Panorama [1] [2]
1 Après avoir été voué aux gémonies au début des années 1990, le modèle nordique fait, depuis, l’objet de toutes les attentions en raison de ses capacités d’adaptation et de son aptitude à concilier efficacité et équité (Katzenstein, 1985 ; Sapir, 2005 ; Pontusson, 2011). Dans cet article, nous esquisserons d’abord les principales caractéristiques communes aux stratégies nordiques traditionnelles de croissance et de protection sociale, puis nous passerons en revue certains des changements entrepris dans la période de crise des 25 dernières années, pour terminer par les différents problèmes qui se poseront dans les années à venir.
2 À l’apogée de la social-démocratie dans les années 1970, les petites économies nordiques ouvertes et reposant sur les exportations étaient réputées pour [différentes caractéristiques] : un système de coordination des négociations collectives, la collectivisation des risques via une protection sociale universelle, des services publics étendus, un haut niveau d’imposition et d’emploi et un système de répartition égalitaire des revenus (Korpi, 1983 ; Esping-Andersen, 1985).
Le modèle nordique traditionnel

Le modèle nordique traditionnel
3 Dans la décennie suivante, le Danemark et, plus tard, la Norvège, la Finlande, puis la Suède ont été confrontés à des crises profondes dues à des facteurs internes ; mais contrairement aux prévisions internationales, les pays nordiques ont réussi à adapter leur modèle et connu une reprise rapide dans les années 1990. Au cours des années 2000, ils sont dans le haut des classements internationaux sur le plan de l’efficacité économique et de l’équité et ont abordé la crise économique mondiale avec des taux de chômage relativement faibles, des excédents commerciaux importants et des finances publiques solides. Cependant, en raison de leurs structurations industrielles différentes, de leurs liens variables avec l’Union économique et monétaire (UEM) et des politiques macroéconomiques qu’ils ont menées avant la crise, les pays nordiques ont subi des évolutions économiques et sociales divergentes pendant la crise de l’Euro [3]. Il faut noter que les deux crises précédentes étaient dues à des échecs en matière de politique économique et financière et non à un modèle social.
4 Au tournant des années 1990, d’importants changements ont été décidés dans les politiques monétaire, fiscale et salariale. Sauf au Danemark, qui a arrimé sa monnaie au Deutschmark (DM) en 1983, des dévaluations menées très tôt ont stimulé la reprise – fondée sur les exportations –, permettant ainsi un assainissement budgétaire rapide et le rétablissement de la demande intérieure. Sous la direction de coalitions menées par les sociaux-démocrates, revenus au pouvoir contre toute attente après les crises, la réforme des systèmes de retraites et des politiques sociales visant à favoriser l’emploi, parallèlement à d’importants investissements dans l’éducation et à des mesures de conciliation des vies familiale et professionnelle, ont permis aux pays nordiques de préserver et de renouveler leur modèle social. La Suède et la Finlande ont réduit l’ampleur de leur État-providence, mais le plus souvent maintenu leurs politiques d’activation de l’emploi en demandant à leurs bénéficiaires de remplir certaines conditions, et leur taux de chômage a été réduit de moitié. Les inégalités de salaires se sont creusées avec le retour de la crise, mais sont restées limitées en comparaison avec d’autres pays.
5 Lors du boom économique des années 2000, le centre-droit a adopté le modèle nordique et est revenu au pouvoir. Ce retour n’a pas bouleversé le système, mais le pouvoir acquis par les syndicats au sein du système d’assurance chômage de Gand [4] a été remis en question, au moment où les inégalités étaient de plus en plus creusées par des allègements fiscaux, des coupes limitées dans les dépenses sociales et une immigration de travail croissante. En parallèle, les partis nationalistes appelant à un renforcement de l’État-providence marquaient des points dans l’opinion, tandis que la concurrence augmentait entre les travailleurs à bas salaire et que quatre arrêts rendus par la Cour de justice des communautés européennes en 2007 et 2008 [5] mettaient en lumière les tensions [entre le modèle social nordique et] la liberté de circulation instituée en Europe.
6 Fortement touchés par la crise de 2008, les pays nordiques ont pu – grâce à des réformes menées au préalable – s’appuyer sur leurs finances publiques solides. Hors de la zone euro, la Suède et la Norvège ont pu, quant à elles, tirer profit de dévaluations décidées dès le début de la crise et rebondir rapidement. La Finlande et le Danemark ont, eux, subi une période de déclin plus difficile : au Danemark, à la suite de l’éclatement de la bulle spéculative et en Finlande, en raison d’une décroissance structurelle des industries du papier et des nouvelles technologies. Dans ces deux pays, la contraction des politiques fiscales qui a suivi la crise a prolongé la durée du ralentissement économique, mais au milieu de l’année 2014, tous les pays nordiques, à l’exception de la Finlande, semblent être sur la voie d’une reprise, encore fragile [6]. Toutefois, le modèle nordique fondé sur les exportations et sur une croissance bénéficiant à tous est de plus en plus mis en doute devant l’instabilité internationale, la hausse du chômage, les inégalités croissantes, l’affaiblissement des syndicats, le vieillissement de la population, la progression de l’immigration et les alliances fluctuantes entre les partis politiques nationaux.
Paysage économique et schémas de pensée
7 Bien que les pays nordiques soient souvent perçus comme un bloc homogène, chacun d’entre eux a suivi des stratégies de développement économique différentes. Aujourd’hui, le Danemark est reconnu pour son solide complexe agroalimentaire et également pour son industrie pharmaceutique, ses transports maritimes, sa production d’énergies renouvelables, de biens économes en énergie et de nombreux articles de niche. Il est par ailleurs devenu le seul pays exportateur net de pétrole dans l’Union européenne (UE). La Suède, elle, est réputée pour ses sociétés multinationales spécialisées dans les véhicules de transport, la mécanique, l’électronique et la production de pâte à papier, autant que pour sa production de médicaments. La Finlande a longtemps été dépendante de l’industrie du bois, mais a fini par jouer un rôle dans le marché international de l’électronique et d’autres industries modernes à haut niveau de qualification, jusqu’à ce que ces deux secteurs subissent récemment une crise structurelle. Quant à la Norvège, si elle continue de dépendre des exportations de matières premières et d’énergie hydraulique bon marché ou encore de la pêche et des transports maritimes, elle est devenue l’un des premiers fournisseurs mondiaux d’énergie grâce à une industrie offshore moderne de rang international et elle a développé une aquaculture industrielle dont la croissance a été rapide.
8 Après le Danemark, seul pays nordique à adhérer à la Communauté économique européenne (CEE) en 1972, les pays nordiques membres de l’Association européenne de libre-échange (Aele) – Finlande, Suède, Norvège (et Islande) – ont prudemment cherché l’harmonie avec la CEE à partir de 1989 via l’Espace économique européen (EEE). L’effondrement de l’économie suédoise en 1990 a poussé le pays, bientôt rejoint par la Finlande, à devenir rapidement candidat à l’entrée dans la communauté. Ensemble, les deux pays sont devenus membres de l’UE en 1995. La Finlande a par ailleurs rejoint la zone euro dès ses débuts. La Norvège (et l’Islande) sont entrées dans le marché unique via l’EEE en 1994, sauf pour ce qui concerne l’agriculture et la pêche. Les quatre pays nordiques se sont donc fondus dans le marché unique à partir de 1994 et ont pour cette raison composé avec des avantages et des inconvénients largement similaires, exception faite de la politique monétaire.
La décennie 1980-1990 : de plus en plus de crises et d’instabilité
9 Au début des années 1980, une phase d’hégémonie de la social-démocratie dans les pays nordiques a pris fin en même temps que la viabilité économique de leur modèle était mise en doute par le raz de marée mondial de libéralisation des marchés et par des déséquilibres croissants dans la balance des comptes courants et dans la fiscalité. Le modèle social nordique a été pour la dernière fois remis en question par la sévère crise économique dans laquelle plongent la Finlande, la Norvège et la Suède vers 1990 – comme le Danemark 15 ans plus tôt [7].
10 Il fallait cependant chercher les causes de cette crise ailleurs. La déréglementation du marché du crédit dans les années 1980 et l’absence d’ancrage nominal [de la politique monétaire] ont entraîné dans tous les pays nordiques une déconnexion entre les politiques macroéconomiques et les négociations collective et ont, parallèlement, privé les politiques fiscales de moyens de contrainte pour limiter la croissance rapide générée par le crédit. La spirale de l’augmentation des prix et des salaires tirés par la demande, les dévaluations et, en dernier lieu, la formation de deux énormes bulles bancaire et immobilière, ont mis l’export, secteur-clé pour la fixation des salaires, sous la pression de luttes intersyndicales pour décider du salaire relatif. Vers la fin de la décennie, il a vainement été tenté de mettre en œuvre une politique monétaire solide, ce qui a alourdi la dette privée et gonflé le déficit de la balance des paiements courants. Lorsque ces bulles ont éclaté, l’atterrissage, brutal, a été encore aggravé par la récession qui a suivi la réunification allemande en Europe et par la crise du mécanisme de taux de change européen (MCE), ancêtre de l’Union européenne et monétaire, dans lesquelles les pays nordiques se sont enlisés.
11 La Finlande, la Suède et la Norvège ont ainsi été confrontées à des crises existentielles au début des années 1990. Avec la chute brutale des prix de l’immobilier, les faillites bancaires, les taux d’intérêt crevant le plafond, l’instabilité des monnaies et un effondrement de la production comparable à ce qui avait été observé dans les années 1930, le taux de chômage brut a dépassé les 20 % en Finlande, les 10 % en Suède et les 9 % en Norvège. Le Danemark, qui se remettait lentement de ses difficultés précédentes, a connu lui aussi un nouvel afflux de chômeurs entre 1990 et 1993. Il n’est donc pas étonnant que de nombreux spécialistes du monde entier, suivis par les partis de droite dans les pays du Nord, aient accablé le modèle nordique : « Le temps du modèle nordique est révolu… Il a créé des sociétés trop dépensières, avec trop de monopoles et pas suffisamment de liberté de choix pour les peuples ; des sociétés qui manquent de souplesse et de dynamisme. » (Carl Bildt, Premier ministre suédois, interview publiée dans le International Herald Tribune, 24 février 1992.)
1990-2008 : Réveil et renouveau du modèle nordique
12 La crise des années 1980-1990 a poussé le modèle nordique à évoluer significativement, en particulier pour ce qui concerne la politique macroéconomique et la fixation des salaires. Parallèlement aux dévaluations (sauf au Danemark), les banques centrales sont devenues indépendantes et chargées de veiller à la stabilité des prix, tandis que les énergiques mesures de consolidation budgétaire se transformaient en règles de politique budgétaire. La déréglementation du marché des biens est intervenue dans le cadre de la réforme du marché unique de l’UE. La Suède et la Finlande ont également réduit certaines prestations sociales et la Suède a libéralisé le travail temporaire. Comme partout, les politiques fiscales, sociales et salariales étaient axées sur une augmentation de l’offre de main-d’œuvre. Les taux d’imposition marginaux ont été baissés et les assiettes élargies. Avec une priorité accordée aux politiques d’activation de l’emploi, à la mise sous conditions des prestations sociales, à l’éducation et à la conciliation des vies familiale et professionnelle, une réforme dynamique des systèmes de retraite est décidée pour renforcer la pérennité de l’État-providence. Ces mesures finissent par donner lieu à une reprise économique solide. Au tournant du millénaire, les comptes budgétaires et la balance des paiements courants étaient excédentaires dans les deux pays. Cette situation a perduré jusqu’à la crise financière de 2008.
Réformes du modèle nordique après les crises des années 1990

Réformes du modèle nordique après les crises des années 1990
13 Alors que l’ensemble des pays nordiques, à l’exception de la Norvège, étaient gouvernés par des coalitions de centre-droit au début des années 1990, les élections organisées après le redémarrage de la crise ont inauguré une nouvelle ère de gouvernements sociaux-démocrates successifs. Les confédérations patronales et les partis conservateurs (plus présents en Suède et en Finlande) ont d’abord cherché à réagir à la crise en faisant reculer l’État-providence et en déréglementant le marché du travail, mais le retour des sociaux-démocrates au pouvoir et la reprise économique ont favorisé une approche moins radicale.
14 Ces réformes sont le fruit de compromis et de luttes politiques déterminés par des configurations institutionnelles plus anciennes. Comme la majorité de l’électorat et des organisations syndicales s’intéresse essentiellement à la protection de ses intérêts dans le modèle social actuel, les forces appelant à une rupture plus radicale avec le passé n’ont pas pu rassembler suffisamment de soutiens politiques. Cette situation, renforcée par l’institutionnalisation de l’équilibre des pouvoirs dans le monde du travail, a donné lieu à des conceptions du changement et à des stratégies d’alliance visant à préserver globalement les acquis sociaux. Tout ceci a permis aux sociaux-démocrates de bien rester au pouvoir jusque dans les années 2000.
15 Les principaux partis conservateurs concluront par la suite qu’une stratégie « anti-modèle nordique » était politiquement vouée à l’échec, ce qui les a amenés à accepter et à réformer progressivement ce modèle social pour pouvoir accéder au pouvoir. Dans un contexte de prospérité, où était pris l’engagement de multiplier les prestations et de baisser les impôts, ce virage stratégique a été couronné de succès et les victoires électorales obtenues dans les années 2000 ont été construites sur un nouvel ajustement politique du centre-droit, qui a adapté le modèle social-démocrate au lieu de le combattre.
Les réformes des politiques macroéconomiques
16 Alors que le Danemark a connu sa période de récession et d’austérité dans les années 1980, c’est au début des années 1990 que la crise a poussé la Finlande, la Norvège et la Suède à mettre un coup de balai dans leur politique économique. D’abord, le système financier a été consolidé par l’État, qui a protégé les établissements de dépôt et de crédit, laissé les actionnaires subir des pertes, nationalisé les banques en faillite et imposé une régulation et un contrôle plus stricts. Les banques centrales sont devenues indépendantes et ont garanti la stabilité des prix. Une brève tentative d’arrimer les monnaies à l’European current unit (ECU), comme au Danemark, prend fin avec l’agitation autour du mécanisme de change européen. Cela a conduit à des dévaluations de 20 % de la monnaie suédoise (Flodén, 2012, p. 13) de près de 40 % en Finlande (Vartiainen, 2011a, p. 74) et de 5 à 6 % en Norvège. Associées à des transformations de l’industrie, à la hausse de la productivité et à la chute des coûts de production unitaires, ces dévaluations ont boosté la forte croissance des exportations qui ont alimenté la reprise du pays à partir de 1994. Tandis que la Suède et finalement la Norvège ont maintenu une politique inflationniste avec des monnaies flottantes, la Finlande a rejoint la zone euro en 1999 et le Danemark a défendu une couronne stable par rapport à la monnaie unique.
17 En Finlande et en Suède, cette récession a taillé dans les finances publiques un large déficit, supérieur à 10 % du produit intérieur brut (PIB). Tandis que la Norvège pouvait se reposer sur des ressources croissantes issues du pétrole, la Finlande et la Suède, elles, ont dû décréter d’importantes coupes budgétaires et une augmentation des impôts. Toutefois, au lendemain de la crise, la politique fiscale suédoise était généreuse ; ce n’est qu’en 1994-1995, une fois la reprise amorcée, que les principales mesures de renforcement de la fiscalité sont instaurées, fiscalité qui représente au total 11 % du PIB suédois de 1995 à 1997 (Flodén, 2012, p. 13 et 14) [8]. La crise finlandaise a été encore plus grave, et les mesures de consolidation sont intervenues plus tôt, mais en 1998, les énormes déficits finlandais et suédois sont devenus des excédents. En Suède, cette période de grande austérité a été suivie par la mise en œuvre d’une politique fiscale appliquant des règles strictes (Erixon, 2011). Grâce aux mesures de rigueur fiscale mises en place dans les années 1980, le Danemark a été en mesure de faire face à la crise européenne de 1993 à l’aide d’un desserrement modéré de la fiscalité et d’un recours facilité au crédit. Contrairement aux pays de la zone euro plongés aujourd’hui dans la crise, la Suède et la Finlande ont pu associer une politique sévère de consolidation du budget avec une croissance solide, due en grande partie aux dévaluations initiales qui ont donné le coup d’envoi à une reprise vigoureuse, tirée par les exportations. En parallèle, l’adoption d’une réforme fiscale sans incidence sur les recettes a permis une croissance régulière des revenus du pays et de la demande intérieure lorsque les exportations ont repris dans les années 1994-2005. En accédant au pouvoir avec des finances publiques solides, les coalitions de centre-droit qui ont présidé au boom économique en Suède et en Finlande dans les années 2000 ont pu faire usage de toute la marge de man œuvre disponible pour consentir à d’importants allègements fiscaux et freiner les dépenses. Au Danemark, la politique fiscale plus procyclique et la libéralisation du crédit dans les années 2000 ont nourri une bulle bancaire et immobilière.
Des changements dans la réglementation du marché du travail et la fixation des salaires
18 Durant la période de surchauffe économique des années 1980, le système centralisé de coordination des salaires s’est effondré, ce qui a favorisé une spirale inflationniste des prix et des salaires et entraîné une concurrence entre les syndicats (Dølvik et Vartiainen, 2002). Le Danemark et la Norvège sont déjà plongés dans une période de turbulences et d’interventions de leur gouvernement lorsque la Confédération des employeurs suédois, la SAF, déclare en 1990 qu’elle se retire du système centralisé de négociation des salaires et appelle à leur fixation par le marché – une revendication rapidement reprise par les employeurs finlandais. Mais ces demandes n’ont pas été entendues. Sous l’influence de la crise et des encouragements de l’État, les principaux protagonistes du marché du travail sont convenus de revenir à une modération des salaires en rétablissant le système centralisé de négociation et en redonnant un rôle-moteur aux industries exportatrices. En Finlande et en Norvège, ces objectifs ont été atteints par une politique traditionnelle tripartite de négociation des revenus. Le pacte conclu en 1995 en Finlande visait lui aussi à compenser les pertes du mécanisme de taux de change au sein de l’UEM en augmentant la flexibilité globale des salaires (Dølvik, 2004). Au Danemark [9] et en Suède, les organisations représentant les salariés et les employeurs dans la production de biens manufacturés se rassemblent pour coordonner leurs systèmes de fixation des salaires et redonner une position-clé aux salaires dans les industries destinées à l’export, ce qui a également permis d’accorder de plus grandes libertés pour fixer le temps de travail et les salaires par branche (Scheuer 1998 ; Elvander 2002). La Norvège a fini par suivre la même direction tandis que, pour la première fois, des négociations moins centralisées commençaient à devenir problématiques en Finlande, en 2007. En Suède, l’Industriavtalet, accord novateur conclu en 1997 par toutes les fédérations du secteur industriel, crée également une procédure de médiation stricte, qui a ensuite été complétée par un Office national de médiation couvrant les secteurs qui ne l’étaient pas encore.
19 Ces changements ont permis de rétablir la position-pilote des industries exportatrices dans un système de fixation centralisée des salaires, désormais basé principalement sur des négociations par secteurs, laissant ainsi davantage de marge pour fixer les salaires par branche (Vartiainen, 2011b). Cette structuration du système des salaires a été mise en place grâce à des règles fixées au niveau macro-économique. En Suède et en Norvège ce sont les taux d’intérêt fixés par les banques centrales qui ont structuré la fixation des salaires, tandis qu’en Finlande et au Danemark les négociations ont dû se soumettre aux règles établies par la zone euro en matière monétaire. C’est ainsi qu’à la suite de la crise des années 1990, la chronique industrielle des pays nordiques a démontré une résilience et une capacité d’adaptation surprenantes et a évolué vers un système caractérisé à la fois par une meilleure coordination des salaires et par plus de souplesse au niveau micro-économique.
20 Les régimes nordiques de réglementation du travail sont restés quasiment inchangés dans les années 1990, sauf en Suède, où les embauches temporaires ont été déréglementées. En 2000, les quatre pays avaient également libéralisé le marché des agences d’intérim. Le gouvernement suédois de centre-droit a approfondi la libéralisation du travail temporaire en 2007, une mesure contestée par la Commission européenne, qui a estimé que cette réforme enfreignait la directive de l’UE sur le travail temporaire.
21 La mise en œuvre des directives minimales de l’UE sur les droits des travailleurs à la suite de l’adhésion au marché unique de l’Union européenne se fait quasiment sans heurts et plusieurs directives permettent un renforcement de ces droits (Ahlberg, 2005). Toutefois, la transposition législative des règles de l’UE fait surgir la crainte que toute cette nouvelle réglementation ne vienne ébranler les accords collectifs nordiques (Madsen et Due, 2008). Cette préoccupation transparaît dans les négociations relatives à la signature du traité de Maastricht au Danemark et à l’accord d’adhésion de la Suède (Ahlberg, 2005). Or après de nombreux conflits avec la Commission européenne, le Danemark doit se résigner à ce que la mise en œuvre des accords nationaux soit encadrée juridiquement.
22 Le problème refait surface après l’élargissement de l’UE en 2004, qui a entraîné un pic de la mobilité de la main-d’œuvre issue des nouveaux États-membres, en particulier en Norvège, où les migrants venus de l’Union européenne représentent environ deux tiers de l’augmentation du taux d’emploi entre 2004 et 2013. Alimentant le boom des années 2000, ce phénomène s’accompagne d’une concurrence accrue entre les bas salaires et – comme les affaires Laval et Viking l’ont illustré – par de nouveaux conflits entre les États et la réglementation européenne (Dølvik, Eldring et Visser, 2014). La Finlande et la Norvège se sont appuyées (dans certains secteurs) sur la prorogation légale et la garantie par l’État du salaire et de la réglementation minimum prévus dans les accords collectifs, conformément à la directive relative aux travailleurs détachés (CE 71/1996). De leur côté, le Danemark et la Suède maintiennent leur système traditionnel, dans lequel les syndicats sont autorisés à conclure des accords avec des entreprises étrangères, si nécessaire au moyen d’une action revendicative. Dans l’affaire Laval, où le syndicat du bâtiment suédois avait procédé à ce type d’action à l’encontre d’une société lettonne, la Cour de justice de l’Union européenne avait jugé qu’il s’agissait là d’une violation de la directive relative aux travailleurs, car l’accord proposé ne comportait aucune clause déterminant un salaire minimum clair et comportait des dispositions qui n’étaient pas conformes à la directive (Malmberg, 2010). En considérant que la mise en œuvre de la directive en Suède et au Danemark était incompatible avec le principe de libre circulation dans l’Union européenne, la Cour de justice avait décrété que les actions menées par les syndicats pour négocier les salaires en-deçà du seuil minimal légal n’étaient pas autorisées dans un contexte transfrontalier.
23 En réponse à ce jugement, le Danemark et la Suède ont amendé leur base juridique en invoquant une clause spéciale de la directive (3 :8). Tandis que les Danois concluaient un accord tripartite ne modifiant les habitudes nationales qu’à la marge, les nouvelles règles suédoises autorisaient les actions syndicales à l’encontre de sociétés étrangères seulement pour obtenir le salaire et la réglementation minimum fixés par les accords nationaux. Ainsi, les employeurs étrangers bénéficient-ils d’une meilleure protection contre les actions syndicales que les employeurs nationaux (Evju, 2010) [10]. En réaction, les syndicats suédois ont commencé à négocier des taux minimaux dans le cadre d’accords qui prévoyaient initialement de laisser aux négociations d’entreprises le soin de fixer les salaires – ironie de l’histoire, dans cet exemple on voit comment la législation de l’UE a réduit la flexibilité du travail. Les représentants des employeurs suédois, norvégiens, puis plus tard, finlandais, ont alors demandé l’établissement d’un salaire minimum légal – c’était auparavant un tabou – ce qui a poussé les syndicats à demander une extension des accords collectifs. Les pressions venues de la réglementation européenne et de la concurrence entre les bas salaires ont ainsi donné un nouveau souffle à la régulation assurée par l’État, au débat entre les partenaires sociaux et au scepticisme général des syndicats vis-à-vis de l’Euro.
Chute des taux de syndicalisation et de couverture par les conventions collectives
24 La réglementation assurée par les accords collectifs dans les pays nordiques dépend du taux de syndicalisation et de la présence des organisations dans les différents secteurs professionnels. Le système de Gand a fait qu’en 1990, le taux de syndicalisation était exceptionnellement élevé (Kjellberg 1992) avec plus de 80 % de travailleurs en Suède, suivi de près par le Danemark et la Finlande. Seule la Norvège fait figure d’exception avec seulement 57 % (et l’absence de système Gand).
Évolution du taux de syndicalisation et du taux de couverture par les conventions collectives dans le secteur privé

Évolution du taux de syndicalisation et du taux de couverture par les conventions collectives dans le secteur privé
25 À partir du milieu des années 1990, le taux de syndicalisation a diminué, en particulier chez les jeunes (Kjellberg, 2010 ; Nergaard, 2010). En plus des changements structurels, il faut noter le rôle des caisses d’assurance chômage dans la syndicalisation, rôle qui a été affaibli par l’introduction de caisses indépendantes (Kjellberg, 2010 ; Due et al., 2010). Au Danemark, le gouvernement de centre-droit de 2001 a autorisé la libre concurrence des caisses d’assurance chômage, y compris pour les caisses dépourvues de liens dignes de ce nom avec les organisations syndicales. En Suède, le gouvernement de centre-droit de 2007 a augmenté les cotisations et abrogé les déductions fiscales pour appartenance à un syndicat ou à une caisse d’assurance chômage, peu après avoir proportionné les primes d’assurance au risque de chômage. En plus de provoquer une chute radicale des adhésions aux caisses suédoises [11], cette mesure a fait passer le taux de syndicalisation de 77 % en 2007 à 68 % en 2008, principalement dans les organisations représentant les professions à faible salaire du tertiaire (Kjellberg, 2010). Un déclin similaire a été observé en Finlande après le même type de changements en 1995. Au Danemark, la confédération syndicale LO d’employés et d’ouvriers a perdu plus d’un quart de ses adhérents entre 1995 et 2010, tandis que les syndicats « alternatifs » – ne jouant aucun rôle dans les négociations collectives –, eux, montaient en puissance (Due et al., 2010). En revanche, le taux de syndicalisation des employeurs a augmenté ou est demeuré stable.
26 La chute de la syndicalisation a été la plus importante parmi les travailleurs à faible niveau de qualification du secteur privé, en particulier dans le secteur tertiaire. En plus du facteur institutionnel, une explication à cette chute a pu être trouvée dans les changements structurels opérés et, récemment, dans l’augmentation de la main-d’œuvre issue de l’immigration et dans la sous-traitance. Néanmoins, par rapport aux autres pays, les taux de syndicalisation demeurent élevés dans les pays nordiques.
Accroître l’offre de main-d’œuvre et de qualification : réforme des politiques sociales, fiscales et de formation
27 Hormis une série de mesures de réduction des dépenses mises en œuvre pour combler les déficits publics au lendemain de la crise en Suède et en Finlande, la stratégie de consolidation de l’État-providence nordique dans les années 1990 s’est caractérisée par une priorité renforcée accordée aux politiques de formation et d’activation des prestations, y compris par des réformes du système fiscal et des pensions de retraite. En accord avec la théorie « de l’investissement social » (Morel, 2012), l’objectif principal de ces mesures a été de stimuler et d’améliorer l’offre de main-d’œuvre pour augmenter les recettes et réduire les dépenses. L’universalisme du système social est en grande partie maintenu et les modifications institutionnelles sont rares et progressives – sauf pour l’accroissement du recours à la sous-traitance dans le secteur public pour les services à la personne et l’enseignement. Ces services sont confiés à des entreprises privées, en particulier en Suède. Cette stratégie de réforme n’a été modifiée qu’à la marge sous les gouvernements de centre-droit pendant le boom des années 2000, mais ils ont réduit les impôts et certaines prestations et se sont montrés davantage désireux de sous-traiter une partie des services publics. Les pays nordiques ont toutefois abordé la crise économique des années 2008 avec d’importants excédents budgétaires.
Investissement dans l’éducation et réforme de la formation professionnelle
28 Entre 1990 et 2005, la part de la population (25-64 ans) ayant achevé un cursus universitaire passe de 15,7 % à 33 % en Norvège et connaît une ascension similaire dans les autres pays (Dolton, 2009, p. 3). L’enseignement secondaire est rendu accessible à la grande majorité des jeunes, tandis que des efforts sont fournis pour améliorer et élargir les cursus de formation professionnelle. Dans les années 1990, le Danemark investit notamment de grands moyens dans la formation continue en coopération avec des partenaires sociaux. Cependant, dans les années 2000, de nombreux abandons et des taux de décrochage scolaire élevés dans l’enseignement secondaire et la formation professionnelle indiquent que de nouveaux phénomènes d’exclusion sociale sont en train d’émerger, en particulier chez les jeunes immigrés de sexe masculin. Alors que la Finlande continue d’afficher l’une des meilleures notes du classement Pisa, les résultats des autres pays nordiques se dégradent, en particulier pour la Suède.
Réformes des retraites
29 Bien que les perspectives démographiques ne soient pas alarmantes par rapport à d’autres pays, les pays nordiques se montrent proactifs dans la réforme de leurs systèmes de retraite. En 1998, la Suède avait déjà remplacé son régime de retraite à deux volets par un régime de cotisations comprenant une part de capitalisation, avec une garantie minimale. L’âge de la retraite est maintenu à 65 ans et le taux de cotisation est fixé à 18,5 %, les prestations de retraite étant calculées en fonction de l’espérance de vie par tranches d’âge et selon la croissance économique. Peu après, la Norvège adopte des mesures relativement similaires à celles prises par la Suède en mettant en place un système de retraite souple à partir de 62 ans (West Pedersen, 2010), tandis que les réformes finlandaises ne seront achevées qu’en 2014 en raison d’une résistance de la part des partenaires sociaux. Au Danemark, les systèmes de fonds du marché du travail intégralement financés sont introduits en 1991 via des accords collectifs et couvrent presque tous les travailleurs qui n’étaient pas déjà assurés. En 2010, les cotisations atteignent un seuil minimal de 12 %. Le système de retraite forfaitaire est maintenu dans une version plus ciblée (Goul Andersen, 2011a), tandis que le régime de départ anticipé (efterløn) est progressivement supprimé de fait par une réforme des retraites adoptée en 2011-2012.
Réformes du système fiscal
30 Dans le cadre d’une série de réformes adoptées la plupart du temps avec le large soutien de plusieurs partis dans les années 1990, la progressivité du système fiscal et les impôts portant sur les revenus les plus élevés sont considérablement réduits, notamment afin de réduire le taux marginal d’imposition des salaires (Christensen, 2013). Dans leur majorité, ces réformes obéissent au principe de la neutralité des revenus et sont financées par un élargissement de l’assiette fiscale et une augmentation des taxes « écologiques » et d’autres impôts indirects. Par conséquent, les taux marginaux d’imposition sont considérablement réduits [12]. Pour ce qui concerne l’impact négatif présumé des impôts sur l’offre de main-d’œuvre, les pays nordiques, en particulier le Danemark et la Suède, passent du statut de « cas critique » à celui de « favorable à l’emploi ». À l’exception du Danemark, les pays nordiques suivent également les tendances internationales qui penchent vers un modèle fiscal double où une plus faible taxation des salaires est combinée avec une imposition forfaitaire, réduite, des revenus du capital. Enfin, l’impôt sur la fortune est aboli [13].
Renforcement et élargissement de la stratégie d’emploi
31 En réponse au fort taux de chômage des années 1990, la précédente stratégie nordique pour l’emploi est réactivée pour que le bénéfice passif de prestations soit transformé en emploi ou en formation. Avec l’amélioration du marché du travail, les allocataires doivent remplir des obligations plus strictes pour activer leur situation ; l’intégration des immigrés devient prioritaire et les efforts accomplis pour favoriser l’emploi sont étendus aux personnes handicapées, aux malades et aux bénéficiaires de longue durée de l’aide sociale. Au Danemark, avec la reprise économique, la durée de l’assurance chômage est réduite de 8 ans à 4 ans en 1998. La Suède et la Finlande mettent elles aussi en place des mesures de réduction des prestations après la période de récession des années 1990, mais en général la mise sous conditions des prestations sociales a été préférée à leur réduction. Dans les quatre pays, cette stratégie pour l’emploi bénéficie de l’appui des principaux partis politiques, des employeurs et des syndicats. Tandis que des minima sociaux généreux, une longue durée d’assurance et une quasi-universalité du système d’assistance sociale soutiennent l’image de marque de la « flexicurité » danoise, les résultats décourageants de l’emploi, au début des années 2000, poussent le gouvernement social-démocrate suédois à resserrer significativement sa politique d’activation du marché du travail (Berglund et Esser, 2014).
Un changement d’orientation sous les gouvernements de centre-droit dans les années 2000 ?
32 Après la reprise économique dans les pays nordiques dans les années 1990, les coalitions de centre-droit sont revenues au pouvoir au début des années 2000. Avoir adopté le modèle nordique dans le passé impliquait une grande continuité, mais un changement d’orientation a été observé dans plusieurs domaines – en particulier pour l’assurance chômage et le rapport aux syndicats. En plus de renforcer la sous-traitance et la liberté de choix des services municipaux, des mesures de réduction des impôts, comme les crédits d’impôt pour les travailleurs actifs et différents avantages liés à l’emploi destinés à limiter l’augmentation présumée d’« outsiders » [exclus du marché du travail], ont été prises dans tous les pays, sauf la Norvège. Ainsi, le rapport impôts/PIB a subi une chute conséquente en Suède et en Finlande, ainsi qu’au Danemark à partir de l’année 2005 (Christensen, 2013, p. 16). En Suède, l’engagement de réduire la dépendance au système d’aide sociale s’est traduit par une réduction des prestations – le plus souvent en catimini – qui a rapproché son niveau de compensation de la moyenne des pays de l’OCDE (Ferrarini, 2012). Au Danemark, les résultats des politiques d’activation n’ont pas été jugés positifs, ce qui a conduit à changer radicalement le système pour une stratégie obligeant les bénéficiaires à travailler (Goul Andersen et Pedersen, 2007). En particulier, des coupes dans l’aide sociale visant de fait les immigrés non occidentaux [14] ont été décidées dans le cadre d’un programme de réformes du Parti populaire danois, mais ces mesures ont été rapidement abrogées au retour du centre-gauche au pouvoir, en 2011.
33 Le changement le plus significatif entrepris par les gouvernements de centre-droit suédois et danois dans les années 2000 a été l’ébranlement du système de Gand, sur lequel était bâtie la puissance des syndicats. Le système social-démocrate de Gand peut [en effet] être libéralisé en mettant fin au monopole des syndicats, en augmentant les cotisations des membres, en calculant ces cotisations en fonction du risque de chômage, en réduisant les prestations et en les mettant sous conditions. Et c’est ce qu’ont fait les gouvernements de centre-droit danois et suédois, chacun à leur façon. En effet, le Danemark a décidé de briser le monopole des syndicats en réduisant ses déductions fiscales et en mettant toutes les caisses en concurrence sans plus tenir compte de l’affiliation à un syndicat ni du secteur d’activité, ce qui a également donné une impulsion à la création de nouveaux fonds d’entreprises. En Suède, les cotisations ont été triplées et les déductions fiscales supprimées en 2007, puis le calcul des cotisations a été lié au risque de chômage propre à chaque secteur, ce qui devait en théorie inciter les syndicats à modérer les salaires [15]. En plus de la baisse radicale du nombre d’adhérents aux caisses à la veille de la crise financière, les membres des syndicats ouvriers ont diminué de manière importante. Quant à la générosité des prestations, le lien avec les revenus a été pratiquement supprimé au Danemark et en Suède [16], ce qui impliquait le fait que dans ces deux pays, l’assurance chômage ne pourvoyait en pratique qu’un revenu forfaitaire de base (Sjöberg, 2011), avec un taux de remplacement net inférieur à 60 % pour les salaires ouvriers moyens – et encore inférieur pour les salaires moyens. Enfin, la durée de versement des prestations a été réduite : au bout de 300 jours (ou de deux fois 300 jours), les Suédois basculent vers une garantie emploi et développement, avec un seuil de rémunération maximal de 65 %. Au Danemark, la durée des prestations est restée inchangée jusqu’à ce qu’elle soit réduite de moitié (passant de 4 ans à 2 ans) après l’éclatement de la crise financière. En pratique, la mise en œuvre de cette réforme a été reportée et, en 2014, une commission a été formée pour mettre au point une réforme exhaustive de l’assurance chômage.
Des évolutions dans l’emploi entre 1990 et 2008
34 Bien que les marchés du travail des pays nordiques aient connu une bonne reprise – avec un taux d’emploi total passant de 16 % à 24 % entre 1994 et 2008 –, il faut noter que la Suède et la Finlande n’ont jamais réussi à retrouver leurs taux d’emploi et de chômage d’avant la crise. En particulier, le taux d’emploi des Suédoises stagne entre 1994 et 2008, alors même que les politiques fiscales restent contraintes et que la population d’immigrés double. En Finlande et en Suède, des taux d’emploi élevés pour les contrats à durée déterminée – plus de 15 % en 2013 – et une mobilité de la main-d’œuvre considérablement inférieure à celles du Danemark et de la Norvège témoignent également de la segmentation croissante du marché du travail lorsque la crise repart dans les années 1990 (Burglund, 2010). Cela correspond au fait que la Suède et la Finlande disposent d’un encadrement juridique plus souple pour le travail à durée déterminée et possèdent des systèmes juridiques de protection contre le licenciement plus stricts pour les travailleurs en contrat à durée déterminée (CDI) que dans les autres pays nordiques, dont les réglementations visant les licenciements collectifs pour des raisons économiques sont particulièrement libérales.
Taux d’emploi (15-64 ans) et taux de chômage, 1990-2008 en pourcentage

Taux d’emploi (15-64 ans) et taux de chômage, 1990-2008 en pourcentage
Des trajectoires divergentes face à la crise
35 Lorsque la crise financière repart, les petites économies nordiques, ouvertes, sont fortement touchées par l’effondrement du commerce en 2009. Alors qu’en Suède et en Norvège, hors zone euro, la reprise est rapide – temporairement favorisée par les dévaluations –, le Danemark, lui, doit faire face à une sévère récession lorsqu’éclate la bulle créée par les politiques budgétaires procycliques et par la libéralisation du crédit durant la période antérieure de boom économique. Parallèlement à une réduction drastique de l’endettement du secteur privé et à l’arrimage de sa monnaie à l’Euro, le gouvernement prend le virage de l’austérité. L’économie danoise s’est par conséquent durablement enfoncée dans le déclin. En 2014, le PIB est toujours bien inférieur à son niveau de 2008, tandis que le chômage augmente et que le taux d’emploi chute d’environ 6 points (cf. figures 5-8). Après une reprise rapide en 2010, la Finlande se heurte à une crise structurelle plus sérieuse et plonge deux fois, après l’effondrement de Nokia et celui du marché mondial du papier. Mise en difficulté par le programme d’austérité de 2011-2012, son économie est toujours en récession, et son taux de chômage continue d’augmenter en dépit d’une diminution de la population active.
Croissance du PIB, taux de chômage et évolution du taux d’emploi 2008-2013

Croissance du PIB, taux de chômage et évolution du taux d’emploi 2008-2013
36 Contrairement à la majorité des pays de la zone euro, les pays nordiques sont cependant sauvés par leurs solides finances publiques et peuvent se permettre de ne pas couper dans leurs prestations sociales. L’instauration de politiques budgétaires et monétaires contracycliques a ainsi permis à la Norvège et à la Suède d’afficher une croissance robuste lors de la crise. Toutefois, la Suède est touchée par une hausse du chômage – en particulier chez les jeunes – en miroir de l’augmentation continue de la population active, notamment parmi les immigrés dont la population croît également.
Après la crise : changement des circonstances, changement de stratégie ?
37 Ainsi donc, quelle est la position des pays nordiques et quelle direction prennent-ils après la crise économique mondiale de 2008 ? Peut-on toujours considérer que ces différents modèles font partie de la même famille, ou les divergences observées au cours des dernières années indiquent-elles une prochaine disparition des caractéristiques communes des pays nordiques ?
38 En premier lieu, il convient de noter qu’en dépit de performances inégales observées lors des dernières années, les fondations du modèle nordique s’avèrent toujours solides. Aussi petites, ouvertes et dispendieuses soient-elles, les économies nordiques résistent à plusieurs égards. Non seulement leurs systèmes d’État-providence étendu et leurs mécanismes de négociations collectives inclusifs sont toujours solidement ancrés et bénéficient d’un grand soutien politique et populaire, mais, en plus, l’observation de leurs solides finances publiques, de leur grande productivité et de l’excédent de la balance de leurs paiements courants permet d’affirmer que les économies nordiques possèdent bien un savoir-faire à la fois pointu et étendu, des infrastructures modernes, une grande capacité d’adaptation et une demande de biens et services plus équilibrée que dans la majorité des pays tributaires des exportations (Baccaro et Pontusson, 2014). Après les réformes des années 1990, les modèles nordiques hybrides qui surgissent – caractérisés par un mélange entre une libéralisation modérée des marchés, une offre abondante de qualifications généralistes, une coordination du système de fixation des salaires, un partage des risques et des services publics étendus favorisant la redistribution – prospèrent dans les années 2000. Par ailleurs, en matière d’innovation, de recherche et développement (R & D) et d’offre de main-d’œuvre avec une formation universitaire, les pays nordiques se classent au premier rang des comparaisons internationales (Fagerberg et Fosaas, 2014). Avec l’Allemagne, le Royaume-Uni, les autres pays du Nord de l’Europe et les États-Unis, qui sont les principaux partenaires commerciaux de ces économies et avec des exportations croissantes de biens à forte valeur ajoutée vers la Chine et d’autres pays émergents, les pays nordiques sont à la bonne place pour tirer profit de la croissance de l’économie mondiale. Avec leur modèle social fondé sur l’unité et la coordination, leur faible taux d’inégalités et leur tradition du compromis politique, les pays nordiques semblent également en principe mieux équipés que la plupart des autres pays pour appréhender les défis issus de la crise et assurer la transition vers une économie neutre en carbone (Dølvik. 2014).
Les nouveaux modèles nordiques hybrides prospèrent avant la crise des années 2000

Les nouveaux modèles nordiques hybrides prospèrent avant la crise des années 2000
Part de la population adulte (25-64 ans) titulaire d’une formation universitaire, 1990-2011, en pourcentage

Part de la population adulte (25-64 ans) titulaire d’une formation universitaire, 1990-2011, en pourcentage
Part des dépenses R&D au sein du PIB, moyenne 2007-2011. Par source de dépense : commerce, gouvernement, étranger/marché extérieur

Part des dépenses R&D au sein du PIB, moyenne 2007-2011. Par source de dépense : commerce, gouvernement, étranger/marché extérieur
Internautes, pourcentage de la population, pourcentage moyen 2008-2012

Internautes, pourcentage de la population, pourcentage moyen 2008-2012
39 En deuxième lieu, en dépit de ces circonstances favorables, nous ne devons pas négliger le fait que les pays nordiques ne sont aucunement protégés contre les évolutions à l’œuvre aux marges de l’Europe, ni que les dynamiques corrélées aux évolutions nationales pourraient affaiblir leur grande capacité d’adaptation. Ainsi, il n’y a pas de raison de faire montre d’un contentement béat devant ce modèle. Tandis que les changements intervenant au niveau européen ou mondial sont bien connus, les changements affectant les sociétés nordiques impliquent, eux, un virage démographique, une modification en profondeur de la gouvernance du marché du travail et, enfin et surtout, la transformation des conditions des alliances politiques, des relations de pouvoir et des compromis stratégiques. L’interférence entre ces changements externes et internes ayant révélé des fissures et des signes d’érosion sur quelques-unes des fondations de ces modèles au cours des dernières années, l’incertitude a grandi au sujet de la stratégie de croissance et de réforme sociale des pays nordiques dans le futur. De nombreuses sources témoignent de la montée en flèche de cette incertitude :
40 – Avec l’adhésion à l’Union européenne et, pour la Finlande, à la zone euro, les schémas de gouvernance macroéconomique ne sont plus les mêmes. Tandis que la Norvège et la Suède peuvent toujours avoir recours aux outils monétaires pour stabiliser leur économie, la Finlande et le Danemark, en raison de leur ancrage dans l’Euro, sont obligés de procéder à des dévaluations internes pour pouvoir s’adapter. Les contraintes fiscales plus strictes imposées par l’UE représentent un poids supplémentaire pour les politiques fiscales et salariales, c’est-à-dire pour son modèle social, et réduisent les marges pour procéder à des réformes par le biais de politiques coordonnées telles qu’elles existaient dans le modèle tripartite nordique [traditionnel].
41 – Comme l’ont démontré l’éclatement des bulles danoise et islandaise, les pays nordiques font face par ailleurs à une forte augmentation de la dette privée et à une réorientation des investissements vers les actifs financiers, l’immobilier, etc. Tout en contribuant à une forte croissance de la demande des consommateurs à l’échelle nationale, ce phénomène a entravé les investissements traditionnellement élevés dans la production, accru les risques d’instabilité financière et soulevé des questions quant à l’augmentation de la productivité et du commerce de biens dans le futur.
42 – Néanmoins, la gestion coordonnée de l’emploi dans les pays nordiques demeure solide. Mais en plus d’une diminution de la syndicalisation et de la couverture conventionnelle dans le secteur privé – qui nuit majoritairement aux syndicats ouvriers –, de plus en plus de signes trahissent une érosion de l’emploi et une dualisation à la marge du marché du travail, actionnées par l’augmentation de la sous-traitance et la concurrence entre les faibles salaires faisant suite aux élargissements de l’UE entre 2004 et 2007. Ces dynamiques peuvent enrayer la mécanique de la productivité, vider les syndicats de branche de leurs forces et inciter davantage d’employeurs à contourner les accords collectifs et à opter pour une compétitivité tirant les coûts par le bas et stimulant ainsi la croissance des inégalités.
43 – Riche en capital humain, la vie professionnelle nordique se distingue depuis longtemps par des seuils de rémunération et des niveaux de productivité élevés. [Or] la main-d’œuvre locale qui stagne, le nombre croissant de personnes immigrées et les niveaux élevés de décrochage scolaire dans l’enseignement secondaire et la formation professionnelle – en particulier chez les jeunes immigrés de sexe masculin – entraînent un risque d’accroissement des inadéquations entre l’offre et la demande de travail et aussi des clivages sociaux et une exclusion sur des motifs ethniques. D’autres indices laissent par ailleurs penser que l’augmentation des migrations professionnelles dans l’UE a évincé les apprentis et les travailleurs à faible niveau de qualification, en particulier chez les jeunes appartenant à des minorités. Le modèle social nordique repose sur un taux d’emploi élevé pour financer l’État-providence et éviter d’augmenter les dépenses publiques, mais depuis le début des années 2000, les taux d’emploi ont eu tendance à baisser. Les énormes efforts pour mettre en œuvre des politiques d’activation et d’intégration se sont soldés par des résultats décevants, et le chômage s’est considérablement accru au cours de la crise. Comme l’essentiel de l’augmentation de la main-d’œuvre disponible dans les décennies à venir sera dû à la population immigrée, dont les taux d’activité sont 25 % à 30 % inférieurs à ceux de la population locale, il est devenu capital de mettre au point une meilleure stratégie pour favoriser leur intégration au marché du travail.
44 – Bien que l’État-providence des pays nordiques soit bien financé et semble robuste, il a maigri et se montre moins généreux, en particulier en Suède (figure 13). Associé à la stagnation des taux d’emploi, au vieillissement, à l’hétérogénéité croissante des populations et aux allègements fiscaux importants qui ont marqué ces dernières années, ce phénomène a contribué – avec le renfort de la crise – à accroître les inégalités de revenus entre les ménages. À vrai dire, les inégalités de revenus, qui étaient faibles au départ, ont augmenté plus rapidement que dans la majorité des autres pays européens (figure 14 ci-après). Le taux de pauvreté a également augmenté en Suède et au Danemark, majoritairement chez les populations immigrées. Depuis les années 1970, la répartition de la demande de main-d’œuvre dans le secteur public favorise l’emploi des femmes, freine les inégalités de revenus et empêche l’explosion des emplois mal payés que l’on observe dans de nombreux autres pays. Mais les coupes récentes dans les impôts et les prestations sociales pourraient parallèlement au changement démographique, amoindrir les effets de ces mécanismes dans les années à venir.
Indice de générosité des prestations sociales – Taux de remplacement des revenus en pourcentage [17]

Indice de générosité des prestations sociales – Taux de remplacement des revenus en pourcentage [17]
Inégalités de revenus disponibles des ménages 1995-2010 (coefficient de Gini, population active 18-65 ans)

Inégalités de revenus disponibles des ménages 1995-2010 (coefficient de Gini, population active 18-65 ans)
Conclusion
45 Les fondations des modèles nordiques semblent solides et offrent de meilleures conditions que la majorité des pays de même niveau de développement pour s’adapter aux conséquences de la crise et passer à une économie sans carbone. Dans le passé, les pays nordiques étaient réputés pour leur capacité à se réformer dans la souplesse et la coordination. Mais avec la montée en puissance des partis populistes à droite et un monde politique plus fragmenté, on peut de moins en moins prévoir jusqu’où cette capacité à se réformer sera préservée. Le modèle nordique affiche en effet divers éléments favorables à un nouveau pacte productif, compromis entre les économies de marché mondialisées et le modèle social fondé sur une coordination, une solide éthique professionnelle, la collectivisation des risques et un investissement social important. Il convient toutefois de ne pas négliger le fait que la dynamique puissante des marchés internationaux, de la concurrence fiscale, de la libre circulation et de la gouvernance naissante de l’Union européenne imposent de nouvelles contraintes et génèrent une érosion institutionnelle susceptible d’affaiblir la capacité future de ces pays à s’adapter. On ne peut pas non plus éliminer la possibilité que les divergences observées à la suite de la crise se creusent, par exemple entre les membres de la zone euro et ceux qui n’en font pas partie ou en raison d’autres facteurs économiques ou politiques, ce qui affaiblirait la pertinence de l’idée d’un modèle nordique unique. L’une des questions complexes auxquelles doivent répondre ceux qui prennent les décisions dans les pays nordiques concerne la compatibilité entre, d’une part des régimes de protection sociale et des marchés du travail égalitaires et inclusifs et d’autre part une immigration importante et probablement en augmentation dans un contexte post-crise caractérisé par un chômage de masse et un creusement des inégalités sociales en Europe.
Notes
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[1]
Ce texte reprend en grande partie « The Nordic Models in Turbulent Times : Consolidation and Flexible Adaptation » in European Social Models from Crisis to Crisis. Employment and Inequality in the Era of Monetary Integration de Dølvik J.E., Goul Andersen J. et Vartiainen J. (2015), paru aux éditions Dølvik J.E. et Martin A., Oxford University Press. Il s’appuie également sur Dølvik J.E, Fløtten T., Hippe, J. et al. (2015), The Nordic Model : A New Chapter ?, Nordmod2030, Oslo, Fafo 2015.
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[2]
La rédaction de la RFAS prie ses lecteurs de bien vouloir l’excuser pour l’absence de traduction des schémas et figures de cet article, due à une impossibilité technique.
-
[3]
Cette analyse n’inclut pas l’Islande, qui a subi un effondrement financier spectaculaire à la suite de la libéralisation financière du milieu des années 1990. L’économie islandaise s’est toutefois rapidement redressée après avoir dévalué la couronne islandaise de quasiment 50 %, introduit un système de contrôle des capitaux et réformé l’État-providence et les impôts ayant une vocation de redistribution (Ólafsdottir et Ólafsson, 2014).
-
[4]
Le modèle de Gand est un système de relations professionnelles où l’appartenance à un syndicat conditionne l’accès à certains droits sociaux tels que l’assurance chômage ou l’assurance maladie (note du traducteur).
-
[5]
Entre décembre 2007 et juin 2008, la Cour de justice des communautés européennes a rendu quatre arrêts (Viking, Laval, Rüffert et Luxembourg) mettant en cause directement certaines spécificités des modèles sociaux européens, touchant au droit de grève, à la nature des dispositifs conventionnels et aux modalités de fixation des minima salariaux (note du traducteur).
-
[6]
En 2014-2015, la chute des prix du pétrole ralentit également la croissance et les investissements en Norvège. Toutefois, la dévaluation massive de la couronne a amélioré la compétitivité des biens manufacturés destinés à l’export et devrait, à l’aide d’une gestion rigoureuse des finances publiques, favoriser une moindre dépendance de son modèle de croissance par rapport au pétrole.
-
[7]
Au Danemark, l’austérité des politiques économiques a débuté au début des années 1980. Après le choc pétrolier de 1972, le Danemark a continué d’étendre ses services publics et s’est débattu contre des déficits croissants de son budget et de sa balance des comptes courants. Après l’arrimage de la couronne au DM (1983), il a fallu quasiment 10 ans de croissance fondée sur les exportations et la contraction de la demande intérieure pour que le solde de la balance des paiements soit fortement excédentaire (Goul Andersen, 1997). Le taux de chômage a connu un pic en 1993, mais, en dépit de la réduction des dépenses publiques, les institutions de l’État-providence sont quasiment restées identiques.
-
[8]
L’ampleur de l’assainissement des finances publiques est plus importante en Suède que dans tous les autres pays de l’OCDE entre le début des années 1970 et la période 2008-2011 (Erixon, 2011, p. 273).
-
[9]
Un accord tripartite pour un système responsable de fixation des salaires avait été conclu au Danemark en 1987, au moment où une nouvelle loi conditionnait les augmentations de salaires dans le secteur public et la majorité des transferts sociaux à l’augmentation des salaires dans le secteur privé, pour soutenir la coordination entre les deux secteurs.
-
[10]
En 2013, le Comité de la liberté syndicale de l’Organisation internationale du travail (OIT) et le Comité européen des droits sociaux du Conseil de l’Europe ont décrété que la nouvelle législation suédoise est contraire au droit à la liberté syndicale et à la négociation collective, protégé à la fois par la Convention 87 de l’OIT et par la Charte européenne des droits de l’homme. Le nouveau gouvernement de coalition a alors proposé d’amender la loi.
-
[11]
Le taux d’adhésion aux caisses ayant chuté d’un demi-million en deux ans, 29 % des salariés (1,3 million) n’ont pas d’assurance en 2009, alors que ce taux était de 17 % en 2006. De même, environ 50 % des chômeurs ne bénéficient pas d’une assurance en 2009 (mais conservent toutefois un droit aux prestations sociales de base). Les taux d’adhésion remontent lors de la crise, mais deux tiers des chômeurs n’ont toujours pas d’assurance en 2012 (Dagens Nyheter, 22 décembre 2012).
-
[12]
Après d’autres réformes mises en œuvre dans les années 2000, en 2013, les taux marginaux d’imposition sur la main-d’œuvre au Danemark et en Suède passent sous la moyenne des 21 pays de l’OCDE dans l’UE pour 7 foyers sur 8. Au regard des taux d’imposition moyens, le Danemark présente un taux inférieur à la moyenne des 21 pays de l’UE pour tous les types de ménages, tandis que la Suède et la Finlande sont, pour la plupart des cas, juste au-dessus de la moyenne – la Norvège se situant entre les deux (OCDE, 2014, p. 67, 77).
-
[13]
En Norvège, l’impôt sur la succession est aboli et l’impôt sur la fortune est réduit par le gouvernement conservateur élu en 2013. Au cours des dernières années, l’impôt sur les sociétés a fait l’objet d’une importante concurrence à la baisse entre les pays nordiques.
-
[14]
En 2005, un programme d’insertion requiert au minimum 300 heures (puis, plus tard, 450 heures) de travail ordinaire sur une période de deux ans pour que les allocataires mariés demeurent éligibles aux prestations sociales.
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[15]
Cette évolution finit par s’inverser en 2014.
-
[16]
En Suède, le gouvernement commence par geler le plafond en 2002 et, en 2007, les prestations sont réduites à 70 % au bout de 200 jours de chômage, puis à 65 % au bout de 300 jours, tandis qu’au lieu de se référer au précédent salaire mensuel des chômeurs, on calcule les prestations sur la base des revenus annuels, ce qui affecte en particulier les travailleurs occasionnels.
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[17]
Taux de remplacement du salaire sous forme de prestations de chômage, d’indemnités maladie et d’allocations de retraite calculées pour un travailleur de 40 ans exerçant dans le secteur des biens manufacturés et se trouvant au chômage après 20 ans de travail (Scrugg, 2014).