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Introduction [1]

1En 2013, les États-Unis restent l’un des pays riches de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui affichent le taux de couverture santé le plus faible [2]. Ils demeurent à cet égard une exception, ce qui leur vaut d’être considérés dans de nombreux cercles comme un pays sous-développé dans le domaine de la politique sociale. Cette situation a donné naissance à un paradoxe : face à l’ampleur des problèmes auxquels est confrontée la population non assurée ou insuffisamment assurée, les États-Unis sont devenus un pays pionnier en matière de mesure et d’analyse de ces questions. De ce point de vue, la thèse de Thorstein Veblen au sujet des « avantages du sous-développement », quoique se rapportant au contexte fort différent de l’Allemagne impériale, semble prendre tout son sens.

2Rares sont ceux qui oseraient contester l’idée que la France offre à sa population un meilleur accès aux soins que les États-Unis (Gusmano et al., 2013). De surcroît, pour continuer dans la veine de Veblen, les maîtres mots de la politique de santé française contemporaine – parcours de soins, parcours de santé, maisons médicales, maisons pluridisciplinaires, chronic care model ou modèle de prise en charge des maladies chroniques –, ainsi que la pratique consistant à définir des indicateurs de qualité de la prévention sont, pour l’essentiel, importés des États-Unis. De même, la mesure de l’accès aux soins de premier recours qui influent sur les taux d’hospitalisation pour des pathologies se prêtant à une prise en charge ambulatoire (hospitalisations sensibles aux soins de premier recours ou HSPR), qui suscite depuis quelque temps un intérêt en France, s’appuie dans une large mesure sur l’expérience des États-Unis. Cet indicateur, qui permet d’identifier à partir de données hospitalières administratives les zones dans lesquelles des problèmes d’accès aux soins peuvent se poser, ne peut pas être employé pour encadrer l’activité des prestataires de soins. De même, utilisé seul, il ne permet pas de déterminer les causes d’éventuelles barrières à l’accès aux soins. En revanche, associé à d’autres indicateurs d’accès aux soins de premier recours, il peut servir à ouvir une discussion avec les professionnels de santé pour rechercher des stratégies visant à améliorer la prise en charge de différentes populations afin d’éviter que des complications courantes de maladies chroniques n’entraînent des hospitalisations potentiellement évitables.

3L’intérêt de l’étude des HSPR (tableau 1) réside dans le fait que garantir un accès à des soins de premier recours adaptés au moment où ils sont nécessaires devrait permettre d’éviter la majorité des hospitalisations pour certaines affections fréquentes, soit en empêchant la survenue de la maladie (dans le cas de la pneumonie bactérienne par exemple) soit en prenant en charge l’affection chronique en milieu ambulatoire (pour l’asthme, l’hypertension artérielle, le diabète, l’insuffisance cardiaque congestive, par exemple). Dès lors que les patients souffrant de ce type de pathologie se présentent à l’hôpital, il ne fait guère de doute qu’une hospitalisation s’impose. L’indicateur HSPR n’est pas conçu pour apprécier le bien-fondé des hospitalisations. Une récente analyse d’études validées par les pairs publiées entre 1990 et 2010 (Rosano et al., 2012) montre qu’il existe selon toute vraisemblance une relation inverse entre la qualité et l’accessibilité des services de soins de premier recours, d’une part, et le taux de HSPR, d’autre part. Certains chercheurs (Billings et al., 1993 ; Basu et al., 2002 ; Hossain et Laditka, 2009) ont comparé les HSPR avec les hospitalisations pour certaines affections, qu’ils dénomment des « conditions marqueuses » (HCM) et qui ont une probabilité beaucoup plus faible d’être influencées par l’accès à des soins de premier recours. Ces affections sont en l’occurrence l’appendicite, l’occlusion gastro-intestinale et la fracture de hanche (tableau 1). S’il n’est pas totalement exclu que l’accès aux soins de premier recours puisse avoir une certaine influence sur ces affections, il est incontestable que cette influence est faible, si tant est qu’elle existe.

Tableau 1

Pathologies sensibles aux soins de premiers recours et pathologies marqueuses

Tableau 1
Pathologies sensibles aux soins de premiers recours (HSPR) Pneumonie bactérienne J13 ; J14 ; J15 ; J16.8 ; J18.0 Insuffisance cardiaque congestive I50 Inflammation du tissu cellulaire J34.0 ; K12.2 ; L02 ; L03 ; L88 Asthme J45 Hypokaliémie E87.6 Maladies évitables par vaccination A35 ; A36 ; A37 ; A80 ; BO5 ; B26 Gangrène I70.2 ; I73.0 ; R02 Complications d’ulcère peptique K25.0 ; K25.1 ; K25.2 ; K25.4 ; K25.5 ; K25.6 ; K26.0 ; K26.1 ; K26.2 ; K26.4 ; K26.5 ; K26.6 ; K27.0 ; K27.1 ; K27.2 ; K27.4 ; K27.5 ; K27.6 ; K28.0 ; K28.1 ; K28.2 ; K28.4 ; K28.5 ; K28.6 Pyélonéphrite N10 ; N11 ; N12 ; N13.6 ; N15.8 ; N15.9 ; N17.2 Diabète, complications aiguës E10.0 ; E10.1 ; E11.0 ; E11.1 ; E13.0 ; E13.1 ; E14.0 ; E14.1 Appendicite aiguë K35.0 ; 35.1 Hypertension I10 ; I11 ; I13 ; I15 ; I67.4 Pathologies marqueuses (HCM) Appendicite K35.9 ; 36-37 Occlusion gastro-intestinale K56 Fracture de la hanche S72

Pathologies sensibles aux soins de premiers recours et pathologies marqueuses

SOURCES HSPR • Weissman et al. (1992). Les diagnostics pour ces pathologies sont obtenus par conversion des codes de la CIM-9 en codes CIM-10. Les codes de la CIM-10 sont actualisés chaque année. La conversion effectuée ici était exacte en 2010, lorsque l’analyse a été réalisée. SOURCES HCM • Billings et Weinick (2003), Agency for Healthcare Research and Quality (AHRQ) (2003).

4D’après une comparaison de l’accès aux soins de premier recours entre la France et les États-Unis (Degos et Rodwin, 2011), ainsi qu’entre Paris, Manhattan et Londres (Inner London), la France (dont Paris) assure un meilleur accès aux soins, mesuré d’après le taux de HSPR (Gusmano et al., 2010). Cette constatation a été corroborée par une comparaison plus récente de cet indicateur entre la région Île-de-France dans son ensemble et les cinq boroughs (arrondissements) de New York : Manhattan, Bronx, Brooklyn, Queens et Staten Island (tableau 2). Néanmoins, cette comparaison ne donne pas d’indication sur les disparités d’accès aux soins au sein de la région Île-de-France.

Tableau 2

Taux annuel moyen d’hospitalisations : HSPR et HCM*,**,***

Tableau 2
Île-de-France, 2004-2008 Taux ajusté sur l’âge** Ecart type*** HSPR 10,24 2,4 HCM 2,95 0,7 New York, 2006-2008 HSPR 16,12 8,29 HCM 5,52 3,98

Taux annuel moyen d’hospitalisations : HSPR et HCM*,**,***

* Pour 1 000 habitants âgés de 20 ans et plus.
** Pour le calcul de ces taux, nous avons utilisé les données de population issues du recensement de l’INSEE (RP 2006). La population de référence est celle de la France métropolitaine en 2006.
*** Calculé d’après la variation constatée entre les 503 zones PMSI d’Île-de-France et les 187 codes postaux de New York.
SOURCES • Ile-de-France : Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) de l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) ; New York : Statewide Planning and Reserach Cooperative System (SPARCS).

5Dans le présent article, nous essayons de mesurer ces disparités en effectuant une comparaison de l’accès aux soins entre les 503 zones PMSI d’Île-de-France. Nous constatons que les difficultés d’accès aux soins de première ligne sont nettement plus fortes dans les zones à faible revenu et pour les patients pris en charge par l’hôpital public. Les données analysées ici ne permettent pas d’apprécier dans quelle mesure les taux élevés de HSPR constatés dans certaines zones pourraient s’expliquer par des facteurs liés à la demande plutôt que par des caractéristiques du système de santé. Nous aborderons ces questions dans nos conclusions.

Mesure de l’accès aux soins

6Weissman et al. (1992) ont passé en revue les travaux consacrés aux HSPR et ont retenu, à partir d’informations recueillies auprès d’un groupe de praticiens, douze diagnostics de sortie correspondant à des pathologies pour lesquelles les taux d’hospitalisation élevés pouvaient être imputés à des difficultés d’accès aux soins de premier recours. Billings et al. (1993) et Billings et Weinick (2003) ont retenu un nombre plus élevé de diagnostics principaux correspondant à des maladies qui, selon eux, auraient été « évitables » si les patients avaient reçu à temps des soins de premier recours appropriés. On pourrait en déduire que c’est en raison d’un taux de morbidité plus élevé que les groupes défavorisés ou moins bien couverts sont exposés à un risque plus élevé de HSPR. Toutefois, des études conduites aux États-Unis montrent qu’au-delà des différences de prévalence des affections chroniques, les patients qui sont dépourvus d’assurance maladie et rencontrent par conséquent plus de difficultés pour accéder aux soins de premier recours sont plus souvent hospitalisés pour des HSPR que les bénéficiaires d’une assurance maladie (Bindman et al., 1995 ; Kozak et al., 2001 ; Weissman et al., 1992). De surcroît, des études montrent qu’après ajustement pour des facteurs de morbidité, il existe un effet indépendant entre un meilleur accès aux soins de premier recours et des taux de HSPR plus faibles (Basu et al., 2002 ; Hossain et Laditka, 2009).

7Après divers ajustements pour neutraliser l’effet de l’état de santé, la plupart des études soutiennent l’hypothèse que si les taux de HSPR peuvent, en partie, s’expliquer par la morbidité et par un recours tardif aux soins, ils n’en demeurent pas moins un bon indicateur de l’accès aux soins de premier recours (Ansari 2007). Aux États-Unis, l’Institute of Medicine (IOM) soutient l’idée que les HSPR constituent un indicateur de l’accès aux soins de premier recours (Millman, 1993) et l’Agency for Healthcare Research and Quality (AHRQ) consacre actuellement une partie de ses travaux à l’accès aux soins de premier recours à partir des taux de HSPR (AHRQ, 2003). De même, le Commonwealth Fund (Radley et al., 2012) qui, depuis fort longtemps, cherche à comparer le système de santé des États-Unis à des systèmes de santé « très performants », emploie les HSPR pour mesurer l’accès aux soins dans les différents États fédéraux des États-Unis.

8Au delà des études conduites aux États-Unis, des travaux de l’OCDE et de nombreuses études réalisées dans le monde entier ont fait appel aux HSPR pour mesurer l’accès aux soins (Rosano et al., 2012 ; Purdy et al., 2000 ; Ansari, 2007). En France, bien qu’il soit utilisé depuis peu de temps, cet indicateur commence à susciter de l’intérêt. [3] Il importe évidemment de reconnaître ses limites en tant qu’indicateur de l’accès aux soins de premier recours. Il existe certes de nombreuses maladies (par exemple celles contre lesquelles il existe des vaccins efficaces) pour lesquelles le recours à des soins de premier recours appropriés au moment où ils sont nécessaires permettrait d’éviter une hospitalisation. Cependant, pour la grande majorité des affections couvertes par notre définition des HSPR (tableau 1), l’accès aux soins de premier recours ne constitue qu’un facteur parmi d’autres. Dans le cas de certaines maladies chroniques complexes, comme l’insuffisance cardiaque congestive et les complications de l’asthme ou du diabète par exemple, d’autres facteurs peuvent influer sur la probabilité d’hospitalisation. En outre, l’existence éventuelle de comorbidités peut compliquer un peu plus la situation. Ainsi, selon Blustein et al. (1998), la fréquence des comorbidités concourt à expliquer le taux de HSPR plus élevé constaté chez les personnes âgées.

9En l’absence de données par circonscriptions géographiques locales sur la morbidité, il n’est cependant pas possible d’évaluer les effets des comorbidités sur les HSPR. À l’évidence, si l’on observe les mêmes disparités géographiques pour les HSPR et pour les HCM (conditions marqueuses), il est possible d’en conclure que les taux de HSPR sont dus à des différences de morbidité et de comportements à l’égard du recours à l’hospitalisation, ou à d’autres facteurs sans rapport avec la possibilité d’accéder à temps à des soins de premier recours adaptés. En revanche, si les variations sont plus fortes pour les HSPR que pour les HCM, il est permis d’en déduire que les taux de HSPR élevés dans certaines zones s’expliquent peut-être par un problème d’accès aux soins, même s’il n’est pas exclu que des différences au niveau de la morbidité, de la situation sociale et des comportements en matière de recours aux soins jouent également un rôle.

Données et méthodes

10Les données administratives hospitalières utilisées par la présente étude proviennent du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) de l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH), qui centralise les données relatives à toutes les sorties de l’hôpital en les regroupant en fonction des diagnostics, des actes médicaux pratiqués, de l’âge et du lieu de résidence des patients. Le PMSI recueille des informations auprès de l’ensemble des établissements de santé, publics comme privés. Nous n’avons retenu que les données relatives aux séjours hospitaliers de courte durée en médecine, chirurgie et gynécologie-obstétrique (MCO) pour la population de 20 ans et plus. Nous avons exclu les données relatives aux séjours inférieurs à 24 heures, mais inclus celles portant sur des patients décédés au cours de cette période. Les données régionales concernent les résidents d’Île-de-France, qu’ils aient été hospitalisés en Île-de-France ou dans une autre région.

Statistiques descriptives

11Nous calculons le taux moyen de sortie de l’hôpital ajusté sur l’âge en Île-de-France au cours de la période 2004-2008 et comparons les variations infrarégionales entre les « zones PMSI » – zone dont la frontière et le nombre d’habitants sont définis par l’Agence technique d’information hospitalière (ATIH, 2013) – pour lesquelles des données domiciliées relatives aux séjours hospitaliers sont disponibles par agrégation de communes dans la série de données issue du PMSI. Ces zones sont formées d’un ensemble de communes sur lesquelles l’INSEE recueille des données démographiques et socio-économiques. Au cours des cinq années étudiées, 6 943 988 séjours hospitaliers de courte durée et 357 612 HSPR ont été dénombrés dans les 503 zones PMSI que compte l’Île-de-France. En 2008, 51 % de l’ensemble de ces HSPR ont été admis à l’hôpital à l’issue d’un passage au service des urgences, ce qui accrédite la thèse selon laquelle ces admissions sont effectivement nécessaires au moment où ces patients se présentent.

12La population de référence utilisée pour calculer les taux ajustés sur l’âge est celle de la France métropolitaine, d’après le recensement INSEE de 2006. Pour les données relatives aux conditions marqueuses (HCM), nous nous appuyons sur la définition proposée par Billings et adoptée par l’AHRQ aux États-Unis (tableau 1). Pour les HSPR, nous retenons la définition plus restrictive de Weissman et al. (1992), reprise par Kozak et al. (2001) et Papas et al. (1997). Purdy et al. (2009) ont identifié, à partir d’une recherche documentaire, un ensemble de 36 pathologies pouvant faire partie de définitions diverses de HSPR. Pour estimer la proportion de HSPR, il est important d’arrêter le nombre de pathologies (et les codes CIM correspondants) couverts par la définition. Or, pour la population de 20 ans et plus, le nombre de HSPR s’explique en grande partie par l’insuffisance cardiaque congestive et la pneumonie bactérienne, raison pour laquelle nous estimons que pour étudier les disparités géographiques et identifier les zones qui affichent des taux de HSPR élevés, il convient d’adopter une définition restrictive. [4]

Analyse des HSPR par régression logistique

13Nous avons utilisé le logiciel SPSS (version 18) pour effectuer des analyses par régression logistique et estimer un odds ratio pour les individus ayant une HSPR (notre variable dépendante). Les variables indépendantes individuelles sont l’âge, le sexe, le nombre de diagnostics enregistrés dans le résumé de sortie (qui constitue un indicateur de gravité), et le statut, public ou privé, de l’établissement de soins. Les variables caractérisant une zone PMSI incluent le quartile de revenu moyen des ménages, la densité des médecins généralistes (omnipraticiens), la densité de population (qui est un indicateur du degré d’urbanisation), et le quartile de niveau d’études d’après le pourcentage de la population de 15 ans et plus qui a suivi deux années d’études après le baccalauréat (niveau bac + 2). Nous avons ajouté un terme d’interaction (tableau 3), qui met en rapport le nombre d’omnipraticiens au sein de chaque zone PMSI avec le nombre de consultations d’omnipraticiens. Ce terme d’interaction nous permet de tester l’hypothèse selon laquelle le nombre d’omnipraticiens n’entraîne une baisse du taux de HSPR que si un nombre élevé d’omnipraticiens va de pair avec une hausse du nombre de consultations. [5]

Résultats

14La comparaison des écarts types des taux d’hospitalisation ajustés sur l’âge entre les HSPR et les HCM dans les différentes zones (codes postaux PMSI) d’Île-de-France révèle que la variation est trois fois plus importante pour les HSPR que pour les HCM (tableau 2). Il est permis d’en déduire que les disparités au niveau des taux de HSPR, qui sont directement liées à l’accès aux soins de premier recours, sont beaucoup plus marquées pour les pathologies qui se prêtent à une prise en charge des soins de premiers recours que pour les affections dites « marqueuses » (HCM). Un gros plan sur la Seine-Saint-Denis, département qui affiche le revenu par habitant le plus faible d’Île-de-France, met en évidence les différences de variation de HSPR et pourrait ainsi servir d’indicateur pour cibler les zones où il serait important d’agir afin d’améliorer l’accès à des soins de premier recours appropriés (graphique 1). L’analyse des variations entre les 503 zones PMSI d’Îlede-France (graphique 2) permet de mettre en évidence les zones dans lesquelles les taux de HSPR sont supérieurs de 1,5 à 2,5 écarts types à la moyenne par rapport à celles dans lesquelles ils sont inférieurs de 0,5 à 1,5 écart type à la moyenne.

Graphique 1

HSPR en Seine-Saint-Denis ajustées sur l’âge /1 000 habitants (2008)

Graphique 1

HSPR en Seine-Saint-Denis ajustées sur l’âge /1 000 habitants (2008)

SOURCES • Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) de l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH).
Graphique 2

Variations entre les 503 zones PMSI d’Île-de-France

Graphique 2

Variations entre les 503 zones PMSI d’Île-de-France

SOURCES • Données PMSI, Insee ; analyse statistique : ILC USA ; cartographie : ORS Île-de-France.

15Le modèle de régression logistique révèle qu’augmenter l’âge, le nombre de diagnostics enregistrés et la densité de population a peu d’influence, tandis qu’augmenter la densité d’omnipraticiens et le nombre de consultations privées rapporté à la résidence des patients se traduit par une légère diminution de la probabilité de HSPR (tableau 3).

Tableau 3

Analyse par régression logistique des HSPR en Île-de-France, 2004-2008

Tableau 3
Variables indépendantes Coefficient (E.T.) Exp(B) (Sig.) I.C. pour EXP(B) 95 % Inférieur Supérieur Âge (variable continue) ,028 (,000) 1,029 (,000) 1,029 1,029 Nombre de diagnostics enregistrés (variable continue) ,060 (,001) 1,062 (,000) 1,061 1,063 Féminin (omis = masculin) -,243 (,003) ,784 (,000) ,779 ,789 Soins dispensés dans un établissement public (x-DG) (omis =x-QON) ,466 (,004) 1,594 (,000) 1,581 1,607 Quartile de revenu de la zone PMSI (omis = quartile supérieur) Quartile inférieur ,106 (,009) 1,112 (,000) 1,093 1,130 Deuxième quartile ,039 (,007) 1,039 (,000) 1,025 1,054 Troisième quartile ,033 (,006) 1,033 (,000) 1,021 1,046 Sans diplôme ou CEP ou BEPC, brevet des collèges pour 1 000 habitants de 15 ans et plus, par quartile (omis : dernier quartile de « niveau d’études faible ») Quartile inférieur (deuxième quartile) ,074 (,009) 1,076 (,000) 1,057 1,096 Troisième quartile ,093 (,012) 1,097 (,000) 1,072 1,122 Quartile supérieur (quatrième quartile) ,104 (,014) 1,109 (,000) 1,078 1,141 Niveau d’études égal à bac+2 pour 1 000 habitants de 15 ans ou plus, par quartile (omis : quartile supérieur de « niveau d’études élevé ») Études supérieures, quartile inférieur ,059 (,014) 1,061 (,000) 1,032 1,091 Deuxième quartile ,001 (,012) 1,001 (,909) ,978 1,026 Troisième quartile ,008 (,010) 1,008 (,398) ,989 1,028 Densité de population/ km² (omis : quartile de densité supérieur) Densité la plus faible ,055 (,008) 1,057 (,000) 1,040 1,073 Deuxième quartile ,074 (,007) 1,077 (,000) 1,061 1,092 Troisième quartile ,074 (,006) 1,076 (,000) 1,064 1,089 Omnipracticiens pour 1 000 habitants -,086 (,011) ,918 (,000) ,899 ,937 Consultations privées pour 1 000 habitants -,026 (,003) ,975 (,000) ,968 ,981 Terme d’interaction – omnipracticiens * consultations privées ,032 (,004) 1,032 (,000) 1,024 1,040

Analyse par régression logistique des HSPR en Île-de-France, 2004-2008

SOURCES HSPR • Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) de l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) ; SOURCES VARIABLES INDÉPENDANTES • 1. Indicateurs socio-économiques : INSEE, 2006. 2. Quartile de revenu : Observatoire régional de la santé d’Ile de France, 2007 (calculé à partir du revenu fiscal de référence moyen de l’ensemble des foyers fiscaux par code PMSI). 3. Omnipraticiens libéraux : base permanente des équipements 2008 de l’INSEE (fonctions médicales et paramédicales). 4. Consultations privées : ARS-IDF, Système national d’informations interrégime de l’Assurance maladie (SNIIRAM) Datasmart Offre de soins, 2009 (pour la population de 20 ans et plus).

16La probabilité de HSPR est plus élevée parmi les résidents des zones à faible revenu. En revanche, à quartile de revenu constant, la corrélation entre le niveau d’études et la probabilité de HSPR est faible. Il faut noter – et il s’agit là d’un point important – qu’il existe une corrélation positive forte entre HSPR et hospitalisation dans un établissement public, comparé à ce qui est observé lorsque l’hospitalisation a lieu dans un établissement privé. Enfin, la probabilité de HSPR est plus faible pour les femmes que pour les hommes, ce qui corrobore les conclusions d’études antérieures (Weissman et al., 1992 ; Gusmano et al., 2006). Ce résultat n’est guère surprenant, puisque l’on sait que les femmes sont proportionnellement plus nombreuses que les hommes à recourir aux soins de premier recours (Aliaga, 2002).

Limites

17L’utilisation de données administratives hospitalières impose des limites à notre étude et il est possible que des problèmes de fiabilité et de validité des systèmes d’enregistrement de données aient une incidence sur nos résultats. Il existe également, comme toujours, un risque de biais lié au fait que les professionnels exerçant dans des services hospitaliers différents n’ont pas toujours les mêmes méthodes de codage. Il n’en reste pas moins que la cohérence de nos résultats par rapport à ceux d’autres études – s’agissant par exemple de l’incidence du sexe et de l’âge sur les probabilités de HSPR – nous conduit à penser que ce biais est minimal. Enfin, nous ne disposons d’aucun indicateur direct concernant certains facteurs non négligeables liés à la demande – prévalence des maladies et différences de comportement à l’égard du recours aux soins entre différents groupes de la population.

Conclusions

18Les résultats synthétisés ici mettent en lumière, dans différentes zones géographiques, certaines conséquences importantes sur les hospitalisations de l’accessibilité des soins de premier recours ou, plus généralement, de l’organisation et de l’efficacité de ces soins. Nos données ne permettent pas, cependant, d’apprécier dans quelle mesure les difficultés d’accès aux soins sont imputables aux multiples caractéristiques des systèmes de santé ou s’expliquent plutôt par divers facteurs liés à la demande de soins. Nous avons pu neutraliser les effets de la gravité des pathologies en incluant dans la régression logistique le nombre de diagnostics enrégistrés et l’âge du patient, mais nous n’avons pas d’informations sur les différences de comportements en matière de recours aux soins, ni sur les différences de qualité des consultations entre les diverses catégories socio-économiques. De plus, nous ne sommes pas en mesure de déterminer si les écarts constatés au niveau des taux de HSRP s’expliquent par des différences de densité de médecins, de nombre de consultations, de qualité des soins, de barrières à l’accès que constituent les dépassements d’honoraires pratiqués par des professionnels de santé ou par divers autres facteurs liés au patient.

19S’appuyant sur une enquête représentative conduite à Paris et dans trois départements de la petite couronne – en d’autres termes dans la partie de l’Île-de-France la mieux dotée en établissements hospitaliers et en professionnels de santé –, Chauvin et Parizot (2009) ont constaté qu’après ajustement pour les effets de la situation socio-économique, de la couverture maladie et de l’état de santé, la densité de professionnels de santé et d’établissements avait peu d’incidence sur le taux de consultation. Toutefois, s’intéressant plus précisément aux frottis cervicaux, un test de dépistage auquel la plupart des femmes peuvent accéder dans le cadre d’un suivi ordinaire, ils ont observé que 10 % des femmes n’avaient jamais subi cet examen et que 26 % n’avaient pas eu de frottis au cours des deux années écoulées. De surcroît, la variation selon le quartier est comprise entre 11 % et 58 % et les femmes qui accomplissent la majorité de leurs activités quotidiennes à proximité de leur domicile ont plus de probabilités d’afficher les taux de recours au frottis cervical les plus faibles, quelles que soient leur catégorie socioprofessionnelle et leurs limites fonctionnelles (Vallée et al., 2010). En d’autres termes, il semble que pour certains segments de la population, la densité de prestataires de soins joue bel et bien un rôle.

20Malgré ces constatations, d’autres études conduites en France révèlent que la notion de distance par rapport aux praticiens ne doit pas s’analyser en termes strictement géographiques, en particulier s’agissant des populations pauvres. La distance a en effet aussi une dimension sociale, culturelle et symbolique (Parizot, 2003). Il est par exemple possible que l’on s’inquiète moins pour sa propre santé quand on est pauvre et que nourrir ses enfants constitue un souci quotidien. De ce fait, les habitants des zones à faible revenu accordent peut-être moins d’importance à l’accès aux services de santé. Il est aussi possible qu’ils soient moins bien informés au sujet des risques de santé et moins bien armés pour se repérer dans les méandres d’un système de santé complexe. Par ailleurs, comme le fait observer Chauvin (2012), le « coût psychosocial » du recours aux soins nécessite une aptitude à faire face à d’éventuelles conséquences fâcheuses, une capacité à se projeter dans l’avenir, à reconsidérer ses priorités de vie et à réaménager son emploi du temps – autant d’aptitudes qui ne sont pas réparties de manière égale entres les différents groupes socio-économiques.

21Le revenu constitue-t-il vraiment le principal facteur qui conduit certains patients à réagir tardivement à leurs propres symptômes et à différer leur recours aux tests de dépistage et aux soins ? C’est l’une des questions cruciales que soulève notre constatation au sujet de l’incidence du revenu moyen par zone sur le taux des HSPR. Il faudrait également examiner si les taux de HSPR élevés pourraient s’expliquer par la présence d’immigrés en situation irrégulière dans la zone étudiée. L’aide médicale d’État (AME) est une prestation accordée sous condition de ressources pour financer les soins dont ont besoin les étrangers en situation irrégulière atteints d’une maladie grave ne pouvant être prise en charge dans leur pays d’origine (da Lomba, 2011). Depuis 2002, diverses dispositions ont été prises pour limiter l’accès à cette prestation et obliger les immigrés en situation irrégulière à assumer une part plus importante de leurs dépenses de santé. Ainsi, en 2010, l’Assemblée nationale a introduit dans la loi de finances un amendement qui exige des bénéficiaires de l’AME le paiement d’un droit d’entrée de 30 euros par adulte. Les bénéficiaires de l’AME continuent d’accéder aux soins, mais ils doivent acquitter un ticket modérateur, à l’exception des femmes enceintes, des enfants et des adultes souffrant d’une affection grave (da Lomba, 2011, p. 364). De nombreuses données empiriques recueillies dans le cadre de l’Enquête démographique et de santé (EDS) montrent que la population immigrée qui vit en France a une « santé perçue » plus mauvaise, est davantage touchée par les affections chroniques et consulte moins souvent les médecins, généralistes comme spécialistes (Dourgnon et al., 2009). Il est en revanche plus difficile d’établir la part de ce phénomène attribuée à des différences de recours aux soins et celle due à des facteurs tels que les écarts de morbidité, de situations socio-économiques, les barrières liées à la culture et à des difficultés d’accès à l’information, la discrimination directe par la société, voire par les prestataires de soins.

22Enfin, l’écart au niveau du taux de HSPR que nous constatons en fonction du statut, public ou privé, de l’établissement surprend par son ampleur comparé aux différences induites par nos autres variables. Les patients pris en charge par le secteur public ont une probabilité beaucoup plus forte d’être hospitalisés pour une pathologie pouvant être traitée en ambulatoire. Pour interpréter ce phénomène, il importe d’avoir à l’esprit la place respective des établissements privés et des établissements publics. Les établissements publics et privés à but non lucratif (qui sont généralement associés aux hôpitaux publics) représentent 74,8 % de l’ensemble des séjours en médecine et 43,8 % des séjours en chirurgie (Or et Belanger, 2011), ainsi que 64 % des séjours hospitaliers de courte durée, contre 36 % pour les établissements privés à but lucratif (DGOS, 2010).

23Étant donné ces différences et compte tenu du fait que la plupart des HSPR sont motivées par des causes médicales, l’importance du statut de l’établissement est moins surprenante. Elle l’est encore moins si l’on ajoute que d’après certaines données, les patients de plus de 80 ans et surtout de plus de 90 ans sont beaucoup plus souvent pris en charge par le secteur public que par le secteur privé à but lucratif (Or et al., 2009). Mais peut-être la différence la plus importante, sur laquelle on dispose de données, tient-elle au fait que les prises en charge lourdes pourraient représenter une part plus importante de l’activité dans le secteur public et privé à but non lucratif que dans le secteur privé à but lucratif (Or et al., 2009). Ces constats laissent à penser que les patients qui présentent les complications les plus sérieuses de leur maladie ont peut-être une plus forte probabilité d’être hospitalisés dans le secteur public. S’ils n’ont pas accès à temps à des soins de premier recours appropriés pour le traitement de pathologies pouvant relever d’une prise en charge ambulatoire, ils ont plus de chances d’être hospitalisés dans un établissement public.

24En l’absence de données sur les caractéristiques des patients en dehors de l’âge et du nombre de diagnostics enregistrés, et faute d’informations sur leurs comportements en matière de recours aux soins avant ou après leur hospitalisation, nous ne pouvons que formuler des hypothèses quant aux autres enseignements à tirer de ces constatations. L’une de ces hypothèses est que les patients pris en charge par l’hôpital public sont peut-être plus susceptibles de recevoir des soins primaires dans les services de consultations externes des hôpitaux publics ou dans des centres de santé publics que dans des cabinets libéraux. Or, en cas de saturation, ces services et centres de santé sont peut-être plus enclins à orienter les patients vers un établissement hospitalier public, ce qui pourrait expliquer la plus forte probabilité de HSPR constatée en cas d’hospitalisation dans le secteur public.

25Un récent rapport sur la politique de santé (Benamouzig, 2012) synthétise clairement le nouveau discours axé sur le développement des maisons de santé et sur la nécessité de privilégier une approche populationnelle pour la promotion de la santé et la prévention des maladies. Ce rapport, qui formule de nombreuses propositions concrètes de réforme de la santé, insiste également sur la nécessité de mettre au point de nouvelles stratégies de prise en charge des maladies chroniques, de limiter les phases de crise qui nécessitent une hospitalisation et de prendre en charge leurs symptômes et leur évolution de manière plus coordonnée, en exploitant l’amélioration des systèmes d’information, la télémédecine et le concept de dossier médical intégré.

26La loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) de 2009 a donné naissance aux agences régionales de santé (ARS), qui regroupent des missions en matière d’assurance maladie, de santé publique et de réglementation des hôpitaux de manière à organiser un ensemble de services, dont les services de consultations externes. La stratégie nationale de santé annoncée par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault en février 2013 insiste de nouveau sur la nécessité d’intégrer les services et plaide en faveur de parcours coordonnés de services de santé. Dans ce contexte, notre constat selon lequel les habitants de zones à faible revenu et les patients hospitalisés dans le secteur public affichent une probabilité plus forte de HSPR mérite une attention particulière. En effet, qu’il s’explique par des facteurs liés à la demande ou par des problèmes d’accès aux soins imputables au financement et à l’organisation du système de santé, le véritable enjeu, pour l’ARS d’Île-de-France (ARS-IDF), consiste à trouver des moyens d’améliorer le système de santé.

27Le taux de HSPR plus élevé constaté dans certaines régions doit-il être imputé à un recours tardif aux soins ou faudrait-il améliorer le système de santé dans ces zones de manière à cibler les populations à risque, à leur offrir un meilleur accès aux soins et à éviter ainsi des hospitalisations potentiellement évitables ? L’indicateur HSPR ne permet pas, à lui seul, d’apporter une réponse à cette question. Toutefois, utilisé de manière judicieuse, associé à des indicateurs de la densité de praticiens et au nouvel indicateur mis au point par l’IRDES – l’accessibilité potentielle localisée (APL) – (Barlet et al. 2012), et accompagné d’une poursuite des échanges avec les prestataires de services de santé et les responsables de l’organisation des soins, il peut se révéler utile pour identifier des zones touchées par des problèmes d’accès aux soins de premier recours et pour le suivi des progrès réalisés s’agissant de la résolution de ces problèmes. Vouloir faire évoluer la situation socio-économique des individus est un objectif de long terme noble mais difficile à atteindre. Dans l’intervalle, il nous semble important que l’ARS-IDF s’intéresse davantage à la manière dont elle pourrait faire évoluer le système pour réduire les disparités d’accès aux soins décrites dans le présent article.

Remerciements

Nous exprimons nos remerciements les plus sincères aux personnes qui nous ont aidés à présenter le concept de HSPR à un lectorat français et à le rendre pertinent par rapport au discours actuel en matière de politique de santé : Ayden Tajahmady et ses collègues de l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), Caroline Laborde et Adrien Saunal de l’Observatoire régional de santé d’Île-de-France, Thomas Cartier, Philippe Le Fur et Michka Naiditch de l’IRDES et les deux relecteurs anonymes de cet article, qui se sont montrés perspicaces et constructifs dans leurs commentaires. Enfin, nous remercions Véronique Moysan pour son aide précieuse pour comprendre les données issues du PMSI.

Notes

  • [*]
    Michael K. Gusmano, chercheur, Hastings Center (États-Unis).
    Victor G. Rodwin, professeur de gestion et politiques de santé, Wagner School of Public Service, New York University (États-Unis).
    Daniel Weisz, chercheur associé, International Longevity Center-USA, Columbia University (États-Unis).
  • [1]
    Cet article a été écrit en anglais. Il a été traduit par Isabelle Croix.
    La version initiale en anglais est disponible sur http://www.cairn.info/revue-francaise-des-affaires-sociales.htm
  • [2]
    D’après les estimations de l’Office of the Management and Budget, même après l’importante extension de la couverture de l’assurance maladie prévue par la réforme de la santé engagée par le président Obama (Affordable Care Act), qui entrera en réalité en vigueur à partir de 2014, quelque 6 % de la population restera dépourvue d’assurance maladie.
  • [3]
    La Direction générale de l’offre de soins (DGOS) du ministère de la Santé a commandité une étude sur les séjours hospitaliers sensibles aux soins de premiers recours (HSPR) (DGOS, 2007), qui montre qu’en France, il existe un effet inverse léger entre la densité de médecins appartenant au secteur 1 et les HSPR. Vigneron (2011) a publié, d’après une étude réalisée par Tonnellier (2011), une carte des séjours hospitaliers motivés par des pathologies se prêtant à une prise en charge ambulatoire. En novembre 2012, l’Observatoire régional de la santé des Pays de la Loire a organisé un congrès sur les hospitalisations évitables (http://www.odisse.fr). IMS Health a réalisé, à la demande du LEEM, une étude qui compare les HSPR en France et en Angleterre (LEEM, 2006). Enfin, deux études récentes consacrées aux HSPR en Île-de-France (Laborde et al.,2013) et dans les Pays de la Loire (Buyck et al., 2013) ont été présentées au Congrès national des Observatoires régionaux de la santé, à Bordeaux (http://www.congres-ors.com/fileadmin/pdf/ORS_pdf/PROGRAMME_congres_2013.pdf).
  • [4]
    D’après une étude non publiée de J.-F. Buyck et al. (2012), qui effectuent une comparaison entre la France et l’Angleterre sur la base de la définition des HSPR retenue par Weissman et al., les hospitalisations pour pneumonie bactérienne et insuffisance cardiaque congestive représentent 58 % de l’ensemble des HSPR prononcées en France.
  • [5]
    Les termes d’interaction sont utiles lorsque l’effet d’une variable indépendante sur la variable dépendante dépend d’une troisième variable. Par exemple, dans notre modèle de régression logistique, nous supposons que l’ampleur de l’impact du nombre d’omnipraticiens sur la probabilité de HSPR dans une zone donnée dépend du nombre de consultations dans cette zone parce qu’un plus grand nombre d’omnipraticiens n’a une importance que s’il va de pair avec une augmentation du recours aux soins de premier recours. En pareil cas, ajouter dans le modèle un terme d’interaction dans lequel les deux variables prédictives sont multipliées permet de tester l’hypothèse selon laquelle une hausse du nombre d’omnipraticiens dans une zone donnée est plus susceptible d’induire une baisse de la probabilité de HSPR lorsque le nombre de consultations augmente au sein de cette zone. La présence d’une interaction significative (tableau 3) indique que l’effet d’une variable prédictive (omnipraticiens) sur la variable dépendante (HSPR) diffère en fonction de la valeur de l’autre variable prédictive (consultations).
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Français

Cet article présente un indicateur, les « hospitalisations sensibles aux soins de premier recours » (HSPR), utilisé aux États-Unis et dans d’autres pays de l’OCDE pour évaluer dans quelle mesure les soins de premier recours sont accessibles et permettent une prise en charge adaptée des pathologies avant qu’elles ne nécessitent des traitements à l’hôpital. Sur la base d’une étude conduite en Île-de-France à partir de données hospitalières et du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI), cet indicateur permet d’identifier les zones où les HSPR semblent particulièrement nombreuses et ces hospitalisations potentiellement évitables. Les facteurs susceptibles d’expliquer ces disparités (facteurs individuels et facteurs contextuels propres au lieu de résidence) sont analysés grâce à une régression logistique : les résidents des zones du dernier quartile de revenu et les patients hospitalisés dans des établissements publics rencontrent davantage de difficultés d’accès aux soins de premier recours, ce qui soulève une question importante pour les politiques de santé : faut-il imputer le nombre élevé de HSPR à un recours aux soins tardif ou au fait que le système de soins n’est pas organisé pour cibler les populations à risque ?

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Michael K. Gusmano
Chercheur, Hastings Center, États-Unis.
Victor G. Rodwin
Professeur de gestion et politiques de santé, Wagner School of Public Service, New York University, États-Unis.
Daniel Weisz [*]
Chercheur associé, International Longevity Center-USA, Columbia University, États-Unis.
  • [*]
    Michael K. Gusmano, chercheur, Hastings Center (États-Unis).
    Victor G. Rodwin, professeur de gestion et politiques de santé, Wagner School of Public Service, New York University (États-Unis).
    Daniel Weisz, chercheur associé, International Longevity Center-USA, Columbia University (États-Unis).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 17/12/2013
https://doi.org/10.3917/rfas.126.0108
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