La crise économique a accru les difficultés économiques et sociales des jeunes, et plus particulièrement de ceux qui ne sont ni en études, ni en emploi, ni en formation (Neets). Afin de prévenir et accompagner ces situations de vulnérabilité, plusieurs réformes ont été mises en place ces dernières années et sont également projetées dans de nombreux rapports. Dans cet article, nous présentons un état des lieux problématisé de ces propositions et réformes à la lumière de l’analyse comparée des régimes d’État-providence et de leurs effets sur les inégalités entre jeunes. Dans un premier temps, nous présentons une typologie des régimes d’accompagnement des jeunes vulnérables en Europe, tout en soulignant les obstacles au changement de l’action publique. Dans un second temps, nous mobilisons ce cadre théorique afin d’identifier trois « trajectoires de réformes » renvoyant à trois stratégies distinctes de lutte contre les inégalités : une trajectoire d’actualisation du régime existant visant d’abord à lutter contre la pauvreté des jeunes ; une trajectoire de dualisation des politiques de jeunesse se focalisant sur une redistribution monétaire verticale entre les familles ; et une trajectoire de changement de régime afin de promouvoir un droit à la formation tout au long de la vie dans la perspective d’une stratégie d’investissement social.
Article
L’aide publique en faveur des jeunes sans emploi sortis du système éducatif (appelés aussi « Neets » pour « Not in Employment, Education or Training ») s’est imposée suite à la crise économique comme un nouvel enjeu pour l’action publique, dans un souci plus large de lutte contre les inégalités. Cette priorité affichée s’insère très différemment dans les États européens selon leurs spécificités institutionnelles. En France, se pose la question de la cohérence du dispositif de Garantie jeunes, récemment créé dans ce sens, avec un système global avant tout fondé sur le principe de l’aide aux familles : on se trouve devant une tension entre individualisation et familialisation de l’action publique en direction des jeunes, sans que la manière de produire les effets les plus souhaitables sur les inégalités soit claire, entre les différents objectifs de lutte contre la pauvreté, de redistribution entre les familles et d’accès à l’éducation. Comment donc interpréter les réformes à l’œuvre quant à la cohérence de la politique de jeunesse en France, à la lumière des autres exemples européens, et au regard de ses effets sur les inégalités entre les jeunes ? Pour répondre à cette question, cet article cherche à mettre au jour trois « trajectoires de réformes » potentielles de la politique de jeunesse en France. Une trajectoire de réformes est « constituée d’une succession de séquences de réformes sur la longue durée, chacune ayant des conséquences sur les suivantes, et ayant un effet de “transformation” sur le système des politiques publiques institutionnalisées faisant l’objet de réformes » (Bezes et Palier, 2018)…
Résumé
Plan
- Introduction
- Les modèles de politiques de jeunesse en Europe, les freins à leur changement et l’enjeu de l’égalité intragénérationnelle
- Trois trajectoires de réformes pour la politique de jeunesse en France
- Amélioration des aides ciblées sur les jeunes les plus vulnérables en vue d’actualiser la logique de familialisation (1re trajectoire)
- Généralisation de la Garantie jeunes ou d’un RSA jeunes dans une logique de dualisation des politiques de jeunesse (2e trajectoire)
- Instauration d’un droit à la formation tout au long de la vie dans la perspective d’un changement de régime (3e trajectoire)
- Conclusion
Auteurs
Cité par
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 07/08/2019
- https://doi.org/10.3917/rfas.192.0053

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