Fondé sur une enquête de terrain au long cours, cet article étudie la distribution et la perception de l’aide sociale, et plus particulièrement du revenu de solidarité active, en partant à la fois du point de vue de travailleuses sociales et d’allocataires élevant seules leur(s) enfant(s). Les travailleuses sont amenées à poser des conditions à l’aide sociale de manière différente suivant le département au sein duquel elles exercent et suivant leur poste de travail particulier. Ces conditions leur servent cependant à négocier une même difficulté, à savoir celle d’impliquer les allocataires dans les relations d’aide. Les allocataires, quant à elles, peuvent très mal vivre ces conditions, qui contredisent parfois leurs stratégies quotidiennes et leurs aspirations sociales. L’article propose d’envisager cette situation à l’aune de l’intersectionnalité, une notion qui invite à rendre compte des conséquences inattendues de la combinaison des rapports sociaux.
Article
« L’activation » des dépenses d’aide sociale et de chômage ainsi que des individus qui les perçoivent se traduit par un conditionnement des aides plus strictement appliqué et plus strictement orienté vers le retour à l’emploi. La généralisation du revenu de solidarité active (RSA) en juin 2009 marque en France une étape dans cette direction, au même titre que la décentralisation des minima sociaux qui avait été décidée en amont (encadré 1). Différents travaux montrent que ces évolutions ne sont pas neutres socialement et qu’elles tendent, au contraire, à reproduire des inégalités. En se basant sur les textes de loi, Hélène Périvier (2010) et Anne Eydoux (2012) ont ainsi souligné que, du fait de la contradiction entre la conception familiale du RSA et l’objectif de remise à l’emploi, ce dernier risquait de ne pas concerner les femmes en couple ; comme si l’alternative qui se présentait aux femmes allocataires, vis-à-vis de l’activation du dispositif, était soit de se marier, soit de trouver un emploi. En se basant sur une enquête auprès de travailleurs et de travailleuses d’une structure d’insertion accueillant des allocataires du RSA, Cécile Talbot (2017) montre que les exigences de l’activation ne pèsent pas de la même manière sur les hommes et sur les femmes, étant donné les assignations qui jouent déjà sur le marché de l’emploi et dans la sphère domestique. Enfin, confirmant ces analyses, des données récentes (DREES, 2017) permettent de mesurer, à l’échelle nationale, à quel point les conditions posées au versement du RSA reconduisent l’ordre du genre…
Résumé
Plan
Auteur
Sur un sujet proche
- Mis en ligne sur Cairn.info le 10/08/2020
- https://doi.org/10.3917/rfas.202.0227

Veuillez patienter...