L’article examine l’émergence d’un marché de l’assurance santé complémentaire en France au cours des vingt dernières années. Nous y développons l’idée que, loin d’avoir suivi une trajectoire univoque, cette évolution résulte de la rencontre de plusieurs séries de réformes partiellement indépendantes : les directives européennes « assurances » et « Solvabilité 2 » ; le développement des réseaux de soins, encouragé par les pouvoirs publics ; et plus récemment, l’obligation faite aux entreprises du secteur privé de fournir une couverture complémentaire à leurs salariés. Si chaque réforme concourt au renforcement d’un marché du risque santé, nous insistons sur le fait qu’elles répondent à des logiques et mobilisent des acteurs spécifiques. Dans ce contexte, l’article montre les tensions induites par cette pluralité de « mises en marché », qui s’accompagne d’une complexification de la régulation de l’assurance santé complémentaire dans le système français.
Article
Dès sa création, l’Assurance maladie a laissé une place à la couverture complémentaire des soins sur une base volontaire. Aujourd’hui, différents types d’opérateurs prennent en charge la part des dépenses de santé non remboursée par les organismes gérant le régime obligatoire (RDSS, 2017). Jusqu’aux années 1980, les mutuelles furent les principaux acteurs présents sur ce segment. Personnes morales de droit privé à but non lucratif, elles sont dirigées par des conseils d’administration élus par leurs adhérents. Préexistantes à la création de la Sécurité sociale, leur position dans le système fut sauvegardée par la loi Morice de 1947 qui leur garantit notamment la prise en charge du ticket modérateur. Un deuxième groupe est constitué par des sociétés commerciales d’assurance. Par contraste avec les mutuelles, elles prennent la forme de sociétés par actions ayant un objectif de bénéfice. On trouve enfin des institutions, créées en 1945 et régies par le Code de la sécurité sociale, qui interviennent principalement dans le domaine de la prévoyance collective des salariés (institutions de prévoyance, ci-après IP). Fonctionnant sur un mode paritaire au niveau des entreprises ou des branches, elles gèrent des régimes pouvant englober le risque santé mais qui portent plus classiquement sur l’invalidité et l’incapacité de travail (Bras et Tabuteau, 2012).
En dépit d’origines et de modes de gouvernance nettement différenciés, l’expression « d’assurance maladie complémentaire » (AMC) s’est imposée pour désigner de façon uniforme l’activité de ces entités…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 10/01/2019
- https://doi.org/10.3917/rfas.184.0259

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