Cet article a pour objet d’analyser les différents sens de la notion polysémique d’universalisation, utilisée fréquemment dans le champ de la protection sociale ou du droit social.
La spécificité de ce domaine rend délicate la simple transposition de l’universalité associée aux droits individuels.
De même, l’emploi de ce terme pour désigner l’extension de l’objet ou du périmètre d’un droit social que l’on généralise n’est légitime qu’à certaines conditions, que l’on s’efforcera de préciser.
Mais l’évolution récente la plus significative se mesure lorsqu’on observe la substitution, par exemple dans la problématique du revenu universel, d’un référent centré sur la personne à un référent lié traditionnellement au travail, à la condition sociale ou familiale.
À travers la notion d’« universalisation » s’exprime alors l’exigence d’inconditionnalité que l’on revendique pour un droit social pris dans sa dimension symbolique.
Article
Les débats récents sur le revenu universel ont fait apparaître la double acception que peut revêtir le terme « universalisation ».
Pour le Mouvement français pour le revenu de base, il s’agit d’un « droit inaliénable, inconditionnel, versé de la naissance à la mort, indépendamment de la situation familiale et financière du bénéficiaire ». Cette conception se situe dans la tradition cosmopolitiste de Thomas Paine : la civilisation ayant brisé la propriété naturelle sur la terre qui appartenait originellement à tous, il est normal d’offrir à chacun un dédommagement lui permettant de subvenir à ses besoins vitaux.
Pour les libéraux (Milton Friedman) le revenu universel procède au contraire d’une extension ou d’une « fusion des minima sociaux » correspondant à une rationalisation du système social, chacun gérant ce revenu de façon autonome : l’universalisation est ici une « généralisation ».
Il y a donc polysémie de ce terme dont l’analyse peut mettre en évidence les implicites relevant de différents champs, logique, épistémologique ou philosophique. On tentera ici d’identifier quelques-uns de ces éléments et de dégager les enjeux, non négligeables, de tel choix sémantique sur la problématique des droits sociaux.
Lorsque la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen énonce l’universalité des droits (« les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit »), elle se fonde sur une norme a priori inconditionnelle, une nécessité que ne produit pas l’expérience (laquelle ne donne jamais, pour les phénomènes humains, d’universalité véritable) : elle ne généralise pas une situation observée mais « déclare », définit l’humanité universelle comme exigence qui s’étend en droit à l’ensemble des hommes, à l’humanité comme totalité…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 10/01/2019
- https://doi.org/10.3917/rfas.184.0119

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