CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Le vendredi 31 octobre 2014, la Revue française des affaires sociales (RFAS) a consacré un séminaire au numéro « Solidarité publique et solidarités privées » (2014 - 1-2). Son objectif était de permettre aux chercheurs et à l’administration de s’approprier les articles du dossier et d’en débattre ensemble. L’un des principes de la revue est en effet de proposer une articulation entre la réflexion théorique ou académique et la mise en œuvre plus concrète des politiques publiques. Mayalen Iron, sous-directrice en charge de l’inclusion sociale, de l’insertion et de la lutte contre la pauvreté à la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a animé les débats.

2Franck von Lennep directeur de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), a ouvert la séance en rappelant que si la tendance actuelle consiste à juger les politiques d’accompagnement avec un prisme essentiellement financier, la protection sociale pourrait davantage valoriser l’investissement, notamment dans la petite enfance et la prévention, afin de lutter en amont contre les inégalités.

3Quatre interventions se sont succédé. Nicolas Rebière, démographe, a présenté le dispositif de microcrédit personnel garanti à partir d’une étude très documentée du comité d’orientation et de suivi de l’emploi des fonds du fonds de cohésion sociale. Mettant au jour la confrontation à l’œuvre entre la logique gestionnaire et marchande et la logique de solidarité, il a démontré notamment que cet outil avait un impact positif sur le plan de l’insertion professionnelle, du logement et de l’insertion sociale en général, même si ses résultats sont moins bons qu’attendu en termes d’inclusion bancaire.

4Marie-Claude Blais, philosophe, a ensuite rappelé le rôle essentiel qu’a joué Léon Bourgeois dans la fondation du concept de solidarité publique comme obligation juridique. Cette notion a été très contestée avant de devenir une composante essentielle de notre République et les débats d’alors, entre individualisme et collectivisme, ou relatifs au rôle de l’État font écho à notre actualité.

5La troisième intervention, de Philippe Warin, chercheur en analyse des politiques publiques, a porté sur les moyens d’agir contre le non-recours aux aides sociales. En détaillant des expérimentations et actions concrètes déjà mises en œuvre par différentes administrations et institutions, il s’est notamment intéressé à leurs conséquences sur l’évolution des représentations des professionnels de l’accompagnement. L’une de ses conclusions est que chaque intervention doit être propre au contexte dans lequel elle s’exerce : il n’y a pas de modélisation possible.

6Enfin, Richard Gaillard, sociologue, a analysé la politique française de la lutte contre le surendettement des particuliers. Il a particulièrement mis en évidence, d’une part, la dépendance des chercheurs par rapport aux données de la Banque de France et d’autre part, le décalage entre la rationalité marchande des leviers qui ont été actionnés dans l’élaboration progressive de ce dispositif et le public précaire qui est visé. La notion de contrat symbolise cette asymétrie car la liberté affichée entre les contractants est limitée par les capacités effectives des personnes pour le dénoncer.

7Ces présentations ont été prolongées par des échanges entre des participants très investis, issus du milieu universitaire, de l’administration (DREES, DGCS) et de hauts conseils (Haut Conseil à la famille, Haut Conseil du financement de la protection sociale). Le non-recours au RSA activité, notamment, a fait l’objet de plusieurs prises de parole, en particulier pour ce qui concerne l’information des allocataires potentiels et la représentation qu’ils ont de leur propre situation et de leurs droits.

8Dans sa conclusion, Pierre Boisard, coordonnateur du numéro, a insisté sur l’écho que l’on peut observer entre les grands principes à l’origine de l’idée de solidarité et les réflexions des praticiens et chercheurs quant aux questions qui se posent aujourd’hui sur le terrain. Il a regretté enfin la très faible présence des solidarités privées dans les recherches actuelles, alors même qu’elles sont intimement enchevêtrées avec la solidarité publique.

Mis en ligne sur Cairn.info le 24/04/2015
https://doi.org/10.3917/rfas.151.0265
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