Depuis la perspective d’une association de patients, cet article analyse l’histoire des mobilisations des associations de lutte contre le VIH pour l’accès aux innovations thérapeutiques en France. L’article propose une étude critique et chronologique de l’évolution de cet activisme et des relations entre associations et industrie pharmaceutique. Des années 1980 aux années 2000, l’impératif de l’accès précoce à des traitements de qualité l’emporte sur la préoccupation du prix. Celle-ci se pose alors avant tout au Sud où les prix constituent une barrière à l’accès aux traitements. En 2014, l’arrivée d’un nouveau traitement contre l’hépatite C propulse la question des prix des médicaments au Nord. Les associations se mobilisent à partir de l’expertise développée au Sud en matière de propriété intellectuelle. Ce combat contre les prix comme barrière à l’accès transforme les mobilisations des associations, les incite à investir de nouveaux champs d’expertise et à revendiquer une meilleure représentation au sein de certaines instances.
Article
Depuis le début des années 2000, les personnes atteintes par l’hépatite C, parmi lesquelles de nombreux usagers de drogues et de personnes co-infectées par le VIH, scrutaient l’arrivée d’un traitement mieux toléré et plus efficace que l’offre disponible. Les personnes touchées par cette maladie du foie disposaient d’un traitement d’une durée d’un an, aux lourds effets secondaires et qui ne menait pas toujours à la guérison. En 2014, une nouvelle molécule, le sofosbuvir, commercialisée sous le nom de Solvadi®, produite par la firme Gilead, arrive sur le marché français et, avec elle, l’espoir de guérison en trois mois de traitement pour les près de 200 000 personnes atteintes d’une maladie chronique du foie, fibrose ou cirrhose hépatique liée au virus (Pioche, Pelat, Larsen et al., 2016). Cependant, l’enthousiasme est de courte durée : à l’issue des négociations entre l’État et l’industriel, le montant public de la cure de trois mois est établi à 41 000 euros par patient. À ce prix, plus de 13 milliards d’euros seraient nécessaires pour traiter toutes les personnes concernées, un montant équivalent à celui du déficit de la Sécurité sociale cette année-là. La Haute Autorité de santé (HAS) recommande alors de ne traiter que les patients dont le foie est le plus atteint. Même s’il ne dit pas son nom, pour la première fois en France, un rationnement est mis en place pour endiguer les dépenses.
Si la situation est inédite dans le domaine du VIH et des hépatites, elle résonne avec ce que connaissent déjà les malades du cancer…
Résumé
Plan
- Introduction
- L’accès à l’innovation à tout prix ?
- La mobilisation contre les prix au Nord : une nouvelle variation du combat pour l’accès
- Conclusion
Auteurs
Sur un sujet proche
- Mis en ligne sur Cairn.info le 16/11/2018
- https://doi.org/10.3917/rfas.183.0027

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