L’histoire de l’enquête Modes de garde et d’accueil des jeunes enfants : des origines à l’enquête aujourd’hui
1En juin 2000, la réalisation d’un dossier statistique sur les « Modes de garde et d’accueil des jeunes enfants » démontre le besoin d’une source d’information récente permettant d’avoir une vision globale de l’accompagnement des familles. D’une part, les données administratives sur les équipements collectifs ou les prestations légales, bien qu’exhaustives, sont alors assez pauvres. D’autre part, dans les enquêtes en population générale, la taille de l’échantillon des familles avec des enfants en bas âge est souvent trop faible pour permettre une analyse détaillée. De fait, l’enquête Famille, de 1990, de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), adossée au recensement de la population, constituait alors la dernière enquête d’envergure fournissant le recours aux modes d’accueil des enfants sur l’ensemble de la population, car ce questionnement n’avait pas été reconduit lors de l’enquête Famille de 1999. C’est dans ce contexte qu’en mai 2002, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques – DREES réalise la première enquête Modes de garde et d’accueil des jeunes enfants, en partenariat avec le Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale – CERC, la Caisse nationale des allocations familiales – CNAF et l’INSEE. Elle est menée auprès de 3 900 familles comptant au moins un enfant de moins de sept ans vivant en France métropolitaine. Son objectif est de dresser le panorama le plus complet possible des différents modes d’accueil des jeunes enfants – qu’ils soient formels : chez un•e assistant•e maternel•le, en établissement d’accueil du jeune enfant ou en garde à domicile, ou informels : lorsque les parents gardent eux-mêmes leur enfant ou qu’ils le confient aux grands-parents par exemple – et d’étudier les pratiques de multirecours pour chaque enfant et selon différentes temporalités. Pour ce faire, l’enquête place notamment l’enfant au centre de l’interrogation, en demandant aux parents de remplir sur une semaine de référence [1] un emploi du temps décrivant horaires et intervenants de l’accueil de leur enfant.
2En octobre 2007, l’enquête est reconduite par la DREES en partenariat avec la CNAF et l’INSEE auprès de 8 200 familles avec au moins un enfant de moins de sept ans et demi. Cette nouvelle édition permet d’analyser les évolutions en matière d’accueil des jeunes enfants et de conciliation entre les vies familiale et professionnelle des parents entre ces deux dates. Par ailleurs, la population interrogée est nettement plus grande que lors de la première édition avec un suréchantillon des parents bénéficiaires de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE), dont il s’agissait d’évaluer les effets de la mise en place, décidée lors de la Conférence de la famille d’avril 2003.
3La vision globale des modes d’accueil, l’originalité du questionnaire, avec un emploi du temps de l’enfant qui décrit ses journées d’accueil, et la possibilité d’évaluer l’impact de mesures ciblant la petite enfance et l’articulation entre les vies familiale et professionnelle en font la source de référence pour l’analyse du recours aux modes d’accueil de la petite enfance. L’enquête a donc été reconduite en 2013. Cette édition a été accompagnée de quatre nouveautés :
- un questionnaire informatisé (collecte assistée par informatique – CAPI) ;
- un accent mis sur les congés autour de la naissance ;
- un calendrier rétrospectif de l’accueil du jeune enfant depuis sa naissance jusqu’à l’enquête ;
- la possibilité de réinterroger les ménages qui l’acceptent, dans le cadre d’une post-enquête qualitative.
L’enquête Modes de garde et d’accueil des jeunes enfants en 2013
4L’enquête Modes de garde et d’accueil des jeunes enfants en 2013 s’est déroulée de fin septembre à mi-décembre 2013. L’échantillon était composé de ménages ayant au moins un enfant de moins de six ans et un mois au moment de l’enquête et vivant en France métropolitaine. Il provient de deux sous-échantillons disjoints, extraits de l’enquête annuelle 2012 du recensement de la population et de la base des allocataires de la CNAF.
5À l’issue de la collecte, 6 500 familles appartenant au champ de l’enquête ont répondu. Le questionnaire aborde de nombreux aspects de l’articulation des vies familiale et professionnelle des parents de jeunes enfants :
- la qualification de l’activité des parents : emploi, chômage, inactivité. Depuis 2007, il est également possible d’utiliser les emplois du temps professionnels des parents sur la semaine de référence ;
- l’emploi du temps de l’accueil des enfants au cours de la semaine de référence, jour par jour et minute par minute. Cet outil permet de décrire avec un grand détail les différents intervenants de l’accueil ;
- les dépenses pour l’accueil des enfants et le montant des aides financières perçues pour y faire face. Cette catégorie contient également les revenus du ménage ;
- la proximité d’autres membres de la famille et leur implication dans l’accueil des enfants ;
- les congés de paternité et de maternité, les préférences des parents en matière de mode d’accueil et les modes d’accueil depuis la naissance.
6Pour la première fois, en 2013, le dispositif de l’enquête a prévu la possibilité de réinterroger les ménages qui l’accepteraient, dans le cadre d’un entretien avec un chercheur, afin d’approfondir qualitativement certains questionnements relatifs au thème de l’enquête, en s’appuyant éventuellement sur les données recueillies dans l’enquête statistique. Environ 3 200 parents des enfants de moins de six ans interrogés dans le cadre de l’enquête Modes de garde et d’accueil des jeunes enfants en 2013 ont ainsi accepté le principe de cette réinterrogation. À la suite d’un appel à projet de recherche, la DREES a sélectionné et financé trois études qualitatives, menées auprès de 40 à 64 personnes, sur les thèmes suivants :
- le rôle des grands-parents dans l’accueil des jeunes enfants (voir l’article « La prise en charge des jeunes enfants par l’aide grand-parentale : un mode de garde composite » dans ce dossier) ;
- les mères actives à temps plein qui n’ont pas arrêté de travailler à la naissance de leur enfant (voir l’article « L’articulation travail-famille chez les mères en activité continue et à temps plein : une question de distanciation subjective ? » dans ce dossier) ;
- les arrangements conjugaux autour des modes de garde : arbitrages sous contrainte et effets de socialisation (voir l’article « Pourquoi les parents préfèrent-ils la crèche ? Les représentations hiérarchisées des modes de garde professionnels » dans ce dossier).
7Plusieurs évolutions législatives ont déjà modifié, depuis septembre 2013, le contexte de l’accueil des jeunes enfants. Cela concerne la réforme des rythmes scolaires en école élémentaire et pré-élémentaire initiée à la rentrée 2013, puis généralisée à la rentrée 2014 ; les aménagements du barème de la PAJE décidés en 2014 ; et l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2015, de la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE), qui promeut un partage du congé parental entre les deux parents.
8Si l’enquête Modes de garde et d’accueil des jeunes enfants devait être reconduite, outre la nécessaire prise en compte de ce nouveau contexte dans le questionnaire, il pourrait être intéressant d’envisager d’autres adaptations. Les données de l’enquête pourraient ainsi être appariées aux fichiers sociaux de la CNAF et aux fichiers fiscaux de la Direction générale des finances publiques (DGFIP), à l’instar de ce qui est fait pour de nombreuses autres enquêtes du système statistique public. Cela permettrait à la fois d’alléger la charge de réponse des enquêtés et d’améliorer la qualité des informations sur les ressources et les aides perçues par les familles.
9Enfin, à titre expérimental, le comité du label du Conseil national de l’information statistique (CNIS) ayant examiné l’enquête 2013, avait recommandé l’intégration d’un département d’Outre-mer (DOM). En effet, à l’heure actuelle, aucune source récente ne permet de décrire, dans ces territoires, les différents dispositifs auxquels les parents peuvent avoir recours et les pratiques de ces derniers concernant l’accueil de leurs enfants. L’extension du champ de l’enquête à un ou à l’ensemble des DOM pourrait constituer un passionnant défi pour une prochaine édition de l’enquête.
Notes
-
[1]
Il s’agit par défaut de la semaine précédant l’enquête, sauf si le dispositif habituel a été perturbé par la maladie d’un enfant, les congés d’un parent ou encore l’indisponibilité d’un mode d’accueil.