En France, dans un contexte où l’obtention d’un diplôme est nécessaire pour accéder à un emploi qualifié et où les injonctions à l’entraide intergénérationnelle sont très fortes, les études font l’objet d’une mobilisation parentale importante, notamment sur le plan financier. À partir d’une enquête par entretiens auprès de 50 enquêtés – des étudiants et leurs parents ayant répondu à l’enquête nationale sur les ressources des jeunes –, l’article analyse comment se décline cette aide parentale selon les milieux sociaux, comment la participation de l’étudiant au financement de ses études est conçue et quels sens sont donnés aux études et à l’emploi étudiant. À travers quatre portraits de familles socialement diversifiées, il tente ainsi de replacer au sein de l’économie globale des rapports familiaux les études et les activités rémunérées des enfants et de les éclairer par la trajectoire de chacun des parents, leurs rapports au travail et les valeurs transmises à leurs enfants. Les familles adhèrent donc de manière très inégale en fonction de leurs trajectoires et de leurs ressources à la vision, promue par certains discours publics, du travail étudiant comme solution au financement des études et à l’insertion professionnelle des diplômés.
Article
Les débats médiatiques sur la « précarité étudiante », s’ils mettent en lumière des situations critiques particulièrement préoccupantes, ne doivent pas faire oublier le soutien parental dont bénéficient la plupart des étudiants et à défaut duquel de nombreux jeunes d’origine populaire n’ont pas accès à l’enseignement supérieur. De fait, comme le montre l’enquête nationale sur les ressources des jeunes (ENRJ) menée en 2014 par la DREES et l’INSEE, l’aide parentale a, en France, une place essentielle au sein des différentes sources de financement des années d’études (aides publiques, prêts, etc.). De même, parmi les étudiants rencontrés dans le cadre de la post-enquête ETUFACT (voir encadré), l’aide matérielle octroyée par les parents, quelle que soit sa forme, est généralisée, ce qui montre à quel point prédominent à la fois la norme des « solidarités familiales », qui impose aux parents de financer au moins une partie des études de leurs enfants, et celle de l’allongement des études, qui justifie de nombreux sacrifices. Normes qui ont d’ailleurs pu conduire les rares familles où l’aide parentale est inexistante à s’auto-exclure de la post-enquête.
Mais, derrière cette apparente homogénéité pouvant faire croire à un groupe étudiant unifié, comment se décline cette mobilisation parentale selon les milieux sociaux et comment la participation de l’étudiant au financement de ses études est-elle conçue ? Si l’enquête par questionnaire permet d’appréhender de manière détaillée leur budget à la date d’enquête, ainsi que les échanges matériels intrafamiliaux, en revanche, des entretiens auprès des étudiants et de leurs parents sont nécessaires pour saisir leur cheminement avant et après l’ENRJ, de même que la trajectoire de chacun des parents, leurs rapports au travail et les valeurs transmises à leurs enfants…
Résumé
Plan
- Introduction
- Continuer ses études dans une famille monoparentale à faibles ressources : entre sacrifices de la mère, activités rémunérées du fils et aides publiques
- Une famille des fractions stables des classes populaires : un assemblage de bourses, d’aide parentale et de revenus du travail mis au service de l’ascension sociale par l’école
- La valorisation du travail en cours d’études comme une source d’argent de poche et un moyen d’apprentissage de la « vie »
- Des jobs d’été qui font « joli sur le CV » et permettent de « se payer rapidement des vacances » : le temps des études, « âge pour s’ouvrir » et âge sans contraintes
- Conclusion
Auteurs
Cité par
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 07/08/2019
- https://doi.org/10.3917/rfas.192.0097

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