Le rôle des aidants profanes en santé mentale s’est considérablement accru suite à la désinstitutionnalisation, la famille et les proches des patients se voyant alors assigner un rôle désormais central, celui d’aidants dits « naturels ». Malgré un certain nombre d’aides sociales, destinées d’abord au patient, mais aussi à ses aidants, les familles déclarent en bénéficier très peu et se sentir relativement seules face à la gestion quotidienne de la maladie. Outre cet enrôlement forcé, les familles et les proches font parfois le choix d’apporter leur aide bénévolement, dans le but de soutenir d’autres familles et des usagers confrontés à une situation similaire à la leur. Ces actions d’entraide s’inscrivent dans la mouvance des philosophies du self-help, sur la base de laquelle les usagers de la psychiatrie eux-mêmes ont fait émerger la notion de « pairs aidants », ces derniers venant contribuer au rétablissement d’autres usagers dans le cadre de programmes d’entraide informels ou structurés. Certains de ces programmes ont récemment promu une fonction d’aidant professionnalisée et rémunérée, dont la reconnaissance se fonderait sur un savoir expérientiel, à la limite entre profane et professionnel. Cette innovation a provoqué de vifs débats et porte de nombreux enjeux. Quoi qu’il en soit, le dynamisme des associations d’usagers et de familles devrait pouvoir s’appuyer sur la volonté des politiques publiques de créer les conditions du développement et du soutien des aidants profanes en santé mentale.
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Dans les suites de la Seconde Guerre mondiale s’est mise en place, en France et dans plusieurs autres pays, une politique visant à éviter l’hospitalisation des patients en psychiatrie et à les soigner au plus près de leur lieu de vie dans des structures extrahospitalières. Ce mouvement appelé « désinstitutionnalisation » s’est traduit par la fermeture de nombreux lits, qui devait être compensée par des « alternatives » qui, encore aujourd’hui, font souvent défaut. De ce fait, les aidants profanes, ou non-professionnels, ont assumé un rôle d’une importance grandissante et, alors même que les familles et les proches avaient pu être considérés comme pathogènes pour les personnes souffrant d’une pathologie psychiatrique chronique (Carling, 1995), ce sont eux qui, dans les faits, accompagnent au quotidien les patients : en Europe, on dénombre environ 10 millions d’aidants familiaux soutenant un proche atteint d’un trouble psychique sévère qui s’estiment insuffisamment aidés (EUFAMI, 2014). En France, d’après une enquête récente réalisée par l’UNAFAM, l’accompagnement quotidien des malades ou « handicapés psychiques » est effectué dans les trois quarts des cas par la famille ; un tiers des malades vivent dans leur famille ou, s’ils vivent de façon autonome, les frais de logement sont souvent assumés par leur famille ; enfin, lors d’une crise aiguë, dans un cas sur cinq c’est la famille qui assure la prise en charge en urgence (UNAFAM, 2016). Le positionnement des aidants profanes familiaux, qui s’estiment souvent contraints, peut aussi s’inscrire dans un mouvement d’entraide, qui s’exprime dans le cadre d’associations de défense des droits des usagers et des familles, ce qui les amène à utiliser leur propre expérience pour aider d’autres parents dans la même situation…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 14/05/2019
- https://doi.org/10.3917/rfas.191.0055

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