928-).
    • Ellsworth Faris (1874-1953) – professeur de sociologie (1919-), chef du département de sociologie (1925-1939).
    • Charles E. Merriam (1874-1953) – professeur de science politique (1905-1940), chef du département de science politique (1923-1940).
    • Frederic C. Woodward (1874-1954) – professeur de droit (1916-1926), vice-président de l’université (1926-1936), acting president (1928-1929).
    • Edith Abbott (1876-1957) – doyen (dean) de la School of Social Service Administration de l’université de Chicago (1924-1942), membre du LCRC.
    • Max Mason (1877-1961) – professeur de physique mathématique à l’université du Wisconsin (1909-1925), président de l’université de Chicago (1925-1929), président de la Rockefeller Foundation (1929-1936).
    • Leon C. Marshall (1879-1966) – doyen de la School of Commerce and Administration (1909-1924).
    • Edward A. Duddy (1884-1966) – professeur de business management.
    • Ernest W. Burgess (1886-1966) – professeur de sociologie (1916-1952), chef du département (1946-1952).
    • William F. Ogburn (1886-1959) – professeur de sociologie (1927-1951), directeur de la recherche du President [Hoover]’s Committee on Social Trends (1930-1933).
    • Louis L. Thurstone (1887-1955) – professeur de psychologie (1924-1952), « pionnier de la psychométrie ».
    • Thomas V. Smith (1890-1964) – professeur de philosophie (1923-1948), membre du LCRC.
    • Quincy Wright (1890-1970) – professeur de science politique (1923-1956).
    • Leonard D. White (1891-1958) – professeur d’administration publique, secrétaire exécutif du LCRC (1926-1930).
    • Henry Schultz (1893-1938) – professeur de science économique (economics) (1926-1938), « un des fondateurs de l’économétrie ».
    • Beardsley Ruml (1894-1960) – directeur du Laura Spelman Rockefeller Memorial (1922-1929), doyen de la Division of Social Sciences (1931-1933), professeur d’éducation (1931-1933).
    • Simeon E. Leland (1897-1972) – professeur de science économique (economics) (1928-1946).
    • Robert Hutchins (1899-1977) – doyen (dean) de la Law School de l’université Yale (1928), président de l’université de Chicago (1929-1951).
    • Morris Janowitz (1919-1988) – chef du département de sociologie (1967-1972).
  • 2/ Étudiants et assistants de recherche

    • On indique le département où l’étudiant est inscrit et les diplômes obtenus ; lorsque la personne est mentionnée dans les archives comme research assistant, on note AR et la première date signalée.
    • Nels Anderson (1889-1986) – sociologie (M.A. 1925), AR 1925.
    • Green, Loraine R. (1890-1996) – sociologie (M.A. 1919), AR 1924.
    • John Landesco (1890-1954) – sociologie (pas de diplôme), AR 1925.
    • Herman C. Beyle (1892-) – science politique, AR 1925.
    • Frederic M. Thrasher (1892-1962) – sociologie (M.A. 1918, Ph.D. 1926), AR 1923.
    • Ernest R. Mowrer (1895-1984) – sociologie (M.A. 1921, Ph.D. 1924), AR 1923.
    • Marion W. Roper (1896-) – sociologie (M.A. 1924, Ph.D. 1935), AR 1924.
    • Ruth Schonle Cavan (1896-1993) – sociologie (Ph.D. 1926).
    • Harold F. Gosnell (1896-1997) – science politique, AR 1925.
    • Clifford R. Shaw (1896-1957) – sociologie (pas de diplôme), AR 1926.
    • Harvey W. Zorbaugh (1896-1965) – sociologie (pas de diplôme), AR 1923.
    • Everett C. Hughes (1897-1983) – sociologie (Ph.D. 1928), professeur de sociologie (1938-1961), chef du département (1952-1956).
    • Ireland, William Rutheford P. (1897-) – sociologie, AR 1926.
    • Robert Redfield (1897-1958) – sociologie (Ph.D. 1928), AR 1924, professeur d’anthropologie (1928-1958).
    • Louis Wirth (1897-1952) – sociologie (M.A. 1925, Ph.D. 1926), AR 1924, professeur de sociologie (1931-1952).
    • Walter C. Reckless (1899-1988) – sociologie (Ph.D. 1925), AR 1924.
    • Paul G. Cressey (1899-1969) – sociologie (M.A. 1929, Ph.D. 1930), AR 1925.
    • Murray H. Leiffer (1902-1992) – sociologie (M.A. 1928), AR 1925.
    • Robert E. L. Faris (1907-1998) – sociologie (M.A. 1930, Ph.D. 1931), fils de Ellsworth Faris.
    • Philip M. Hauser (1909-1994) – sociologie (M.A. 1933, Ph.D. 1938), professeur de sociologie (1947-1977), directeur du Population Research Center (1947-1979), chef du département de sociologie (1956-1965).
    • Helen I. Clarke – service social (M.A. 1927), AR 1926.
    • Paul R. Conway – sociologie (M.A. 1926), RA 1925.
    • Vivien M. Palmer – sociologie (Ph.D. 1932), AR 1924, coordinatrice du programme (program coordinator) « Local Communities of Chicago ».
    • Daniel C. Russell – sociologie (M.A. 1931), AR 1925.
    • Robert F. Steadman – science politique, AR 1927.
    • Roy C. Tibbitts – sociologie, AR 1926.
  • Sources

    • Beyle, Herman C. 1928. Governmental Reporting in Chicago. Chicago, University of Chicago Press [ci-après UCP].
    • En ligneBurgess, Ernest W. 1916. « The Social Survey : A Field for Constructive Service by Departments of Sociology », American Journal of Sociology, vol. 21, janvier : 492-500.
    • Burgess, Ernest W. 1924a. « The Growth of the City : Introduction to a Research Project », in American Sociological Society, Papers and Proceedings. Eighteenth Annual Meeting […] Held at Washington, D.C., December 26-29, 1923. Chicago, UCP : 85-97.
    • Burgess, Ernest W. 1924b. « Can Neighborhood Work Have a Scientific Basis ? », Proceedings of the National Conference of Social Work [ci-après : NCSW] at the Fifty-First Annual Session Held in Toronto, Ontario, June 25-July 2, 1924. Chicago, UCP : 406-411.
    • Burgess, Ernest W. 1925. « Can Neighborhood Work Have a Scientific Basis ? », in Robert E. Park, Ernest W. Burgess et Roderick D. McKenzie. The City. Chicago, UCP : 142-155.
    • Burgess, Ernest W. 1926. « The Natural Area as the Unit of Social Work in the Large City », in Proceedings of the NCSW at the Fifty-Third Annual Session Held in Cleveland, Ohio, May 26-June 2, 1926. Chicago, UCP : 504-510.
    • Burgess, Ernest W. 1928a. « Family Tradition and Personality Development », Proceedings of the NCSW at the Fifty-Fifth Annual Session Held in Memphis, Tennessee, May 2-3, 1928. Chicago, UCP : 322-330.
    • Burgess, Ernest W. 1928b. « The Use of Census Data in Local Community Studies », Proceedings of the NCSW at the Fifty-Fifth Annual Session Held in Memphis, Tennessee, May 2-3, 1928. Chicago, UCP : 634-637.
    • Burgess, Ernest W. 1931. Census Data of the City of Chicago. Chicago, UCP.
    • Burgess, Ernest W. et Donald J. Bogue (éd.). 1964. Contributions to Urban Sociology. Chicago, UCP.
    • Cavan, Ruth S. 1928. Suicide. Chicago, UCP (Sociological Series).
    • Cavan, Ruth S. 1983. « The Chicago School of Sociology, 1918-1933 », Urban Life, vol. 11, janvier : 407-420.
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Christian Topalov
Christian Topalov, sociologue et membre du Centre Maurice Halbwachs, enseigne à l’École des hautes études en sciences sociales. Il a récemment publié Les Aventures des mots de la ville (en collaboration, Robert Laffont, 2010) et une édition critique des Écrits d’Amérique de Maurice Halbwachs (Éditions de l’EHESS, 2012). Histoires d’enquêtes. Londres, Paris, Chicago 1880-1930 est sous presse (Classiques Garnier).
Mis en ligne sur Cairn.info le 10/06/2014
https://doi.org/10.3917/gen.094.0081
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