En prenant pour terrain d’enquête les recherches interventionnelles en santé des populations (RISP), un domaine de recherche émergeant dans le secteur de la santé en France, cette contribution se propose de considérer divers jeux d’acteurs et d’arguments, de pouvoir et de savoir qui accompagnent son développement. Nous montrons que ce nouvel espace intermédiaire, entre l’expérimentalisme et les sciences humaines et sociales, œuvre à une pluralisation des expertises en santé pour une meilleure prise en compte de la singularité des contextes des interventions, de la transférabilité des connaissances. Il met également en avant la volonté de renforcer les collaborations entre chercheurs et « acteurs de terrain ». Nous soulignons toutefois combien ces deux grands principes donnent lieu à des appréhensions et à des positionnements différents rendant compte d’approches différenciées des recherches interventionnelles en France. L’enquête se base sur trois grands types de données : des observations ethnographiques de RISP ainsi que des congrès et réunions de groupes d’experts produisant des réflexions sur ce type de recherches, des analyses d’écrits (articles, rapports, lettres d’information…) sur les RISP et des entretiens (14) avec les principaux experts du domaine.
Article
Considérant les jeux d’acteurs et d’arguments autour de la construction d’un nouvel espace intermédiaire promoteur d’expertises plurielles en santé, la recherche interventionnelle en santé des populations (RISP), cet article rend compte des déclarations de ses promoteurs tout en analysant les modes de coordination concrètement à l’œuvre dans les pratiques de recherche. Promu récemment par l’État en lien avec le secteur de l’éducation et de la promotion de la santé, cet espace intermédiaire d’expertise se constitue entre l’expérimentalisme médical et les sciences humaines et sociales de la santé, et aspire à alimenter l’action publique sanitaire, appréhendée bien au-delà du seul soin de patient·e·s malades, par des préconisations opérationnelles.
Le secteur des RISP existe depuis un peu moins d’une dizaine d’années. Il est soutenu financièrement, via différents appels à projets, par diverses institutions (AVIESAN [Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé], INCA [Institut national du cancer], IRESP [Institut de recherche en santé publique], INSERM [Institut national de la santé et de la recherche médicale], ANRS [Agence nationale de recherche sur le sida-HIV et les hépatites] notamment). Il a également donné lieu à une « action coordonnée » de l’IRESP, l’action coordonnée pour la recherche interventionnelle (ACRISP), également soutenue par l’INCA par la suite. Depuis 2010, ces deux agences, en lien également avec l’INSERM, organisent des colloques scientifiques visant à promouvoir ce domaine de la recherche interventionnelle…
Résumé
Plan
- Introduction
- L’émergence progressive du domaine des RISP en France comme espace intermédiaire entre les essais expérimentaux et les sciences humaines et sociales
- Étudier les jeux d’acteurs et d’arguments, de pouvoir et de savoir autour de la construction d’un nouvel espace intermédiaire promoteur d’expertises plurielles en santé
- Considérer les effets d’affichage et les déclarations tout en observant les modes de coordination à l’œuvre pratiquement dans des RISP
- Une vision partagée de la nécessaire prise en compte du contexte des interventions et d’une meilleure transférabilité des résultats de la recherche vers l’action : entre ouverture à la pluralité, à l’hybridation et tentation totalisante
- Une volonté commune de renforcer les collaborations entre chercheurs et « acteurs de terrain » : un pas plus ou moins grand vers les enjeux participatifs en lien avec diverses visions du transfert de connaissances
- Conclusion
Auteur
Sur un sujet proche
- Mis en ligne sur Cairn.info le 11/01/2021
- https://doi.org/10.3917/rfas.204.0053

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