La tarification à l’activité impose aux médecins hospitaliers une rationalité économique qu’ils perçoivent spontanément comme envahissante et toute-puissante. L’économie est d’abord appréhendée comme un corps étranger, dénaturant le travail et les représentations que les acteurs s’en font. Toutefois, elle peut prendre d’autres sens et d’autres aspects quand elle est appréhendée comme un élément constitutif du travail, au même titre que le respect des normes, que les cadres déontologiques fixant les règles éthiques, ou les savoir-faire techniques acquis tout au long de la formation des médecins. En appréhendant ainsi l’économie, via la tarification à l’activité, comme une variable entrant dans la composition du travail, il est alors possible d’essayer de saisir la place qu’elle occupe dans l’accomplissement des activités, comment les acteurs parviennent à la neutraliser et à quelle condition elle acquiert de la légitimité.
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Depuis le début des années 2000, avec la tarification à l’activité (T2A), les médecins hospitaliers sont définitivement entrés dans une nouvelle ère. Aboutissement d’un long processus, amorcé à partir des années 1970, ce dispositif impose définitivement un raisonnement économique non plus aux seules structures hospitalières mais aussi au corps médical. Il marque, symboliquement, le passage de l’affirmation qu’une santé n’a pas de prix à la certitude qu’elle a un coût et à la nécessité de le maîtriser (Benamouzig, 2005 ; Juven, 2014). Assimilée à l’emprise de l’idéologie du new public management, la tarification à l’activité cristallise de nombreuses critiques qui l’associent au néolibéralisme, à la mise en concurrence entre les structures hospitalières ou bien encore à la quête de performance comme critère ultime de jugement du travail du personnel médical (Mas, Pierru, Smolski et al., 2011 ; Pierru, 2012). Elle place sous le joug de la rationalité économique une profession, celle des médecins hospitaliers, qui était auparavant relativement épargnée, à l’aide d’instruments comptables permettant de coder les activités pour les convertir en tarifs.
Système complexe, la tarification à l’activité repose sur deux piliers majeurs. D’une part, elle vise à homogénéiser les coûts par le recours à la création de catégories de pathologies, auxquelles sont associés des critères prenant en compte certaines caractéristiques des patients. Pour chaque grand type de pathologie, sur la base d’une moyenne pondérée en fonction des pratiques des différents hôpitaux, un coût moyen est calculé à partir de la moyenne des coûts observés sur un échantillon d’établissements hospitaliers…
Résumé
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 10/10/2018
- https://doi.org/10.3917/rfas.182.0111

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