CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction [1]

1 La question de la coopération entre les professionnels de santé et des transferts de compétences des médecins vers les autres professionnels de santé a connu un essor important en France au cours de la dernière décennie. Ce sujet fait partie intégrante de la question de l’organisation des soins primaires avec l’objectif d’un virage ambulatoire, qui prévoit davantage de prévention, de coopération et de coordination entre les professionnels de santé dans le suivi des patients, notamment ceux ayant des maladies chroniques.

2 Dans ce contexte, la coopération et la délégation d’activité des médecins vers les autres professionnels de santé revêt un double enjeu. Le premier est d’apporter des solutions aux problèmes démographiques en améliorant l’accès géographique ou temporel aux soins dans les zones sous-dotées en offre médicale. Il s’agit dans ce cas de substitution d’une partie de l’activité médicale par celle des autres professionnels de santé, notamment des infirmiers.

3 Le second concerne l’amélioration de la couverture des besoins de la population qui ne sont pas ou pas toujours suffisamment couverts : manque de temps médical, manque d’intérêt de la part des médecins, non adéquation entre l’organisation du cabinet médical et la couverture de ces nouveaux besoins, notamment ceux des patients atteints de maladies chroniques, dont l’effectif ne cesse d’augmenter [2]. Dans cette optique, la délégation permet une couverture d’une partie de ces besoins par d’autres professionnels de santé formés dans le suivi et l’accompagnement des patients souffrant de maladies chroniques. Le médecin et les autres professionnels de santé (l’infirmier, le pharmacien…) peuvent être complémentaires dans la prise en charge de ces patients.

4 Notre travail concerne la coopération et la délégation d’activité entre les médecins généralistes et les infirmiers. Malgré un nombre important d’études sur les impacts attendus de la délégation sur la qualité et l’efficience des soins (voir la revue de littérature proposée par Laurant, 2007), peu d’études existent sur l’opinion des médecins, relatives aux questions de coopération et de délégation d’activité vers les autres professionnels de santé, notamment les infirmiers. De premiers résultats sur cette question ont néanmoins pu être obtenus à partir de l’interrogation en 2012 d’un panel de médecins généralistes (Massin, 2014). Seul un tiers des médecins généralistes interrogés seraient favorables à des coopérations avec un infirmier sur une ou plusieurs tâches, ce résultat étant par ailleurs très sensible au mode de financement d’un tel dispositif. Les tâches relevant des compétences réglementaires du médecin telles que les prescriptions, seraient par ailleurs moins volontiers déléguées à un infirmier. Grâce à cette même source, mais en exploitant davantage la richesse des questions collectées auprès de ces médecins généralistes, cette étude tente d’apporter un éclairage plus approfondi des déterminants à l’œuvre dans la coopération et la délégation d’actes des médecins vers les infirmiers. L’organisation du cabinet, l’emploi du temps du médecin, sa patientèle ou sa zone d’installation jouent notamment des rôles cruciaux.

5 L’article est structuré en six sections. La première est consacrée aux expériences étrangères et en France de coopération et de délégation d’activité entre les professionnels de santé, en particulier médecins et infirmiers. La deuxième section présente les données du panel des médecins généralistes mobilisées ici. Une analyse exploratoire des résultats est réalisée en troisième section. La quatrième décrit la modélisation utilisée et présente ses résultats. La cinquième analyse expose les profils des médecins favorables à la délégation selon le type d’activité déléguée. Enfin la dernière section ouvre la discussion.

Expériences étrangères et françaises sur la coopération entre les médecins et les infirmiers

6 La question des coopérations entre professionnels de santé tourne aujourd’hui beaucoup, en France comme à l’étranger, autour du rôle des « infirmiers cliniciens » ou des « infirmiers en pratiques avancées ». Il n’y a pas de norme internationale pour définir ces « pratiques avancées », mais on considère généralement que ces infirmiers exercent dans les soins primaires et fournissent un ensemble de services, parmi lesquels certains relèveraient de l’activité des médecins : par exemple être le premier contact pour les personnes atteintes d’une affection mineure, les dépistages, les activités dans le champ de la prévention et de l’éducation à la santé, assurer le suivi de routine des patients souffrant de maladies chroniques, prescrire des médicaments ou des tests (Delamaire et Lafortune, 2010). Dans la plupart des pays, le développement des pratiques infirmières avancées s’explique, du moins au début, par une pénurie de l’offre médicale. Cependant, leur rôle évolue rapidement avec les nouveaux enjeux de santé liés au vieillissement de la population ; en lien avec le personnel médical et médico-social, les infirmiers ont pris une place importante dans la prise en charge des maladies chroniques.

7 Dans la plupart des pays et conformément aux recommandations du Conseil international des infirmiers [3], un diplôme de master est recommandé ou requis pour pouvoir exercer sous cette qualité (on parle souvent d’« infirmiers praticiens » ou nurse practitioners en anglais). Dans certains pays, des formations spécifiques sont prévues pour élargir encore plus le champ de compétences des infirmiers, comme la prescription de médicaments par exemple au Royaume-Uni (Delamaire et Lafortune, 2010).

8 Trois types d’activités en pratique infirmière avancée sont ainsi généralement distingués :

  • activités cliniques et techniques telles que les consultations infirmières avancées, la prescription et l’interprétation de tests diagnostiques, la prescription des médicaments dans certains cas ;
  • promotion de la santé avec les bilans de santé, l’éducation du patient et le dépistage ;
  • suivi des maladies chroniques (diabète, maladies cardio-vasculaires, broncho-pneumopathie chronique obstructive-BPCO…). Selon l’état de santé des patients, les infirmiers sont impliqués dans la gestion et le suivi de la maladie (disease management) et dans la gestion des cas les plus lourds (case management).

9 En Australie, au Canada, au Royaume-Uni, les consultations avancées et la prescription des médicaments font partie de l’activité des infirmiers praticiens, mais dans un cadre limité (listes et situations types) ou dans des conditions d’exercice bien précisées (Bourgueil, 2006).

10 Les programmes de disease management ont été mis en œuvre en Allemagne, aux Pays-Bas, aux États-Unis afin d’améliorer la prise en charge des maladies chroniques. Les infirmiers jouent un rôle important dans le suivi et l’accompagnement de ces patients (annexe 1).

11 En France, l’expérimentation « Asalée » de coopération entre médecin et infirmier a été mise en place en 2004 (Bourgueil, 2008). Le protocole Asalée propose essentiellement des séances individuelles d’éducation thérapeutique, réalisées par les infirmiers auprès de patients adhérant à ce dispositif et, dans une moindre mesure, un transfert des actes médicaux vers les infirmiers. Les infirmiers réalisent ces activités dans le cabinet médical et en lien avec le médecin. Depuis 2013, le protocole de coopération Asalée a intégré les expérimentations des nouveaux modes de rémunération (ENMR) auprès des maisons et centres de santé.

12 En ce qui concerne le rôle de l’infirmier dans les programmes de gestion individuelle des patients (case management), nous pouvons l’observer dans de nombreux programmes aux États-Unis, au Canada ou au Royaume-Uni. Il s’agit le plus souvent des patients avec des pathologies lourdes ou complexes, ayant plusieurs maladies chroniques ou en période-clé de transition dans le parcours de soins. Une période-clé intervient par exemple après une hospitalisation, lorsqu’un suivi régulier et rapproché du patient est nécessaire pour éviter l’aggravation de son état de santé et une nouvelle hospitalisation dans certains cas. Loin d’être exhaustifs, nous donnerons quelques exemples de ces programmes en annexe 1.

13 En conclusion, malgré une grande variété des programmes, il existe un point commun par rapport au rôle des infirmiers :

  • leur spécialisation dans les maladies chroniques qu’ils suivent ;
  • leur rôle important dans la coordination et la prise en charge des pathologies chroniques et complexes, avec notamment une participation active à l’élaboration des plans de soins ;
  • un contact intensif avec les patients, par téléphone ou via des visites à domicile pour les personnes âgées ou à haut risque.

Données mobilisées

14 La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), en collaboration avec les observatoires régionaux de santé (ORS) et les unions régionales de professionnels de santé, médecins libéraux (URPS-ML) des régions Provence-Alpes-Côte d’Azur, Pays de la Loire et Bourgogne [4], a mis en place sur la période 2010-2012 un panel national de médecins généralistes libéraux (appelé « panel 2 »). Pour chaque panel, un échantillon représentatif de médecins (encadré 1) a été interrogé pendant trois ans avec une périodicité d’une vague d’enquête par semestre.

Encadré : Description du panel 2 et des questions posées aux médecins généralistes

La base de sondage
Le panel a pour objectifs d’observer et de décrire les conditions d’exercice et les pratiques de prise en charge des médecins généralistes libéraux, ainsi que leur environnement professionnel et géographique. Les médecins généralistes sont interrogés, à travers des enquêtes, à la fois par rapport aux dimensions évoquées et sur des sujets plus spécifiques, comme la vaccination, la prévention, la coopération entre les médecins et les autres professionnels de santé, l’attitude face aux recommandations de bonne pratique et en matière de prescriptions médicamenteuses [5].
La base de sondage a été constituée à partir du répertoire d’automatisation des listes (ADELI), qui recense l’ensemble des professions de santé. Les médecins exclusivement salariés, ayant des projets de cessation d’activité ou de déménagement à moins d’un an et avec un mode d’exercice particulier (MEP) ont été exclus. Les données des enquêtes sont enrichies avec celles extraites des relevés individuels d’activité et de prescription (RIAP) envoyées par l’assurance maladie. Dans le RIAP, les informations relatives à l’activité et à la prescription des médecins et aux caractéristiques de la patientèle – répartition par tranches d’âge, nombre de patients par médecin traitant, part des bénéficiaires en couverture maladie universelle complémentaire (CMUC) – sont renseignées. Les échantillons ont été constitués par tirages aléatoires stratifiés sur le sexe, l’âge, le type de la commune d’exercice et le volume d’activité des médecins. Les données des répondants ont été pondérées afin d’être représentatives de l’ensemble des médecins généralistes français selon l’âge, le sexe, le lieu d’exercice et le nombre d’actes réalisés.

15 La cinquième vague du panel 2 a eu lieu à l’automne 2012 et elle a été consacrée aux thèmes de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) et de la coopération avec les infirmiers. Notre étude est, ici, ciblée sur le volet coopération. Elle prolonge les résultats d’une première exploitation de la vague 5, publiée en février 2014 (Massin, 2014). Notre analyse est notamment enrichie de plusieurs variables de la vague 2 de ce même panel, portant sur l’organisation du cabinet et l’emploi du temps des médecins généralistes (encadré 2).

16 Pour le panel 2, l’échantillon national des médecins à interroger est constitué de 5 340 généralistes. Au total les réponses de 1 121 médecins sont exploitables pour la cinquième vague du panel 2. Après l’appariement des données de l’enquête de la vague 5 avec celles de la vague 2, les réponses de 849 médecins généralistes sont exploitables. Les répartitions des médecins selon leurs caractéristiques, avant et après l’appariement, sont présentées en annexe 2 et comparées avec l’ensemble des médecins généralistes de la France entière.

17 Les questions sur la délégation de tâches sont posées aux médecins généralistes sous l’hypothèse qu’une loi de réforme offre la possibilité de rattacher un infirmier au cabinet pour quelques permanences dans la semaine. Celui-ci serait rémunéré selon l’un des trois scénarios suivants, proposés aléatoirement à trois sous-échantillons de médecins :

  • par un forfait de l’assurance maladie (269 médecins répondants après l’appariement) ;
  • pour moitié sur les revenus d’exercice libéral du cabinet (287 médecins répondants après l’appariement) ;
  • intégralement sur les revenus d’exercice libéral du cabinet (293 médecins répondants après l’appariement).

18 Les caractéristiques observées des médecins de ces trois sous-échantillons ne diffèrent pas sensiblement de celles de l’échantillon des médecins répondants après l’appariement des vagues 2 et 5 (annexe 3).

Encadré : Variables mobilisées dans l’étude

Vague 5 du panel 2 (ROSP et coopération avec les infirmiers).
Le médecin est interrogé sur sa disposition à lui déléguer une ou plusieurs tâches et, si oui,
  • sur le type de tâche déléguée, parmi les suivantes :
  • éducation thérapeutique du patient diabétique ou asthmatique ;
  • prescription d’HbA1c pour un patient diabétique ;
  • frottis cervical ;
  • vaccination et application du calendrier vaccinal ;
  • éducation nutritionnelle ;
  • interrogation des patients sur leur curriculum laboris (histoire professionnelle du patient) ;
  • interrogation des patients sur leurs habitudes de vie ;
  • accompagnement des patients lors de l’arrêt de la consommation de tabac ;
  • surveillance de la tension artérielle ;
  • réalisation de certains gestes techniques : électrocardiogramme (ECG), suture… ;
  • réalisation de tâches administratives (mise à jour du dossier médical patient, codage diagnostic…) ;
  • tests de diagnostic rapide réalisés au cabinet.
Vague 2 du panel 2 (l’organisation du cabinet et l’emploi de temps du médecin)  : nombre de professionnels de santé exerçant au sein du cabinet, présence d’un secrétariat médical, nombre de demi-journées (ou soirées) de formation médicale continue ou évaluation des pratiques professionnelles (EPP) suivies dans l’année, satisfaction vis-à-vis du temps de travail, durée moyenne de consultation, opinion sur la zone de patientèle (dispose-t-elle d’un nombre suffisant de médecins généralistes ?).
Autres variables liées au lieu d’exercice du médecin : en plus de l’indicateur d’accessibilité potentielle localisée (APL [6]), on mobilise ici le zonage en aires urbaines, défini par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE [7]).
Enfin, quelques caractéristiques de la patientèle du médecin (tranches d’âges, patients avec CMUC) sont également retenues dans notre étude.

Les médecins sont globalement réticents à la délégation : seulement un tiers y seraient favorables

19 Interrogés sur leur propension à déléguer au moins une activité vers un infirmier de leur cabinet, 22 % des médecins généralistes y sont assez favorables et 12 % y sont tout à fait favorables.

20 Les médecins seraient d’autant plus favorables au transfert d’activité si celui-ci était rémunéré par l’assurance maladie (60 % d’entre eux). En revanche, dans le cas d’une rémunération mixte (moitié par l’assurance maladie et moitié par les revenus du cabinet) 27 % des médecins seraient favorables à la délégation. Lorsque l’infirmier est intégralement rémunéré par les revenus du cabinet, seuls 17 % des avis seraient favorables.

21 Les caractéristiques des médecins sont différentes selon qu’ils sont favorables ou non à la délégation (tableau 1) : les médecins favorables sont davantage les praticiens hommes qui exercent en cabinets de groupe ; ils indiquent plus souvent vouloir travailler moins, mais sans que cela soit possible, car personne ne pourrait les remplacer. Ils sont aussi plus nombreux à considérer qu’il n’y a pas suffisamment de médecins dans leur zone de patientèle.

Tableau 1

La répartition des médecins selon l’opinion sur la délégation de tâches [8]

Tableau 1
Variables Total Délégation (oui) Délégation (non) Sexe Femme 28 % 25 % 30 % Homme 72 % 75 % 70 % Âge Moins de 49 ans 34 % 38 % 32 % De 49 à 56 ans 36 % 37 % 35 % Plus de 56 ans 30 % 25 % 33 % Formation continue Moins d’une demi-journée 7 % 6 % 7 % Entre 1 et 9 demi-journées 34 % 33 % 34 % Entre 10 et 19 demi-journées 31 % 31 % 31 % Au moins 20 demi-journées 28 % 29 % 28 % Activité (nombre de consultations) Moins de 2 849 20 % 12 % 24 % De 2 849 à 5 494 55 % 61 % 52 % Plus de 5 494 25 % 26 % 23 % Durée des consultations Moins de 15 min 9 % 8 % 9 % Entre 15 et 19 min 50 % 49 % 50 % Au moins 20 min 41% 43 % 41 % Nombre de professionnels de santé du cabinet 1 (cabinet individuel) 47 % 40 % 51 % 2 (cabinet de groupe) 21 % 23 % 20 % 3 (cabinet de groupe) 12 % 15 % 11 % 4 et plus (cabinet de groupe) 20 % 22 % 19 % Secrétariat Non 46 % 37 % 50 % Oui 54 % 63 % 50 % Aire urbaine Grand pôle 61 % 56 % 64 % Couronne grand pôle urbain 12 % 13 % 12 % Couronne grand pôle rural 9 % 11 % 8 % Petit ou moyen pôle 7 % 5 % 8 % Couronne petit ou moyen pôle urbain 5 % 6 % 4 % Hors aire urbaine 6 % 10 % 5 % APL Moins de 55 11 % 15 % 10 % Entre 55 et 70 19 % 19 % 19 % Entre 71 et 87 29 % 26 % 31 % Plus de 87 41 % 40 % 41 %
Tableau 1
Variables Total Délégation (oui) Délégation (non) Opinion sur le temps de travail Emploi du temps qui convient 42 % 36 % 45 % Souhait de travailler moins, mais pas possible pour des raisons financières 15 % 13 % 16 % Souhait de travailler moins, mais pas possible, car personne pour remplacer 43 % 51 % 39 % Opinion sur le nombre des médecins généralistes dans la zone de patientèle Oui, leur nombre est suffisant 64 % 56 % 69 % Non 36 % 44 % 31 % Taille de la patientèle (file active) Moins de 1 225 23 % 14 % 28 % Entre 1 225 et 1 708 26 % 29 % 25 % Entre 1 708 et 2 200 26 % 31 % 24 % 2 200 patients et plus 25 % 27 % 24 % Part des patients de 70 ans et plus Moins de 10 % 31 % 29 % 32 % Entre 10 % et 15 % 28 % 30 % 27 % Entre 15 % et 20 % 22 % 23 % 22 % 20 % et plus 19 % 18 % 19 % Part des patients en CMUC Moins de 3 % 20 % 18 % 21 % Entre 3 % et 5 % 24 % 26 % 23% Entre 5 et 9% 26% 25% 26% 9% et plus 30% 30% 31%

La répartition des médecins selon l’opinion sur la délégation de tâches [8]

Source : RIAP, l’appariement des vagues 2 et 5 de l’échantillon national, données pondérées.

Méthode d’analyse et résultats

22 Afin d’isoler les effets propres de chacun de ces facteurs, cette analyse exploratoire doit être complétée par une approche « toutes choses égales par ailleurs ». Une régression logistique multiple est réalisée pour étudier la probabilité de délégation d’activité du médecin vers l’infirmier du cabinet.

23 Le choix d’étudier les trois scénarios de financement dans la même analyse s’explique par les faibles effectifs des sous-échantillons pour certaines variables envisagées. Par ailleurs, comme évoqué dans la section sur les données mobilisées, les caractéristiques observées des médecins de ces trois sous-échantillons ne diffèrent pas sensiblement de celles de l’ensemble de l’échantillon (annexe 3).

24 Le pouvoir prédictif du modèle est bon, la courbe ROC – Receiving Operating Characteristic –, qui mesure la performance d’un classificateur binaire, est égale à 78 %, et 73 % des paires sont concordantes. Le modèle prévoit correctement 50 % des opinions favorables à la délégation, et 65 % des avis favorables prévus par le modèle sont en réalité ceux qui sont favorables à une délégation d’activité (tableau 2).

Tableau 2

Résultats du modèle logistique multiple

Tableau 2
Variables Odds ratios Std. Err. P>|z| IC à 95 % Sexe (Réf. = femme) Homme 1,52 0,05 0,000 1,43-1,63 Âge (Réf. = moins de 49 ans) De 49 à 56 ans 0,81 0,03 0,000 0,76-0,87 Plus de 56 ans 0,60 0,02 0,000 0,56-0,64 Activité (Réf. = moins de 2 849) De 2 849 à 5 494 1,64 0,06 0,000 1,52-1,77 Plus de 5 494 1,16 0,06 0,002 1,05-1,27 Durée des consultations (Réf. = moins de 15 min) Entre 15 et 19 min 1,07 0,05 0,163 0,97-1,18 Au moins 20 min 1,42 0,08 0,000 1,27-1,58 Nombre de professionnels de santé du cabinet (Réf. = cabinet individuel) 2 (cabinet de groupe) 1,35 0,05 0,000 1,25-1,44 3 (cabinet de groupe) 1,43 0,06 0,000 1,31-1,56 4 et plus (cabinet de groupe) 1,17 0,05 0,000 1,08-1,26 Secrétariat (Réf. = non) Oui 1,38 0,04 0,000 1,30-1,47 Aire urbaine (Réf. = grand pôle) Couronne grand pôle urbain 1,42 0,06 0,000 1,31-1,54 Couronne grand pôle rural 1,41 0,07 0,000 1,29-1,55 Petit ou moyen pôle 0,64 0,04 0,000 0,57-0,72 Couronne petit ou moyen pôle urbain 1,85 0,12 0,000 1,63-2,10 Hors aire urbaine 2,38 0,13 0,000 2,14-2,66 APL (Réf. = moins de 55 ETP8 pour 100 000 habitants) Entre 55 et 70 0,55 0,03 0,000 0,50-0,61 Entre 71 et 87 0,54 0,03 0,000 0,50-0,60 Plus de 87 0,67 0,03 0,000 0,61-0,73 Rémunération de l’infirmier travaillant dans le cabinet du médecin (Réf. = intégralement sur les revenus du cabinet du médecin) Pour moitié sur les revenus du cabinet 1,95 0,07 0,000 1,83-2,09 Intégralement par un forfait de l’assurance maladie 8,44 0,29 0,000 7,90-9,03 Formation continue (Réf. = moins d’une demi-journée) Entre 1 et 9 demi-journées 0,98 0,06 0,688 0,87-1,09 Entre 10 et 19 demi-journées 1,05 0,06 0,407 0,94-1,17 Au moins 20 demi-journées 1,29 0,08 0,000 1,15-1,45 Opinion sur le temps de travail (Réf. = emploi du temps qui convient au médecin) Souhait de travailler moins, mais pas possible pour des raisons financières 0,83 0,03 0,000 0,77-0,90
Tableau 2
Variables Odds ratios Std. Err. P>|z| IC à 95 % Souhait de travailler moins, mais pas possible, car personne pour remplacer 1,41 0,04 0,000 1,33-1,50 Opinion sur le nombre des médecins généralistes dans la zone de patientèle (Réf. = oui, leur nombre est suffisant) Non, leur nombre n’est pas suffisant 1,77 0,05 0,000 1,68 1,88 Part des patients de 70 ans et plus (Réf. = moins de 10 %) Entre 10 % et 15 % 1,29 0,05 0,000 1,20-1,38 Entre 15 % et 20 % 1,12 0,05 0,006 1,03-1,21 20 % et plus 0,97 0,04 0,462 0,88-1,06 Part des patients en CMUC (Réf. = moins de 3 %) Entre 3 % et 5 % 1,36 0,06 0,000 1,26-1,48 Entre 5 % et 9 % 1,23 0,05 0,000 1,14-1,33 9 % et plus 1,58 0,07 0,000 1,46-1,72 Pouvoir prédictif du modèle : Sensibilité 50 % Spécificité 85 % PPV (valeur prédictive positive) 65 % NPV (valeur prédictive négative) 76 % Paires concordantes 73 %

Résultats du modèle logistique multiple

Source : RIAP, l’appariement des vagues 2 et 5 de l’échantillon national, données pondérées.

Le mode de financement de l’infirmier est primordial

25 Sans surprise, le facteur jouant le plus sur la propension à déléguer est le mode de financement de l’infirmier : plus le financement est intégré (pris intégralement sur les revenus du cabinet), plus les médecins sont défavorables à la délégation de tâches.

Les caractéristiques personnelles et professionnelles des médecins restent cependant déterminantes

26 Les praticiens hommes, ainsi que les jeunes médecins veulent transférer davantage par rapport aux femmes et aux confrères plus âgés. Ce sont également plutôt des médecins qui exercent dans les cabinets de groupe disposant d’un secrétariat (qu’il soit physiquement dans le cabinet, comme dans 80 % des cas, ou qu’il s’agisse d’un secrétariat téléphonique). À l’opposé, les médecins sans secrétariat sont moins enclins à déléguer : on peut y voir une certaine cohérence en terme d’organisation du cabinet, partant du principe que ces derniers ne délèguent pas leur tâche administrative à une secrétaire (que ce soit en raison de contraintes financières ou autres), il n’est pas étonnant qu’ils soient aussi en moyenne plus réticents à déléguer une ou plusieurs tâches – même non médicales – à un autre professionnel. La taille du cabinet de groupe semble en revanche n’avoir que peu d’influence.

L’importance du contexte géographique

27 Contrôlée par l’indicateur de l’APL, la typologie du territoire d’exercice a une influence significative, confirmant les résultats descriptifs de la partie précédente. Les médecins généralistes installés dans les couronnes de grands pôles urbains et ruraux, ainsi que dans les couronnes des petits ou moyens pôles urbains sont davantage favorables à transférer certains actes par rapport aux généralistes des grands pôles urbains. Le même constat est valable pour les médecins installés dans les zones hors aire urbaine (zones rurales isolées) qui sont environ deux fois plus souvent en faveur de la délégation par rapport à ceux de grands pôles. En revanche, les médecins des petits ou moyens pôles sont moins enclins à une délégation d’activité vers les infirmiers par rapport aux généralistes des grands pôles.

28 En plus de ces caractéristiques objectives du territoire d’exercice, un éventuel sentiment d’« isolement » du médecin dans sa zone peut également contribuer à modifier son opinion sur la délégation de tâches. Ainsi, les médecins généralistes qui estiment insuffisant le nombre de confrères généralistes exerçant dans leur zone de patientèle sont plus enclins à déléguer que les autres.

La formation continue, la charge de travail, les pratiques du médecin influent également sur son opinion de délégation

29 Les médecins généralistes les plus assidus au dispositif de formation continue sont également les plus enclins à déléguer : les médecins qui suivent au moins vingt demi-journées de formation au cours de l’année ont une probabilité d’être enclins à transférer une part de leur activité supérieure de près de 40 % à celle d’un médecin qui ne suit pas de formation.

30 Les généralistes ayant une activité moyenne ou élevée sont aussi davantage favorables à une délégation d’activité, en comparaison avec les praticiens qui ont une faible activité. À niveau d’activité équivalent, c’est aussi le ressenti du médecin qui joue sur son appétence pour la délégation de tâches. Ainsi, les médecins exprimant le souhait de travailler moins, mais pour qui c’est impossible faute de remplacement disponible, sont plus favorables à la délégation par rapport aux médecins déclarant un emploi du temps qui leur convient. La taille de la file active confirme également ce résultat : les médecins ayant beaucoup de patients sont davantage favorables à la délégation que ceux qui ont peu de patients. En revanche, les généralistes souhaitant travailler moins, mais pour qui c’est impossible pour des raisons financières, sont moins favorables à un transfert d’activité vers l’infirmier. Vraisemblablement, pour ces médecins, la délégation est considérée comme une perte d’activité et ainsi comme une concurrence avec les infirmiers pour une partie de leur activité.

31 L’effet de la durée moyenne de consultation déclarée par le médecin sur la délégation d’activité n’est cependant significatif que lorsque cette durée est supérieure à vingt minutes : ces médecins sont plus favorables à un transfert d’activité, par rapport à ceux déclarant des durées de consultation inférieures à quinze minutes. L’interprétation de ce résultat n’est pas évidente, la pratique de consultations longues pouvant relever à la fois d’une conception particulière de la médecine et de caractéristiques objectives de la patientèle (patients en situation de dépendance, atteints de polypathologies ou de troubles psychologiques, etc.).

Un rôle plus ambigu de la structure d’âge de la patientèle

32 La structure d’âge de la patientèle du médecin joue un rôle plus ambigu sur la propension à transférer une ou plusieurs tâches à un infirmier du cabinet. Les médecins les plus enclins à déléguer sont ceux dont la part de personnes âgées (70 ans et plus) dans leur patientèle se situe autour de la médiane (entre 10 et 20 % de patients ayant 70 ans ou plus). Ceux qui en ont très peu (moins de 10 %) ou au contraire beaucoup (au-delà de 20 %) délèguent moins volontiers à un infirmier. Pour ces derniers, une hypothèse est qu’il s’agit de médecins pour qui la délégation concernerait une part importante de leur patientèle, souvent en lien avec les soins autour de la personne âgée et qui verraient dès lors la délégation comme une concurrence. Enfin, les médecins ayant une part importante de patients en CMUC sont davantage enclins à transférer.

La délégation des activités liées à l’interrogation et l’éducation des patients versus celle des actes techniques et de la prescription

33 Les médecins ayant répondu favorablement à la délégation sont interrogés sur le type de tâche déléguée à l’infirmier (voir la liste dans l’encadré 2). Les tâches déléguées peuvent être regroupées en trois grandes catégories, en fonction de leur nature. Nous avons exclu de cette classification les tâches administratives qui ne font pas partie des activités de soins ou de prise en charge des patients en lien avec leur maladie.

34 La première catégorie inclut des activités non techniques de recherche d’informations auprès du patient ou d’éducation à la santé, pour lesquelles la présence effective d’un membre d’une profession médicale n’est pas explicitement requise au moment de leur réalisation (même s’il en réalise la supervision).

35 La seconde catégorie inclut des actes techniques courants de diagnostic et de surveillance, dont la réalisation peut être, pour certains d’entre eux, déjà effectuée par un membre d’une profession paramédicale (en milieu hospitalier en particulier), avec une interprétation postérieure ou une supervision médicale.

36 La troisième catégorie inclut des actes techniques (frottis cervical) ou une prescription (prescription Hba1c), dont la réalisation est réservée à un membre d’une profession médicale.

Favorables à une délégation d’activité liée à l’interrogation et à l’éducation des patients, et moins favorables à une délégation des actes techniques et de la prescription de Hba1c

37 C’est pour la troisième catégorie, qui inclut des gestes plus techniques, comme ici le frottis cervical ou la prescription Hba1c, que les médecins sont les plus opposés à une délégation d’activité vers l’infirmier (respectivement 13 % et 17 % de l’ensemble des médecins). Il s’agit plutôt d’activités considérées par les médecins comme faisant partie du cœur de leur métier et de leur pratique.

Figure 1

La répartition des opinions des médecins sur la délégation selon le type d’activité déléguée et le mode de financement de l’infirmier

Figure 1

La répartition des opinions des médecins sur la délégation selon le type d’activité déléguée et le mode de financement de l’infirmier

Source : l’appariement des vagues 2 et 5 de l’échantillon national, données pondérées.

38 Les médecins sont en revanche plus enclins à déléguer les activités liées à l’éducation et à l’accompagnement du patient ; 31 % seraient favorables à la délégation de l’éducation nutritionnelle et de l’éducation thérapeutique du patient diabétique ou asthmatique. Et quand l’infirmier est financé par l’assurance maladie cette proportion s’élève à 53 %. Il s’agit probablement, dans ce cadre, davantage d’une coopération entre le médecin et l’infirmier que d’une délégation exclusive. Ces activités sont les plus chronophages et ne peuvent pas être réalisées correctement en cas d’activité importante du médecin. Les prescriptions (ou la décision de ne pas prescrire) sont en revanche peu chronophages et sont considérées comme un élément essentiel de décision concernant le patient.

39 Indépendamment du type d’activité déléguée, les médecins seraient plus favorables à la délégation quand l’infirmier est financé par l’assurance maladie.

Différents profils de médecins en fonction du type d’activité déléguée

40 Les médecins favorables à une délégation des actes techniques le sont aussi pour les autres activités, notamment celles liées à l’éducation des patients. L’analyse qui suit est réalisée pour savoir si le profil des médecins favorables à une délégation des actes techniques est différent de celui des médecins qui délèguent uniquement les tâches liées à l’éducation des patients, les actes courants de diagnostic et de surveillance.

41 Le modèle précédent de la propension des médecins généralistes à déléguer à un infirmier est affiné en fonction du type d’activité transférée. L’analyse logistique multiple est donc réalisée cette fois-ci uniquement sur le champ des médecins favorables à la délégation d’activité, avec pour variable d’intérêt la probabilité d’être en faveur du transfert des activités de frottis cervical ou de prescription Hba1c (la troisième catégorie, voir supra). Les résultats du modèle sont illustrés dans l’annexe 4.

42 Parmi les médecins qui sont favorables à la délégation, les praticiens hommes, ainsi que les jeunes médecins sont plus enclins à transférer le frottis cervical ou la prescription Hba1c. La probabilité de déléguer le frottis cervical ou la prescription Hba1c est plus élevée pour les médecins exerçant dans des grands pôles urbains, leurs couronnes, ainsi que dans des communes avec une faible APL.

43 Enfin, comme déjà mis en évidence dans Massin (2014), parmi les médecins qui sont favorables à la délégation, la rémunération intégrale de l’infirmier sur les revenus du cabinet est plus privilégiée par les médecins favorables à la délégation du frottis cervical ou de la prescription Hba1c.

44 Ces résultats suggèrent l’existence d’une « approche entrepreneuriale » du cabinet libéral chez les médecins généralistes les plus favorables à la délégation y compris d’actes plus « techniques », impliquant plutôt de jeunes médecins installés dans les grandes villes et en périphérie urbaine. Selon cette logique d’organisation, le modèle de rémunération de l’infirmier par le cabinet s’approche des modèles en place au Royaume-Uni, où les infirmiers sont salariés des cabinets médicaux et placées sous l’autorité hiérarchique du responsable du cabinet, en général un médecin (Sibbald, 2010).

L’émergence des deux modèles de coopération…

45 Ces nouveaux résultats confirment ceux de l’étude précédente, obtenus à partir du panel 2 de médecins généralistes, en montrant que globalement, les praticiens interrogés restent assez réticents à la délégation d’activités et de compétences vers les infirmiers, même si ces derniers exercent dans le même cabinet que le leur. La question de la rémunération de l’infirmier est cruciale pour l’opinion du médecin sur la délégation, puisque le pourcentage des avis favorables varie de 17 (lorsque c’est le cabinet qui doit financer la rémunération de l’infirmier) à 60 (rémunération de l’infirmier financée par l’assurance maladie).

46 Les résultats de cette étude permettent également de mieux dessiner la vision du médecin dans le modèle de coopération avec l’infirmier. Comment les médecins qui sont favorables à la délégation d’activité voient-ils cette coopération et jusqu’où sont-ils prêts à aller dans la délégation ? D’une manière non surprenante, les résultats de l’enquête montrent qu’il n’y a pas un seul modèle ou une seule réponse, car les déterminants de l’opinion des médecins sur la délégation sont multiples et comprennent des dimensions personnelles, organisationnelles, environnementales et financières. Par rapport à cette dernière dimension, il y a probablement une crainte de mise en concurrence des activités déléguées et de baisse des revenus pour les médecins : ainsi, les médecins qui souhaiteraient travailler moins, mais pour qui c’est impossible pour des raisons financières, sont plus réticents à la délégation que les médecins déclarant un emploi du temps qui leur convient.

47 À partir des opinions exprimées par les médecins interrogés, deux modèles de coopération et de délégation semblent ainsi émerger. Un premier modèle, pour lequel opte la majorité des médecins qui sont favorables à la délégation, prévoit une délégation de certains types d’activités (éducation thérapeutique, accompagnement des patients lors de l’arrêt de la consommation de tabac, etc.) vers les infirmiers de leur cabinet. Selon ce modèle, le financement de l’infirmier devrait être assuré par l’assurance maladie. En revanche, ces médecins sont opposés à la délégation d’actes plus techniques ou au cœur de leur profession, comme la prescription de Hba1c. Ce modèle est développé dans certains pays ; l’infirmier aux Pays-Bas ou l’assistante médicale en Allemagne réalisent l’accompagnement et le suivi des malades chroniques en lien avec le médecin, dans le cadre des programmes de disease management (voir section 1 supra).

48 En France, c’est également le cas pour certaines maisons et certains centres de santé, dans le cadre des expérimentations des nouveaux modes de rémunération (ENMR), où les infirmiers jouent un rôle important dans l’éducation thérapeutique du patient chronique ou dans la coordination des parcours de soins complexes (Mousquès et Bourgueil, 2014). En ce qui concerne les cabinets médicaux, nous ne disposons pas d’information sur le poids de ces activités dans la pratique des médecins de ville, lors de consultations. Ces activités sont de fait quasi inexistantes dans l’immense majorité des cas, car il est impossible de les réaliser dans une consultation de quinze minutes.

49 Un deuxième modèle beaucoup plus minoritaire semble aussi émerger, davantage accepté par les jeunes médecins exerçant dans des cabinets de groupe de petite taille et dans les grands pôles ou couronnes des grands pôles urbains avec une faible APL. Ces médecins sont favorables à une délégation plus large d’activités, y compris le frottis cervical et la prescription de Hba1c. Ils sont d’autant plus favorables à la délégation qu’ils ont une charge de travail élevée ; les médecins souhaitant travailler moins, mais qui n’ont personne pour les remplacer étant davantage enclins à la délégation que ceux qui déclarent un emploi du temps qui leur convient. Dans ce modèle, les médecins sont dans une approche beaucoup plus intégrée des soins, avec plus de délégation d’activités et de compétences vers l’infirmier, qui serait directement rémunéré par le cabinet médical.

50 À noter aussi que tous les médecins ne sont pas formés à la pratique des frottis, qui nécessite une certaine expérience pour être réalisée correctement.

51 L’inclusion des pathologies traitées, par exemple les affections de longue durée (ALD), pourrait constituer un axe d’amélioration de cette étude. En effet, il n’est pas exclu que ce type de caractéristiques relatives aux patients soignés par le médecin généraliste aient une influence sur son opinion concernant la délégation d’activité vers l’infirmier.

Conclusion

52 Notre analyse montre qu’il n’y a pas un seul modèle en matière de coopération ou de délégation entre les médecins généralistes et les infirmiers. Des formes différentes de coopération peuvent être envisagées, en fonction de la zone géographique d’exercice, des aspects organisationnels du cabinet (exercice individuel, en groupe monodisciplinaire ou en maison de santé pluridisciplinaire) et de la structure de la patientèle du médecin (maladies chroniques, polypathologies, patients en situation précaire…).

53 L’expérience des pays étrangers montre que les choix stratégiques en matière de modèle(s) de coopération s’appuient souvent sur les avantages du système de santé existant, par exemple en termes de disponibilité de l’offre médicale et paramédicale sur le territoire ; des capacités de formation ; des modalités de l’organisation du cabinet médical (seul ou en groupe, taille des cabinets de groupe, avec ou sans secrétariat…) ; d’existence de nouveaux métiers de la santé ou de leur évolution, comme les infirmiers en pratiques avancées ; de dynamique existante (formelle ou informelle) de coopération entre les professionnels de santé… Ils tiennent compte également de perspectives démographiques d’évolution de l’offre de soins en adéquation avec l’évolution de besoins de soins qui sont formalisés de plus en plus en termes de parcours de soins.

Annexe 1

Les exemples de programmes de disease management et de case management à l’étranger et en France

Programmes de disease management

54 En Allemagne, les programmes de disease management ont été introduits en 2002 par les caisses d’assurance maladie afin de répondre à un manque de coordination entre les professionnels de santé dans la prise en charge des maladies chroniques (diabète, maladies coronaires, asthme, BPCO et cancer du sein). En 2012, environ six millions de personnes sont suivies dans le cadre de ces programmes. Le médecin généraliste est fortement impliqué dans le dispositif. Il en assure la coordination avec les autres professionnels de santé. Le médecin est rémunéré par un montant forfaitaire annuel pour le suivi de ces patients et s’engage à son tour à respecter les référentiels élaborés au niveau national pour le suivi d’une maladie chronique et le renseignement systématique des données cliniques de prise en charge.

55 Aux Pays-Bas, les patients diabétiques sont pris en charge par des groupes de soin qui sont composés soit uniquement de médecins généralistes, soit également de représentants de laboratoires, d’hôpitaux et d’organisations de soins infirmiers. Dans le cadre de cette prise en charge, certaines activités sont déléguées vers l’infirmier en ambulatoire. Il s’agit pour l’essentiel du suivi du patient avec un contrôle trimestriel et de l’accompagnement et du conseil en ce qui concerne la nutrition et le régime alimentaire. Pour les patients les plus lourds, il s’agit aussi de la mise sous insuline, du conseil avancé en nutrition et d’échanges plus approfondis avec le patient. Pour la première année de prise en charge d’un patient diabétique, le médecin généraliste lui consacre en moyenne une heure et demie par an et l’infirmier quatre heures. La rémunération du groupe de soin est un forfait annuel par patient, versé par la compagnie d’assurance maladie.

56 Aux États-Unis, les premiers programmes de disease management ont souvent recours aux plateformes d’appels infirmiers. Les appels des infirmiers déterminent les besoins des patients (diabète, BPCO), améliorent leur compréhension de la maladie et donnent des conseils en matière de gestion de la maladie, de nutrition et d’exercice physique. En outre, une large variété d’autres ressources est utilisée à destination des patients, comme les journaux, les films, les sites Internet. Une petite fraction de ces patients, ceux à haut risque, bénéficie d’un suivi plus intensif.

57 En France, l’expérimentation Asalée de coopération entre médecin et infirmier a été mise en œuvre en 2004 (Bourgueil, 2008). Actuellement, deux domaines d’actions sont proposés dans ce protocole : le dépistage (troubles cognitifs et BPCO du patient tabagique) et le suivi des pathologies chroniques (diabète et risque cardio-vasculaire). Le protocole propose essentiellement des séances individuelles d’éducation thérapeutique réalisées par les infirmiers auprès de patients adhérant à ce dispositif et, dans une moindre mesure, un transfert des actes médicaux vers les infirmiers, comme la prescription d’examen Hba1c, l’examen du pied, la proposition d’examen de spirométrie [9] ou la prescription et la réalisation d’un électrocardiogramme (ECG). La gestion informatique de certaines données du patient est également confiée aux infirmiers (essentiellement les résultats biologiques ; si nécessaire, les rappels informatiques dans le dossier du patient).

58 En France toujours, un programme d’accompagnement des patients diabétiques, « Sophia », a été mis en place en 2008 par la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés. Les objectifs du programme Sophia sont d’améliorer la prise en charge et l’état de santé des patients diabétiques et de diminuer la fréquence des complications. L’adhésion du patient au dispositif est volontaire. Selon l’état de santé de ce dernier, un accompagnement téléphonique plus ou moins fréquent est assuré par les infirmiers des centres d’appels. L’infirmier favorise l’orientation adéquate du patient dans l’offre de proximité (professionnels de santé, associations de patients, réseaux de santé, maisons du diabète…) et relaie les recommandations de bonnes pratiques (observance, examens de suivi, alimentation, activité physique…).

59 En France, il existe également des initiatives au niveau local dans le cadre des réseaux de soins pour le suivi des maladies chroniques.

Programmes de case management

60 Aux États-Unis, Kaiser Permanente (compagnie d’assurance maladie Health Maintenance Organization-HMO) a mis en œuvre un modèle avec une forte implication des infirmiers dans la prise en charge des patients atteints de maladies chroniques (Ross, 2011). Il s’agit de patients de plus de 65 ans, avec plusieurs comorbidités qui nécessitent beaucoup de soins. Un infirmier prend en charge environ 50 à 60 patients par an. L’infirmier est dans l’obligation d’avoir une formation spécifique dans la prise en charge des maladies chroniques et travaille en collaboration avec le médecin généraliste et les autres professionnels de santé. Un contrôle mensuel est réalisé par l’infirmier afin de promouvoir l’éducation à la santé et les principes de gestion de la maladie par le patient. L’infirmier coordonne également les soins fournis auprès des autres prestataires de soins, comme l’hôpital et le secteur médico-social, et aide le patient à faire la transition entre ces différents prestataires de soins.

61 Au Canada, la région Ontario a mis en place des programmes de gestion de certaines pathologies et de segments de population. Ces programmes consistent dans le développement de soins à domicile ou en ambulatoire pour certains parcours de soins : les plaies chroniques, les soins palliatifs, les personnes âgées vulnérables (plus de 75 ans avec deux pathologies ou plus), les enfants avec des pathologies complexes. Dans ce type de prise en charge, les gestionnaires de cas sont les infirmiers en lien avec les autres professionnels de santé et le secteur médico-social.

62 Au Royaume-Uni, le National Health Service (NHS) a mis en place, comme modèle de case management, les programmes de « l’hôpital virtuel » (ou virtual ward, voir Lewis, 2013). Le fonctionnement de l’hôpital avec ses « tournées » régulières est dupliqué en soins de ville. L’idée de base de ce programme est la réduction des hospitalisations non programmées, grâce à une prise en charge des patients à risque par des équipes multidisciplinaires en soins de ville, incluant en général le médecin généraliste, l’infirmier, le pharmacien, le travailleur social, l’ergothérapeute et, si besoin, un spécialiste. Un hôpital virtuel couvre une population d’environ 30 000 personnes dont 0,3 % d’entre elles sont prises sont prises en charge dans ce cadre. Les personnes à haut risque sont identifiées par un modèle prédictif qui calcule le niveau de risque des individus. L’infirmier joue un rôle de gestionnaire de cas, en déterminant les besoins du patient et en élaborant un plan de soins avec ce dernier et ses proches. L’équipe de l’hôpital virtuel discute régulièrement de chaque cas par téléphone ou sur place, et le plan de soins est validé ou modifié pendant ces discussions. La fréquence des discussions varie selon l’état de santé et le niveau de risque du patient. Le plan de soins ainsi qu’une grande partie des soins sont réalisés au domicile du patient.

63 En France, le dispositif « Prado » (programme retour à domicile des patients hospitalisés) a pour objectif d’assurer l’accompagnement de certains patients après l’hospitalisation et d’éviter ainsi des hospitalisations successives. Les infirmiers sont impliquées dans la prise en charge post-chirurgie orthopédique pour six interventions (prothèse de hanche et de genou ou pour fracture du col du fémur, réparation chirurgicale des ruptures de la coiffe des rotateurs, ligamentoplastie du croisé antérieur du genou, ostéosynthèse pour fracture trochantérienne) et après une hospitalisation pour une décompensation cardiaque. Dans le cadre du retour à domicile, le programme prévoit ainsi des consultations et des visites avec le médecin traitant, le cardiologue, et également des visites hebdomadaires par ces infirmiers formés.

Annexe 2

Les échantillons selon les variables de stratification

tableau im6
Variables Appariement vagues 2 et 5 (N = 849) Médecins répondants vague 5 (N = 1 121) France entière (N = 50 898) Sexe Femme 28 % 27 % 27 % Homme Âge 72 % 73 % 73 % Moins de 49 ans 34 % 32 % 31 % De 49 à 56 ans 36 % 36 % 35 % Plus de 56 ans Activité (nombre de consultations) 30 % 32 % 34 % Moins de 2 849 20 % 21 % 25 % De 2 849 à 5 494 55 % 54 % 50 % Plus de 5 494 Lieu d’exercice 25 % 25 % 25 % Rural 19 % 21 % 18 % Périurbain 19 % 19 % 17 % Pôle urbain 62 % 60 % 65 %
CHAMP • Médecins libéraux hors mode d’exercice particulier (MEP) exclusif, France métropolitaine.
SOURCE • Répertoire Adeli, Système national d’information inter‑régime de l’assurance maladie‑SNIIRAM.
Annexe 3

Trois sous-échantillons selon les modes de financement de l’infirmier

tableau im7
Variables Rémunération 100 % assurance maladie (N = 269) Rémunération mixte : 50 % assurance maladie et 50 % revenus du cabinet (N = 287) Rémunération 100 % par les revenus du cabinet (N = 293) Ensemble de l’échantillon (N = 849) Caractéristiques et activité du médecin Sexe Femme 27 % 29 % 29 % 28 % Homme 73 % 71 % 71 % 72 % Âge Moins de 49 ans 34 % 35 % 33 % 34 % De 49 à 56 ans 39 % 33 % 35 % 36 % Plus de 56 ans 27 % 32 % 32 % 30 % Activité (nombre de consultations) Moins de 2 849 15 % 26 % 20 % 20 % De 2 849 à 5 494 57 % 50 % 59 % 55 % Plus de 5 494 28 % 24 % 21 % 25 % Durée des consultations Moins de 15 min 9 % 9 % 9 % 9 % Entre 15 et 19 min 49 % 51 % 47 % 50 % Au moins 20 min 42 % 40 % 44 % 42 % Organisation du cabinet Nombre de professionnels de santé du cabinet 1 (cabinet individuel) 45 % 46 % 51 % 47 % 2 (cabinet de groupe) 21 % 23 % 19 % 21 % 3 (cabinet de groupe) 14 % 12 % 10 % 12 % 4 et plus (cabinet de groupe) 20 % 20 % 20 % 20 % Secrétariat Non 43 % 47 % 48 % 46 % Oui 57 % 53 % 52 % 54 % Contexte géographique du lieu d’exercice Aire urbaine Grand pôle 61 % 61 % 61 % 61 % Couronne grand pôle urbain 10 % 13 % 13 % 12 % Couronne grand pôle rural 11 % 9 % 8 % 9 % Petit ou moyen pôle 5 % 7 % 7 % 7 % Couronne petit ou moyen pôle urbain 5 % 5 % 5 % 5 %
tableau im8
Variables Rémunération 100 % assurance maladie (N = 269) Rémunération mixte : 50 % assurance maladie et 50 % revenus du cabinet (N = 287) Rémunération 100 % par les revenus du cabinet (N = 293) Ensemble de l’échantillon (N = 849) Hors aire urbaine 8 % 5 % 6 % 6 % APL Moins de 55 13 % 11 % 10 % 11 % Entre 55 et 70 20 % 19 % 18 % 19 % Entre 71 et 87 29 % 30 % 28 % 29 % Plus de 87 38 % 40 % 44 % 40 % Patientèle Taille de la patientèle (file active) Moins de 1 225 23 % 25 % 21 % 23 % Entre 1 225 et 1 708 25 % 25 % 29 % 26 % Entre 1 708 et 2 200 26 % 25 % 27 % 26 % 2 200 patients et plus 26 % Part des patients de 70 ans et plus 25 % 23 % 25 % Moins de 10 % 30 % 30 % 33 % 31 % Entre 10 % et 15 % 28 % 29 % 27 % 28 % Entre 15 % et 20 % 22 % 22 % 24 % 22 % 20 % et plus 20 % 19 % 16 % 19 % Part des patients en CMUC Moins de 3 % 20 % 18 % 21 % 20 % Entre 3 % et 5 % 26 % 28 % 20 % 24 % Entre 5 % et 9 % 26 % 25 % 25 % 26 % 9 % et plus 28 % 29 % 34 % 30 %
SOURCE • RIAP, l’appariement des vagues 2 et 5 de l’échantillon national, données pondérées.
Annexe 4

Résultats de la modélisation logistique multiple pour la délégation du frottis cervical ou la prescription Hba1C

tableau im9
Variables Odds ratios Std. Err. P>|z| IC à 95 % Sexe (Réf. = femme) Homme 1,59 0,09 0,000 1,42-1,78 Âge (Réf. = moins de 49 ans) De 49 à 56 ans 0,73 0,04 0,000 0,65-0,81 Plus de 56 ans 0,50 0,03 0,000 0,44-0,57 Activité (Réf. = moins de 2 849) De 2 849 à 5 494 0,88 0,06 0,088 0,77-1,02 Plus de 5 494 1,21 0,11 0,038 1,01-1,45 Durée des consultations (Réf. = moins de 15 min) Entre 15 et 19 min 0,78 0,07 0,004 0,65-0,92 Au moins 20 min 0,95 0,09 0,576 0,79-1,14 Nombre de professionnels de santé du cabinet (Réf. = cabinet individuel) 2 (cabinet de groupe) 1,18 0,07 0,007 1,05-1,33 3 (cabinet de groupe) 0,99 0,07 0,883 0,86-1,14 4 et plus (cabinet de groupe) 1,00 0,07 0,985 0,88-1,15 Secrétariat (Réf. = non) Oui 0,62 0,03 0,000 0,56-0,69 Aire urbaine (Réf. = grand pôle) Couronne grand pôle urbain 1,36 0,10 0,000 1,17-1,58 Couronne grand pôle rural 0,67 0,05 0,000 0,57-0,78 Petit ou moyen pôle 0,27 0,03 0,000 0,21-0,33 Couronne petit ou moyen pôle urbain 0,82 0,09 0,080 0,66-1,02 Hors aire urbaine 1,03 0,09 0,758 0,87-1,21 APL (Réf. = moins de 55 ETP pour 100 000 habitants) Entre 55 et 70 0,11 0,01 0,000 0,09-0,14 Entre 71 et 87 0,11 0,01 0,000 0,09-0,14 Plus de 87 0,16 0,02 0,000 0,14-0,20 Rémunération de l’infirmier travaillant dans le cabinet du médecin (Réf. = intégralement sur les revenus du cabinet du médecin) Pour moitié sur les revenus du cabinet 0,61 0,04 0,000 0,53-0,70 Intégralement par un forfait de l’assurance maladie 0,52 0,03 0,000 0,46-0,59 Formation continue (Réf. = moins d’une demi-journée) Entre 1 et 9 demi-journées 0,28 0,03 0,000 0,23-0,35 Entre 10 et 19 demi-journées 0,43 0,05 0,000 0,34-0,54 Au moins 20 demi-journées 0,26 0,03 0,000 0,21-0,32
tableau im10
Variables Odds ratios Std. Err. P>|z| IC à 95 % Opinion sur le temps de travail (Réf. = emploi du temps qui convient au médecin) Souhait de travailler moins, mais pas possible pour des raisons financières 0,77 0,06 0,000 0,66-0,88 Souhait de travailler moins, mais ne peut pas, car personne pour remplacer 1,32 0,07 0,000 1,19-1,46 Opinion sur le nombre des médecins généralistes dans la zone de patientèle (Réf. = oui, leur nombre est suffisant) Non, leur nombre n’est pas suffisant 0,88 0,04 0,007 0,80-0,96 Part des patients de 70 ans et plus (Réf. = moins de 10 %) Entre 10 % et 15 % 0,62 0,04 0,000 0,55-0,70 Entre 15 % et 20 % 0,94 0,07 0,367 0,82-1,08 20 % et plus 0,66 0,05 0,000 0,57-0,78 Part des patients en CMUC (Réf. = moins de 3 %) Entre 3 % et 5 % 1,49 0,10 0,000 1,30-1,69 Entre 5 % et 9 % 1,51 0,10 0,000 1,32-1,72 9 % et plus 2,30 0,17 0,000 1,99-2,65
SOURCE • RIAP, l’appariement des vagues 2 et 5 de l’échantillon national, données pondérées.

Notes

  • [1]
    Cet article est issu d’une exploitation des résultats des enquêtes du panel 2 des médecins généralistes libéraux.
  • [2]
    Selon la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), entre 2011 et 2013, l’évolution annuelle moyenne des effectifs est de 3,5 % pour les maladies cardio-neurovasculaires, 3,2 % pour le diabète et l’insuffisance rénale chronique terminale, 1,8 % pour les maladies respiratoires chroniques.
  • [3]
    Selon ce Conseil, qui fédère plus de 130 associations nationales d’infirmiers, représentant plus de 16 millions d’infirmiers du monde entier : « Un infirmier praticien/en pratique infirmière avancée est un infirmier diplômé d’État ou certifié qui a acquis les connaissances théoriques, le savoir-faire nécessaire aux prises de décisions complexes, de même que les compétences cliniques indispensables à la pratique avancée de son métier, pratique avancée dont les caractéristiques sont déterminées par le contexte dans lequel l’infirmier sera autorisé à exercer. Un master est recommandé comme diplôme d’entrée ».
  • [4]
    La Bourgogne était une région autonome au moment de la mise en place du panel. Elle a depuis été intégrée à la région Bourgogne-Franche-Comté.
  • [5]
  • [6]
    Barlet M., Coldefy M., Collin C. et al. (2012), « L’accessibilité potentielle localisée (APL) : une nouvelle mesure de l’accessibilité aux médecins généralistes libéraux », DREES, Études et résultats, no 795 p. 2 (http://drees.social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/er795.pdf).
  • [7]
  • [8]
    Équivalent temps plein.
  • [9]
    Test de mesure de la respiration.
Français

Des nouvelles formes de coopération entre les médecins généralistes libéraux et les infirmiers se développent en France, souvent dans le cadre d’expérimentations. La vision des professionnels de santé sur les modalités de cette coopération n’est pas uniforme. À partir des résultats de deux enquêtes réalisées auprès du panel des médecins généralistes, cet article étudie les déterminants de la disposition à déléguer des médecins selon trois scénarios de financement de l’infirmier : la rémunération intégrale par l’assurance maladie, la rémunération mixte (50 % par l’assurance maladie et 50 % par les revenus du cabinet) et la rémunération intégrale par les revenus du cabinet.
Tous scénarios confondus, un tiers des médecins généralistes seraient favorables à la délégation d’une ou plusieurs tâches vers un infirmier de leur cabinet. Néanmoins, ce résultat varie sensiblement selon le mode de financement de l’infirmier : les médecins seraient d’autant plus favorables au transfert d’activité que celui-ci est rémunéré par l’assurance maladie (60 % d’entre eux), alors que lorsque l’infirmier est intégralement rémunéré par les revenus du cabinet, seuls 17 % des avis seraient favorables.
Nos analyses suggèrent également l’émergence de deux modèles de coopération entre les médecins généralistes libéraux et les infirmiers. Un premier modèle, pour lequel opte la majorité des médecins qui seraient favorables à la délégation, prévoit une délégation d’activités liées à l’accompagnement des patients et au suivi des maladies chroniques (éducation thérapeutique, accompagnement des patients lors de l’arrêt de la consommation de tabac, etc.). Un deuxième modèle beaucoup plus minoritaire semble aussi émerger de médecins favorables à une délégation plus large d’activités y compris des actes techniques (le frottis cervical) ou la prescription d’hémoglobine glyquée (HbA1c).

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Emin Agamaliyev
Chef du Bureau d’appui à l’évaluation et aux études régionales, Direction de la recherche, des études de l’évaluation et des statistiques (DREES).
Fanny Mikol
Doctorante à Paris Dauphine, ancienne cheffe du Bureau des professions de santé, sous-direction observation de la santé et de l’assurance maladie, Direction de la recherche, des études de l’évaluation et des statistiques (DREES).
Thierry Prost
Médecin chef de projet en santé publique, sous-direction Observation de la santé et de l’assurance maladie, Direction de la recherche, des études de l’évaluation et des statistiques (DREES).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 15/06/2016
https://doi.org/10.3917/rfas.161.0375
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