Partant du constat que les représentations d’une maladie influent sur la prise en charge que les médecins en proposent, une équipe de recherche multidisciplinaire s’est intéressée aux représentations et à la prise en charge de la dépression chronique par les médecins généralistes, au moyen de focus groups. Dans un premier temps, nous présentons les types de patients qui sont décrits par les médecins généralistes lorsqu’est évoquée la dépression chronique. Dans un second temps, nous nous intéressons aux savoir-faire et aux savoir-être qui sont déployés par les généralistes pour faire face à ces situations complexes. Enfin, nous interrogeons la place qu’occupent les antidépresseurs dans la prise en charge de cette maladie. Il apparaît que la prise en charge proposée par les généralistes relève davantage d’un cadre conceptuel de médecine générale – qui pourrait s’appliquer à différents troubles psychiques ou psychosomatiques – que d’une compréhension spécifique de la dépression chronique.
Article
Les médecins généralistes (ci-après MG) sont souvent en première ligne pour les problèmes de santé mentale. En France, deux tiers des MG de ville sont confrontés chaque semaine à des patients présentant un état dépressif (Dumesnil et al., 2012). Les MG suisses estiment à 30 % la prévalence des troubles dépressifs dans leurs consultations (Baer et al., 2013) et, selon le monitorage de la santé psychique en Suisse, « ce sont en particulier la dépression, l’angoisse et la douleur qui entraînent une sollicitation accrue des prestations de médecine générale » (Schuler et al., 2016). Les études internationales montrent qu’environ un patient sur sept qui consulte en médecine générale souffre de dépression majeure (Herrman et al., 2002) et que 20 à 30 % de ces dernières évoluent en dépression chronique (Jobst et al., 2016). Une récente étude dans une population urbaine suisse a estimé à 15 % la prévalence de la dépression chronique au cours de la vie. Les sujets souffrant de dépression chronique présentent une atteinte sévère et vont davantage chercher un traitement par rapport aux autres troubles dépressifs (Vandeleur et al., 2017). De plus, une proportion élevée de personnes ayant des « symptômes dépressifs sévères (73 %) souffrent également d’importants troubles physiques » (Schuler et al., 2016), ce qui explique en partie le recours aux MG – plutôt qu’à un psychiatre ou psychothérapeute – mais aussi la complexité de la prise en charge de ces patients.
La médecine générale est caractérisée par le haut degré d’incertitude avec laquelle elle doit composer (Bloy, 2008), ainsi que par l’importance du décalage entre le savoir biomédical transmis aux MG pendant leur formation et la complexité de la pratique clinique à laquelle ils sont confrontés (Membrado, 1993)…
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L’ordre de présentation a été défini par les auteurs.
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 10/01/2019
- https://doi.org/10.3917/rfas.184.0239

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