CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Alors que l’année 2019 n’est pas encore achevée, le chiffre de cent trente féminicides (entendu comme des meurtres de femmes dans le cadre de violences conjugales) perpétrés dans l’année est avancé par les collectifs féministes. Plus de trente ans après l’ouverture des premiers centres d’accueil pour les femmes victimes de violences (Herman, 2016), le travail social féministe mis en œuvre dans ces structures ferait-il l’aveu de son impuissance à éradiquer ce phénomène ? La permanence d’un nombre élevé de femmes victimes d’homicides conjugaux charrie des questionnements touchant aux politiques publiques de lutte contre ces violences, au sujet des rapports de pouvoir au sein des couples, et à celui de l’efficacité des modalités d’intervention auprès des femmes victimes.
S’inscrivant à la croisée du travail social et du militantisme féministe (Delage, 2017), les associations féministes accueillant des femmes victimes de violences constituent un objet fécond pour interroger la question du pouvoir d’agir du travail social et, en creux, pour saisir les espaces de son impuissance. À partir de l’analyse du travail d’accompagnement des femmes mis en place par l’Association Femmes Indépendantes (AFI), cet article propose d’interroger le potentiel transformateur de l’accompagnement au sein des associations féministes, notamment le processus de développement du pouvoir d’agir des femmes accueillies. Il s’agira de comprendre comment le travail social mis en œuvre dans ces associations féministes entend subvertir les rapports sociaux de sexe, en impulsant chez les personnes accompagnées une démarche d’…

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S’appuyant sur une ethnographie de trois mois menée au sein d’une association féministe gérant un service d’accueil de femmes victimes de violences, cet article propose d’interroger le potentiel transformateur du travail social féministe mis en œuvre dans cette association. Il s’intéresse aux processus d’empowerment et de conscientisation que les professionnelles de l’association tentent d’impulser chez les femmes qu’elles accueillent, ces dernières étant le plus souvent éloignées des idées et du militantisme féministe. Une première partie présente le travail social féministe, en s’attachant à mettre en lumière son inscription dans le travail social comme son opposition à certaines de ses pratiques. Les deux parties suivantes, plus ethnographiques, donnent à voir le travail de conscientisation en direction des femmes accueillies, et les effets de celui-ci en termes de pouvoir d’agir individuel. Il s’agit de montrer comment certaines valeurs du travail social féministe peuvent entrer en contradiction avec la mise en œuvre d’un réel travail de mobilisation des femmes accueillies, qui nécessiterait pour les professionnelles d’adopter une posture « d’avant-garde » qu’elles rejettent.

Auréline Cardoso
Docteure en sociologie au CERTOP (université de Toulouse).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 10/08/2020
https://doi.org/10.3917/rfas.202.0073
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