CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Garantir un niveau de ressources adapté aux retraités actuels et futurs est l’un des objectifs principaux des systèmes de retraite. Cet objectif peut être appréhendé d’un point de vue collectif, en comparant les revenus des actifs et des retraités, et en tenant compte de l’ensemble des revenus du foyer et de la composition familiale. Cette approche a notamment été développée et illustrée par le Conseil d’orientation des retraites (COR) à partir de données émanant de l’INSEE (enquête Revenus sociaux et fiscaux). En intégrant les revenus du patrimoine et compte tenu d’une plus petite taille des ménages retraités, on observe en 2009 une quasi-parité de niveau de vie entre ces deux catégories.

2Cet objectif se décline également au niveau individuel : pour chaque assuré, la pension de retraite est destinée, entre autres, à limiter la baisse des revenus entre la période d’activité et celle de la retraite. Un indicateur généralement utilisé pour apprécier si cette finalité est satisfaite ou non est le taux de remplacement du dernier revenu d’activité par la retraite, calculé sur données individuelles [1] : ce taux est défini comme le rapport entre le montant de la retraite (base et complémentaire, tous régimes confondus) et celui de la dernière rémunération ou du dernier revenu d’activité perçu. Il s’agit de mesurer à quelle hauteur les différentes pensions de retraite couvrent la rémunération d’activité de fin de carrière. Cet indicateur ne tient pas compte des autres sources de variation de revenus entre la retraite et l’activité tels que la fiscalité, les prestations et les revenus du patrimoine faute d’informations précises. Cet indicateur reflète une situation individuelle et pas celle de l’ensemble du ménage qui est souvent l’unité d’étude privilégiée pour l’analyse des revenus.

3Le taux de remplacement est souvent au cœur du débat public puisqu’il porte sur une des principales finalités du système de retraite. La garantie d’un niveau élevé de pensions a été réaffirmée dans les objectifs de la loi de réforme des retraites de 2010 et l’opinion publique est très attachée au maintien d’un haut niveau de revenus à la retraite, comme le montre le baromètre annuel DREES sur les attitudes et les opinions des Français sur la santé, la protection sociale et la solidarité [2]. En effet, parmi les leviers pour assurer la pérennité du système de retraite par répartition, la hausse des cotisations et l’augmentation de l’âge de départ à la retraite sont très nettement préférées à la baisse du niveau des pensions. En 2010, un tiers des Français souhaitent ne pas voir diminuer leurs revenus au moment du départ à la retraite (par rapport au salaire ou au revenu professionnel antérieur) et la moitié jugent acceptable une baisse de 10 à 20 %.

4L’intérêt de l’indicateur du taux de remplacement réside dans son caractère synthétique. Les règles d’acquisition de droits à retraite présentant des différences importantes selon les régimes, le taux de remplacement est souvent mis en avant car c’est un indicateur permettant de comparer de manière simple la situation des salariés du public et du privé, des hommes et des femmes en matière de retraite. Mais le calcul et l’interprétation de cet indicateur ne vont pas de soi.

5Son calcul nécessite de disposer à la fois de données individuelles sur les retraites et les salaires de fin de carrière sur une période d’observation relativement longue puisque plusieurs années peuvent s’écouler entre la cessation d’activité salariée et le départ en retraite. Le calcul de taux de remplacement a déjà été réalisé par la DREES à partir des données de l’échantillon interrégimes de retraités (EIR) de 2001. Néanmoins, la présente étude porte sur un champ plus large que celui des publications antérieures (Coeffic, 2004 ; COR, 2011a). L’élargissement du champ est autorisé par une plage plus longue d’observation des parcours de fin de carrière (cf. encadré 1). Les chroniques des salaires et des conditions d’emploi depuis l’âge de 50 ans sont en effet disponibles pour la première fois dans la vague 2008 de l’EIR (les données sur les salaires n’étaient recueillies qu’à partir de l’âge de 55 ans dans les précédentes vagues). Des calculs de taux de remplacement peuvent aussi être réalisés sur cas types. Ces derniers permettent de bien comprendre l’impact des règles de calcul de la pension mais ils ne retracent pas la diversité des carrières salariales et reposent sur des hypothèses simplificatrices.

Encadré 1. Sources et champ de l’étude

Sources
Pour calculer un taux de remplacement, il faut à la fois connaître le montant de pension perçu par le retraité et ses revenus d’activité en fin de carrière.
La DREES interroge tous les quatre ans, via l’échantillon interrégimes de retraités (EIR), la quasi-totalité des organismes de retraite obligatoire (régimes de base et régimes complémentaires) sur les caractéristiques individuelles d’un échantillon anonyme de retraités : nature et montant des prestations versées, conditions de liquidation des droits à la retraite (âge et taux de liquidation, durée de carrière validée). Le rapprochement, individu par individu, des montants en provenance des différents régimes (plus de 70 au total) permet notamment de reconstituer la pension issue de l’avantage principal de droit direct tous régimes confondus ainsi que la pension globale de chacun des retraités. La sixième vague du panel porte sur la situation des retraités au 31 décembre 2008.
Les informations sur les salaires, sur les types d’emploi occupés, sur les secteurs d’activité, etc., sont fournies par les panels DADS (déclaration annuelle des données sociales) et État de l’INSEE appariés à l’EIR. Plus précisément, il s’agit des trajectoires salariales des individus à partir de leurs 50 ans [4] et jusqu’à l’année 2008. Dans le secteur privé, il s’agit du salaire net fiscal (participation non comprise) auquel sont soustraites la CSG et la CRDS non déductible. Le salaire net dans la fonction publique intègre les primes. Les salaires sont corrigés de la durée de paie (ils sont tous rapportés à une durée de un an si besoin) mais pas de la quotité de travail. Ils ont été actualisés selon l’indice d’évolution des salaires nets moyens.
Les salaires du secteur privé sont issus du panel DADS. Les salaires du public sont issus du panel État pour les agents de l’État (titulaires ou non) mais aussi du panel DADS pour la fonction publique hospitalière, les collectivités territoriales et les établissements publics nationaux.
Champ
L’analyse concerne la génération 1942, âgée de 66 ans fin 2008, qui est donc presque entièrement partie à la retraite à cette date. Sont retenus les retraités de droit direct d’un régime de base résidant en France, dont le ou les régimes d’affiliation sont le régime général, le service des retraites de l’État (fonctionnaires civils), la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL, fonctionnaires territoriaux ou hospitaliers) ou les régimes spéciaux de salariés, et pour lesquels au moins un salaire est renseigné dans les panels de l’INSEE à partir de l’année de leurs 50 ans. Pour les polypensionnés, ne sont gardés que ceux dont le régime principal et le régime secondaire sont parmi ceux précités [5]. La sélection conduit à écarter les retraités sortis précocement (avant 50 ans) de l’emploi salarié : retraités terminant leur carrière par un emploi non salarié ou sortant de toute activité professionnelle (chômage, invalidité, préretraite…) ainsi que les retraités ayant pour régime principal un régime d’indépendants, d’agriculteurs, de professions libérales, ou le Service des retraites de l’État (militaires). Les retraités ainsi observés représentent environ 57 % du total des retraités de droit direct d’un régime de base résidant en France et nés en 1942 [6].
En revanche, les taux de remplacement sont calculés pour tout type d’emploi (temps plein ou temps partiel) et sans condition sur la carrière (complète ou non) [7].

6L’interprétation du taux de remplacement est également délicate. Cet indicateur permet de juger à quelle hauteur la pension de retraite remplace le salaire atteint en fin de carrière et de comparer de manière simple la situation des retraités par sexe, type de carrière, etc. Mais il n’est pertinent que si la position occupée juste avant de partir à la retraite s’inscrit dans la carrière et n’apparaît pas comme atypique. Pour une proportion substantielle de la population, c’est loin d’être le cas [3] : dans le secteur privé, en particulier, de nombreux salariés connaissent des transitions indirectes de l’activité à la retraite (préretraite, chômage, invalidité…) et le passage à temps partiel en fin de carrière est assez développé, ce qui pose la question du salaire à retenir qui soit le plus représentatif de la fin de carrière. En outre, on se restreint dans cette étude aux seuls « salaires », et non aux « revenus » au sens plus large, qui recouvrent aussi des revenus de remplacement (indemnités de chômage, préretraite, pensions d’invalidité), pourtant fréquents en fin de carrière. Les taux de remplacement présentés ici permettent uniquement d’évaluer quelle fraction du niveau de salaire atteint en fin de carrière est couverte par le système de retraite.

7En outre, l’analyse des taux de remplacement doit être réalisée en regard des montants de pension perçus, car un taux de remplacement élevé peut être associé à un parcours professionnel avec un salaire faible (emploi à temps partiel, faible rémunération). Un taux de remplacement élevé ne témoigne ainsi pas nécessairement d’un montant de pension important. Compte tenu des propriétés redistributives du système de retraite (présence de minima de pension notamment), les taux de remplacement sont généralement supérieurs pour les personnes percevant des salaires modestes. Par exemple, les assurés affectés par des aléas en fin de carrière se retrouvent plus souvent parmi les personnes percevant les salaires les plus faibles. Leur taux de remplacement peut être de ce fait relativement élevé au regard de celui des autres salariés, il ne faudrait pas pour autant en conclure à un impact neutre d’un parcours discontinu. Dans l’analyse proposée, l’accent sera donc mis sur des résultats en neutralisant les effets de composition (type de carrière, genre) et l’on raisonnera à salaire de fin de carrière équivalent. Il s’agit ici de comparer les situations des assurés soumis éventuellement à des règles différentes mais qui présentent des caractéristiques voisines.

8Cette étude vise dans un premier temps à proposer un indicateur de taux de remplacement du salaire par la retraite le plus pertinent possible, qui tienne compte des différentes situations et des aléas de fin de carrière rencontrés. Ce taux de remplacement sera ensuite comparé selon les caractéristiques du retraité (genre, secteur d’activité, parcours de fin carrière, etc.). L’étude porte essentiellement sur la génération 1942 qui est quasiment intégralement partie à la retraite en 2008. Les résultats ne sont pas généralisables aux générations plus récentes.

9Dans une première partie orientée sur la méthodologie, nous nous intéresserons à la relation décroissante entre le salaire perçu en fin de carrière et le taux de remplacement. Ce premier résultat nous conduit ensuite à raisonner à salaire de fin de carrière équivalent pour comparer au mieux les taux de remplacement des différents profils de retraités.

10La seconde partie présente ainsi les taux de remplacement des anciens salariés du privé et des anciens salariés du public de la génération 1942. Nous nous intéressons notamment à la contribution des régimes complémentaires dans les taux de remplacement des anciens salariés du secteur privé. Nous prenons en compte les parcours de fin de carrière qui peuvent différer significativement selon le secteur d’activité et nous regardons également les écarts de taux de remplacement entre les hommes et les femmes.

11Enfin, la dernière partie offre une approche plus dynamique en donnant des éléments de comparaison de taux de remplacement entre générations, pour les retraités nés avant 1942.

Des taux de remplacement très sensibles aux niveaux de salaire

12Les taux de remplacement sont définis ici comme le rapport entre le montant net de la pension perçue fin 2008 et un salaire net représentatif de la fin de carrière : la moyenne des salaires nets perçus lors des cinq avant-dernières années d’activité salariée est privilégiée (cf. annexe).

13Compte tenu des propriétés redistributives du système de retraite, les retraités ayant perçu les salaires de fin de carrière les plus faibles ont les taux de remplacement les plus élevés (cf. graphiques 1). Pour ces derniers, le taux de remplacement peut même dépasser 100 %, signifiant que le montant de pension de droit direct perçu est supérieur au salaire comparé. Cette situation ne concerne quasiment que des femmes et s’explique par la proportion importante de salariées terminant leur carrière par un emploi à temps partiel. À l’inverse, les retraités les mieux rémunérés en fin de carrière ont des taux de remplacement bien plus faibles, inférieurs à 70 % pour les hommes et inférieurs à 75 % pour les femmes. Le système de retraite, avec ses dispositifs de solidarité, atténue donc les disparités individuelles de revenus. La relation décroissante du taux de remplacement en fonction du salaire est manifeste parmi les salaires les plus faibles. Les taux de remplacement se stabilisent autour des valeurs 75-80 % pour les salaires « intermédiaires », pour ensuite marquer une inflexion significative pour les très hauts salaires chez les hommes.

Graphiques 1

Graphiques 1

Graphiques 1

Taux de remplacement médians du salaire moyen des avant-dernières années avant liquidation par la retraite de droit direct, par tranches de salaire
CHAMP • Retraités de droit direct nés en 1942, en emploi salarié après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, résidant en France.
LECTURE • Tranches de salaire calculées à partir du salaire moyen des avant-dernières années avant liquidation, dans la limite de cinq années.
Les taux de remplacement sont bornés ici à 20 % minimum et 150 % maximum.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

14Plusieurs règles du système de retraite expliquent cette décroissance du taux de remplacement selon le niveau de salaire de fin de carrière.

15Les plus hautes rémunérations en fin de carrière vont généralement de pair avec des trajectoires salariales ascendantes. Dans le secteur privé, la retraite de base est calculée sur le salaire perçu au cours des meilleures années de carrière (dix-neuf années pour la génération 1942), pas uniquement sur les tout derniers salaires [8], et la retraite complémentaire se fonde sur les rémunérations perçues sur l’ensemble de la carrière.

16Dans le secteur public, les primes, qui sont généralement plus élevées pour les salaires les plus hauts [9] (bien que le lien ne soit pas systématique), n’entrent pas dans le calcul du salaire de référence pour la retraite.

17En outre, les dispositifs de minima de pension, attribués aux salariés ayant cotisé sur la base de salaires modestes (minimum contributif au régime général et minimum garanti dans la fonction publique), ont un impact significatif sur les taux de remplacement [10], notamment parmi la population féminine, davantage concernée (41 % des femmes de l’étude perçoivent un minimum, contre seulement 17 % des hommes).

18Enfin, au régime général, les rémunérations prises en compte pour le calcul des droits à retraite sont plafonnées.

19Les taux de remplacement étant très sensibles au niveau de salaire de fin de carrière, les écarts entre catégories de retraités seront le plus souvent présentés en neutralisant la répartition dans les tranches de salaire (« à salaire de fin de carrière équivalent ») [11].

20Les écarts selon le type de carrière (complète ou incomplète) apparaissent ainsi très différents selon que l’on neutralise ou pas la position dans la hiérarchie salariale. De manière brute, sans tenir compte de l’inégale répartition par niveau de salaire des retraités selon leur type de carrière, ne pas avoir réuni suffisamment de trimestres pour valider une carrière complète est associé à un taux de remplacement un peu plus faible (cf. tableau 1). Une carrière est considérée complète si la durée d’assurance tous régimes est supérieure au seuil de durée retenu pour que la pension ne subisse pas de décote (159 trimestres pour la génération 1942).

Tableau 1

Taux de remplacement selon le type de carrière et le genre

Tableau 1
Indicateurs de salaires Salaire moyen des avant-dernières années avant liquidation Salaire moyen des avant-dernières années avant liquidation - salaires à temps plein uniquement Premier quartile Médiane Dernier quartile Rapport inter-quartiles Premier quartile Médiane Dernier quartile Rapport inter-quartiles Tous secteurs Toutes carrières 65 78 92 0,71 63 74 85 0,74 Hommes 66 78 91 0,72 64 76 86 0,74 Femmes 65 78 93 0,70 61 73 83 0,74 Carrières complètes 68 80 92 0,74 66 76 86 0,77 Hommes 68 79 92 0,74 66 77 88 0,76 Femmes 69 80 93 0,75 66 76 85 0,78 Secteur privé Toutes carrières 66 79 96 0,69 63 75 86 0,73 Hommes 66 79 93 0,72 65 76 88 0,74 Femmes 65 79 101 0,64 59 72 83 0,72 Carrières complètes 69 80 96 0,72 67 77 88 0,76 Hommes 68 80 94 0,73 67 78 89 0,75 Femmes 70 81 99 0,71 67 76 86 0,78 Secteur public Toutes carrières 67 78 88 0,76 65 75 84 0,78 Hommes 68 78 87 0,78 67 76 84 0,79 Femmes 66 78 88 0,75 65 75 83 0,77 Carrières complètes 69 80 89 0,78 67 77 85 0,80 Hommes 69 79 88 0,79 68 77 85 0,80 Femmes 70 80 89 0,78 67 77 84 0,79

Taux de remplacement selon le type de carrière et le genre

CHAMP • Retraités de droit direct nés en 1942, en emploi salarié après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, résidant en France.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

21À tranche de salaire de fin de carrière égale, les écarts sont nettement amplifiés entre les retraités à carrière complète et les autres. Les assurés ayant validé une carrière complète bénéficient de taux de remplacement plus élevés de l’ordre de 19 points [12]. Les salariés qui n’obtiennent pas une durée d’assurance suffisante du fait d’interruptions [13] perçoivent des salaires généralement faibles en fin de carrière, ce qui pousse à la hausse leur taux de remplacement (sans que cela traduise une position privilégiée).

22En dehors du niveau de salaire de fin de carrière, d’autres facteurs peuvent plus ou moins influer sur les niveaux des taux de remplacement. Ces derniers diffèrent en effet selon le profil du retraité (homme ou femme, parcours de fin de carrière heurté ou non, passage à temps partiel ou non, etc.). Cette deuxième partie vise donc à comparer les différents profils de retraités anciens salariés, en distinguant le secteur privé et le secteur public, où les règles de calcul de retraite sont distinctes.

Des taux de remplacement voisins dans le public et le privé

23Les taux de remplacement médians sont globalement de niveau comparable entre le secteur public et le secteur privé. Sur le champ des carrières complètes, les écarts de taux de remplacement médians entre secteurs sont inférieurs à 2 points de pourcentage (cf. tableau 1). Ce résultat n’était a priori pas évident car les règles de calcul de la pension sont assez différentes d’un secteur à l’autre. Par exemple, le salaire de référence retenu pour le calcul de la pension n’est pas le même : six derniers mois dans le secteur public, contre salaire moyen des meilleures années pour la pension de base et salaires sur l’ensemble de la carrière pour la pension complémentaire dans le privé. Dans le secteur public, les primes, qui peuvent couvrir une large part de la rémunération, ne donnaient aucun droit à retraite [14].

24Alors que les débats sur la convergence des régimes de retraite mettent en avant de multiples différences dans l’acquisition des droits et le calcul des pensions, ce résultat peut paraître contre-intuitif et singulier. Il ressortait pourtant déjà de l’étude de Coeffic (2004) sur un champ plus restreint et avait été mis en évidence par Colin et al. (1999) à partir de données reconstituées pour la génération 1946, avec l’indicateur du taux de remplacement du salaire moyen. Établi à nouveau et sur un champ plus large, ce résultat contre-intuitif peut donc être considéré comme solide.

25Même si on observe des écarts médians entre secteur privé et secteur public, les profils de distribution des taux de remplacement sont relativement semblables (cf. graphiques 2). Toutefois, les taux de remplacement dans le secteur public apparaissent moins dispersés et se situent pour la plupart entre 80 et 85 % contre 75 et 80 % pour le secteur privé. À l’inverse, quelques taux de remplacement très élevés sont observés dans le secteur privé, surtout chez les femmes, qui occupent plus fréquemment des emplois peu rémunérés à temps partiel en fin de carrière.

Graphiques 2

Graphiques 2

Graphiques 2

Distribution des taux de remplacement du salaire moyen des avant-dernières années avant liquidation, selon le secteur d’activité
CHAMP • Retraités de droit direct nés en 1942, en emploi salarié après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, résidant en France.
LECTURE • En abscisse figurent les taux de remplacement du salaire par la retraite, répartis par tranches, en %. « < 75 » signifie que le taux de remplacement est supérieur à 70 % (inclus) et inférieur à 75 % (exclu).
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

26La proximité des deux secteurs en termes de taux de remplacement médians demeure à tranche de salaire équivalente. La fixation des rémunérations obéit en effet à des logiques différentes dans les secteurs public et privé. Dans le privé, l’éventail des rémunérations est beaucoup plus large, il importe donc de neutraliser les effets de composition par niveau de salaire. À tranche de salaire de fin de carrière égale (pour un emploi à temps plein), les anciens salariés du secteur public perçoivent un taux de remplacement médian généralement légèrement plus élevé que les anciens salariés du privé, pour les hommes comme pour les femmes (cf. graphiques 3). À tranche de salaire, sexe, type de carrière – complète ou non –, parcours de fin de carrière équivalent, être ancien salarié du secteur public est associé à un taux de remplacement un peu plus élevé (estimé à 1 point de plus par rapport au secteur privé).

Graphiques 3

Graphiques 3

Graphiques 3

Taux de remplacement médians du salaire moyen des avant-dernières années avant liquidation, salaires à temps plein uniquement, selon la tranche de salaire et le secteur d’activité, pour les retraités à carrière complète
CHAMP • Retraités de droit direct nés en 1942, en emploi salarié à temps plein après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, résidant en France.
LECTURE • Tranches de salaire calculées à partir du salaire moyen des avant-dernières années avant liquidation relatives à des emplois à temps plein uniquement, dans la limite de cinq années.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

Dans le secteur privé, le taux de remplacement de la pension versée par les régimes complémentaires croît avec les salaires de fin de carrière

27À la différence du système de retraite de la fonction publique (qui ne distingue pas la retraite complémentaire de la retraite de base), ceux des salariés du privé comprennent des régimes de base (régime général essentiellement) et des régimes complémentaires.

28Dans le secteur privé et pour les non-titulaires de la fonction publique, la retraite est composée de la pension de base et de la pension complémentaire, versée par les régimes complémentaires ARRCO/AGIRC ou IRCANTEC.

29Pour les pensionnés principalement affiliés au régime général, l’ajout de la retraite versée par les complémentaires permet de passer d’un taux de remplacement médian de 49 % à 79 % chez les hommes et de 55 % à 80 % chez les femmes.

30Calculés sur la pension de base uniquement, les taux de remplacement médians décroissent quand les salaires de fin de carrière augmentent (cf. graphiques 4). La pension de base est calculée à partir du salaire pris en compte dans la limite du plafond de la sécurité sociale, c’est pourquoi son montant est limité. À l’inverse, les taux de remplacement de la pension servie par les régimes complémentaires, qui permettent de cotiser au-delà du plafond de la sécurité sociale, augmentent avec les salaires pour les tranches de salaire moyennes et élevées.

Graphiques 4

Graphiques 4

Graphiques 4

Taux de remplacement médians par tranche de salaire, selon la composition de la retraite (base, complémentaire, les deux)
CHAMP • Retraités de droit direct nés en 1942, en emploi salarié à temps plein après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, résidant en France.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

31L’impact des retraites complémentaires sur les taux de remplacement est davantage visible pour les retraités ayant perçu les salaires de fin de carrière les plus élevés. Elles leur permettent d’atteindre un niveau de taux de remplacement du salaire par la retraite bien plus élevé qu’avec la simple pension de base.

Les taux de remplacement diffèrent selon les parcours de fin de carrière

32Les parcours de fin de carrière des retraités anciens salariés regroupent des situations très diverses. Une période de chômage, de préretraite ou d’inactivité précède souvent le départ en retraite. En outre, il n’est pas rare que les salariés connaissent au moins une année d’interruption de carrière entre leurs 50 ans et leur dernière année d’activité salariée, pour du chômage par exemple. Enfin, le temps partiel est très développé en fin de carrière (Andrieux et Chantel, 2011). S’agissant des parcours de fin de carrière, les secteurs public et privé se différencient assez nettement.

33Dans le secteur privé, sur le champ retenu, les deux tiers des retraités anciens salariés n’ont pas connu un passage direct de l’emploi salarié à la retraite (cf. tableau 2), c’est-à-dire qu’ils ont connu au moins une année sans salaire (chômage, inactivité, etc.) entre leur fin d’activité salariée et le départ en retraite. De plus, 43 % ont eu une trajectoire salariale discontinue en fin de carrière (présence d’années sans salaire recensée dans les panels entre les 50 ans de l’individu et son dernier salaire reporté). 26 % ont d’ailleurs conjugué les deux effets : ils ont connu des interruptions d’activité salariée dans leurs dernières années d’activité et ils ne sont pas passés directement d’un emploi à la retraite. Les taux de remplacement sont légèrement plus élevés pour les retraités anciens salariés du privé ayant connu un passage direct de l’emploi salarié à la retraite (cf. tableau 3), 78 % contre 76 % pour les passages indirects (retraités à carrière complète). Pour ceux qui ont eu un passage direct de l’emploi salarié à la retraite et qui n’ont pas connu de temps partiel après 50 ans, le fait d’avoir eu une trajectoire salariale discontinue en fin de carrière est associé à des taux de remplacement voisins de ceux qui ont eu un parcours continu.

Tableau 2

Répartition des effectifs des retraités anciens salariés selon leurs trajectoires salariales de fin de carrière (en pourcentage)

Tableau 2
Toutes carrières Carrières complètes Secteur privé Secteur public Secteur privé Secteur public H F E H F E H F E H F E 1. Passage direct et emploi salarié continu -temps plein exclusivement 11 71038353611 8 10 37 35 36 2. Passage direct et emploi salarié continu -du temps partiel 7 9 8 34 31 32 7 9 8 36 34 35 3. Passage direct et emploi salarié non continu - temps plein exclusivement 9 6 8 10 6 8 9 6 8 10 7 9 4. Passage direct et emploi salarié non continu - du temps partiel 8 10 9 5 9 8 7 9 8 5 9 7 5. Passage indirect et emploi salarié continu - temps plein exclusivement 28 26 27 6 7 7 30 30 30 6 6 6 6. Passage indirect et emploi salarié continu - du temps partiel 12 14 13 2 4 3 12 15 13 1 3 2 7. Passage indirect et emploi salarié non continu - temps plein exclusivement 13 10 12 3 2 3 13 9 12 3 2 2 8. Passage indirect et emploi salarié non continu - du temps partiel 12 17 14 3 5 4 11 14 12 2 3 3 Ensemble 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 -Total passage direct d’un emploi salarié à la retraite (1+2+3+4) 35 32 34 86 82 83 34 32 33 88 85 87 -Total passage indirect d’un emploi salarié à la retraite (5+6+7+8) 65 68 66 14 18 17 66 68 67 12 15 13 -Total emploi salarié continu (1+2+5+6) 58 56 57 79 78 78 61 62 61 80 79 79 -Total emploi salarié discontinu (3+4+7+8) 42 44 43 21 22 22 39 38 39 20 21 21

Répartition des effectifs des retraités anciens salariés selon leurs trajectoires salariales de fin de carrière (en pourcentage)

CHAMP • Retraités de droit direct nés en 1942, en emploi salarié après 49 ans, ayant connu au moins une année à temps complet après 50 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, résidant en France.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.
Tableau 3

Taux de remplacement médians du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein des retraités anciens salariés, selon leurs trajectoires salariales en fin de carrière (en pourcentage)

Tableau 3
Toutes carrières Carrières complètes Secteur privé Secteur public Secteur privé Secteur public H F E H F E H F E H F E 1. Passage direct et emploi salarié continu -temps plein exclusivement 76 75 76 78 77 77 77 77 77 79 80 80 2. Passage direct et emploi salarié continu -du temps partiel 77 75 77 76 74 75 78 80 78 76 76 76 3. Passage direct et emploi salarié non continu - temps plein exclusivement 76 74 76 68 67 67 77 76 77 69 67 68 4. Passage direct et emploi salarié non continu - du temps partiel 78 69 75 74 74 74 81 76 79 78 76 76 5. Passage indirect et emploi salarié continu - temps plein exclusivement 75 74 75 79 72 74 76 75 76 80 74 76 6. Passage indirect et emploi salarié continu - du temps partiel 79 74 77 77 74 74 80 75 79 79 77 78 7. Passage indirect et emploi salarié non continu - temps plein exclusivement 73 68 71 63 70 68 75 74 75 66 74 71 8. Passage indirect et emploi salarié non continu - du temps partiel 76 67 72 70 73 72 80 74 78 73 79 79 Ensemble 76 72 75 76 75 75 78 76 77 77 77 77 -Total passage direct d’un emploi salarié à la retraite (1, 2, 3, 4) 77 74 76 76 75 76 78 77 78 77 77 77 -Total passage indirect d’un emploi salarié à la retraite (5, 6, 7, 8) 76 72 74 74 72 73 77 75 76 76 75 75 -Total emploi salarié continu (1, 2, 5, 6) 77 74 75 77 75 76 77 76 77 78 78 78 -Total emploi salarié discontinu (3, 4, 7, 8) 75 69 73 69 70 70 78 75 77 71 73 72

Taux de remplacement médians du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein des retraités anciens salariés, selon leurs trajectoires salariales en fin de carrière (en pourcentage)

CHAMP • Retraités de droit direct nés en 1942, en emploi salarié après 49 ans, ayant connu au moins une année à temps complet après 50 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, résidant en France.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

34Les anciens salariés du secteur public connaissent des trajectoires de fin de carrière nettement moins heurtées que les anciens salariés du privé. 87 % d’entre eux connaissent un passage direct entre l’emploi salarié et la retraite (88 % des hommes et 85 % des femmes). Seul le cinquième d’entre eux connaît une discontinuité de l’emploi salarié entre l’année des 50 ans et la dernière année d’activité salariée avant la retraite. Dans ce secteur, le fait d’avoir connu une interruption d’activité salariée en fin de carrière (parcours discontinu) va de pair avec un taux de remplacement inférieur. Les retraités en emploi salarié discontinu en fin de carrière, mais à temps plein, ont des taux de remplacement médians sensiblement inférieurs aux retraités en emploi salarié continu (68 % contre 80 % pour les retraités à carrière complète ayant connu un passage direct de l’emploi salarié continu et à temps plein vers la retraite).

35À tranche de salaire, sexe, carrière – complète ou non –, secteur égaux, un passage indirect de l’emploi salarié à la retraite est associé à une baisse du taux de remplacement estimée à 4 points, tandis qu’un parcours discontinu en fin de carrière est associé à une baisse de 5 points.

36Si l’on ne tenait pas compte du type de parcours dans l’analyse des taux de remplacement, l’écart en faveur du secteur public pour le taux de remplacement serait légèrement plus marqué. Les taux de remplacement du salaire à 50 ans font d’ailleurs apparaître un écart par secteur en faveur du public un peu plus prononcé que celui du salaire des cinq avant-dernières années avant liquidation, indicateur qui est privilégié dans l’étude.

37On constate également des écarts de taux de remplacement entre les hommes et les femmes, même si ces derniers appartiennent au même secteur d’activité (public ou privé) et ont des profils de fin de carrière similaires (parcours et niveau de salaire).

À salaire de fin de carrière équivalent, les taux de remplacement sont un peu inférieurs pour les femmes, surtout dans le secteur privé

38Le taux de remplacement des femmes anciennes salariées dépasse un peu celui des hommes (cf. tableau 1). Cela est dû au recours plus fréquent au temps partiel en fin de carrière, puisque l’inverse prévaut lorsque la pension de retraite est comparée au salaire relatif à des emplois à temps plein. Les écarts par genre sont toutefois peu flagrants sur le champ restreint des carrières complètes.

39À tranche de salaire équivalente en fin de carrière, les femmes disposent d’un taux de remplacement généralement moins élevé que les hommes, du fait d’un montant de pension globalement plus faible. Ce constat vaut particulièrement pour les tranches de salaire les plus faibles. Pour les salaires intermédiaires, les différences s’estompent fortement. Ce résultat s’observe même sur le champ restreint des carrières complètes et des salaires de fin de carrière relatifs à des emplois à temps plein (cf. tableau 4).

Tableau 4

Taux de remplacement médians du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein par la retraite, selon les tranches de salaire et le genre, pour les retraités à carrière complète (en pourcentage)

Tableau 4
Tranches de salaires (en euros) Hommes Femmes Ensemble Écarts hommes-femmes Privé Public Tous secteurs Privé Public Tous secteurs Privé Public Tous secteurs Privé Public Tous secteurs < 750 NS NS NS 119 NS NS NS NS NS ---< 1000 NS NS NS 90 90 90 97 NS 95 ---< 1250 95 NS 95 76 80 76 82 85 82 19,3 -18,8 < 1500 87 91 88 76 84 78 82 86 83 11,8 6,6 9,7 < 1750 83 85 84 77 78 77 80 80 80 6,9 7,1 7,0 < 2000 82 78 81 78 74 76 80 76 79 4,1 4,6 4,6 < 2250 80 72 78 77 68 75 79 71 77 3,0 4,2 3,2 < 2500 78 80 79 75 77 75 77 79 78 3,1 2,6 3,1 < 2750 75 76 75 72 83 77 74 80 76 2,2 -7,0 -2,6 < 3000 76 77 76 70 77 74 75 77 75 6,3 0,2 1,7 < 3250 71 76 72 71 74 72 71 75 72 0,6 1,8 0,3 < 3500 72 75 73 66 77 71 70 77 73 6,2 -1,3 1,7 < 3750 70 78 72 NS 76 72 70 76 72 -1,7 0,4 < 4000 66 75 69 NS 72 NS 65 73 67 -2,9 -> 4000 61 62 60 NS 53 NS 60 60 58 -9,6 -

Taux de remplacement médians du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein par la retraite, selon les tranches de salaire et le genre, pour les retraités à carrière complète (en pourcentage)

CHAMP • Retraités de droit direct nés en 1942, en emploi salarié à temps plein après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, ayant effectué une carrière complète, résidant en France.
NS • Non significatif : effectifs correspondants trop restreints pour être analysés.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

40Les écarts hommes/femmes à tranches de salaire égales sont plus marqués dans le secteur privé. Le montant de pension de droit direct versé par les complémentaires et les taux de remplacement correspondants sont plus élevés chez les hommes que chez les femmes, même sur le champ restreint aux seules carrières complètes. Cela peut s’expliquer par le fait qu’une partie des femmes retraitées ayant validé une carrière complète a atteint ce seuil grâce à l’obtention de trimestres assimilés, d’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) ou des majorations de durée, acquises sans contrepartie de cotisations et d’activité professionnelle. Au régime général, les mères ayant élevé des enfants bénéficient ainsi, par exemple, de huit trimestres supplémentaires par enfant élevé, mais ces majorations de durée n’ouvrent pas de droits dans les régimes complémentaires.

41Afin d’isoler l’effet « genre » des autres facteurs, on peut raisonner toutes choses égales par ailleurs. Ainsi, à caractéristiques principales équivalentes (tranches de salaire, parcours de fin de carrière, carrière – complète ou non –, secteur), le fait d’être une femme est associé à une baisse du taux de remplacement du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein estimée à 8 points (9 points si l’on considère toutes les quotités de travail). L’écart est ramené à 5 points si l’on tient compte de la durée validée totale au cours de la carrière.

42Tous ces résultats concernent les retraités anciens salariés nés en 1942 et ne sont pas généralisables aux autres générations. Les données nous permettent néanmoins d’étendre l’analyse aux individus nés avant 1942 (ayant plus de 66 ans en 2008) et d’apporter quelques éléments de comparaison intergénérationnelle.

Des taux de remplacement peu différenciés d’une génération à l’autre

43Sur le champ limité aux salaires de fin de carrière correspondant à du temps plein, les taux de remplacement médians des hommes retraités à carrière complète sont peu différenciés entre la génération 1934 et la génération 1942 (cf. encadré 2). Mais cette stabilité cache des mouvements différents selon le secteur d’activité. Le taux de remplacement médian des hommes anciens salariés du privé progresse légèrement entre les générations 1934 et 1942 (+ 1,5 point) alors que celui des anciens salariés du public baisse de près de 4 points. Ces évolutions s’observent à tous les niveaux de salaire (cf. graphique 5). Les différences sont nettement atténuées dans le public lorsque l’on tient compte de la composition par statut.

Encadré 2. Comparaisons intergénérationnelles : méthodologie et limites

Nous présentons ici quelques résultats sur les générations nées avant 1942 (plus de 66 ans en 2008) et qui sont donc parties intégralement en retraite. Pour chaque individu a été calculée une probabilité de survie de l’année des 66 ans à 2008. Cette probabilité vaut 1 pour la génération 1942, qui a 66 ans en 2008 [15]. Comme les femmes et les retraités les plus aisés bénéficient d’une plus grande longévité, comparer des générations à la même date (plutôt qu’au même âge) peut conduire à surestimer ou sous-estimer les écarts entre générations car la mortalité différentielle a pu affecter la structure de la population. Les taux de remplacement sont calculés pour les retraités ayant liquidé à 66 ans ou avant, pour pouvoir être comparés au mieux à la génération 1942 (on exclut les liquidations très tardives). Pour les générations plus récentes, en revanche, une partie substantielle des individus n’ont pas liquidé leurs droits à retraite en 2008, et le montant moyen de retraite perçu ne peut être comparé à celui des générations plus anciennes. En comparant les générations à âge équivalent (en se limitant aux retraités liquidant leurs droits à 60 ans ou avant, ou aux retraités liquidant à 62 ans ou avant…), un biais peut subsister car les personnes qui partent à la retraite à un âge donné ne sont pas nécessairement comparables d’une génération à l’autre et ne représentent pas la même proportion des retraités au fil des générations. Le biais est particulièrement important dans un contexte où les conditions de liquidation des pensions varient en fonction des générations, comme c’est le cas dans les périodes de montée en charge des réformes. Dans son étude sur les niveaux de pension par générations, Aubert (2011) montre qu’il est nécessaire de connaître l’ensemble des départs à la retraite pour une génération donnée, car les différences par générations peuvent fortement s’atténuer, voire s’inverser, avec l’avancée en âge, à mesure que les liquidations tardives interviennent : les différences observées à 60 ans, sur une partie de la population, ne sont ainsi pas les mêmes qu’à 65 ans, lorsque la quasi-totalité des pensions ont été liquidées.
Les résultats sur les générations les plus anciennes sont à interpréter avec précaution. En effet, les panels DADS et État de l’INSEE se sont enrichis au fur et à mesure des exercices. Les individus nés en 1930 ont eu 60 ans en 1990. Or, dans les panels, les années avant 1990 sont moins bien renseignées que les années récentes. Pour les personnes nées avant 1942, un problème d’exhaustivité des données se pose, en particulier pour les générations 1930 et 1932. Seuls les résultats sur les générations 1934, 1936, 1938 et 1940 sont ici présentés.

Graphique 5

Graphique 5

Graphique 5

Distribution des taux de remplacement du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein par la retraite de droit direct, selon la génération, pour les retraités à carrière complète
CHAMP • Retraités de droit direct, en emploi salarié à temps plein après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, résidant en France.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

44Chez les femmes, le taux de remplacement médian des anciennes salariées du privé est plus élevé pour la génération 1942 que pour la génération 1934 (+ 2,2 points). L’inverse prévaut dans le secteur public, mais l’écart est moindre que dans le cas des hommes (– 1,7 point).

45Ces évolutions intergénérationnelles se traduisent par un rapprochement des taux de remplacement médians des secteurs privé et public. Les écarts de taux de remplacement médians public/privé sont assez marqués pour la génération 1934 (près de 5 points pour les hommes et les femmes en faveur du public), ils le sont beaucoup moins pour la génération 1942 (1 point d’écart en faveur des femmes du public, 0,5 point d’écart en faveur des hommes du privé).

46Les écarts hommes/femmes tendent à se réduire également, les hommes nés en 1934 ont un taux de remplacement médian de 2,2 points supérieur à celui des femmes, l’écart n’est plus que de 1,2 point pour la génération née en 1942.

47L’analyse par génération ne retient ici que les carrières complètes. Or, la durée validée requise pour le taux plein varie d’une génération à l’autre : la réforme des retraites du régime général en 1993 a instauré une augmentation de cette durée, de 37,5 ans à 40 ans, à raison d’un trimestre par an à partir de la génération 1934 jusqu’à la génération 1943. Dans la fonction publique, en revanche, la durée était fixée à 37,5 ans avant 2004 [16].

48Au sein des retraités à carrière complète retenus dans le champ de l’étude, la durée validée moyenne s’élève à 152 trimestres pour les générations nées en 1934, elle augmente de deux trimestres de la génération 1934 à 1938 et de quatre trimestres de la génération 1938 à la génération 1942.

49Dans le secteur privé, les taux de remplacement médians sont plus élevés pour la génération 1942 que pour la génération 1934 dans toutes les tranches de salaire, sauf pour les retraités ayant perçu les salaires de fin de carrière les plus élevés (cf. tableau 5). Dans le public, le constat est moins net, en particulier pour les femmes. Dans ce secteur, la composition par statut (A, B ou C) s’est sensiblement modifiée et rend les évolutions de taux de remplacement moins lisibles.

Tableau 5

Taux de remplacement médians du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein par la retraite de droit direct, par tranches de salaire et selon la génération, pour les retraités à carrière complète (en pourcentage)

Tableau 5
Hommes anciens salariés du secteur privé Femmes anciennes salariées du secteur privé Tranches de salaire (en euros) 1934 1936 1938 1940 1942 Tranches de salaire (en euros) 1934 1936 1938 1940 1942 [500-1000[NS NS NS NS NS [500-1000[95 109 94 103 99 < 1500 89 87 86 87 89 < 1500 75 75 76 77 76 < 2000 80 81 79 83 83 < 2000 75 75 77 78 77 < 2500 76 78 76 77 79 < 2500 70 74 75 76 76 < 3000 71 72 72 76 75 < 3000 67 70 68 70 72 < 3500 69 72 68 73 71 < 3500 63 61 64 68 68 < 4000 69 70 70 69 69 < 4000 62 66 57 69 62 > 4000 62 63 61 62 61 > 4000 57 57 61 60 51 Hommes anciens salariés du secteur public Femmes anciennes salariées du secteur public Tranches de salaire (en euros) 1934 1936 1938 1940 1942 Tranches de salaire (en euros) 1934 1936 1938 1940 1942 [500-1000[NS NS NS NS NS [500-1000[106 98 109 115 100 < 1500 102 97 100 98 93 < 1500 89 89 84 84 83 < 2000 88 88 87 81 82 < 2000 76 79 75 74 76 < 2500 80 81 79 77 76 < 2500 77 77 75 69 73 < 3000 78 82 83 83 77 < 3000 80 81 80 79 80 < 3500 83 83 78 80 76 < 3500 75 76 77 75 76 < 4000 75 79 75 71 75 < 4000 67 77 75 75 75 > 4000 67 64 60 62 62 > 4000 NS NS NS NS NS

Taux de remplacement médians du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein par la retraite de droit direct, par tranches de salaire et selon la génération, pour les retraités à carrière complète (en pourcentage)

CHAMP • Retraités de droit direct ayant effectué une carrière complète, en emploi salarié à temps plein après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, résidant en France.
NS • Non significatif : effectifs < 2 % de la population étudiée.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

50À type de carrière, niveau de salaire, catégorie socioprofessionnelle, secteur, parcours de fin de carrière, sexe équivalents, les différences de taux de remplacement d’une génération à l’autre ne sont pas statistiquement significatives ou apparaissent de faible ampleur.

51Dans le secteur privé, la progression du taux de remplacement est tirée par les retraites complémentaires. Chez les hommes retraités du régime général à carrière complète, le taux de remplacement médian de la pension de base par le salaire de fin de carrière baisse légèrement au fil des générations, passant de 49 % pour les nés en 1934 à 47 % pour les nés en 1942 (cf. tableau 6). Dans le même temps, le taux de remplacement médian du salaire de fin de carrière par la pension complémentaire augmente de 27 % à 32 %. Le constat est le même chez les femmes, la retraite complémentaire comptant de plus en plus dans le taux de remplacement, mais à un niveau qui reste encore inférieur à celui des hommes. Le régime complémentaire du privé ARRCO a été créé au début des années 1960, les individus nés en 1934 ont donc pu commencer leur carrière sans valider des droits dans le régime complémentaire.

Tableau 6

Taux de remplacement du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein par la retraite de base et par la retraite complémentaire pour les retraités du régime général, retraités à carrière complète

Tableau 6
Premier quartile Médiane Dernier quartile 193419361938194019421934193619381940194219341936193819401942 Hommes - taux de remplacement de la pension entière 65 66 64 67 67 76 77 75 78 77 86 88 86 88 89 - taux de remplacement de la pension de base 35 35 33 33 32 49 49 47 47 47 58 58 57 57 56 - taux de remplacement de la pension complémentaire 20 22 21 24 24 27 29 28 31 32 36 39 39 40 41 Femmes - taux de remplacement de la pension entière 65 65 65 67 67 74 74 76 76 76 84 84 85 86 86 - taux de remplacement de la pension de base 45 46 44 43 43 52 53 52 52 52 59 60 59 58 58 - taux de remplacement de la pension complémentaire 15 15 16 17 18 20 21 22 24 24 29 29 31 32 32

Taux de remplacement du salaire moyen des avant-dernières années à temps plein par la retraite de base et par la retraite complémentaire pour les retraités du régime général, retraités à carrière complète

CHAMP • Retraités de droit direct, en emploi salarié à temps plein après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, résidant en France et ayant effectué une carrière complète.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

52Ainsi, la hausse du taux de remplacement médian du salaire de fin de carrière par la retraite, constatée au fil des générations chez les anciens salariés du privé, est essentiellement imputable à une montée en charge des pensions complémentaires. Ces résultats se vérifient également au niveau des premiers et derniers quartiles de distribution. La montée en charge des complémentaires ne jouera en revanche pas ou très peu pour les générations actuellement actives.

Conclusion

53Les taux de remplacement sont peu différenciés par génération. Ils ont eu tendance à augmenter légèrement dans le secteur privé entre les générations 1934 et 1942, car les durées validées pour la retraite ont progressé, en particulier pour les femmes, et la part des régimes complémentaires a été croissante. Ces deux phénomènes ont contrebalancé l’impact a priori négatif de la réforme de 1993 sur les taux de remplacement. L’effet de la réforme de 1993 n’a pas été isolé dans cette étude, mais Duc et Lermechin (2009) ont montré une diminution très nette de la pension au régime général [17], à carrière équivalente (le calcul ne tient compte que des changements du mode de calcul des pensions et pas des changements de comportements). En outre, la réforme de 1993 a davantage affecté les retraités à carrière incomplète, pour lesquels nous n’avons pas présenté de résultats par génération.

54Dans le secteur public, les taux de remplacement médians décroissent un peu, en raison notamment d’effets de composition (ce secteur regroupe des personnes plus qualifiées au fil des générations avec des salaires plus élevés en fin de carrière, ce qui pousse à la baisse les taux de remplacement). L’analyse porte dans cet article sur les générations qui ont au moins atteint l’âge de 66 ans en 2008 et sont quasiment intégralement parties à la retraite. Il n’est pas sûr que ces résultats demeurent pour les générations plus récentes, qui sont directement concernées par les réformes plus récentes des systèmes de retraite (2003, 2010). Au vu des données actuelles, il n’est pas encore possible de déterminer si ces réformes ont eu un impact sur les taux de remplacement des retraités.

55L’indicateur du taux de remplacement présente plusieurs limites et ne saurait constituer l’unique indicateur pour juger de l’équité du système de retraite. D’une part, il s’agit d’un indicateur instantané, qui reflète la situation à la date de liquidation de la pension, il ne tient pas compte de la durée de versement des avantages de retraite. Or les dates de départ à la retraite et l’espérance de vie ne sont pas uniformes selon le profil du retraité (sexe, génération…) : un même taux de remplacement peut concerner des personnes qui passent une durée courte ou longue à la retraite et qui ne reçoivent pas du système de retraite la même somme cumulée au cours du cycle de vie. En outre, la pension versée à la liquidation est revalorisée. Pour une même pension globale perçue tout au long de la période de retraite, plusieurs choix sont possibles : une pension élevée à la liquidation très peu revalorisée, voire gelée, ou une pension initiale plus faible mais fortement revalorisée tous les ans. Des taux de remplacement identiques peuvent en fait masquer des situations très différentes.

56D’autre part, le taux de remplacement ne tient pas compte des cotisations versées tout au long de la carrière et ne renseigne qu’imparfaitement sur l’effort contributif (c’est-à-dire les cotisations versées tout au long de la carrière en regard des pensions perçues). La contribution aux systèmes de retraite n’est pas la même selon les régimes, même si les dernières réformes ont eu pour but de rapprocher les règles de la contribution. Ainsi, un même taux de remplacement peut recouvrir des situations très différentes en matière d’effort contributif, ce que notre étude ne permet pas d’évaluer. Intégrer les données de cotisation dans l’analyse permettrait une approche plus complète de la redistribution et de la contribution aux systèmes de retraite.

57Malgré ces limites, le taux de remplacement reste un indicateur important pour le système de retraite : il est souvent évoqué dans le débat public, il permet de mesurer l’adéquation des montants de pensions de retraite aux derniers revenus d’activité. À son aune, il est possible de comparer simplement la situation des hommes et des femmes, des salariés du privé et du public.

Construction des taux de remplacement

58Un des enjeux de l’étude est d’abord de définir un taux de remplacement pertinent pour la plupart des anciens salariés, quelle que soit leur trajectoire de fin de carrière.

59L’analyse ne peut se limiter aux parcours des anciens salariés à temps complet qui n’ont connu ni interruption ni période transitoire entre la retraite et l’activité, car la restriction de champ alors imposée conduirait à des résultats peu généraux. Plusieurs indicateurs de taux de remplacement sont ici retenus, construits de façon à refléter au mieux la situation des retraités anciens salariés.

60Pour le calcul du taux de remplacement, seule la pension acquise au titre de l’activité professionnelle passée (on parle de droit direct ou droit propre) est retenue : les droits dérivés (réversion) ne sont pas inclus. La pension nette consiste en l’avantage principal de droit direct (tous régimes) net des cotisations mais augmenté, si l’assuré a eu trois enfants ou plus, du montant de la majoration pour enfant. La dimension « tous régimes » de l’EIR permet de capter la somme des pensions de droit direct du (des) régime(s) de retraite de base et du (des) régime(s) complémentaire(s).

Actualisation des salaires

61Plusieurs années peuvent s’écouler entre la dernière année d’activité et le départ à la retraite. Les salaires sont revalorisés par l’indice d’évolution des salaires nets moyens entre l’âge d’observation et l’âge de liquidation. Le salaire net moyen calculé à partir des DADS sur l’ensemble des salariés à temps complet – y compris stagiaires et apprentis – du secteur privé ou semi-public en France métropolitaine a été retenu pour l’actualisation [18]. Le choix de cet indice, plutôt que l’évolution des prix, a été opéré au vu de l’évolution des salaires relatifs individuels après 50 ans. La dynamique des salaires nets en fin de carrière pour les personnes restées en emploi à temps plein est globalement plus proche de celle des salaires moyens dans l’ensemble de l’économie que des prix. On peut certes supposer que les personnes qui restent salariées à temps plein ont de meilleures perspectives d’évolution salariale que ceux qui sortent de l’activité salariée ou ont recours au temps partiel mais, faute d’information, on privilégie l’indice qui retrace le mieux l’évolution des salaires des personnes salariées à temps plein.

Quels salaires de référence pour le calcul des taux de remplacement ?

62Le montant de pension peut être comparé :

  • au salaire perçu à l’âge de 50 ans (année 1992 pour la génération 1942), mais il ne reflète pas parfaitement la fin de carrière ;
  • à l’avant-dernier salaire perçu avant le départ en retraite, c’est-à-dire, ici, avant la première liquidation d’un droit direct dans un régime de base, en excluant les situations de cumul emploi-retraite. Le dernier salaire apparaît moins pertinent car il est affecté par des événements exceptionnels (primes de départ ou reports de salaire) ;
  • au salaire moyen des avant-dernières années renseignées avant la liquidation, dans la limite de cinq années. Si, parmi les cinq avant-dernières années avant liquidation, on trouve des années sans salaires reportés (à cause du chômage, par exemple), on retient les années antérieures ; et, si moins de cinq années de salaires sont mentionnées dans les panels après 50 ans (pour sortie précoce d’activité salariée, par exemple), la moyenne porte sur les seules années où les salaires sont disponibles. Cet indicateur de salaire moyen est également calculé pour les seules années à temps plein. Les retraités qui auraient occupé uniquement des emplois à temps partiel à partir de 50 ans ne sont pas dans le champ de cet indicateur. C’est le cas pour peu d’hommes de la population étudiée (3 % seulement) mais pour un nombre plus conséquent de femmes (18 %). Calculer un salaire moyen sur les dernières années renseignées (hors salaire de la dernière année) permet de lisser davantage la distribution des taux de remplacement, en éliminant la plupart des valeurs extrêmes (cf. graphiques ci-dessous).

Graphiques

Distributions des taux de remplacement selon l’indicateur de salaire retenu, pour les hommes retraités de droit direct, anciens salariés ayant effectué une carrière complète

a

a

a

Toutes quotités de travail
CHAMP • Hommes retraités de droit direct nés en 1942, ayant effectué une carrière complète, en emploi salarié après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, anciens salariés résidant en France.
LECTURE • En abscisse figurent les taux de remplacement du salaire par la retraite, répartis par tranches, en %. « < 75 » signifie que le taux de remplacement est supérieur à 70 % (inclus) et inférieur à 75 % (exclu).
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

b

b

b

Salaires relatifs à des emplois à temps plein uniquement
CHAMP • Hommes retraités de droit direct nés en 1942, ayant effectué une carrière complète, en emploi salarié à temps plein après 49 ans, dont le régime d’affiliation principal est le régime général, la fonction publique civile ou les régimes spéciaux, anciens salariés résidant en France.
SOURCES • EIR 2008 (DREES), panels INSEE.

Distributions des taux de remplacement selon l’indicateur de salaire retenu, pour les hommes retraités de droit direct, anciens salariés ayant effectué une carrière complète

63On ne retient pas les salaires avant l’âge de 50 ans car le cadre juridique de l’EIR ne nous autorise à disposer dans les panels de l’INSEE que des salaires de fin de carrière. En outre, nous avons privilégié la toute fin de carrière. La distribution du salaire moyen perçu de 50 ans à la fin de carrière est assez proche de celle du salaire moyen des cinq avant-dernières années.

Calculs des taux de remplacement

64Les taux de remplacement sont calculés ici de façon micro, c’est-à-dire qu’ils sont calculés pour chacun des individus.

65Les valeurs extrêmes des salaires peuvent modifier significativement les moyennes des taux de remplacement. L’analyse des taux de remplacement médians, indicateurs plus robustes, est privilégiée. Pour le calcul de taux de remplacement moyens, les faibles taux de remplacement sont bornés à 20 % minimum et les plus élevés à 150 % maximum.

Notes

  • [*]
    Virginie Andrieux, adjointe au chef du bureau Retraites de la DREES. Cécile Chantel, chargée d’études au bureau Retraites de la DREES.
  • [1]
    Faute d’informations, on ne tient pas compte de l’ensemble des ressources au cours de la période d’activité et au cours de la retraite.
  • [2]
    Enquête barométrique sur l’attitude et l’opinion des Français à l’égard de la santé, de la famille, de la protection sociale, de la solidarité, de la pauvreté et de l’exclusion, commandée annuellement par la DREES et réalisée par l’institut BVA auprès d’un échantillon représentatif de la population française (environ 4 000 personnes interrogées) (DREES, 2012).
  • [3]
    Une minorité des salariés du privé exercent une activité salariée sans interruption à temps complet de 50 ans à la fin de carrière (Andrieux et Chantel, 2011).
  • [4]
    Pour une description plus complète des panels de l’INSEE, voir Andrieux et Chantel (2011).
  • [5]
    Cela permet d’exclure les potentiels retraités qui auraient cotisé en fin de carrière en même temps dans deux régimes de retraite dont l’un serait un régime de non-salariés. Le taux de remplacement calculé ne serait alors pas pertinent puisqu’il manquerait une partie du revenu (revenu non salarié) pour comparer avec la pension.
  • [6]
    Le champ diffère de l’étude précitée (Andrieux et Chantel, 2011) car l’ensemble des salariés y était étudié, et pas seulement ceux qui sont retraités des régimes sélectionnés ici.
  • [7]
    La précédente publication de la DREES sur les taux de remplacement (Coeffic, 2004) portait sur un champ plus restreint : retraités à carrière complète avec au moins un emploi à plein temps occupé pendant une année entière depuis l’année des 55 ans.
  • [8]
    Des simulations sur cas types, pour la génération 1948, réalisées par le modèle OSIRIS de la Direction de la sécurité sociale pour le COR (séance du 13 mai 2009), montraient que, même pour des salariés à carrière salariale plate (salaire évoluant comme le plafond de la sécurité sociale), le taux de remplacement décroît en fonction du niveau de salaire.
  • [9]
    La DGAFP a publié pour le COR (séance du 13 mai 2009) une note montrant que le taux de prime est fonction croissante de l’indice de traitement chez les fonctionnaires d’État, excepté pour les enseignants.
  • [10]
    Le minimum contributif ou garanti vise à fournir un minimum de pension aux assurés qui ont cotisé pour leur retraite sur la base de salaires modestes. Il est servi entier si la durée d’assurance est suffisante, sinon il est proratisé. Son attribution est conditionnée à l’obtention du taux plein (par l’âge, la durée d’assurance, la situation) au régime général et dans les régimes alignés.
  • [11]
    Les écarts de taux de remplacement entre catégories de retraités (secteur, genre, parcours) peuvent être analysés tels quels (comparaison des taux de remplacement médians), mais cette méthode ne tient pas compte des effets de composition par rapport aux salaires de fin de carrière. En effet, les catégories de retraités comparées via le taux de remplacement peuvent avoir des compositions très différentes : un groupe ayant en moyenne des salaires de fin de carrière plus élevés qu’un autre groupe sera plus enclin à avoir un taux de remplacement médian faible, cela pouvant « cacher » les impacts sur cet indicateur des autres caractéristiques du groupe. Il est alors important de raisonner à salaire de fin de carrière équivalent.
  • [12]
    Écart calculé en moyenne (en bornant les valeurs extrêmes) et à partir du salaire moyen des avantdernières années avant liquidation – toutes quotités de travail.
  • [13]
    Ou ayant eu de trop faibles rémunérations dans le secteur privé pour valider un trimestre de retraite (règle des 200 heures SMIC).
  • [14]
    Avant la mise en place du régime additionnel de la fonction publique (RAFP) au 1er janvier 2005.
  • [15]
    Ces calculs d’espérance de vie et de probabilité de survie ont été réalisés grâce aux données de l’EIR 2008. Les probabilités de survie tiennent compte de la génération, du sexe, du type de régime d’affiliation principal, du type de prestation versée (pension d’invalidité ou pension normale) et du niveau de pension.
  • [16]
    Cette durée est passée de 37,5 années en 2003 à 40 années en 2008 avec la réforme de 2003.
  • [17]
    Moins 36 % sur le cycle de vie dont 60 % sont imputables à la modification du calcul du salaire annuel moyen et à l’allongement de la durée requise entre 1993 et 2008.
  • [18]
    Malgré une logique différente de fixation des salaires dans le secteur public, on retient le même indice d’évaluation.
Français

Assurer un niveau de vie suffisant aux retraités est l’un des objectifs du système de retraite, traditionnellement mesuré par le taux de remplacement de la retraite par le dernier salaire. Cet indicateur est pertinent pour les personnes dont le parcours de fin de carrière n’est pas heurté. Mais, dès lors que des périodes de chômage, d’inactivité ou d’emploi à temps partiel apparaissent en fin de carrière, son interprétation est plus délicate. L’objectif de l’étude est de construire un indicateur de taux de remplacement qui reflète au mieux la situation des retraités anciens salariés. L’analyse, fondée sur les résultats de l’échantillon interrégimes de retraités (EIR) de 2008, porte essentiellement sur les retraités anciens salariés nés en 1942. Les taux de remplacement diminuent fortement en fonction du salaire pour les rémunérations les plus faibles et se stabilisent dans la zone intermédiaire des rémunérations. À salaire comparable, les femmes ont des taux de remplacement un peu inférieurs. Les taux de remplacement apparaissent voisins dans le secteur privé et le secteur public. Ces résultats valent pour toutes les générations nées en 1942 et auparavant, avec des écarts entre générations peu marqués.

Références bibliographiques

  • Andrieux V., Chantel C. (2011), Description des salaires et des parcours de 50 ans à la fin de carrière, document de travail n° 5 de la séance du Conseil d’orientation des retraites du 23 novembre 2011, « Niveau des pensions et taux de remplacement ».
  • Andrieux V., Chantel C. (2012), « Les taux de remplacement du salaire par la retraite pour la génération 1942 », Dossiers Solidarité et santé, n° 33, DREES, p. 49-81.
  • Aubert P. (2011), « Les écarts de niveaux de pension de retraite entre générations », Document de travail, série Études et Recherche, n° 107, DREES.
  • Coeffic N. (2004), « Le taux de remplacement du salaire par la retraite pour les salariés de la génération 1934 ayant effectué une carrière complète », Études et Résultats, n° 312, DREES.
  • En ligneColin C., Legros F., Mahieu R. (1999), « Le rendement des régimes de retraite : une comparaison entre fonction publique d’État et secteur privé », Économie et Statistique, n° 328, INSEE.
  • Conseil d’orientation des retraites (2011a), réunion plénière du 4 septembre 2011, fiche n° 4, « Taux de remplacement dans les fonctions publiques et les régimes spéciaux ».
  • Conseil d’orientation des retraites (2011b), réunion plénière du 18 novembre 2011, document n° 6, « Évolutions comparées des niveaux de vie des actifs et des retraités de 1996 à 2009 (niveau de vie moyen et pauvreté) ».
  • Direction générale de l’administration et de la fonction publique (2009), Taux de prime et indice de fin de carrière dans la fonction publique de l’État, document de travail n° 10 de la séance du COR du 13 mai 2009, « Solidarité et contributivité dans les systèmes de retraite français et étrangers ».
  • DREES (2012), Les retraités et les retraites en 2010, coll. « Études et Statistiques ».
  • Direction de la sécurité sociale (2009), « Analyse de cas types illustrant les règles de calcul des pensions dans le secteur privé », document de travail n° 12 de la séance du COR du 13 mai 2009, « Solidarité et contributivité dans les systèmes de retraite français et étrangers ».
  • Duc C., Lermechin H. (2009), « L’impact des réformes de 1993 et 2003 sur le montant des pensions de retraite : une analyse sur le cycle de vie », congrès de l’AFSE.
  • Joubert P., Vanriet J. (2008), « Problématique des taux de remplacement », Étude de la CNAV, n° 2008-040, DSP.
  • Raynaud E. (2004), « Les retraites de la générations 1948, une illustration par quelques cas types », Études et Résultats, n° 331, DREES.
Virginie Andrieux [*]
Adjointe au chef du bureau Retraites de la DREES.
  • [*]
    Virginie Andrieux, adjointe au chef du bureau Retraites de la DREES. Cécile Chantel, chargée d’études au bureau Retraites de la DREES.
Cécile Chantel
Chargée d’études au bureau Retraites de la DREES.
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 13/03/2013
https://doi.org/10.3917/rfas.124.0160
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