Introduction [2]
1 Le réseau REDSIAM a pour objectif de mieux utiliser les données du Système national d’information interrégimes de l’assurance maladie (SNIIRAM) pour la recherche (Tuppin, 2010 ; Goldberg, 2012, Begaud, 2010, Bourgueil, 2014), la surveillance, l’évaluation et la santé publique. Il a été mis en place sous l’égide des principaux organismes producteurs et principaux utilisateurs des données du SNIIRAM [3]. Le SNIIRAM a été créé par la loi de financement de la Sécurité sociale en 1999 et la collection de données a été constituée en 2003 pour le régime général de l’assurance maladie. Il est géré par la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) pour le compte des régimes d’assurance maladie obligatoire.
2 L’objectif de REDSIAM est de favoriser, par le partage d’expériences et l’interaction entre équipes, le développement, la discussion critique et la mise à disposition d’algorithmes spécifiques permettant d’identifier des pathologies, fondés sur la combinaison de différentes sources de données et de variables individuelles, médicales ou administratives, présentes dans le SNIIRAM. Les activités de REDSIAM reposent essentiellement sur le fonctionnement de groupes de travail thématiques par grands domaines pathologiques et de groupes de travail transversaux.
3 L’objectif du groupe de travail sur les troubles mentaux et du comportement (GT-TMC) est de permettre dans le cadre du réseau REDSIAM de faire le point sur les algorithmes de repérage des patients atteints de troubles psychiatriques. Les membres du groupe de travail ont choisi dans un premier temps d’aborder le sujet de la dépression de l’adulte.
4 En effet, les épisodes et troubles dépressifs – en termes de file active [4] – ainsi que les troubles schizophréniques – en termes de nombre de journées ou d’actes – constituent les motifs de recours en psychiatrie les plus fréquents dans les établissements de santé (DREES, 2014).
5 Il a été prévu de faire cet état des lieux par le biais d’entretiens et de recherches bibliographiques, afin d’intégrer par la suite les algorithmes repérés, dans la bibliothèque centralisée de REDSIAM, et de proposer une synthèse des éléments obtenus, concernant à la fois les algorithmes existants et aussi les pistes de réflexion des personnes interrogées et des membres du groupe.
6 Après une courte présentation du SNIIRAM et de son utilisation, cet article présente la synthèse des travaux menés par le GT-TMC de REDSIAM autour de la création d’un algorithme de repérage de patients adultes atteints de dépression.
Présentation des données du SNIIRAM, avantages, limites et exemples d’utilisation en épidémiologie
7 La France est dotée de l’une des plus grandes bases de données médico-administratives au monde, le SNIIRAM, avec une profondeur d’historique de près de dix ans actuellement, qui présente un intérêt majeur dans le domaine de la santé publique et l’épidémiologie.
8 Les différents régimes d’assurance maladie se sont associés pour centraliser leurs données de remboursement de soins au sein du SNIIRAM, géré par la CNAMTS. Créé en 2002, avec les données de la médecine de ville, il inclut également, depuis plusieurs années, les données d’hospitalisation du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) transmises par l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH). En particulier, les données du PMSI dans les services de médecine chirurgie et obstétrique (PMSI-MCO) sont transmises depuis 2005, de même que celles du PMSI dans les soins de suite et de réadaptation (PMSI-SSR) et du PMSI relatif à l’hospitalisation à domicile (PMSI-HAD). Il s’agit ainsi de données individuelles extrêmement riches : données de remboursement de soins avec codage des actes et des médicaments ; identifiants des professionnels et des établissements de santé qui ont participé aux soins du patient ; informations sur la pathologie traitée pour les patients en affection de longue durée (ALD) et en accidents du travail et maladies professionnelles ; données d’hospitalisation.
9 Bien qu’elles n’informent évidemment pas sur de nombreuses données personnelles et environnementales pouvant être indispensables pour la recherche et la surveillance (comportements, expositions à des facteurs de risque de natures diverses, situation socioprofessionnelle de l’assuré en dehors de la notion de couverture maladie universelle complémentaire – CMU-C), les données du SNIIRAM intégrant le PMSI ont à l’évidence un intérêt majeur pour documenter les événements de santé et les parcours de soins, disposer de données peu coûteuses, récentes et de travailler sur des pathologies rares.
10 Elles présentent cependant certaines limites (Goldberg, 2012 ; Goldberg, 2015), car les données médico-administratives sont recueillies à des fins de gestion, avec un objectif de suivi des dépenses occasionnées par la fréquentation du système de soins. Leur utilisation nécessite donc de bien connaître leurs modalités de constitution et l’évolutivité de ces modalités, afin d’appréhender le lien entre l’information codée et la réalité clinique, épidémiologique ou économique, selon les objectifs poursuivis. Par ailleurs, la complexité et la volumétrie du SNIIRAM nécessitent le développement d’une expertise technique spécifique, d’autant que l’accès à ces données est très réglementé.
11 En effet, l’utilisation des données des séjours hospitaliers du PMSI, comme source d’information sur les pathologies, peut s’avérer délicate et nécessiter le développement d’algorithmes complexes pour l’identification des patients et des pathologies, alliant les codes des diagnostics aux codes des actes spécifiques de la pathologie étudiée (Couris, 2004). Ceci implique un important travail de réflexion méthodologique en lien avec les experts du domaine et de validation des données (Quantin, 1999). Par ailleurs, lors de l’étude de l’incidence d’une pathologie chronique, il faut penser à exclure les cas prévalents (Quantin, 2000). Il faut également noter la présence non-exhaustive des facteurs de risque classiquement étudiés : conduites addictives (notamment tabac et alcool), poids, hypercholestérolémie, hypertension et facteurs génétiques.
12 De plus, la base des patients en affections longue durée – ALD est à vocation médico-sociale (CNAMTS 2004), et ses limites sont connues : imprécision des diagnostics, absence d’exhaustivité des cas déclarés, risque de double déclaration (Chinaud, 2004). La prévalence des affections classées en ALD est systématiquement inférieure à la prévalence réelle, car le patient peut être atteint d’une maladie, mais ne pas bénéficier de l’ALD correspondante pour de multiples raisons (autre ALD, invalidité, souci de confidentialité …).
13 La base de données de remboursements de l’assurance maladie ne comporte pas d’information sur la nature des maladies traitées, les résultats d’examens biologiques ou médico-techniques et n’inclut pas les prestations non remboursées.
14 Enfin, l’absence des causes des décès, en l’attente du chaînage avec les données de mortalité du Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDC), a souvent été déplorée.
15 Malgré ces limites, leur exploitation à des fins de recherches scientifiques épidémiologiques ou médico-économiques s’est développée à la CNAMTS, comme dans de nombreuses équipes de recherche et de surveillance en santé, d’abord sur les données du PMSI seul (Chan-Chee, 2011 ; Bulletin épidémiologique hebdomadaire, 2011 et 2012 ; De Peretti, 2012 et 2014 ; Rapport InVS 2010 ; Belchior, 2009), puis sur celles du SNIIRAM. Ainsi, des études aux conséquences sanitaires importantes ont été réalisées, notamment par le ministère de la Santé, la CNAMTS et les agences sanitaires, telles que des études d’association entre l’utilisation d’un médicament ou d’un dispositif médical et la survenue d’effets indésirables graves (Mezzarobba, 2014 ; Neumann, 2012 ; Cola, 2015 ; Weill, 2010). L’état des lieux de la consommation de certains médicaments (Brisacier, 2013 ; ANSM, 2013) a permis de caractériser l’usage et également le mésusage des médicaments et de dresser un profil des utilisateurs de ces produits. D’autres études épidémiologiques ont été menées par ces institutions, ainsi que par les chercheurs, sur de nombreuses pathologies (Abdulmalak C., 2015 ; Lainay C., 2015 ; Lorgis L., 2013 ; Quantin C., 2013-1 ; Allaert F.-A., 2016 ; Quantin C., 2013-2, Tuppin P., 2011 ; Tuppin P., 2014-1 ; Tuppin P., 2014-2).
Recours aux bases de données médico-administratives pour l’étude de la dépression
16 La psychiatrie n’est que très peu étudiée via les bases de données médico-administratives, malgré son poids dans l’appareil sanitaire national. Parmi les rares études, l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) a publié une étude de faisabilité concernant l’utilisation des données du recueil d’information médicalisée en psychiatrie –RIM-P, équivalent du PMSI-MCO pour les établissements de santé ayant une autorisation d’activité en psychiatrie (Coldefy, 2012). La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques – DREES a également publié en 2015 un rapport concernant la santé mentale en France, dont une partie des données repose sur les données du RIM-P (Rapport DREES, 2015). Dans ce dernier, la prise en charge pour les troubles dépressifs a été identifiée à partir de la présence d’une ALD active ou d’une hospitalisation pour dépression dans les deux dernières années du PMSI-MCO ou RIM-P. Pour terminer, la CNAMTS vient de mettre à disposition la cartographie des pathologies prises en charge par le système de santé et le poids des dépenses correspondantes (Rapport assurance maladie, 2015 ; Étude des algorithmes de définition des pathologies dans le SNIIRAM, 2014, voir fiche sur les dépenses du secteur psychiatrique). Ce travail repère les sujets pris en charge pour cinquante-six pathologies ou événements de santé fréquents ou graves ou coûteux ou évolutifs à partir des données du SNIIRAM intégrant le PMSI après élaboration par différents algorithmes et analyses de sensibilité. Il a montré que les pathologies psychiatriques et les traitements associés concernaient, en 2013, près de 7,3 millions de personnes en France (5,5 millions de personnes qui consomment annuellement des psychotropes sans avoir un diagnostic clairement avéré de trouble mental, auxquelles il faut ajouter près de 1,8 million de personnes avec un diagnostic psychiatrique), ce qui correspond en termes budgétaires au deuxième poste de dépenses de l’assurance maladie (21,3 milliards d’euros) après les hospitalisations ponctuelles (32 milliards d’euros).
17 C’est pourquoi un état des lieux des méthodes de repérage des patients concernés par ce type de prise en charge s’imposait. Nous avons choisi de nous intéresser au principal motif de recours en soins en psychiatrie, la dépression chez l’adulte.
Présentation des travaux du groupe de travail : apports attendus et limites des bases de données médico-administratives pour la caractérisation de la dépression
Méthodologie de la concertation
Prise de contact avec les experts sollicités pour les entretiens
18 En plus d’une recherche bibliographique, le GT-TMC a tout d’abord recensé les équipes françaises ayant conçu ou utilisant des algorithmes d’identification de pathologies dans les bases de données médico-administratives, via leurs thématiques de recherche, leurs publications ou communications dans des congrès scientifiques. Un courrier électronique a été adressé par le Pr Catherine Quantin à chaque personne sollicitée pour lui présenter l’objet du travail et lui proposer un entretien. Des questionnaires permettant de mieux connaître les modalités de développement ou d’utilisation des algorithmes étaient joints au courriel. Ces questionnaires devaient rendre compte le plus précisément possible de l’algorithme, de ses avantages et des limites qui ont accompagné son développement, ainsi que ses modalités d’utilisation.
19 S’il souhaitait participer à cette étude, l’expert sollicité était encouragé à renvoyer une version préremplie du questionnaire. La plupart des entretiens étaient par la suite menés par téléphone. Au total, 10 entretiens ont été réalisés.
Des sources de données multiples au service d’objectifs différents
20 Ces entretiens ont été l’occasion de noter qu’il n’y avait que très peu de travaux sur l’analyse de la dépression de l’adulte dans les bases de données médico-administratives en France, en dehors de ceux des personnes interrogées.
21 Des premiers éléments de synthèse provenant de ces entretiens, il ressort qu’il convient d’adapter l’algorithme au type de dépression étudiée, les patients hospitalisés représentant naturellement les cas les plus graves. Il faut également bien préciser les objectifs et définir si ce sont les antécédents, les cas prévalents ou les cas incidents qui seront étudiés. Par ailleurs, il est important de savoir si l’on s’intéresse à l’ensemble des cas ou uniquement à ceux pris en charge.
22 Il faut donc bien définir les objectifs de l’étude avant de déterminer quelles sont les données des bases de données médico-administratives utilisables, que ce soient les données relatives aux ALD pour lesquelles se posent, comme pour les autres pathologies, le problème de la déclaration de l’affection, ou également les données du PMSI, la difficulté supplémentaire de l’étude de la dépression est qu’elle ne s’intéresse pas uniquement au champ des données MCO (ATIH, 2015), mais également à celui de la psychiatrie avec les données du RIM-P. En psychiatrie, les patients sont plus fréquemment hospitalisés pour dépression dans des structures privées, avec des règles de prise en charge qui peuvent être différentes. Par ailleurs, les données de consommation de soins de ville peuvent être très utiles, notamment pour ce qui concerne les médicaments et aussi les autres prestations, par exemple les actes de consultations de professionnels de santé.
Définition des algorithmes de repérage des patients pris en charge pour dépression, selon la cartographie de la CNAMTS
23 Il a été rappelé aux personnes contactées que la CNAMTS propose des versions mises à jour des algorithmes utilisés pour la cartographie des pathologies et des dépenses (Rapport CNAMTS, 2013). La version V2, publiée en 2014 [5], a servi de base de discussion, dont les éléments relatifs aux maladies et aux traitements pour la dépression sont détaillés ci-dessous.
24 Les bénéficiaires pris en charge pour des soins en santé mentale peuvent être repérés soit à partir d’un code diagnostic, soit à partir de traitements spécifiques, puis classés en groupes de patients.
25 De façon générale, les affections psychiatriques déterminées au travers du code diagnostic – diagnostic principal (DP), diagnostic relié (DR) ou diagnostics associés (DA) – sont recherchées dans le PMSI au cours des cinq dernières années pour les établissements MCO, à partir de 2007 pour les établissements psychiatriques, ainsi qu’à partir des ALD. Cinq groupes de pathologies ont ainsi été identifiés : troubles psychotiques, troubles névrotiques et de l’humeur, troubles du développement mental et deux autres groupes ne prenant en compte que les ALD liées à des pathologies psychiatriques autres que celles des trois premiers groupes.
26 En complément de ces groupes de pathologies ont été créés quatre groupes de patients repérés via la prise d’un traitement par psychotropes : antidépresseurs et lithium, neuroleptiques, anxiolytiques, hypnotiques. Ces personnes ont reçu au moins trois délivrances de psychotropes au cours de l’année n, mais n’ont pas connu d’ALD ni d’hospitalisation pour pathologie psychiatrique.
27 S’agissant du cas précis de la dépression, deux groupes ont été retenus :
- groupe diagnostic « dépression/névrose » : personnes en ALD pour troubles de l’humeur au 31 décembre de l’année n, ou personnes hospitalisées pour ces mêmes motifs – dans un établissement de santé MCO ou psychiatrique – durant au moins une des cinq dernières années ;
- groupe traitement « antidépresseurs et lithium » : personnes ayant reçu au moins trois délivrances d’antidépresseurs ou de lithium au cours de l’année n (à différentes dates).
28 À l’issue d’un précédent travail réalisé en collaboration avec la CNAMTS sur l’état des lieux et la validation des algorithmes de cette cartographie (Étude des algorithmes de définition des pathologies dans le SNIIRAM, 2015), à l’aide des préconisations de différents experts interrogés et après consultation de l’avis de plusieurs psychiatres, la CNAMTS a décidé d’identifier et de renommer les groupes différemment.
29 Les névroses sont conservées sous l’appellation « Troubles névrotiques et de l’humeur », mais la CNAMTS a également créé des sous-groupes (sans remontée spécifique de dépenses) pour des analyses spécifiques, qui distinguent les troubles bipolaires des épisodes dépressifs et autres troubles dépressifs et des troubles anxieux, névrotiques, liés au stress et somatoformes, de la façon suivante :
- épisode maniaque et trouble bipolaire (codes CIM10 F30-F31) ;
- épisode dépressif et autres troubles de l’humeur (codes CIM10 F32-F39) ;
- troubles névrotiques, liés au stress et somatoformes (codes CIM10 F40-F48).
Résultats des entretiens
30 Les entretiens avec les experts ont permis de mesurer l’intérêt du PMSI-MCO d’une part et du RIM-P d’autre part, pour le repérage des dépressions. Ils ont également permis d’interroger la pertinence de la prise en compte des tentatives de suicide, des consommations médicamenteuses de ville et d’évaluer la possibilité d’établir des degrés de sévérité pour la dépression.
Intérêt des données du PMSI-MCO pour le repérage des dépressions
Quel repérage par les codes diagnostiques ?
31 L’utilisation des codes de la Classification internationale des maladies, 10e révision (CIM10), pour un repérage des séjours hospitaliers avec un diagnostic de dépression dans le PMSI-MCO, soulève de nombreuses questions. Pour certains, le PMSI-MCO ne semble pas être la meilleure source de données pour repérer les dépressions, qui ne sont souvent pas un motif principal d’hospitalisation en MCO. Les patients souffrant de dépressions légères (F32.0 : épisode dépressif léger et F32.9 : épisode dépressif, sans précision) ne sont généralement pas hospitalisés, ni en MCO ni en psychiatrie. Cependant, les codes de dépression sévère leur paraissent intéressants à prendre en compte – F32.1 : épisode dépressif moyen ; F32.2 : épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques ; F32.3 : épisode dépressif sévère avec symptômes psychotiques ; F32.8 : autres épisodes dépressifs. Et les codes F33 : troubles dépressifs récurrents ; F34 : troubles de l’humeur (affectifs) persistants ; F38 : autres troubles de l’humeur (affectifs) et F39 : trouble de l’humeur (affectif), sans précision. Néanmoins, le choix des codes est en général discutable en fonction des objectifs de l’étude, et la validation des codes sélectionnés devrait de toute façon se faire avec l’aval des spécialistes.
32 En particulier, plusieurs options ont été discutées :
- se restreindre aux codes F32, épisodes dépressifs et F33, troubles dépressifs récurrents, en les séparant ou non ;
- conserver ou non les codes F30, épisode maniaque et F31, trouble affectif bipolaire ;
- rassembler ou non les codes F34, troubles de l’humeur (affectifs) persistants ; F38, autres troubles de l’humeur (affectifs) et F39, trouble de l’humeur (affectif), sans précision. Mais cela représente peu de patients ;
- ajouter ou non le code F06.32, trouble dépressif organique, utilisé lorsqu’un patient souffre d’une dépression en relation avec une pathologie somatique.
Quel repérage par les actes spécifiques ? l’exemple des sismothérapies
33 Un repérage des sismothérapies, comme marqueur de patients dépressifs, pourrait être envisagé. Celles-ci seraient repérables dans les données de consommation interrégimes de ville et dans le PMSI-MCO via les actes de la classification commune des actes médicaux (CCAM), mais pour ce dernier il existe une grande hétérogénéité dans leur codage. L’établissement MCO peut déclarer l’acte de sismothérapie, qui existe dans la CCAM, et le séjour est classé dans un groupe homogène de malades de sismothérapie. Dans ce cas, il s’agit d’une prestation inter-établissement, et les situations sont très disparates. En revanche, il n’est pas possible de repérer les sismothérapies qui seraient réalisées par les structures de psychiatrie, dans la mesure où il n’y a pas de codage des actes CCAM (dont la sismothérapie) dans le RIM-P.
Intérêt des données du RIM-P pour le repérage des dépressions
Interrogations sur la qualité et l’exhaustivité des données
34 Les personnes interrogées ont fait part de la très grande hétérogénéité du recueil dans les établissements, à la fois en termes de qualité du codage et d’exhaustivité.
35 Pour certains, l’amélioration de l’exhaustivité du recueil est très nette, 90 % à 95 % des établissements remontant leurs informations depuis 2010. Ce pourcentage concerne les établissements et non pas les séjours ou les actes. Les établissements qui font défaut sont majoritairement de petites structures. En revanche, il n’est pas possible aujourd’hui d’avoir une idée précise de l’exhaustivité de ce recueil en séjours par établissement. Certains établissements par exemple n’enregistreraient que la moitié de leur activité. Il n’existe pas, pour l’instant, de contrôles de qualité, mais des contrôles de cohérence, réalisés sur les bases de l’ATIH.
36 Selon certains, les diagnostics associés significatifs (DAS), associés au diagnostic principal et ayant donné lieu à une prise en charge effective, seraient exploitables dans le RIM-P, même si leur codage est perfectible et qu’ils ne sont pas recueillis de façon exhaustive (et leur recueil varie fortement selon les établissements, notamment entre secteurs public et privé). En effet, dans la mesure où le codage des DAS n’a pas d’impact en termes de tarification, contrairement aux impacts potentiels en établissement MCO, ceux-ci ne sont pas tous notés. En revanche, lorsqu’un DAS est noté, celui-ci peut être considéré comme fiable.
37 Dans le doute, d’autres préfèrent fonder exclusivement leurs algorithmes sur les diagnostics principaux (DP) en utilisant les distinctions entre épisodes sévères, légers, moyens, telles qu’elles sont précisées dans la CIM10, pour les codes F32 et F33.
Complémentarité du RIM-P avec d’autres sources et problème des prises en charge en ambulatoire
38 Un souci fréquemment évoqué concerne le chaînage des éléments du RIM-P avec les autres champs du SNIIRAM. Le RIM-P dispose, en fonction de la nature de l’activité, de deux recueils différents : d’une part, les informations issues de la prise en charge en hospitalisation à temps complet ou partiel du résumé par séquence (RPS) et d’autre part les informations issues de la prise en charge ambulatoire du résumé d’activité ambulatoire (RAA).
39 Pour les patients qui ont été hospitalisés à temps complet ou partiel (environ 20 % à 30 % de l’activité enregistrée dans le RIM-P), le RPS contient le numéro anonyme de chaînage (ANO), le reliant aux autres informations du PMSI – HAD, MCO … – et du SNIIRAM – soins de ville … Le RPS contient également l’identifiant permanent du patient (IPP), identifiant unique au sein d’une entité juridique pour tout patient, transformé en une chaîne alphanumérique non signifiante par hachage irréversible, permettant de chaîner les séjours à temps complet ou partiel du RPS aux prises en charge ou actes ambulatoires, lorsque ceux-ci sont réalisés dans le même établissement ; les actes peuvent cependant avoir lieu au domicile du patient, en unité somatique ou aux urgences d’un autre établissement.
40 En ce qui concerne la prise en charge ambulatoire (70 % à 80 % de l’activité), seul l’IPP est renseigné dans le RAA. Le patient suivi uniquement en ambulatoire dans un établissement n’est donc pas chaînable aux autres données du SNIIRAM s’il ne possède pas de séjours à temps complet ou partiel dans le même établissement. En revanche, il est donc possible, si le patient a déjà été hospitalisé dans le même établissement à temps complet ou partiel, de relier son RAA au RPS au sein d’un même établissement (via l’IPP) et ensuite de récupérer le numéro de chaînage ANO du PMSI, mais uniquement dans ce cas. C’est une difficulté importante, car la prise en charge ambulatoire représente 70 % à 80 % de l’ensemble des prises en charge.
41 Environ 90 % des sujets hospitalisés ont effectivement des actes en ambulatoire dans le même établissement. Toutefois, sur la base nationale en 2013, 83 % des patients du secteur public étaient pris en charge uniquement en ambulatoire et n’avaient donc pas de numéro ANO dans le RIM-P. Pour mémoire, le recueil expérimental du PMSI en psychiatrie (2002-2005) pourrait, du fait d’une seconde clé de chaînage générée à partir des nom, prénom, date de naissance et code sexe, constituer une source pour l’estimation de ce recours (Circulaire DHOS/E3/2001/ n° 625 du 19 décembre 2001).
42 Par ailleurs, le suivi des patients ne peut pas être considéré de la même façon entre le secteur public et le secteur privé. En effet, dans les établissements psychiatriques publics, le suivi des prises en charge des patients au sein d’une même structure est possible, grâce à la clé constituée de l’IPP crypté et du numéro fichier national des établissements sanitaires et sociaux (FINESS) de l’établissement. Il n’y a cependant pas de numéro ANO pour retrouver d’autres soins pour ces patients en dehors de la psychiatrie, comme vu précédemment. Dans les établissements privés, les actes et les consultations externes se font dans des cabinets libéraux de praticiens parfois rattachés à ces structures ; elles n’entraînent pas non plus de production de résumés, mais sont identifiables dans le SNIIRAM, car elles donnent lieu à remboursement. Il faudrait donc établir une estimation, pour les patients pris en charge en psychiatrie, du pourcentage de ceux qui ont effectivement un numéro ANO. En plus de cette question se pose celle de la fiabilité des numéros ANO du RIM-P, qui est toutefois en nette progression : en 2013, environ 4,5 % de clés de chaînage sont non valides dans le RIM-P, contre 36 % en 2007 (tableau 1).
Amélioration de la fiabilité des numéros ANO dans le RIM-P depuis 2007

Amélioration de la fiabilité des numéros ANO dans le RIM-P depuis 2007
43 Un des membres du groupe de travail a également exploré la possibilité d’améliorer le chaînage du RIM-P (volet hospitalisations) via l’identifiant du patient au sein de l’établissement (IPP). En cas de numéro de chaînage manquant ou erroné pour un séjour donné, l’idée est d’essayer de retrouver ce numéro dans d’autres séjours liés au même patient par le numéro IPP, dans lesquels le numéro de chaînage est valide. Les tableaux 2 et 3 présentent l’amélioration obtenue.
44 On peut ainsi rechercher les séjours liés au même IPP sur plusieurs années consécutives (par exemple cinq années), pour augmenter les chances de récupérer le numéro de chaînage. Toutefois, on ne peut pour l’instant réellement utiliser un recul de cinq ans, compte tenu du pourcentage d’anomalies du numéro de chaînage très élevé dans les années passées. Ceci ne doit pas empêcher de prendre en compte ce procédé dans la construction d’un algorithme pour l’avenir, la qualité de cette information s’améliorant rapidement.
45 La possibilité de repérer les patients pris en charge dans des appartements thérapeutiques a également été discutée, mais ce type de prise en charge est marginal.
Amélioration du chainage via l’IPP pour l’hospitalisation à temps complet

Amélioration du chainage via l’IPP pour l’hospitalisation à temps complet
Amélioration du chainage via l’IPP pour l’hospitalisation à temps complet et à temps partiel

Amélioration du chainage via l’IPP pour l’hospitalisation à temps complet et à temps partiel
Faut-il ou non prendre en compte les tentatives de suicides ?
46 D’autres questions se posent pour ce qui concerne la prise en compte des tentatives de suicide : peuvent-elles aider à repérer les patients dépressifs ? Certains pensent que les tentatives de suicide peuvent être un marqueur de la dépression, d’autres conseillent de ne pas les utiliser pour repérer la dépression, même si des pathologies psychiatriques y sont souvent associées.
47 Le codage des tentatives de suicide est fait systématiquement en DAS, puisque le code correspondant ne peut pas être utilisé en DP, car il s’agit d’un code X (c’est vrai aussi bien pour le PMSI-MCO, PMSI-SSR que pour le RIM-P). Actuellement, la plupart des algorithmes de repérage des patients dépressifs n’intègrent pas les DAS. Cependant, dans le PMSI-MCO, le DP est la manifestation clinique (somatique) du motif d’hospitalisation. La dépression apparaît donc le plus souvent en DAS, alors que dans le RIM-P le DP correspond à la pathologie psychiatrique.
48 Lors d’une tentative de suicide, le patient est souvent vu aux urgences (environ 80 % des cas), il peut être hospitalisé directement ou non en MCO en réanimation par exemple ou en psychiatrie, directement ou non.
49 S’il n’est pas hospitalisé (environ la moitié des passages pour TS aux urgences), il n’y a pas de production de résumé de sortie du PMSI, mais un résumé de passage aux urgences, dans lequel il est difficile d’identifier directement les TS, sauf peut-être à partir de certains actes traceurs comme le lavage d’estomac. Cependant, une personne interrogée estime que les lavages d’estomac sont rarement réalisés en situation courante.
50 Dans le PMSI-MCO, le DAS de tentative de suicide est souvent oublié du fait de son absence d’impact sur la tarification du séjour et dans le RIM-P, le DAS de tentative de suicide est très peu noté par les psychiatres qui sont plus intéressés par la pathologie psychiatrique elle-même que par ses conséquences.
51 Pour certains, les patients ayant réalisé une tentative de suicide et qui sont hospitalisés en MCO peuvent être repérés par le PMSI-MCO, car ce champ leur semble fiable pour estimer le nombre de patients ayant fait des tentatives de suicide, hospitalisés dans ce secteur (mais il n’y a pas eu de travail de validation des diagnostics pour l’instant), contrairement au RIM-P : non exhaustif, il manque donc certains patients hospitalisés directement en psychiatrie. Le RIM-P donne cependant des informations sur les pathologies liées, dont la dépression, lorsque les patients sont hospitalisés en MCO et transférés en psychiatrie et qu’un résumé est renseigné (défaut d’exhaustivité).
52 Les auteurs d’un récent rapport sur les tentatives de suicide (Chan Chee et Jezewski-Serra D., 2014) ont relevé le manque de sources de données exhaustives. Malgré tout, on note que certaines études globales peuvent être conduites en confrontant les données issues de différentes sources d’information (rapports de l’Observatoire national du suicide). Suite au problème du dénombrement des passages aux urgences non suivis par une hospitalisation, les auteurs envisagent une collaboration avec les urgentistes pour mieux coder les tentatives de suicide aux urgences et améliorer l’estimation de l’effectif de cette population.
53 Pour eux, un peu plus d’un tiers des patients hospitalisés pour tentative de suicide aurait un diagnostic de dépression. Il faut donc trouver d’autres sources de données (Plancke, 2014-1 ; Plancke, 2014-2) pour la construction des algorithmes.
54 Pour ceux qui désirent se servir des tentatives de suicide comme d’un marqueur, il faudrait, comme pour les DAS de troubles dépressifs, étudier ce qui se passe avant ou après en termes de délivrance d’un traitement antidépresseur ou d’hospitalisation.
55 D’autres partenaires ont développé des algorithmes sur les données du CépiDC pour repérer les suicides. Les certificats de décès (1er Rapport de l’Observatoire national du suicide) comportent en effet des pathologies ayant contribué au décès, qui, associées à la mention d’une mort par suicide, permettent d’identifier certains facteurs connexes, comme la dépression ou des pathologies liées à une dépression.
Peut-on utiliser les données de consommations médicamenteuses de ville ?
56 Lors des entretiens, l’utilisation des données de consommation de ville a été source d’interrogations, par exemple l’existence de trois délivrances d’antidépresseurs. En effet, les antidépresseurs (classe ATC [6] : N06A) peuvent avoir d’autres indications que les épisodes dépressifs, sévères ou non, et notamment les douleurs neuropathiques ou les troubles anxieux. Certains ont rapporté qu’il serait peut-être possible d’éliminer ces douleurs neuropathiques grâce aux pathologies associées. Cette question reste à explorer. D’autres pensent que les troubles bipolaires pourraient être éliminés, en cas d’hospitalisation, grâce aux diagnostics des séjours, que ce soit dans le PMSI-MCO ou dans la partie du RIM-P ;cette question devra être étudiée.
Est-il possible d’établir des degrés de sévérité ?
57 Le groupe s’est demandé s’il était possible d’utiliser le nombre de délivrances d’un médicament antidépresseur pour repérer la sévérité de la dépression. L’un des experts pense que cela n’est pas possible. Pour lui, ni le nombre de délivrances ni le type de médicament ne sont des indicateurs de la sévérité. Les tentatives de suicide pourraient à la rigueur être utilisées, mais pas la durée du traitement ni la nature de la prescription. Un patient bénéficiant d’une seule délivrance d’un traitement antidépresseur dans le SNIIRAM peut très bien présenter une dépression sévère, qui sera par ailleurs suivie d’une tentative de suicide, pas forcément repérée dans le SNIIRAM si le patient n’est pas hospitalisé. De plus, certains patients ne souhaitent pas continuer leur traitement, alors qu’ils sont sévèrement atteints. Par ailleurs, pour les personnes âgées, la dispensation des médicaments en maison de retraite n’est pas toujours enregistrée dans le SNIIRAM.
58 À l’inverse, certains estiment que la prise en charge d’une tentative de suicide, la réalisation d’une sismothérapie ou une hospitalisation sont des marqueurs de la sévérité devant être pris en compte.
Propositions par les membres du groupe de travail d’algorithmes de repérage de la dépression
59 Lors des entretiens, la CNAMTS a évoqué le développement de sept algorithmes de repérage de la dépression s’appuyant sur des combinaisons entre ALD, PMSI-MCO – avec les DP et DR –, RIM-P – avec les DP et DAS –, médicaments remboursés … Ces algorithmes sont en phase de test et posent la question de la définition de périodes temporelles idoines pour le repérage. Les modalités d’inclusion à partir des délivrances de médicaments posent le problème de leur spécificité. En effet, il apparaît qu’avec un repérage reposant sur trois délivrances dans l’année, le groupe est trop large et concerne les patients souffrant de troubles bipolaires, anxieux et dépressifs. L’identification d’un groupe plus restreint pose quant à lui le problème des modalités de sélection plus fines, qui restent à définir.
60 Des analyses de sensibilité ont été faites par la CNAMTS (Étude des algorithmes de définition des pathologies dans le SNIIRAM, 2014), en restreignant encore davantage les données du PMSI – MCO et RIM-P – à un an plutôt que deux, comme le proposent certains partenaires, ou en combinant ou non les hospitalisations anciennes en tant que marqueurs de pathologies et la présence actuelle d’un traitement, avec ou sans ajout des DAS du PMSI-MCO.
61 Suite aux différents entretiens, il apparaît que de plus amples analyses sont encore nécessaires avant de produire des algorithmes finalisés. Toutefois, quelques points peuvent être relevés : l’inclusion des DAS (associés à une ALD ou à des délivrances de médicaments antidépresseurs) du PMSI-MCO contribue à un fort accroissement des effectifs. En effet, il peut être intéressant d’utiliser ce repérage par le DAS, dans la mesure où la dépression ne sera pas forcément mise en diagnostic principal, celle-ci n’étant pas le motif de l’hospitalisation, et dans la mesure où une bonne partie des prises en charge pour dépression se fait en médecine de ville. En général, les algorithmes s’appuyant sur des délivrances de médicaments sont ceux qui incluent le plus de patients et posent donc le problème de leur spécificité. Toutefois, l’ajout d’une condition sur l’existence d’un diagnostic relatif à la pathologie psychiatrique dans le PMSI-MCO ou le RIM-P permet de limiter ce problème, notamment lorsque le DP pour le PMSI-MCO est utilisé. Pour ce qui concerne l’utilisation du DAS pour le PMSI-MCO, il semble y avoir un intérêt (à confirmer par une étude de validation) lorsque le recul est limité à un an. Le recul de cinq ans semblerait apporter trop de faux positifs, ce qui serait à vérifier par une étude de validation. Il faut donc se méfier d’une surestimation liée à un surcodage des DAS. Il serait néanmoins très intéressant de les repérer dans le champ MCO, à condition de confirmer l’existence d’une dépression avec d’autres arguments, tels que la délivrance d’un traitement antidépresseur, l’existence d’un DAS pour tentative de suicide pendant cette hospitalisation, la confirmation par l’existence d’hospitalisations antérieures ou ultérieures, de consultations chez un spécialiste ou par la mention de la dépression dans le RIM-P. Se pose alors la question du recul de la prise en compte des hospitalisations antérieures : faut-il prévoir un an ? deux ans ? Ou plus ?
62 Par ailleurs, une analyse sur les données du SNIIRAM est en cours au sein du groupe, en partant de toutes les hospitalisations avec mention de tentative de suicide en MCO : il s’agit d’étudier s’il est possible de conserver les hospitalisations pour lesquelles il y avait, avant ou après (année glissante), soit une ou plusieurs délivrances d’un traitement antidépresseur en médecine de ville – dont le seuil reste à définir – soit une hospitalisation en MCO/RIM-P avec la mention de dépression, quelle que soit la position du diagnostic. Pour le repérage des médicaments antidépresseurs, ceux-ci sont classés en ATC N06A. En revanche, le repérage par les consultations chez un spécialiste en psychiatrie a été écarté, car ces consultations peuvent concerner d’autres motifs que la dépression. De plus, la plupart des prescriptions des traitements antidépresseurs sont réalisées par des médecins généralistes. L’idée est de les utiliser comme un marqueur éventuel de troubles dépressifs. Comme pour les DAS, les hospitalisations pour lesquelles il y aurait, avant ou après, une délivrance d’un traitement antidépresseur en médecine de ville ou une hospitalisation en MCO/RIM-P avec la mention d’une dépression, quelle que soit la position du diagnostic, pourraient être conservées. À partir de ces marqueurs (DAS ou tentative de suicide), il serait possible de reconstituer, grâce aux données du SNIIRAM, les différents parcours envisageables de ces patients, puis de demander à des experts s’ils pensent que certains parcours peuvent être considérés comme relevant d’une prise en charge pour dépression ou non et être intégrés dans la construction des algorithmes. Si l’objectif était de repérer les dépressions sévères hospitalisées en psychiatrie, on pourrait s’appuyer sur les données du RIM-P. Si l’objectif était de repérer toutes les personnes prises en charge pour un état dépressif, on pourrait définir des bornes. Pour la fourchette haute, on pourrait ajouter les DAS de dépression ou les DAS de tentative de suicide en MCO, à condition que cela soit confirmé par des éléments du parcours de soins, jugés recevables par les experts.
Faut-il réaliser des études de validation ?
63 La principale question soulevée par les intervenants à l’issue de l’entretien est celle du manque d’analyses de validation, qui n’ont pas été menées sur les bases de données médico-administratives faute de gold standard. Ces analyses sont nécessaires mais complexes à mettre en œuvre, notamment parce qu’elles doivent idéalement s’appuyer sur des dossiers de patients suivis en médecine de ville par des libéraux. Néanmoins, ces études sont nécessaires pour estimer la performance des algorithmes (sensibilité, spécificité, valeur prédictive positive), puis pour les valider et explorer les apparentes contradictions entre les médicaments délivrés et les diagnostics rapportés.
Conclusion
64 Les sources de données pour évaluer la dépression de l’adulte sont multiples (bases de données médico-administratives de l’assurance maladie, PMSI de l’ATIH, enquête déclarative …) et concernent des populations différentes.
65 L’état des lieux présenté ici, réalisé auprès des utilisateurs de bases de données médico-administratives, met en évidence une variété des critères pris en compte dans les algorithmes existants de repérage de la dépression. L’élaboration d’un algorithme généraliste applicable à ces différentes sources ne nous paraît pas concevable, car il devrait forcément s’adapter aux spécificités de l’étude et de la source de données. Cette difficulté est renforcée dans le champ de la psychiatrie. Contrairement à d’autres pathologies chroniques, comme le diabète par exemple, le traitement antidépresseur n’est pas forcément spécifique de la dépression.
66 Nos premières investigations montrent effectivement qu’il est difficile d’individualiser les dépressions de façon complètement fiable à partir des données du SNIIRAM, de définir des niveaux de sévérité, et que des études de validation des algorithmes proposés sont nécessaires. Néanmoins, il est tout de même possible d’identifier des groupes de patients souffrant de dépression répondant à une combinaison de critères d’inclusion (on peut identifier les patients hospitalisés pour tentative de suicide dans le cadre d’une dépression par exemple).
67 De futurs travaux sont donc nécessaires pour réaliser la validation des critères de repérage de la dépression, à partir de sources complémentaires telles que le dossier médical ou de confrontation des résultats de l’application des algorithmes à des travaux déjà publiés (enquêtes en population).
68 Ce travail de validation devra s’intéresser à plusieurs catégories d’algorithmes, afin de permettre à chacun de construire un algorithme d’identification qui réponde spécifiquement à ses objectifs.
69 Par exemple, les personnes sous traitement antidiabétique sont toutes diabétiques (sauf cas aberrant), alors qu’il n’en va pas de même pour les personnes sous traitement antidépresseur. Du coup, il faudrait pointer du doigt que le repérage dans les bases de données médico-administratives se fait par le constat d’une forme de prise en charge qui sous-tend elle-même un questionnement sur sa pertinence et son adéquation face à la situation réelle du patient, qui reste inconnue.
Glossaire
Notes
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[*]
L’ordre de présentation a été défini par les auteurs.
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[1]
Réseau national pour la validation des algorithmes utilisés pour identifier des cas de pathologies dans le programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI). Le groupe REDSIAM-Troubles mentaux et du comportement composé de : A. Amariei, N. Authier, M.-J. Bismuth, R. Bouhia, V. Carrasco, C. Chan-Chee, F. Chin, M. Coldefy, C. Collin, J. Cottenet, J-P. Fagot, N. Fourcade, C. Gourier-Fréry, I. Khati, R. Legal, A-S. Mariet, R. Mas, F. Mikol, M. C. Mouquet, C. Nestrigue, A. Neumann, J-F. Philippon, L. Plancke, C. Quantin, D. Raynaud, S. Rey, P. Ricordeau, A. Roussot, J. Rudant, E. Rusch, A. Soudry-Faure, C. Verret.
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[2]
Remerciements
Nous remercions tous les membres du réseau REDSIAM du groupe de travail Troubles mentaux et du comportement, ainsi que les experts du domaine et utilisateurs de bases de données médico-administratives, qui ont bien voulu participer à cette concertation.
Ce rapport a profité de la relecture attentive du Pr B. Bonin (centre hospitalier universitaire de Dijon) et du Dr N. Younès (centre hospitalier de Versailles), du Pr M. Goldberg (UMS 011-Cohortes épidémiologiques en population), du Dr A. Fagot-Campagna (Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés – CNAMTS) et du Dr A. Vuagnat (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques – DREES), ainsi que de l’ensemble des membres du groupe de travail et des personnes ayant participé aux entretiens :
Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – ANSM : K. Bouillon ; Agence technique de l’information sur l’hospitalisation – ATIH : A. Buronfosse ; centre hospitalier spécialisé Le Vinatier : C. Marescaux ; CNAMTS : P. Ricordeau et J.-P. Fagot ; fédération régionale de recherche en santé mentale Nord-Pas-de-Calais : L. Plancke ; hôpital de Bicêtre – Hôpitaux universitaires Paris Sud : E. Corruble, Y. Mikaeloff (sur proposition de la DREES) ; Institut de veille sanitaire – InVS : C. Gourier-Fréry, C. Chan-Chee ; Institut de recherche et documentation en économie de la santé – IRDES : C. Nestrigue, M. Coldefy ; observatoire régional de la santé des Pays-de-la-Loire : A. Tallec, J.-F. Buyck, F. Lelièvre.
Nous remercions l’ Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – ANSM pour son soutien pour la réalisation de cette étude. -
[3]
ATIH : Agence technique de l’information sur l’hospitalisation ; ANSM : Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ; CNAMTS : Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés ; DREES : Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques ; HAS : Haute Autorité de santé ; INCA : Institut national du cancer, INSERM : Institut national de la santé et de la recherche médicale ; IRDES : Institut de recherche et documentation en économie de la santé ; INVS : Institut de veille sanitaire ; MSA : Mutualité sociale agricole ; RSI : Régime social des indépendants.
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[4]
File active : total des patients vus au moins une fois dans l’année soit en hospitalisation, soit en consultation, soit en visite à domicile.
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[5]
À signaler qu’il existe une version encore plus récente de la cartographie : http://www.ameli.fr/fileadmin/user_upload/documents/Methodologie_medicale_MaJ_2015.pdf
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[6]
Classification anatomique, thérapeutique et chimique.