Depuis 2012, la négociation sur le prix des médicaments innovants entre l’État et les industriels prend en compte un « avis sur l’efficience » émis par une commission de la Haute Autorité de santé. Cette nouvelle procédure mobilise des savoirs économiques, dont l’introduction n’a rien d’évident dans le contexte institutionnel français, traditionnellement rétif à l’usage de l’économie. À partir d’une enquête sociologique conduite auprès des services et de la Commission d’évaluation économique de la HAS, cet article analyse la façon dont le calcul coûts-résultats a été introduit dans la fixation des prix des médicaments, en insistant sur le travail opéré par les économistes de la HAS sur les méthodes et les procédures d’évaluation économique. Ces dernières se caractérisent par un degré accru de formalisation. Il pointe aussi les effets institutionnels de l’introduction des avis d’efficience, qui rapprochent des acteurs ayant jusqu’alors travaillé de manière largement séparée, sans pour autant ouvrir publiquement les débats relatifs aux prix des médicaments.
Article
Au début des années 2010, les enjeux de sécurité des médicaments sont renouvelés par le scandale du Mediator®. La précaire maîtrise des dépenses de l’Assurance maladie est affectée par l’arrivée de médicaments très onéreux. Les acteurs de la politique du médicament affichent leur volonté de renforcer l’assise scientifique des évaluations et de mieux prendre en compte les coûts et la transparence des décisions. En 2012, un décret d’application de la loi de financement de la sécurité sociale introduit dans le processus de fixation des prix des médicaments un nouveau dispositif d’évaluation, portant sur leur efficience comparée. Tandis que le prix reste fixé par l’État après négociations avec les industriels au sein du Comité économique des produits de santé (CEPS), ce dernier est désormais supposé prendre en compte une évaluation coûts-résultats réalisée par la Haute Autorité de santé (HAS). L’introduction de ces évaluations économiques est perçue par certains observateurs comme une incongruité ou comme un « changement de paradigme » (Detournay, 2016). Certains pointent l’originalité française au regard d’autres pays européens, dans lesquels l’évaluation économique est plus souvent associée aux décisions de remboursement qu’à la fixation des prix (Jeantet et Lopez, 2014). Surtout, la fixation du prix des médicaments s’était jusqu’alors fort bien passée de ce type d’évaluation. Si les préoccupations économiques n’étaient pas absentes du processus de décision, la formalisation des informations mobilisées n’était pas explicite…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 16/11/2018
- https://doi.org/10.3917/rfas.183.0161

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