CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction [1]

1En 2008, la plus grave crise ayant frappé l’économie mondiale depuis la Grande Dépression de 1929 a commencé aux États-Unis, avant de se propager rapidement en Europe. Cette crise, qui s’est d’abord transmise à la Grèce et a ensuite touché la plupart des économies périphériques de l’Union européenne (UE), a révélé non seulement les faiblesses structurelles de certains États membres de l’UE, mais aussi les faiblesses de la gouvernance de la zone euro (Grauwe, 2013). Du point de vue de la diversité des formes de capitalisme, l’appartenance à l’Union économique et monétaire (UEM) a généré des tensions structurelles dues au fait que différents types d’économies politiques ont adopté une monnaie commune. Dans ce contexte, le Portugal, l’Espagne, l’Italie et la Grèce ont été souvent classés dans un même groupe, par opposition à un groupe de pays du Nord conduit par l’Allemagne et comprenant des pays tels que les Pays-Bas, l’Autriche, le Danemark et la Finlande (Hall, 2012). Parmi les caractéristiques attribuées au premier groupe figuraient les rigidités du marché du travail, notamment en matière de protection contre les licenciements, la disponibilité de formes d’emploi atypiques et de négociation collective et une faible capacité administrative de mise en œuvre de la réglementation, conjuguant le non-respect des règles avec des insuffisances institutionnelles et culturelles plus générales (La Spina et Sciortino, 1993).

2Sous l’angle du droit du travail, malgré l’absence d’un Code du travail au niveau de l’UE qui aurait défini un plancher minimum pour les systèmes juridiques nationaux dans ce domaine, l’expérience du droit du travail européen depuis le début des années 1970 a été largement caractérisée par la stabilité et la préservation d’un haut niveau de protection [2]. Cela s’explique en partie par une compatibilité fondamentale entre la protection du droit du travail et l’agenda en matière de compétitivité à cette époque, qui reconnaissait l’effet des « contraintes bénéfiques » (Streeck, 1997) de la réglementation du marché du travail, notamment de la négociation collective, ce qui était particulièrement important. Cette compatibilité était une des caractéristiques de l’élaboration des politiques et de la pratique des (systèmes de) relations professionnelles tant au niveau européen qu’au niveau national. Concernant le niveau européen, la Communauté économique européenne apparaissait axée, depuis ses origines, autour du découplage des sphères économique et sociale qui soutenaient le processus de construction européenne, tandis que la sauvegarde de cette politique sociale continuait de relever des prises de décision politiques au niveau national. Le fait que toute compétence de l’UE soit exclue en matière de rémunérations, droit d’association, droit de grève ou droit de lock-out – désormais article 153(5) du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) doit être compris à la lumière de cette position.

3Malgré ces limites, le rôle de la négociation collective dans l’élaboration de la loi et l’intégration dans le droit de l’UE des procédures de négociation collective nationales ont été reconnus par la suite (Ewing, 2015). Dans le cas de la négociation collective, le traité de Maastricht a fourni un cadre pour des accords autonomes conclus par les partenaires sociaux européens, qui pouvaient même être convertis en loi européenne par une décision du Conseil (articles 154 et 155 TFUE). La directive sur les travailleurs détachés (96/71/CE) est un bon exemple de ce dernier cas : en application de l’article 3(1), les conditions de travail et d’emploi pour les travailleurs détachés sont celles fixées par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives et par des conventions collectives ou la jurisprudence d’application générale. En même temps, l’acceptation d’une approche monétariste du projet de construction européenne qui a été institutionnalisée dans le traité de Maastricht comportait également un risque de déstabilisation des systèmes nationaux de relations professionnelles. Cependant, ainsi que Bruun (2003, p. 23) l’affirmait : « la réglementation économique de l’UE a jusqu’ici subi avec succès le test de l’acceptation ou du respect des résultats nationaux du processus de négociation collective ». Le rôle de la négociation collective a même été renforcé par la suite avec la reconnaissance par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (CDFUE) du droit de négocier et de conclure des conventions collectives et de recourir à des actions collectives (article 28), même si ce droit est fondamentalement soumis à la conformité au droit communautaire et aux législations nationales [3].

4Parallèlement à ces évolutions, un certain nombre de systèmes de droit du travail et de relations sociales ont reconnu au niveau national, y compris au niveau constitutionnel, le droit à la négociation collective. On a pu dire que cela reflétait « l’orthodoxie économique à l’époque à laquelle ces constitutions ont été élaborées, généralement entre le milieu des années 1940 et le milieu des années 1970 » (Ewing, 2015, p. 79). Par exemple, la constitution grecque dispose que les « conditions générales du travail sont déterminées par la loi et complétées par des conventions collectives résultant de négociations collectives libres » (article 22). Des dispositions similaires ont été introduites dans d’autres pays touchés plus tard par la crise (voir l’article 37 pour la constitution de l’Espagne et l’article 56 pour la constitution du Portugal). Certains États d’Europe centrale et orientale ont adopté des dispositions d’effet similaire (par exemple l’article 41 de la constitution roumaine et l’article 108 de la constitution lettone). Ces dispositions interagissaient, le cas échéant, avec la reconnaissance des droits respectifs résultant de la Convention européenne des droits de l’homme (article 11), de la Charte sociale européenne (révisée), tels que la liberté syndicale (article 4) et le droit de négociation collective (article 5) et les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT, en particulier no 98 et no 154). Dans ce contexte, il est important de souligner que la majorité des systèmes de relations professionnelles (à l’exception du Royaume-Uni et d’un certain nombre d’États d’Europe centrale et orientale qui ont rejoint plus tard l’UE) se caractérisaient par des systèmes de négociation à plusieurs niveaux. À quelques exceptions près, de tels mécanismes bénéficiaient d’un large soutien institutionnel de la part, à la fois, de l’État (sous la forme, par exemple, de mécanismes d’extension) et des partenaires sociaux (Koukiadaki et al., 2015). Malgré ces évolutions, la réglementation du travail a été plus généralement incapable d’inverser la tendance allant vers des systèmes de négociation collective plus faibles et vers une chute du taux de syndicalisation au niveau national. Ces problèmes, en affaiblissant à la base les protections assurées par le droit du travail, ont été à l’origine, au moins en partie, de l’augmentation des inégalités qu’ont connue les grandes économies de l’UE, ainsi que les États-Unis, pendant la période ayant conduit à la crise. Lorsque la crise de 2007-2008 est apparue, tout d’abord aux États-Unis, les connexions entre les marchés du travail et les marchés financiers ont fait que les contradictions entre les différents droits ont été transmises d’un contexte de marché à l’autre, ce qui a aggravé la crise et l’a propagée aux États membres de l’UE (Deakin et Koukiadaki, 2013).

5Dans ce contexte, l’article évalue de façon critique les effets des mesures liées à la crise sur les droits collectifs des travailleurs et particulièrement sur la négociation collective en Europe. Les perceptions de la crise de l’euro ayant été influencées de manière significative par la crise en Grèce, l’analyse utilisera parfois le cas grec comme exemple pour illustrer les évolutions dans ces domaines. Dans un second temps, on étudie la réponse institutionnelle à la crise, en regardant comment elle peut se recouper avec le droit du travail et les relations sociales. Une troisième partie examine l’impact réel des mesures sur le droit collectif du travail au niveau national et sur les systèmes de négociation en particulier. Enfin, l’analyse évalue de façon critique les possibilités de contestation légale des mesures devant les institutions juridiques supranationales.

La crise économique et l’institutionnalisation de l’austérité au niveau européen

6Lorsque la crise a frappé l’Europe, la réponse supranationale à cette crise a abouti, d’une manière diversifiée et complexe, à un effort de prise en compte des particularités de toutes les situations (par exemple les États membres de la zone euro, les États membres de l’UE, les pays bénéficiant de prêts et ceux subissant des déséquilibres macro-économiques). En tout premier lieu, un certain nombre de prêts ont été accordés aux États les plus touchés par la crise, aussi bien à l’intérieur qu’en dehors de la zone euro. La première tranche d’accords de prêt en dehors de la zone euro était explicitement basée sur le droit de l’UE : la Hongrie, la Lettonie et la Roumanie ont toutes reçu, depuis 2008, une assistance en application d’une disposition de traité déjà existante (l’article 143 TFUE) permettant de mettre en place un fonds pour assister les États non-membres de la zone euro rencontrant des difficultés dans la balance des paiements susceptibles de compromettre le fonctionnement du marché intérieur ou la mise en œuvre de la politique commerciale commune [4]. À l’intérieur de la zone euro, il y avait un panachage de programmes reposant en partie sur le droit de l’UE (à savoir en Irlande et au Portugal), tandis que d’autres étaient entièrement basés sur les trois types distinctifs d’accords internationaux adoptés par les États de la zone euro (à savoir en Grèce et à Chypre). Pour le premier groupe, c’est-à-dire l’Irlande et le Portugal, les programmes étaient basés sur le mécanisme européen de stabilisation financière (MESF) reposant sur le droit de l’UE (article 122(2) TFUE) [5] et sur le Fonds européen de stabilité financière (FESF) intergouvernemental [6]. Mais, ainsi que Kilpatrick le fait valoir, même dans les cas où les programmes reposaient sur un panachage de mécanismes de l’UE et de mécanismes intergouvernementaux, « c’est la composante UE qui est systématiquement et explicitement utilisée pour encadrer légalement les conditions du prêt dans les protocoles d’accord » (Kilpatrick, 2014, p. 401). En outre, le mécanisme européen de stabilité (MES, un traité intergouvernemental) [7] a servi de base à l’assistance financière accordée à Chypre [8]. Enfin, les États membres de la zone euro ont mis en place des prêts bilatéraux complétés par un accord de confirmation du Fonds monétaire international (FMI) pour le premier programme grec en 2010 et le FESF a servi de base au deuxième programme grec en 2012. Mais différents liens avec les sources du droit de l’UE restaient disponibles. Avant tout, un certain nombre de décisions du Conseil ont été adoptées sur la base des articles 126 (paragraphes 6 et 9) et 136 TFUE dans le cas du premier programme, qui consistait en prêts bilatéraux. Il est important de noter que certaines des décisions étaient au stade contraignant de la procédure prévue à l’article 126(9) (Kilpatrick, 2014). Des liens supplémentaires avec le droit de l’UE ont résulté du fait que les recommandations spécifiques par pays pour la Grèce n’ont pas stipulé de recommandations supplémentaires, mais seulement, d’une manière générale, la mise en œuvre de leurs protocoles d’accord respectifs, avec les suppléments révisés (Koukiadaki, 2014). Enfin, il est tout aussi important de noter qu’un certain nombre d’institutions de l’UE, à savoir la Commission européenne et la Banque centrale européenne (BCE), ont été fortement impliquées dans l’établissement, l’exécution et la surveillance des programmes [9].

7L’adoption de programmes d’ajustement économique pour les États membres de l’UE les plus touchés a été complétée par une série de réformes radicales de grande envergure au niveau européen. En tout premier lieu, le traité de Lisbonne de 2009 a ajouté des dispositions importantes aux traités européens afin de renforcer la gouvernance économique de la zone euro (Schömann, 2014). Cependant, au fur et à mesure que la crise se développait, de nouvelles compétences devenaient nécessaires pour en maîtriser les effets. Le Conseil, basant ses actions sur l’article 48(6) du traité sur l’Union européenne (TUE), a ajouté un troisième paragraphe à l’article 136 TFUE afin de permettre au Conseil d’arrêter des mesures pour la zone euro, mais aussi de légitimer l’adoption du MES, conçu pour créer un mécanisme de stabilité permanent. En outre, un nouvel ensemble de règles sur l’amélioration de la gouvernance économique de l’UE était adopté. En 2010, les États membres de l’UE ont décidé de créer le semestre européen, un mécanisme dans le cadre duquel tous les États membres de l’UE, après avoir reçu des recommandations spécifiques au niveau de l’UE, soumettent alors leurs programmes nationaux en vue de leur évaluation au niveau européen. Dans le cadre du semestre européen, les recommandations par pays relatives à la politique économique et à l’emploi sont adoptées sur la base des articles 121 et 148 TFUE respectivement. L’article 121 engage les États membres de l’UE à coordonner leurs politiques économiques et les dissuade d’appliquer des politiques qui pourraient mettre en danger le bon fonctionnement de l’UEM. L’article 148 place l’emploi au centre de la politique économique de l’UE et demande aux États membres de soumettre des rapports réguliers sur la situation de l’emploi dans leur pays. Il est important de noter que le semestre européen s’appuie sur un système de surveillance et de contrôle a posteriori basé sur un traité et reconnaît les rôles spécifiques de diverses institutions de l’UE, la Commission européenne jouant un rôle central [10].

8Le mécanisme du semestre européen a été ensuite suivi, en 2011, par ce que l’on a appelé le Pacte pour l’euro plus et le Six-Pack, se composant de cinq règlements et d’une directive, renforçant le Pacte de stabilité et de croissance (PSC). En bref, le premier, c’est-à-dire le Pacte pour l’euro plus, a été adopté en mars 2011 et constitue un accord intergouvernemental permettant une coordination accrue des politiques en matière de compétitivité et d’emploi, entre autres, pour les États membres de la zone euro plus un groupe d’États supplémentaires. Le Pacte souligne en particulier le besoin de flexibilité, la réduction du coût de la main-d’œuvre et la décentralisation de la négociation salariale comme objectifs de la coordination des politiques (Barnard, 2012). Quant au Six-pack, qui s’applique également aux États membres de la zone euro et de la zone euro « plus », il se compose d’une directive et de cinq règlements sur la surveillance macro-économique et fiscale. Il est entré en vigueur en décembre 2011. Le Six-Pack perfectionne le PSC en renforçant à la fois le volet préventif, c’est-à-dire l’objectif à moyen terme de discipline budgétaire, et le volet correctif du Pacte, c’est-à-dire la procédure concernant les déficits excessifs, qui s’applique aux États membres qui n’ont pas respecté le critère de déficit ou de dette. Toujours dans le même contexte, les règlements inclus dans le Two-Pack, entré en vigueur en mars 2013, imposent aux États membres de soumettre leurs budgets nationaux pour examen à la Commission européenne, qui peut demander des modifications si le budget se révèle significativement nonconforme aux exigences du PSC. En outre, en mars 2012, le Pacte budgétaire intergouvernemental (qui est la partie fiscale du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance – TSCG) a été signé par 25 des 27 États membres de l’UE, à l’exception du Royaume-Uni et de la République tchèque. Le but est, là aussi, de renforcer encore le PSC et d’introduire de nouveaux mécanismes de contrôle [11].

Les effets sur le droit collectif du travail et les systèmes de relations sociales au niveau national

9Une caractéristique centrale des mécanismes appliqués pour gérer la crise en Europe et en particulier dans les États membres de l’UE qui ont reçu des prêts consiste en la promotion de politiques de « dévaluation interne ». De telles politiques sont utilisées comme « équivalents fonctionnels » à la flexibilité des taux de change, afin de restaurer la compétitivité en matière de coût de main-d’œuvre des États membres de l’UE les plus touchés par la crise (Armigeon et Baccaro, 2012). Cet écart de compétitivité était en partie le résultat de pactes sociaux qui comprimaient la croissance des salaires dans les États membres du Nord, ainsi que de la productivité élevée, obtenue en partie à travers l’institutionnalisation de la coopération sur le lieu de travail dans ces pays, et qui n’avait pas été égalée ailleurs (Johnston et Hancké, 2009). Cependant, l’axe des réformes portait exclusivement sur les régimes de droit du travail des États membres de l’UE les plus touchés par la crise (Deakin et Koukiadaki, 2013).

10En effet, un examen des décisions d’accompagnement du Conseil et du protocole d’accord accompagnant les programmes nationaux de réforme révèle que leurs dispositions étaient très intrusives à l’égard des systèmes juridiques et des politiques sociales nationales. Un aspect important du caractère intrusif réside dans le fait que les programmes mettent en œuvre des changements portant sur un certain nombre de questions allant de l’éducation et de la santé aux retraites, aux salaires du secteur public et à la protection de l’emploi dans le secteur privé. Concernant en particulier le marché du travail, les objectifs de la Commission européenne poursuivis avec les réformes structurelles en échange d’un soutien financier ont été clairement définis dans le rapport de la direction générale des affaires économiques et financières (DG ECFIN) « Labour Market Developments in Europe 2012 » (Commission européenne, 2012a). Sous l’intitulé « réformes favorables à l’emploi », la DG ECFIN présentait une longue liste de « réformes structurelles » nécessaires, qui prévoyaient divers aspects de déréglementation du marché du travail, tels que la diminution des allocations de chômage, l’assouplissement de la législation sur la protection de l’emploi et le relèvement de l’âge de la retraite. Un aspect essentiel de cette liste figurait aussi dans une sous-section sur le « cadre de la négociation salariale », qui formulait un certain nombre de suggestions telles que la réduction des salaires minimum légaux et contractuels, la réduction du champ d’application des négociations et l’extension (automatique) des conventions collectives, la réforme du système de négociation collective dans le sens de la décentralisation, par exemple en introduisant ou en renforçant la possibilité de déroger à des conventions de niveau supérieur ou de négocier des conventions au niveau de l’entreprise et en promouvant des mesures conduisant à « une diminution globale du pouvoir des syndicats dans la fixation des salaires » [12].

11De même, des efforts particuliers ont été faits pour modifier des aspects centraux des mécanismes de fixation des salaires, ainsi que des procédures de négociation collective, de médiation et d’arbitrage. Ces changements sont conformes à l’exigence de garantir la modération des salaires, mais aussi à celle de réduire le rôle des systèmes de négociation collective. À cet égard, on peut distinguer trois catégories de mesures (Marginson, 2015). La première consiste à réduire le champ d’application de la négociation collective, notamment en limitant ou supprimant les mécanismes d’extension et en limitant la durée pendant laquelle les conventions demeurent en vigueur après expiration. Le cas de la Grèce représente un exemple plutôt extrême dans cette catégorie, puisqu’il y a eu une suspension (temporaire) de l’extension des conventions collectives sectorielles et professionnelles [13] et que la durée de validité des conventions après expiration de leur période de validité a été réduite à trois mois [14]. La deuxième catégorie de mesures porte sur la décentralisation de la négociation et comprend toutes les mesures liées à l’abolition des conventions nationales et intersectorielles faisant prévaloir les conventions conclues au niveau de l’entreprise, suspendant le principe de la clause la plus favorable et introduisant de nouvelles possibilités pour les accords d’entreprise de déroger aux accords de niveau supérieur ou à la législation. Si l’on prend de nouveau l’exemple de la Grèce, un certain nombre de changements ont été introduits dans ces domaines : le droit de fixer des salaires applicables dans toute la Grèce dans le cadre d’une convention collective générale nationale a été remplacé par un salaire minimum légal fixé au moyen d’une loi par le gouvernement en consultation avec les partenaires sociaux [15] ; la possibilité pour les accords d’entreprise de déroger aux conventions sectorielles a été introduite [16] ; l’application du principe de la clause la plus favorable dans le cas de la mise en œuvre simultanée de conventions collectives sectorielles et d’entreprise a été suspendue [17] ; le recours unilatéral à l’arbitrage a été aboli [18]. Enfin, la troisième catégorie porte sur une réduction de la prérogative des syndicats d’agir à titre de principal canal de représentation des travailleurs. En Grèce, des associations dites « associations de personnes », sans aucune indépendance manifeste, se sont vu accorder le pouvoir de conclure des accords d’entreprise pouvant comporter des clauses dérogatoires moins favorables [19]. Des efforts ont également été faits pour modifier radicalement la législation sur les syndicats et le champ d’application de l’action syndicale, mais l’élection du gouvernement dirigé par Syriza en janvier 2015 y a mis fin (temporairement).

12Pour couronner ces efforts, d’autres formes d’intervention, notamment le Pacte pour l’euro plus et les recommandations par pays, ont entraîné des changements sur le marché du travail dans d’autres États membres de l’UE qui n’étaient pas bénéficiaires de programmes d’assistance financière à proprement parler. Dans le cadre du Pacte pour l’euro plus, un certain nombre d’États membres de l’UE ont été invités à reconsidérer certains aspects de leurs mécanismes de fixation des salaires. Ici aussi, l’accent a été mis de plus en plus sur la révision des accords salariaux, le degré de centralisation du processus de négociation et les mécanismes d’indexation (Conseil européen, 2011, p. 16). Les engagements pris par les États ont ensuite fait l’objet des recommandations par pays adoptées dans le cadre du système de semestre européen. Au total, des RSP ont été adressées à six pays concernant certains aspects de leurs mécanismes de fixation des salaires au moins au cours de l’une des trois années pendant lesquelles le système a fonctionné. Parmi ces six pays figuraient la Belgique, le Luxembourg, l’Italie et Malte [20]. Le cas de l’Italie est particulièrement révélateur. Un certain nombre de politiques qui ont été mises en place depuis 2011 ressemblent fortement à une « lettre secrète » adressée au Premier ministre italien de l’époque, signée conjointement par les deux présidents entrant et sortant de la BCE, décrivant des réformes structurelles similaires à celles figurant dans les RSP (Colombo et Regalia, 2015). Dans le même temps, l’Italie était destinataire de RSP orientées également vers la promotion de la flexibilité du marché du travail dans le droit individuel du travail et vers l’amélioration de la productivité à travers des modifications du système de négociation collective [21]. Il en a résulté l’introduction de modifications dans la législation en matière de négociation collective, notamment la possibilité controversée de dérogations à la législation nationale au niveau de l’entreprise [22].

13Les premières évaluations de ce cadre réglementaire en évolution rapide pour la gouvernance de la politique économique au sein de l’UE et de la zone euro soulignent leur impact crucial, direct et indirect sur le droit du travail, représentant « la réponse de l’UE à la crise constituant la menace la plus grave pour les travailleurs : une déréglementation cautionnée par l’UE ou l’UE et le FMI des droits des travailleurs au niveau national entraînant un risque de course vers le bas » (Barnard, 2012). L’effet est encore plus prononcé en ce qui concerne les modalités de fonctionnement du système de négociation collective à multiples niveaux, qui subissent maintenant ce que Marginson (2015) a appelé une « attaque frontale ». En effet, les éléments empiriques donnent à penser que les mesures ont modifié d’une manière substantielle le paysage de la réglementation paritaire des conditions d’emploi. Des recherches récentes sur la situation de la négociation collective dans sept États membres de l’UE touchés de manière significative par la crise (la Grèce, l’Italie, l’Irlande, l’Espagne, le Portugal, la Roumanie et la Slovénie) ont montré que l’impact des mesures sur la négociation collective était important et que le dénominateur commun était une réduction de la négociation collective aux niveaux supérieurs (c’est-à-dire intersectoriel et sectoriel) et une tendance à la décentralisation (Koukiadaki et al. 2015).

La possibilité (ou l’impossibilité) d’un recours juridictionnel contre les mesures d’austérité au niveau supranational

14L’institutionnalisation de l’austérité fiscale dans les mécanismes de gouvernance conçus pour répondre à la crise économique a entraîné des « réformes [du marché du travail] qui ont transformé profondément les systèmes nationaux » (Barnard, 2014, p. 25). Dans ce contexte, il est essentiel que puissent être contrôlées la légalité ainsi que la légitimité de la volonté d’appliquer des mesures d’austérité de grande envergure, notamment dans le domaine des droits collectifs des travailleurs et particulièrement dans celui de la négociation collective [23]. L’élaboration de stratégies de recours juridictionnel par les acteurs concernés, par exemple par les syndicats européens et nationaux, pourrait être un instrument pour un tel contrôle (Barbier et Colomb, 2012). Cependant, ainsi que nous le verrons plus loin, le cas de la Grèce est loin d’être évident. Bien qu’il existe différentes voies de recours, la complexité juridique des accords de prêt et la réticence de certains organes judiciaires supranationaux, notamment, ce qui est le plus important, la réticence des cours de l’UE et de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), à s’engager dans un examen des mesures, ainsi que l’ont illustré également certaines affaires concernant des plans d’austérité dans d’autres pays, font que le recours juridictionnel devant ces organes judiciaires supranationaux a ses limites.

15Ainsi que cela a été évoqué dans la première partie de cet article, un certain nombre de mesures liées à la crise ont été promues ou même dictées par des institutions supranationales, principalement liées à l’UE. Mais un paradoxe est apparu : bien qu’il soit effectivement vrai qu’un certain nombre de ces mesures aient une origine supranationale, la détermination des compétences pour contester juridiquement ces mesures soulève des difficultés. La jurisprudence récente des tribunaux de l’UE, le Tribunal de première instance et la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), concernant les mesures liées à la crise confirme largement ces problèmes. À cet égard, un premier problème est lié à la qualité pour agir de demandeurs « non privilégiés », tout particulièrement de syndicats, réclamant un contrôle juridictionnel des mesures. Au début de la crise, deux affaires ont été portées devant le Tribunal de première instance par le syndicat du secteur public en Grèce (ADEDY) [24] : ces affaires concernaient deux décisions du Conseil [25] qui étaient directement destinées à la Grèce dans le but de renforcer et d’approfondir la surveillance budgétaire et de la mettre en demeure de prendre des mesures en vue d’une réduction du déficit jugée nécessaire pour remédier à la situation de déficit excessif. L’ADEDY arguait que les décisions du Conseil violaient, entre autres, le principe d’attribution des compétences, car les mesures allaient au-delà des limites des compétences attribuées au Conseil pour atteindre les objectifs définis dans les traités [26]. Suivant sa jurisprudence constante en la matière [27], le Tribunal de première instance a rejeté les actions pour des motifs de défaut de qualité pour agir des demandeurs. La Cour a considéré que les demandeurs n’étaient pas parvenus à démontrer qu’ils étaient directement concernés par les actes attaqués ; les mesures étaient censées être d’ordre général et nécessitaient l’adoption de mesures d’application par les autorités grecques, qui disposaient à cet effet, selon la Cour, d’un large pouvoir d’appréciation.

16Un second problème, concernant toujours l’évaluation de la compatibilité des mesures avec le droit de l’UE, est lié au fait que certains accords de prêt et les décisions qui les accompagnent peuvent ne pas relever du droit de l’UE. Comme indiqué plus haut, c’est le cas des programmes qui ont été mis en œuvre sur la base du FESF et des accords de prêt bilatéraux, comme dans le cas des deux programmes pour la Grèce. Dans une réponse récente à la question d’un parlementaire concernant ce problème dans le cas de la Grèce, le représentant de la Commission européenne a déclaré : « La Commission s’engage à veiller à ce que, dans la mise en œuvre du droit communautaire, les États membres respectent les droits consacrés dans la Charte des droits fondamentaux de l’UE. Cependant, les documents du programme ne relèvent pas du droit communautaire, mais sont des dispositions convenues entre la Grèce et ses prêteurs : de ce fait, la Charte ne peut pas être utilisée comme référence, et il appartient à la Grèce de veiller à ce que ses propres obligations en matière de droits fondamentaux soient respectées » (Parlement européen, 2014) [28]. La décision de la Cour dans l’affaire Pringle[29] a été utilisée pour soutenir cette interprétation de la Commission. Dans l’arrêt Pringle, la Cour a considéré que la conclusion du MES n’enfreignait pas le principe de protection juridictionnelle effective prévu à l’article 47 de la CDFUE, parce que « les États membres ne mettent pas en œuvre le droit de l’Union, au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte, lorsqu’ils instituent un mécanisme de stabilité tel que le MES pour l’institution duquel les traités UE et FUE n’attribuent aucune compétence spécifique à l’Union. » Cependant, il est crucial de souligner que la nonopposabilité de la Charte a été uniquement invoquée à l’égard des États membres. La Cour ne dit rien à propos de la possible opposabilité de la CDFUE aux institutions de l’UE dans le contexte du traité instituant le MES, peut-être parce qu’elle a considéré que ces institutions ne pouvaient pas adopter des actes contraignants en application de ce traité (Peers, 2013). Pour sa part, l’avocat général Juliane Kokott a effectivement argué qu’en sa qualité d’institution de l’Union européenne : « La Commission demeure entièrement liée par le droit de celle-ci, y compris par la Charte des droits fondamentaux. [30] » Cela semble impliquer que les institutions de l’UE sont liées par la CDFUE, même si leurs actions se déroulent en dehors du cadre du droit de l’UE.

17Mais même si les programmes relèvent du droit de l’UE, il est manifeste que la CJUE a été jusqu’ici réticente à se référer à la CDFUE dans les cas concernant directement des mesures d’austérité (Barnard, 2013 ; Kilpatrick, 2014 ; Koukiadaki, 2014). À cet égard, l’adéquation du lien entre une source relevant de l’UE et une action d’un État membre a été examinée dans un certain nombre de cas. Par exemple, dans l’affaire Sindicato dos Bancários do Norte et autres c. BPN – Banco Português de Negócios, SA[31], qui concernait la compatibilité des réductions de salaire dans le secteur public avec l’interdiction des discriminations, la CJUE a rejeté la demande de décision préjudicielle au motif que les dispositions de la loi portugaise concernées ne mettaient pas en œuvre le droit de l’UE au sens de l’article 51(1). Mais, ainsi que Kilpatrick (2014, p. 419) l’a fait valoir, ce raisonnement de la Cour est contraire à sa jurisprudence constante, selon laquelle elle faisait preuve de bienveillance en reformulant les questions pouvant relever du droit de l’UE et en ne refusant d’examiner les questions que lorsqu’elles n’avaient absolument aucun lien avec le droit de l’UE. En supposant qu’il soit possible d’établir un lien entre les actions d’un État et la CDFUE, cela poserait la question de savoir comment la Cour pourrait se prêter à un exercice d’équilibrage entre des droits concurrents [32]. Concernant la compatibilité des mesures touchant la négociation collective, la reconnaissance du droit fondamental de négocier et de conclure des conventions collectives prévue à l’article 28 serait ici cruciale. L’article 28 n’étend pas seulement la garantie de ce droit existant déjà dans les législations nationales des États membres au niveau du droit de l’UE, mais, interprété en combinaison avec l’article 52(3) CDFUE, il fournirait aussi une base pour interpréter ce droit conformément à la jurisprudence récente de la Cour européenne des droits de l’homme, qui reconnaît que le droit à la liberté d’association prévu à l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme implique le droit de négociation collective (voir aussi Schmitt, 2014 ; Ewing, 2015).

18Cependant, la conceptualisation largement réductrice du rôle de la négociation collective dans la récente série de décisions de la CJUE est un sujet de préoccupation à cet égard. Dans les quatre décisions « Laval », désormais tristement fameuses, la CJUE a gravement remis en cause l’autonomie des partenaires sociaux quant à l’établissement des conditions d’emploi dans les cas comportant une dimension transnationale (Parlement européen, 2010 ; Barbier, 2013, p. 142) [33]. Plus récemment, la CJUE est même allée plus loin en s’appuyant sur la CDFUE elle-même (article 16 sur la liberté d’entreprise) pour limiter le droit de négociation collective (article 28) [34]. Dans ce contexte, la décision également récente de la CJUE sur l’accession de l’UE à la CEDH, dans laquelle la CJUE s’est efforcée de protéger les éléments de base du droit de l’UE en ignorant les valeurs fondamentales sur lesquelles l’UE a été fondée, est considérée comme particulièrement problématique pour l’interaction entre l’ordre juridique de l’UE et la Convention (Peers, 2015) [35]. Plus largement, l’exercice de recours devant la CJUE repose sur l’hypothèse que cette dernière devrait s’abstenir d’exercer une réserve juridictionnelle. Mais dès lors qu’elle manque de légitimité sociale dans les affaires concernant des mesures d’austérité imposées par des institutions de l’UE alors que ces affaires relèvent d’une sphère hautement sensible de prises de décision politique et économique (Hijaneros, 2015, p. 144), une telle hypothèse est loin d’être évidente.

19Dans le même esprit, l’expérience concernant jusqu’ici l’implication de la CEDH dans l’évaluation de la légalité des mesures d’austérité par rapport à la Convention européenne des droits de l’homme est plutôt mitigée [36]. Contrairement à l’UE, la Convention ne garantit pas de droits économiques et sociaux. Néanmoins, elle comporte certaines dispositions qui pourraient être invoquées pour contester des mesures en rapport avec les droits collectifs des travailleurs, tout particulièrement l’article 11 sur la liberté d’association. Il est important de souligner qu’aucune des affaires portant sur les politiques d’austérité n’a jusqu’ici soulevé la question de la compatibilité des mesures avec l’article 11 de la Convention. Cela est particulièrement intéressant, car dans une affaire intentée contre l’interdiction des augmentations de salaire pour les employés du secteur public (Koufaki et ADEDY c. Grèce) [37], l’ADEDY avait intenté l’action au niveau local et avait argué que la loi 3833/2010, qui introduisait ces modifications, contrevenait à l’article

2011. Ce moyen ayant été rejeté par le Conseil d’État, le syndicat ne le souleva pas lorsque l’affaire vint devant la CEDH. L’interprétation des critères de recevabilité de la Convention par la CEDH a peut-être ici un effet dissuasif sur l’exercice d’un recours juridictionnel invoquant des violations de l’article 11 [38]. L’article 35(2)(b) établit, entre autres, que la CEDH ne retient aucune requête individuelle introduite en application de l’article 34 lorsqu’« elle est essentiellement la même qu’une requête précédemment examinée par la Cour ou déjà soumise à une autre instance internationale d’enquête ou de règlement, et si elle ne contient pas de faits nouveaux. » Dans POA et autres c. Royaume-Uni[39], qui concernait une interdiction légale d’une action collective pour les surveillants de prison, la CEDH a jugé la requête irrecevable au motif qu’elle avait fait précédemment l’objet d’une contestation devant le Comité de la liberté syndicale de l’OIT. Cela était conforme à la jurisprudence antérieure dans laquelle la CEDH avait jugé que « le comité de la liberté syndicale constitue une autre instance internationale aux fins du critère de recevabilité » [40].

21La question de la recevabilité nous amène finalement à la discussion concernant les possibilités de saisir les juridictions mises à disposition par l’OIT et le Conseil de l’Europe dans les stratégies de recours juridictionnel contre les mesures d’austérité limitant les droits collectifs des travailleurs. D’un côté, l’exercice d’un éventail plus large de recours, faisant appel, en particulier, à l’OIT et au Conseil de l’Europe, peut fournir un levier plus efficace dans le débat sur la légalité des mesures d’austérité. Non seulement de tels recours peuvent servir de base pour évaluer la compatibilité des mesures avec les solides acquis en matière de normes internationales du travail et de droits sociaux internationaux, mais, en outre, ce faisant, ils peuvent aussi éclairer les liens entre les mesures nationales et les institutions supranationales. En effet, il existe déjà un stock croissant de réclamations adressées au Comité de la liberté syndicale de l’OIT, à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations et au Comité européen des droits sociaux (CEDS) qui font ressortir ces problèmes. Dans le cadre de l’OIT, les deux instances ont critiqué de nombreuses violations de la liberté syndicale et des droits de la négociation collective, notamment des conventions no 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical et no 98 sur le droit d’organisation et de négociation collective, qui ont été imposées en Grèce depuis l’apparition de la crise [41]. Ces décisions ont ensuite été citées par des membres du Parlement européen dans une question soumise à la Commission concernant la violation par la troïka de la négociation collective et du dialogue social [42]. La réponse de la Commission indique que « les protocoles d’accord insistent sur le fait que les réformes du marché du travail doivent, d’une manière générale, être adoptées en consultation avec les partenaires sociaux et dans le respect du droit communautaire et des normes fondamentales en matière de droit du travail. La Commission, le FMI et la BCE s’efforcent de rencontrer régulièrement les partenaires sociaux dans les pays qui mettent en œuvre un programme d’ajustement économique » [43]. Toutefois, c’était loin d’être vrai dans le cas de la Grèce. Il n’y a eu absolument aucune consultation des partenaires sociaux sur les mesures associées au premier accord de prêt : le gouvernement grec de l’époque a justifié l’absence de consultation au motif qu’il « n’était pas possible de mettre en œuvre des méthodes de consultation des partenaires sociaux alors que la Grèce était au bord du défaut de paiement de ses emprunts » (OIT, 2011, p. 27). Pendant les négociations en vue du deuxième accord de prêt, les partenaires sociaux sont parvenus à un accord-cadre, qui fut, cependant, ignoré ensuite par la troïka et par le gouvernement, car il « ne répondait pas aux attentes » (Commission européenne, 2012b, p. 147).

22Dans un esprit similaire à celui de l’OIT, le CEDS a formulé un certain nombre de décisions critiquant l’incompatibilité des mesures d’austérité en Grèce avec la Charte sociale européenne [44]. Ce faisant, le CEDS a considéré, en invoquant les engagements des États pris dans le contexte d’obligations internationales que « c’est au Comité qu’il revient, en dernier lieu, d’apprécier si la situation nationale est conforme à la Charte, et ce, y compris lorsque la mise en œuvre d’obligations internationales parallèles en droit interne est susceptible d’interférer avec la mise en œuvre de celles résultant de la Charte » [45]. Il est important de noter qu’aucune des réclamations grecques soumises au CEDS ne portait directement sur les modifications des droits collectifs des travailleurs et notamment sur la négociation collective, car la Grèce n’a accepté ni l’article 5 (droit de négociation) ni l’article 6 (droit de grève). Cependant, GENOP-DEI et ADEDY ont tenté de contourner cette limite [46] dans leur réclamation collective concernant la possibilité pour les accords d’entreprise de déroger dans un sens plus défavorable aux accords collectifs de plus haut niveau. Les syndicats ont argué que cela violait l’article 3(1)(a) du protocole additionnel de 1988 (droit de prendre part à la détermination et à l’amélioration des conditions de travail et du milieu du travail), car cela encourageait une détérioration systématique des conditions de travail. Cette lecture de l’article 3(1)(a) a, toutefois, été rejetée par le Comité, au motif que la disposition ne concernait pas le droit de négociation collective [47].

Conclusion

23Dans le contexte de la crise économique en Europe, les droits sociaux et démocratiques sont vulnérables. Les programmes d’ajustement économique pour les États membres de l’UE les plus touchés par la crise, conjugués avec les nouveaux mécanismes de gouvernance économique, notamment le semestre européen, remettent en cause le droit fondamental des travailleurs à négocier collectivement et placent en dernière instance le droit du travail « sous le contrôle du droit économique européen » (Seifert, 2014, p. 312). En réponse à ces évolutions, des stratégies de « recours contentieux » ont été mises en place en direction d’organes judiciaires supranationaux, mais avec des résultats mitigés jusqu’à ce jour. Alors qu’il est crucial de recadrer le débat autour de la crise sous l’angle de la légalité et de la légitimité des mesures d’austérité, ce sera insuffisant sans une remise en cause majeure en Europe permettant d’admettre que les politiques d’austérité ne peuvent pas conduire à la croissance économique.

24Malheureusement, les derniers épisodes, comme l’illustrent les négociations récentes entre le gouvernement grec dirigé par Syriza et les institutions européennes ainsi que les États membres de l’UE, vont dans la direction opposée. En échange d’un troisième programme de 86 milliards d’euros, la Grèce a été contrainte d’adopter et de mettre en œuvre « le programme de surveillance économique le plus intrusif jamais mis en place au sein de l’UE » (Wagstyl et al., 2015). Et ce, malgré le fait que le référendum du 5 juillet a clairement démontré que le peuple grec était profondément opposé à la nature des réformes réclamées par les créanciers. Concernant le marché du travail, la déclaration du sommet des pays de la zone euro du 13 juillet 2015 indiquait que le gouvernement devait « entreprendre un réexamen rigoureux et une modernisation des négociations collectives, de l’action syndicale et, conformément à la directive pertinente de l’UE et aux bonnes pratiques, des procédures de licenciement collectif selon le calendrier et l’approche convenus avec les institutions. Sur la base de ces réexamens, les politiques du marché du travail devraient être alignées sur les meilleures pratiques internationales et européennes, sans que cela se traduise par un retour aux politiques antérieures qui ne sont pas compatibles avec les objectifs de croissance durable et inclusive » (Conseil européen, 2015, p. 3). Et ce, malgré le fait que la Commission elle-même a récemment reconnu que « la Grèce était en tête des pays dans l’adoption de mesures assouplissant le caractère contraignant des règles du marché du travail » (Commission européenne, 2014, p. 49). Mais le plus important est qu’il n’est pas démontré que les mesures, en particulier celles en faveur de la décentralisation de la négociation collective, ont des effets positifs ; ce qui est nécessaire, c’est une augmentation et non une réduction de la coordination des politiques salariales (pour une démonstration empirique de l’impact des modifications de la négociation collective sur la Grèce, voir Koukiadaki et Kokkinou, 2015). La volonté d’imposer à tout prix des politiques économiques qui ont échoué ne compromet pas seulement l’avenir de la Grèce, mais aussi celui du projet européen lui-même.

Notes

  • [1]
    Je voudrais remercier infiniment Jean-Claude Barbier et les réviseurs anonymes pour leurs commentaires sur une version antérieure de cet article. Les réserves juridiques habituelles s’appliquent.
  • [2]
    Il est néanmoins important de relever que si cela correspondait au tableau général, il y a eu un certain nombre de tendances à la déréglementation au niveau national (par exemple en Allemagne dans les années 2000) et au niveau de l’UE, les objectifs de flexisécurité étant en vogue.
  • [3]
    Voir aussi l’article 12, qui établit que toute personne a droit à la liberté d’association. Comme l’observe Ewing (2015), l’article 12 est devenu très important à la suite de la décision de la CEDH dans l’affaire Demir et Baykara c. Turquie ([2008] CEDH 1345, [2009] EHRR 54). Cette décision a des conséquences sur la relation entre les articles 12 et 20 de la Charte de l’UE, en facilitant l’intégration indirecte de la convention no 98 de l’OIT dans le droit de l’UE (Ewing, 2015).
  • [4]
    Ces programmes impliquaient également le FMI, ainsi que des institutions de l’UE (à savoir la BCE et la Commission européenne).
  • [5]
    Le MESF était un programme de financement d’urgence reposant sur des fonds collectés sur les marchés financiers et garantis par la Commission européenne, en utilisant le budget de l’UE comme garantie. L’article 122(2) a été utilisé comme base légale du règlement du Conseil 407/2010 ([2010] JOCE L118/1), qui stipule les détails du mécanisme.
  • [6]
    Le FESF a été créé par les États membres de la zone euro à la suite des décisions prises le 9 mai 2010 dans le cadre du Conseil ECOFIN.
  • [7]
    Le MES avait été précédé par un amendement de l’article 136 TFUE pour accorder aux États membres l’autorisation explicite de disposer d’un mécanisme de financement.
  • [8]
    Le MES a aussi été la source du programme d’assistance espagnol, qui s’est adressé uniquement au secteur financier.
  • [9]
    C’est particulièrement important en ce qui concerne la question de l’applicabilité de la CDFUE (voir la troisième section de notre article). Voir aussi Fischer-Lescano (2014).
  • [10]
    Voir en particulier les articles 3, 5, 7(2) et 9 du règlement 1176/2011.
  • [11]
    Le mécanisme comprend une obligation de mettre en œuvre des mesures adaptées sur une période de temps définie, un processus qui peut être interprété comme un durcissement de la législation non contraignante que représentait l’ancien PSC (Maher, 2004).
  • [12]
    Commission européenne (2012a : 104). Dans le même esprit, la BCE notait dans son document de travail de 2012 sur les marchés du travail de la zone euro et la crise : « Plus récemment, les réformes du marché du travail en cours dans des pays tels que la Grèce, l’Irlande, le Portugal, l’Espagne et l’Italie comportent certaines mesures importantes pour accroître la flexibilité de la négociation salariale et réduire la protection excessive de l’emploi. Ces réformes sont des premières étapes appropriées en vue d’une amélioration du marché du travail et des performances de compétitivité de ces pays, ainsi que de la zone euro dans son ensemble. » (Banque centrale européenne, 2012, p. 10).
  • [13]
    Article 37(6) de la loi 4024/2011.
  • [14]
    Article 2(3) du décret 6 du 28/2/2012 du Conseil des ministres. Le régime antérieur (article 9 de la loi 1876/1990) prévoyait une durée de six mois et s’appliquait aux nouveaux employés recrutés pendant la période de six mois.
  • [15]
    Loi 4093/2012.
  • [16]
    L’article 2(7) de la loi 3845/2010 disposait que les conditions des accords professionnels et d’entreprise pouvaient déroger par des clauses moins favorables aux dispositions de conventions sectorielles et même à la convention collective générale nationale ; dans le même esprit, les conventions sectorielles pouvaient déroger à la convention collective nationale. Toutefois, à la suite des réactions des partenaires sociaux, il a été convenu de respecter le plancher de droits défini par la convention collective générale nationale.
  • [17]
    Article 3(5) de la loi 4024/2011.
  • [18]
    Article 3(1), du décret 6 du 28/2/2012 du Conseil des ministres.
  • [19]
    Article 37(1) de la loi 4024/2011.
  • [20]
    Pour une analyse, voir Marginson et Welz (2014).
  • [21]
    Voir en particulier les recommandations par pays de 2011.
  • [22]
    Il est important de noter que ces modifications ont été ultérieurement atténuées à la suite de négociations intersectorielles entre le patronat et les syndicats, qui ont limité dans les faits la possibilité de telles dérogations (pour une analyse, voir Colombo et Regalia, 2015).
  • [23]
    Par souci de concision, l’analyse proposée dans cette section abordera uniquement la légalité des mesures, telle qu’elle peut être évaluée au niveau supranational. Pour une critique portant sur la légitimité, voir Barnard (2014). Pour une discussion de l’évaluation des mesures d’austérité par les cours constitutionnelles nationales, voir Kilpatrick (2015). Concernant la Grèce, il est important de noter qu’à l’exception des modifications du système d’arbitrage (Conseil d’État, décision 2307/2014), tous les recours constitutionnels contre les mesures portant sur la négociation collective ont échoué.
  • [24]
    Affaire T-541/10, ADEDY et autres c. Conseil, JO C 26/45, 26/1/2013 ; affaire T-215/11, ADEDY et autres c. Conseil, JO C 26/45, 26/1/2013.
  • [25]
    Décision du Conseil 2010/320/UE et décision du Conseil 2011/57/UE.
  • [26]
    Article 5(2) TUE.
  • [27]
    Voir, entre autres, Comité central d’entreprise de la Société générale des grandes sources c. Commission, affaire T-96/92 [1995] ; Vittel c. Commission, affaire T-12/93 [1995] et Comité d’entreprise de la Société française de production c. Commission, affaire T-189/97 [1998].
  • [28]
    Questions parlementaires : réponse donnée par M. Katainen au nom de la Commission, 17 septembre 2014, E-005633-14. Le comité économique du Parlement européen est même allé plus loin dans son rapport sur l’action de la troïka : « [il] déplore que les programmes ne soient pas soumis à la CDFUE, à la Convention européenne des droits de l’homme et à la Charte sociale européenne en raison du fait qu’ils ne reposent pas sur le droit primaire de l’Union » (Parlement européen, 2014).
  • [29]
    Affaire C-370/12 Pringle c. Irlande, arrêt (assemblée plénière) du 27 novembre 2012.
  • [30]
    Paragraphe 176 de ses conclusions.
  • [31]
    C-128/12, JO C 151, 26/5/2012. Voir aussi C-434/11 Corpul Naţional al Poliţiştilor, ordonnance du 14 décembre 2011 ; C-134/12 Corpul Naţional al Poliţiştilor, ordonnance du 10 mai 2012 ; C-462/11 Cozman, ordonnance du 14 décembre 2012.
  • [32]
    Pour une analyse détaillée de ce point, voir Barnard (2014) et Fischer-Lescano (2014).
  • [33]
    Affaire C-438/05, International Transport Workers’ Federation, Finnish Seamen’s Union c. Viking Line ABP, OÜ Viking Line Eesti, [2008] IRLR 143 ; affaire C-341/05, Laval un Particleicleneri Ltd c. Svenska Byggnadsarbetareförbundet, Svenska Byggnadsarbetareförbundet, avd. 1, Svenska Elektrikerförbundet, [2007] ECR I-11767 ; affaire C-346/06, Rechtsanwalt Dr. Dirk Rüffert c. Land Niedersachsen [2008] ECR I-1989 ; affaire C-319/06, Commission c. Luxembourg [2007] ECR I-4323.
  • [34]
    Affaire C-426/11, Mark Alemo-Herron et autres c. Parkwood Leisure Ltd, [2013] WLR (D) 288.
  • [35]
    Opinion en application de l’article 218(11) TFUE, CJUE affaire C-2/13 (18 décembre 2014).
  • [36]
    Comparer, par exemple, R. Sz. c. Hongrie (no 41838/11, décision du 2 juillet 2013) avec Koufaki et Adedy c. Grèce, no 57665/12 et no 57657/12, décision du 7 mai 2013 ; Antonio Augusto Da Conceicao Mateus c. Portugal et Lino Jesus Santos Januario c. Portugal, no 62235/12 et no 57725/12, décision du 8 octobre 2013.
  • [37]
    Koufaki et Adedy c. Grèce, no 57665/12 et no 57657/12, décision du 7 mai 2013.
  • [38]
    Je voudrais remercier infiniment Keith Ewing pour cette suggestion.
  • [39]
    Requête no 59253/11, 21 mai 2013.
  • [40]
    Fédération hellénique des syndicats des employés du secteur bancaire c. Grèce (déc), no 72808/10, 6 décembre 2011. Néanmoins, il est important de noter ici que cela ne fera obstacle à une requête devant la Cour que si cette dernière requête est « essentiellement la même » que la requête devant le Comité de la liberté syndicale (POA et autres c. Royaume-Uni, paragraphe 28). Un problème similaire se posera si l’affaire a été traitée par le Comité européen des droits sociaux.
  • [41]
    Comité de la liberté syndicale de l’OIT, affaire no 2820 ; Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (CEACR) de l’OIT, rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, Conférence internationale du travail, 102e session, 2013, ILC.102/III(1A). Il est important de noter que l’OIT a déployé une activité importante dans le cas de la Grèce : voir la mission de haut niveau qui s’est rendue dans ce pays (OIT, 2011). Plus largement, des éléments donnent à penser que l’OIT a augmenté son implication dans la surveillance des projets de réforme du droit du travail : elle a récemment lancé un certain nombre de nouveaux projets en réponse à la crise dans le domaine de l’emploi, soulignant l’importance des droits de protection sociale (OIT, 2014, p. 120).
  • [42]
    Question de parlementaire en vue d’une réponse écrite de la Commission, Raül Romeva i Rueda (Verts/ ALE), Nikos Chrysogelos (Verts/ALE), Rui Tavares (Verts/ALE), objet : Violation par la troïka de la négociation collective et du dialogue social, JO C 330 E, 14/11/2013.
  • [43]
    Questions parlementaires, réponse globale de M. Rehn au nom de la commission « Questions écrites » : E-010617/12, E-010571/12, JO C 330 E, 14/11/2013.
  • [44]
    Décisions du CEDS sur le bien-fondé du 23/05/2012, réclamations no 65/2011, Fédération générale des employés des compagnies publiques d’électricité (GENOP-DEI) et Confédération des syndicats des fonctionnaires publics (ADEDY) c. Grèce ; no 66/2011, Fédération générale des employés des compagnies publiques d’électricité (GENOP-DEI) et Confédération des syndicats des fonctionnaires publics (ADEDY) c. Grèce ; décisions du CEDS sur le bien-fondé du 07/12/2012, réclamations no 76/2012, Fédération des pensionnés salariés de Grèce (IKA – ETAM) c. Grèce ; no 77/2012, Fédération panhellénique des pensionnés de la Fonction publique (POPS) c. Grèce ; no 78/2012, Syndicat des pensionnés des Chemins de fer électriques d’Athènes Piraeus (ISAP) c. Grèce no 79/2012, Fédération panhellénique des pensionnés de l’entreprise publique de l’électricité (POSDEI) c. Grèce ; no 80/2012, Syndicat des pensionnés de la Banque agricole de Grèce (ATE) c. Grèce. Voir aussi la réclamation en instance : Confédération générale grecque du travail (GSEE) c. Grèce, réclamation no 111/2014 et Conseil de l’Europe (2015).
  • [45]
    Fédération des pensionnés salariés de Grèce (IKA-ETAM) c. Grèce, réclamation collective no 76/2012, paragraphe 51.
  • [46]
    Fédération générale des employés des compagnies publiques d’électricité (GENOP-DEI) et Confédération des syndicats des fonctionnaires publics (ADEDY) c. Grèce, réclamation collective no 65/2011.
  • [47]
    M. Petros Stangos a émis une opinion dissidente, considérant que la négociation collective relève du champ d’application de l’article 3(1)(a) du protocole de 1988, au motif, entre autres, que le rapport explicatif du protocole de 1988 stipule que « les matières énumérées dans cet article, dont la « détermination et l’amélioration des conditions, de l’organisation et du milieu du travail » qui figurent dans l’alinéa a de la disposition, « font souvent l’objet de dispositions contenues dans des conventions collectives ou autres accords conclus entre les employeurs et les représentants des travailleurs » (§47 du rapport). (Opinion dissidente de M. Petros Stangos, Fédération générale des employés des compagnies publiques d’électricité (GENOP-DEI) et Confédération des syndicats des fonctionnaires publics (ADEDY) c. Grèce, réclamation collective no 65/2011). Se fondant sur ces motifs, il arrivait alors à la conclusion que la législation interne contrevenait à l’article 3(1)(a) du protocole de 1988.
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La crise de la dette souveraine en Grèce, qui s’est ensuite étendue à d’autres États membres de l’Union européenne, menace les fondements de l’Europe sociale. En réaction à cette crise, les États les plus touchés ont mis en œuvre de vastes programmes d’ajustement économique, ce qui a eu un impact sur un certain nombre de domaines essentiels de la compétence nationale, notamment le droit du travail et la politique sociale. Ceux-ci, en liaison avec l’adoption de nouveaux mécanismes de gouvernance économique, marquent une rupture avec le consensus sur le modèle social européen qui prévalait auparavant et reconnaissait, entre autres, le rôle de la négociation collective dans la réglementation des conditions d’emploi. Notre analyse prend l’exemple de la Grèce pour évaluer de manière critique les stratégies de recours contentieux qui ont été mises en œuvre contre les mesures d’austérité touchant les droits collectifs des travailleurs et en particulier la négociation collective. Nous ferons valoir que la complexité juridique des programmes d’assistance économique, ainsi que la réticence de certains organes judiciaires supranationaux à examiner la légalité des mesures ont considérablement limité les possibilités de recours. Il est crucial de recadrer le débat autour de la crise sous l’angle de la légalité et de la légitimité des mesures liées à la crise, mais cela sera insuffisant sans une remise en cause majeure en Europe. Il est nécessaire d’admettre que les politiques d’austérité ne conduiront pas à la croissance économique et que des garanties juridictionnelles sont nécessaires pour permettre la mise en place de politiques alternatives avec la participation des groupes touchés par les mesures.

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Aristea Koukiadaki
Université de Manchester.
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 18/12/2015
https://doi.org/10.3917/rfas.153.0053
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