CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1La catastrophe sanitaire de l’amiante et plus récemment la prise de conscience du nombre de suicides liés à des expositions professionnelles ont révélé au public combien la préservation des conditions de travail constituait un enjeu majeur de santé publique. Les discussions engagées depuis 2003 autour de la prise en compte de la pénibilité du travail et les plans santé au travail, notamment, attestent de l’intérêt porté par les pouvoirs publics vis-à-vis des liens entre l’état de santé et l’activité professionnelle. Ce débat renvoie aussi à la nécessité de tenir compte d’inégalités sociales de santé qui tendent à s’accroître (Cambois, Laborde, Robine, 2008). Ainsi à 50 ans, en 2003, l’espérance de vie des hommes cadres atteint 32 ans contre 27 ans pour les ouvriers. En prenant en compte l’espérance de vie en bonne santé perçue, les inégalités sociales de santé sont encore plus marquées (respectivement 23 années pour les hommes cadres versus 14 années pour les hommes ouvriers) (Cambois, Barnay et Robine, 2010).

2La question de la santé au travail relève de problématiques plus larges qui dépassent le simple cadre de l’entreprise ou de la relation de l’individu à son milieu professionnel. En se limitant aux coûts tangibles (sans considérer la souffrance et la perte d’utilité liées à la dégradation de l’état de santé), on peut recenser les problématiques suivantes :

3D’une part, la dégradation de l’état de santé contribue à modifier les préférences pour le loisir et à affecter la capacité de travail des individus. Au niveau macroéconomique, cette dégradation de l’état de santé affecte l’offre de travail et peut limiter l’efficacité des politiques de relance de l’emploi des seniors. En outre, dans un système de retraite par répartition, le rapport entre les cotisants et les retraités, déjà fortement dégradé par l’accélération du vieillissement démographique et les conséquences de la récession économique, peut diminuer sous l’effet d’un retrait précoce du marché du travail de salariés souffrant de problèmes de santé invalidants. D’autre part, les conditions de travail peuvent affecter l’état de santé et générer à la fois des coûts pour l’entreprise (coûts indirects liés à l’absentéisme) et une augmentation de la consommation de soins et du nombre d’indemnités journalières pour maladie.

4Ainsi, l’altération de l’état de santé peut conduire à dégrader les comptes des branches vieillesse, maladie et AT-MP de la Sécurité sociale ainsi que ceux de l’assurance chômage. Les coûts générés (arrêts de travail, soins, pensions, indemnités chômage…) reposent alors en large partie sur une prise en charge collective. Les modalités de cette prise en charge (assiette et montant des cotisations, conditions d’éligibilité et montant des prestations) conditionnent le partage du financement entre les différents contributeurs (cotisations sociales employeurs/employés, contribution sociale généralisée) et le restant dû (restes à charge des dépenses de santé par exemple).

5S’il semble nécessaire et pertinent que des économistes s’attellent à étudier les liens entre état de santé et activité professionnelle, cet objet de recherche reste encore sous-étudié en France. Deux axes semblent avoir été privilégiés : l’étude de l’impact de l’état de santé sur la situation professionnelle et l’étude de l’impact des conditions de travail sur la santé des travailleurs. Les deux parties de cet article [1] présenteront pour chacun de ces axes les enseignements de la littérature économique sur données françaises mais aussi les pistes de recherche dont les chercheurs pourraient se saisir.

L’effet de sélection de la santé sur le marché du travail

6L’état de santé apparaît comme un des déterminants majeurs de l’offre de travail des travailleurs (healthy worker effect) (Lindeboom, 2006) [2]. Une dégradation de l’état de santé peut augmenter la désutilité du travail, diminuer la productivité du travail, voire conduire à une interruption (temporaire ou permanente) de l’activité professionnelle. En fin de carrière, malgré les incitations financières à retarder la date de sortie du marché du travail (phénomène amplifié par le recul de 60 à 62 ans de l’âge légal de la retraite), les actifs occupés peuvent être contraints d’anticiper leur cessation d’activité en raison de leur état de santé. Les travaux économiques explorent ainsi le lien entre état de santé et emploi pour l’ensemble de la population en âge de travailler ou pour la population des 50 ans et plus, d’autres analysent le rôle de l’état de santé dans la détermination de l’âge de cessation d’activité.

Le lien entre état de santé et probabilité d’être en emploi

7Plusieurs études tentent d’appréhender les liens entre état de santé et situation vis-à-vis de l’emploi. Elles se heurtent principalement à deux difficultés : Quelle mesure de l’état de santé retenir ? Comment passer des liens statistiques observés à des conclusions sur le rapport de cause à effet de l’état de santé sur le travail ?

8Pour mesurer l’état de santé, les seules bases de données comprenant des informations sur l’offre de travail et la santé sont des enquêtes déclaratives auprès des ménages. Ces enquêtes sont caractérisées par de potentiels biais de déclaration (mesures subjectives de l’état de santé) (Bound, 1999) mais aussi de mesure, le caractère multidimensionnel de la santé ne pouvant pas être appréhendé à partir d’une seule mesure. Par ailleurs, certaines personnes pourraient expliquer a posteriori une perte d’emploi par un problème de santé plutôt que par un licenciement ou une forte préférence pour le loisir (biais de justification). Par conséquent, l’autodéclaration de l’état de santé dépend potentiellement de la position de l’enquêté sur le marché du travail. Ces difficultés suggèrent d’utiliser plusieurs outils de mesure de la santé (tels que les limitations d’activité, la santé perçue ou la prévalence de maladies chroniques) et de tenter de corriger les biais de justification mentionnés [3].

9Outre ces biais de mesure plus ou moins bien pris en compte, dans les études sur données françaises, peu d’études ont tenté de passer du constat de corrélations entre santé et offre de travail à la détermination du lien de cause à effet entre ces deux phénomènes. Cela est lié pour une part à l’absence de données longitudinales. Il peut y avoir corrélation statistique sans causalité pour plusieurs raisons. Une première difficulté est évidemment liée au fait que les conditions de travail elles-mêmes affectent à la fois l’offre de travail et la santé et peuvent donc aussi générer une corrélation apparente sans causalité réelle. Les économistes corrigent ces corrélations artificielles en utilisant trois méthodes principales : les quasi-expériences naturelles (effet d’un choc de santé imprévisible sur l’offre de travail), les données de panel (observation du même individu dans le temps) qui permettent de contrôler les spécificités individuelles (traits de personnalité par exemple) non directement observables, et une modélisation tenant compte de l’effet simultané de la santé sur l’offre de travail et des conditions de travail sur la santé. Ensuite, ces études, qui portent uniquement sur les déterminants de l’offre de travail, ignorent bien souvent les contraintes de la demande liées à la conjoncture économique (ralentissement économique dans certains secteurs), mais aussi aux attitudes discriminatoires de certaines entreprises à l’égard des salariés âgés, en raison du surcoût salarial, ou les changements technologiques qui évincent les seniors les moins qualifiés (Aubert, Caroli et Roger, 2006). Cela étant précisé, plusieurs enseignements peuvent être néanmoins tirés des études économiques.

10Tessier et Wolff (2005) ont par exemple réalisé une étude sur la population âgée de 25 à 55 ans à partir des données de l’enquête Emploi du temps 1999. Ils choisissent de limiter leur analyse aux personnes de moins de 55 ans pour éviter les biais institutionnels liés aux dispositifs de préretraite proposés à partir de cet âge. Ils montrent à partir d’un modèle d’équations simultanées que l’impact causal négatif d’une dégradation de la santé sur la probabilité d’être en emploi est observé dès le début de l’activité professionnelle. Jusot et al. (2006) ont mené à partir de l’enquête Santé et protection sociale de l’IRDES une analyse de causalité en mesurant, à quatre années d’intervalles, l’impact de la santé sur les sorties définitives de l’emploi (chômage et inactivité) pour une population âgée de 30 à 54 ans. Ils montrent que les personnes qui se déclarent en mauvaise santé ont un risque de sortie de l’emploi deux fois plus élevé que celles se déclarant en bonne santé.

11C’est cependant la population des plus de 50 ans qui fait l’objet de toutes les attentions. Cet engouement s’explique en partie par la montée en charge de la population du baby-boom et de la problématique de l’emploi des seniors. Chaque année en France, depuis 2006, environ 800 000 personnes atteignent l’âge de 60 ans (contre 500 000 précédemment). L’équilibre comptable des systèmes de retraite par répartition est ainsi mis à mal obligeant la plupart des pays à opérer des réformes paramétriques de leur système par l’augmentation de la durée de cotisation requise (France), le recul de l’âge de liquidation des droits à la retraite (France, Allemagne, Royaume-Uni) ou en introduisant des mécanismes actuariels (Suède et Italie). L’altération prématurée de l’état de santé et l’accès aux dispositifs de préretraites dédiées, de pensions d’invalidité ou encore d’arrêts maladie limitent la portée des mesures d’augmentation de la durée d’assurance et de recul de l’âge de la retraite sur l’équilibre des comptes de l’assurance vieillesse. Il est difficile de mesurer clairement ce qui relève de la santé et ce qui relève des dispositifs spécifiques de préretraite ou d’invalidité. Plusieurs études européennes soulignent que les écarts résiduels de taux d’emploi relèvent de fortes spécificités institutionnelles. Par exemple, Börsch-Supan (2007) montre que les disparités de recours aux dispositifs d’invalidité ne sont pas le fait de différences d’état de santé au niveau agrégé mais de différences de générosité des systèmes d’assurance dédiés. Barnay (2010) utilise l’enquête décennale sur la santé 2002-2003 pour décrire les dispositifs dont bénéficient les personnes en mauvaise santé après 50 ans pour cesser prématurément leur activité professionnelle. Ces personnes se portent sur des dispositifs dédiés à la reconnaissance d’un état de santé dégradé mais aussi, selon les critères d’éligibilité, sur d’autres dispositifs. S’appuyant sur plusieurs mesures de l’état de santé, ces résultats confirment un lien statistique entre limitations physiques et probabilité de travailler après 50 ans et montrent que la population masculine de plus de 55 ans au chômage mais ne recherchant pas d’emploi est significativement en plus mauvaise santé. Cela pourrait signifier que le dispositif de dispenses de recherche d’emploi (supprimé en 2008 en France) a été utilisé par des personnes en mauvaise santé pour sortir précocement du marché du travail.

12Derriennic et al. (2003) étudient le rôle de la santé et des conditions de travail sur l’emploi à partir des enquêtes de panel ESTEV de 1990 et 1995. La santé est approchée par des indicateurs de santé perçue et par différents examens lors de la visite médicale. La pénibilité physique, les horaires décalés, le travail répétitif sous contrainte de temps, le job strain (évalué par le modèle de Karasek [4]), le libre choix de sa profession et la latitude offerte pour faire un travail de bonne qualité constituent les différentes dimensions des conditions de travail prises en compte. De mauvaises conditions de travail (surtout chez les hommes) ou un état de santé dégradé en 1990 ont une influence négative sur la probabilité d’être en emploi en 1995. De même, la santé perçue est le facteur qui a la plus grande influence sur le risque de sortie d’emploi pour les hommes (risque deux fois plus élevé que lorsque la santé perçue est bonne).

13D’autres études portent sur les maladies les plus incapacitantes sur le marché du travail. Barnay et Debrand (2006), à partir des données européennes SHARE [5], montrent que, après contrôle de la limitation d’activité et de l’indice de masse corporelle, les maladies dont l’impact est le plus fort sur la probabilité d’emploi sont, pour les hommes, la fracture de la hanche, les accidents vasculaires cérébraux et le cancer, et, pour les femmes, les accidents vasculaires cérébraux, les maladies cardiaques et le diabète.

État de santé et âge de cessation d’activité

14Longtemps, les déterminants non monétaires du choix de départ à la retraite ont été occultés par des analyses financières stricto sensu visant à établir l’impact des modifications de barèmes de calcul des pensions (décotes liées à l’âge et taux de remplacement) sur l’âge de départ à la retraite. L’évaluation des dernières réformes de l’assurance vieillesse semble néanmoins réhabiliter une approche multicritère intégrant d’autres facteurs tels que l’état de santé ou la satisfaction au travail. Seules 50 % à 66 % des personnes concernées par l’accroissement de la durée de cotisation lié aux réformes de 1993 et de 2003 ont choisi de reporter leur départ au-delà de 60 ans (Bozio, 2006). L’inertie partielle des comportements de cessation d’activité s’explique par de fortes incitations à des départs anticipés (ou d’adhésion massive à des dispositifs spécifiques types « carrières longues »), une probable myopie des individus et une demande de travail fragile pour les plus de 50 ans. Cependant, l’état de santé (et aussi la satisfaction au travail [6]) apparaît comme un des déterminants les plus importants de l’âge réel de cessation d’activité. Plusieurs études ont mis en évidence ces causalités. Blanchet et Debrand (2007) montrent sur données européennes que pour les plus de 50 ans les variables non financières (en particulier de santé) ont un poids plus fort sur les comportements de cessation d’activité que les variables financières.

15Barnay (2005) recherche également les déterminants de l’âge de cessation d’activité, mais à partir de l’enquête complémentaire à l’enquête Emploi consacrée au passage à la retraite et aux conditions de vie des personnes âgées de 50 ans et plus. Par rapport aux personnes déclarant avoir cessé leur activité parce qu’elles avaient atteint l’âge de la retraite, le motif de santé lié à une longue maladie apparaît significativement associé à une cessation d’activité survenant cinq ans plus tôt, toutes choses égales par ailleurs. Les ouvriers qualifiés de type industriel et de la manutention, du magasinage et du transport anticipent même leur retrait d’activité de sept années lorsqu’il est causé par un problème de santé. L’étude de populations spécifiques permet de cibler les populations les plus exposées. Ainsi, Barnay et Briard (2009) cherchent à comprendre les comportements de départ en retraite des assurés du régime général nés en 1940 qui ont liquidé leurs droits sans justifier de la durée d’assurance requise (carrières incomplètes). Ils montrent que le départ en retraite précoce, à taux réduit ou au titre de l’inaptitude et de l’invalidité, est lié à une dégradation de la santé et qu’il existe des effets cumulatifs et des interactions avec la situation vécue sur le marché du travail (carrière professionnelle courte et problèmes de santé plus récurrents), en particulier en fin de vie active. Les mères de famille aux revenus modestes sont ainsi relativement plus nombreuses à être éligibles à des pensions d’inaptitude ou d’invalidité au moment de partir en retraite.

L’impact des conditions de travail sur la santé

16Le lien de causalité entre conditions de travail et état de santé a été établi pour un grand nombre de pathologies dans la littérature épidémiologique. Par ailleurs, dans les données de l’enquête sur l’emploi des personnes handicapées complémentaire à l’enquête Emploi, les déclarations des salariés suggèrent un impact des conditions de travail sur la santé. En 2002, 36 % des personnes âgées de 50 à 59 ans, en emploi et déclarant souffrir d’une affection limitant leur capacité de travail, déclaraient que leur problème de santé était dû à leur environnement professionnel. Ce lien de causalité déclaré doit cependant être interprété avec précaution sachant qu’il s’agit d’un lien ressenti par le salarié et non issu d’un constat médical ou d’une analyse épidémiologique (Coutrot et Waltisperger, 2005).

17L’analyse économique des impacts des conditions de travail sur la santé constitue une littérature encore relativement peu abondante, au regard du nombre d’études publiées en épidémiologie, sociologie ou psychologie par exemple. Rappelons que l’apport principal de l’approche économique consiste à partir d’un modèle théorique cohérent pour mesurer la causalité entre ces deux phénomènes.

18Les travaux d’économie appliquée peuvent être classés en deux catégories, selon les objectifs et la méthodologie employée. Un premier ensemble de travaux mobilise les outils économétriques traditionnels. Une seconde approche se fonde sur les données épidémiologiques de fractions attribuables pour estimer la part des cas et des coûts de la maladie imputables à une exposition professionnelle. De façon générale, ces évaluations économiques sont d’autant plus utiles que le système statistique de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) mesurant le nombre de cas d’accidents du travail et de maladies professionnelles déclarés et reconnus conduit à une forte sous-estimation du phénomène.

Sous-déclaration, sous-reconnaissance dans le système AT-MP et responsabilité des employeurs

19L’examen de la branche AT-MP traduit une explosion du nombre de maladies professionnelles (44 000 en 2007 contre moins de 10 000 en 1995), cependant ce chiffre est sous-évalué au regard de l’ensemble des atteintes professionnelles. La fréquence des accidents du travail ne diminue plus, contrairement à ce qui était constaté entre 1960 et 1990. De nombreux travaux en sociologie du travail et quelques-uns en économie montrent l’évolution concomitante des conditions de travail caractérisée par de nouvelles formes d’intensification du travail depuis les années 1990 (Gollac et Volkoff, 1996, 2006 ; Askenazy, 2005 ; Volkoff, 2008). Loin d’avoir disparu, ces contraintes se cumulent désormais avec de nouvelles formes d’exposition de nature psychosociale.

20En France, depuis la loi sur les accidents du travail de 1898 et la loi de 1919 sur les maladies professionnelles, l’indemnisation des victimes permet une visibilité partielle des atteintes à la santé liées au travail. Cependant, elle permet de rendre visibles uniquement les accidents déclarés et les maladies professionnelles reconnues par le système AT-MP, les cas n’ayant pas fait l’objet d’une demande ou dont la demande a été rejetée n’étant pas comptabilisés. La maladie professionnelle doit tout d’abord figurer dans l’un des tableaux des maladies professionnelles. La procédure de reconnaissance du caractère professionnel d’une maladie exige ensuite le strict respect de conditions d’éligibilité (durée d’exposition, délai de prise en charge…) [7]. L’actualisation de ces tableaux dépend du progrès des connaissances épidémiologiques et des négociations entre partenaires sociaux. Cette actualisation constitue ainsi un enjeu crucial pour la reconnaissance de nouvelles maladies. Cependant, cette mise à jour reste bien souvent très insuffisante et n’intervient que tardivement.

21Ces contraintes donnent lieu à un double phénomène de sous-déclaration et de sous-reconnaissance qui tend à réduire la part des coûts assumés par la branche AT-MP. Par exemple, le nombre de cas de cancers du poumon imputables à une exposition en milieu professionnel a été estimé par la méthode des fractions attribuables, classique en épidémiologie, entre 2 713 et 6 051 pour 1999 (Imbernon, 2003). Pour cette même année, seuls 458 cancers du poumon ont été reconnus et indemnisés par la branche AT-MP. Bien évidemment, la méthode des fractions attribuables utilisée par Imbernon ne représente elle aussi qu’une approximation de la réalité, puisqu’elle vise à estimer la part des cas qui aurait été évitée en l’absence de toute exposition aux facteurs de risque étudiés. Pour autant, la confrontation de ces deux nombres suggère la plausibilité de sous-déclarations. Sur la base d’études épidémiologiques internationales (Nurminen et Karjalainen, 2001 ; Rushton et al., 2008), le rapport Diricq (2008) estime qu’au minimum un cas de cancer professionnel sur deux, chez les hommes, n’aurait pas été reconnu en France en 2000, en restant dans le champ des substances cancérogènes reconnues par les tableaux de maladies professionnelles. Lorsqu’on retient la fourchette haute de ces études et un champ de cancérogènes plus large, le nombre incident de cancers professionnels chez les hommes en 2000 serait quatre fois plus élevé que le nombre de cancers professionnels reconnus. Malgré l’intégration des troubles musculo-squelettiques (TMS) dans les tableaux des maladies professionnelles, ce même rapport estime, sur la base des données fournies par le programme de surveillance des TMS de l’Institut de veille sanitaire (InVS), qu’à peine plus de la moitié des cas apparaissent effectivement dans les statistiques AT-MP. La disparité serait encore plus forte pour les cas d’asthme et de broncho-pneumopathies chroniques obstructives dans la mesure où seulement quelques centaines de cas sont reconnues par an alors que les études épidémiologiques estiment à plusieurs dizaines de milliers le nombre de cas imputables à une exposition professionnelle (Diricq, ibidem).

22La confrontation des données de l’enquête Conditions de travail aux statistiques de la branche AT-MP fait apparaître un écart de l’ordre de 25 % entre accidents reportés à l’enquête et accidents reconnus par l’assurance publique (Diricq, ibidem), concernant essentiellement les accidents sans arrêt de travail. À partir des données de cette même enquête, Askenazy (2006) confirme que la gravité de l’accident est associée à une meilleure déclaration. Si le type de contrat (CDD ou CDI) au moment de l’accident ne semble pas jouer de rôle dans la déclaration, en revanche, pour les salariés en CDI, le fait d’avoir connu dans l’année précédant l’enquête des périodes de CDD ou de chômage réduit la probabilité de déclarer l’accident. Une interprétation possible de ces résultats est que ces salariés, qui ont été embauchés récemment, sont en période d’essai et plus vulnérables au licenciement (Askenazy, 2006).

23De façon générale, la déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles est déterminée par le cadre administratif et juridique mis en place en France. Les facteurs de risque psychosociaux, qui ne figurent pas dans les tableaux des maladies professionnelles et qui sont pourtant des risques avérés pour les maladies cardio-vasculaires et la dépression, ne constituent qu’une partie de l’iceberg des maladies professionnelles non prises en charge par la branche AT-MP.

24Ainsi, qu’il s’agisse des maladies d’origine professionnelle ou des accidents du travail, une partie de leurs coûts est directement prise en charge par la branche maladie de la Sécurité sociale. Ces imputations inadéquates donnent d’ailleurs lieu chaque année à un transfert financier de compensation de la branche AT-MP vers la branche maladie en fonction d’un rapport qui, tous les trois ans, évalue le coût de la sous-déclaration (Diricq, 2008). En 2008, le coût annuel de la sous-déclaration a été estimé entre 564,7 millions d’euros et 1,02 milliard d’euros (Diricq, ibidem). Le transfert réel pour cette même année était seulement de 410 millions d’euros. Il a cependant été fixé à 710 millions d’euros par an pour 2009 et 2010 à la suite des conclusions du rapport Diricq.

25La prise en charge par la Sécurité sociale de ces coûts ne signifie pas que cette opération soit neutre financièrement pour les entreprises. En effet, le financement de la branche AT-MP est assuré à plus de 90 % par les cotisations patronales globales (les dépenses de l’AT-MP s’élevaient en 2009 à 11,7 milliards d’euros). En échange des compensations financières versées aux salariés, les employeurs sont assurés, en vertu du principe établi en France par la loi de 1898 sur les accidents du travail, de ne pas être poursuivis pour faute. Ce principe devrait inciter les entreprises à davantage investir dans la préservation des conditions de travail mais les incitations semblent insuffisantes (Bras, 2007). Notamment, les modalités de calcul du taux brut des cotisations (c’est-à-dire la part la plus individualisée du taux de cotisation) n’incitent pas à la prévention. Le degré d’individualisation du taux brut est croissant avec la taille de l’établissement (Cour des comptes, 2002). On observe une relation décroissante entre taille de l’établissement et fréquence des accidents du travail qui peut s’expliquer par la réduction et même la disparition d’aléa moral entre l’entreprise et l’assureur lorsque la taille de l’établissement augmente (Trontin et Béjean, 2004). Une plus grande individualisation des cotisations pourrait ainsi réduire l’aléa moral et inciter les employeurs à davantage d’efforts de prévention [8]. Bras préconise de mettre en place une tarification au niveau de l’entreprise et non plus de l’établissement afin d’accroître les incitations à la prévention des accidents avec arrêt. Cette nouvelle tarification serait basée sur une part individuelle accrue dont le calcul serait fondé sur un système de forfaits calibrés de manière à accroître les incitations à la prévention des accidents avec arrêt. La part mutualisée qui permet d’assurer l’équilibre du système verrait sa proportion se réduire. Le récent décret du 5 juillet 2010 a accru le poids de la tarification individuelle en abaissant le seuil de son application de 200 à 150 salariés, et retenu l’idée du forfait, en mettant en place un coût moyen par type d’accident dans le calcul du taux individuel.

26La sous-déclaration et la sous-reconnaissance créent par conséquent un phénomène d’invisibilité des cas (Gollac et Volkoff, 2006 ; Thébaud-Mony, 2006 ; Serrier et al., 2009), qui constitue un obstacle à la mesure précise des effets de l’exposition à un facteur de risque sur la santé des salariés à l’échelle nationale. Par conséquent, les données produites par la branche AT-MP sont peu opérantes comme outil d’aide à la décision pour l’orientation des politiques publiques en matière de santé au travail. Dans ce contexte, des évaluations économiques s’appuyant sur des données alternatives et focalisées sur les impacts des conditions de travail sur la santé et sur leurs coûts produisent des résultats empiriques particulièrement pertinents.

Les analyses économétriques des liens entre conditions de travail et santé

27L’objectif de ces études est de saisir l’influence des conditions de travail sur les indicateurs de santé (absentéisme ou consommations de soins), toutes choses égales par ailleurs.

L’impact des conditions de travail et d’emploi sur les accidents du travail

28À partir des données de l’enquête Emploi et de l’enquête Conditions de travail, Askenazy et al. (2002) montrent que l’utilisation de robots ou d’équipements numériquement contrôlés est corrélée à une probabilité plus forte d’occurrence d’accidents du travail, qui est par contre plus faible dans les cas d’utilisation d’un ordinateur. Les catégories professionnelles et les qualifications jouent un rôle déterminant sur le risque de survenue d’accidents du travail, les travailleurs les plus exposés étant les ouvriers qualifiés sans diplôme. Les nouvelles pratiques organisationnelles (l’usage de normes de qualité et la rotation des postes) sont corrélées à une probabilité accrue d’accident. Celle-ci est en effet plus forte de 29 % dans un contexte où des normes de qualité sont utilisées, et de 23 % lorsque la rotation des postes est mise en œuvre. Parallèlement, les auteurs montrent que ces nouvelles pratiques de travail sont associées à une plus forte pression qui s’exerce sur les travailleurs en termes de performances au travail et rendent les conditions de travail plus difficiles (Askenazy et al., 2002).

29Des liens avec les conditions d’emploi ont également été établis. La mesure de l’impact de la nature du contrat de travail (à durée déterminée ou indéterminée) sur l’occurrence des accidents du travail est susceptible d’être biaisée par trois phénomènes :

  • un effet de sélection, les travailleurs en CDD pouvant avoir une attitude différente vis-à-vis du risque par rapport aux travailleurs en CDI ;
  • un effet de structure, dans la mesure où les postes les plus dangereux peuvent être pourvus de façon plus fréquente par des contrats à durée déterminée ;
  • et un effet de sous-déclaration, car le fait d’être en situation précaire peut inciter les salariés à ne pas déclarer les accidents du travail (Askenazy, 2006).
Il n’existe aucune étude française permettant de séparer ces effets.

Liens entre conditions de travail, santé et absentéisme

30Afsa et Givord (2009) mettent en lumière, à partir de données de l’enquête Emploi, l’impact des horaires irréguliers sur l’absentéisme. Ils montrent que ce type d’horaires est lié à une augmentation de la probabilité de s’arrêter pour maladie. 20 % de l’absence pour maladie des ouvriers serait liée au fait de travailler avec des horaires irréguliers. Pour les ouvriers âgés de 40 à 49 ans, cette proportion est de 39 %, et de 30 % pour les ouvriers âgés de 50 à 59 ans.

31La question de la comparabilité et de la complémentarité de ces résultats avec ceux des nombreuses études épidémiologiques sur le lien entre conditions de travail et santé serait à explorer plus avant. Certains facteurs de risque, comme la sous-traitance, les formes d’emploi (type de contrat) ou les modes d’incitations (systèmes de rémunération), sont traditionnellement familiers aux économistes, ainsi qu’aux épidémiologistes qui développent des approches centrées sur la précarité de l’emploi et l’injustice au travail. Les approches se distinguent par les outils, les catégories statistiques étudiées et le choix des instruments de mesure de l’exposition et des effets sur la santé. À l’évidence, l’économie a un rôle à jouer dans la mesure des impacts des conditions de travail sur la santé.

La mesure des coûts des maladies imputables à des expositions professionnelles

32D’autres études économiques sur les liens entre conditions de travail et santé portent sur l’estimation du coût des pathologies imputables à des expositions professionnelles. La part imputable à un facteur de risque peut être estimée grâce à la méthode des fractions attribuables (Levin, 1953) à partir de données de risque relatif et de prévalence d’exposition, méthode plus fréquemment utilisée en épidémiologie. La fraction attribuable permet d’estimer quelle serait, en proportion, la réduction du nombre de cas dans la population si l’exposition pouvait être entièrement évitée. Il s’agit ensuite d’appliquer ces fractions au nombre de cas de pathologies ou au coût de ces pathologies. Cette méthode d’évaluation nécessite donc d’avoir recours aux études sur le coût de la maladie développées en économie de la santé. Les coûts directement imputables peuvent être médicaux (coûts de la prise en charge de la maladie par le système de soins). Mais l’intérêt principal des études sur le coût de la maladie réside dans leur tentative de mesurer toutes les conséquences de la maladie en termes monétaires. Une pathologie entraîne certes des coûts médicaux mais elle peut également avoir pour conséquence des arrêts de travail, des invalidités, voire des décès. Ces coûts dits indirects font référence aux pertes de production résultant de la maladie. La méthode d’estimation de ces coûts est au centre de débats dans la littérature en économie de la santé, notamment concernant le choix entre deux méthodes de valorisation, la méthode du capital humain et la méthode des coûts de friction (Sultan-Taïeb et al., 2009). En outre, un nombre croissant d’études insiste sur la nécessité de tenir compte du phénomène de présentéisme et de ses impacts économiques (Collins et al., 2005 ; Turpin et al., 2004 ; Pauly et al., 2008 ; Schultz et al., 2009). Un salarié peut en effet ne pas être en pleine possession de ses capacités intellectuelles et physiques à cause de la maladie tout en continuant à travailler. Il faut alors estimer la valeur de la baisse de productivité qui en résulte.

33En outre, la maladie entraîne également une perte de bien-être (peine, souffrance) ou encore une diminution de la qualité de vie pour la victime et son entourage. Ces coûts intangibles sont la conséquence de la maladie et devraient être pris en compte. Les méthodes de mesure de ces coûts intangibles, comme la disposition à payer [9], sont à la fois coûteuses à mettre en œuvre sur le terrain et comportent des biais dont il faut tenir compte dans l’analyse.

34L’étude de Béjean et Sultan-Taïeb (2005) sur les coûts imputables à l’exposition au stress professionnel (job strain au sens de Karasek) estime pour l’année 2000 en France un coût pour la collectivité compris entre 1,2 et 2 milliards d’euros (ce qui représente entre 14,4 à 24,2 % des dépenses de la branche AT-MP), soit entre 3 et 3,5 millions de journées de travail perdues, entre 310 000 et 400 000 cas de pathologie et entre 2 300 et 3 600 décès. Cette estimation intègre trois pathologies, les maladies cardio-vasculaires, les troubles de santé mentale et les TMS, et correspond sans doute à une fourchette basse du coût, notamment parce que les coûts intangibles ne sont pas pris en compte, faute de données disponibles.

35D’autres études mobilisent également les fractions attribuables pour mesurer le poids économique des facteurs de risque professionnels. C’est le cas de Leigh et al. (1997), qui ont évalué à 171 milliards de dollars les coûts directs (prise en charge médicale et indemnisation des salariés) et indirects (pertes de production) des atteintes à la santé (145 milliards pour les accidents du travail et 26 milliards pour les maladies professionnelles) liées à une exposition professionnelle aux États-Unis pour l’année 1992 (environ 3 % du PIB). Cette estimation laisse également de côté les coûts intangibles. Au total, ces expositions sont à l’origine de 6 500 décès liés à des accidents du travail, 60 300 décès liés à des maladies professionnelles et 862 000 cas de maladies professionnelles.

Conclusion

36Les études de corrélations entre santé et offre de travail, encore relativement peu nombreuses, permettent d’identifier le rôle déterminant de la santé dans le processus de cessation d’activité temporaire ou permanent, notamment pour certaines catégories : ouvriers dans le secteur industriel et salariés précaires aux carrières incomplètes par exemple.

37Par ailleurs, la connaissance des atteintes à la santé liées au travail ne peut se limiter aux statistiques des accidents du travail et des maladies professionnelles qui souffrent de biais de sous-déclaration et de sous-reconnaissance. Les travaux qui font le lien entre les formes d’organisation du travail et les atteintes à la santé viennent utilement compléter les travaux déjà nombreux en épidémiologie visant à déterminer dans la dégradation de l’état de santé la part imputable aux caractéristiques professionnelles. Les études économiques produisent en outre des évaluations des coûts liés aux conditions de travail nocives pour la santé, en adoptant la perspective du financeur (branches assurance maladie et AT-MP), de l’entreprise ou, de façon plus globale, de la société.

38Les enjeux des recherches à venir sont de taille car ces travaux pourraient contribuer à analyser plus finement les causalités entre pathologies (professionnelles et non professionnelles) et situations professionnelles tout au long du cycle de vie. Il s’agit d’inscrire les études dans une perspective dynamique afin de comprendre les épisodes de santé qui interviennent dès le début de la carrière professionnelle, d’analyser les comportements de sélection des métiers par des travailleurs en début de carrière ou d’identifier la nature des pathologies les plus invalidantes. Pour ce faire, la disponibilité de données appariées employeurs-employés sur l’ensemble du cycle de vie professionnel permettrait d’apprécier finement l’environnement de travail et de procéder à des typologies des milieux professionnels et des populations à risque.

39Une prévention au travail ciblée, par le biais de nouvelles formes d’organisation du travail préservant la santé des travailleurs, devrait apparaître comme une priorité des politiques de l’emploi et de la santé. L’évaluation économique de ces politiques de prévention pourrait jouer son rôle d’outil d’aide à la décision en sélectionnant les mesures jugées les plus efficientes en moyenne mais poursuivant aussi un objectif de réduction des inégalités sociales. Ces évaluations économiques constituent des arguments de nature à convaincre les décideurs publics et privés de l’intérêt de promouvoir ces mesures.

Notes

  • [*]
    Thomas Barnay : université Paris-Est - Créteil (UPEC) ; ERUDITE et Fédération de recherche du CNRS-TEPP (FR 3126).
    Damien Sauze et Hélène Sultan-Taïeb : université de Bourgogne, Laboratoire d’économie et gestion (UMR CNRS 5118).
  • [1]
    Les auteurs tiennent à remercier les deux rapporteurs anonymes, Bénédicte Galtier ainsi que Michel Grignon pour leur relecture attentive, ils restent seuls responsables des insuffisances de cet article.
  • [2]
    Pour les économistes, l’offre de travail est le fait des individus (qui, s’ils sont chômeurs, demandent donc un emploi) et la demande de travail est le fait des employeurs (qui offrent donc un emploi).
  • [3]
    Les économistes utilisent des procédures économétriques, donc de la modélisation, pour mener ce type de correction.
  • [4]
    Le modèle de Karasek est le modèle dominant de stress professionnel dans la littérature (notamment épidémiologique). Ce modèle définit le job strain comme la combinaison entre une forte demande psychologique au travail (quantité et complexité des tâches, contraintes temporelles) et une faible latitude décisionnelle (autonomie décisionnelle et utilisation des compétences).
  • [5]
    SHARE (Survey on Health, Ageing and Retirement in Europe) est une enquête longitudinale (les mêmes individus sont enquêtés plusieurs fois, la première vague ayant eu lieu en 2004) menée dans onze pays européens auprès de la population âgée de 50 ans et plus. Voir http://www.share-project.org/ pour une présentation détaillée.
  • [6]
    Voir, sur les données européennes, le numéro spécial de la revue Économie et Statistique, « Santé, vieillissement et retraite en Europe », n° 403-404, 2007/12.
  • [7]
    Plus marginalement, moins de 4 % des reconnaissances globales relèvent d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP).
  • [8]
    Askenazy (2004) propose une revue de littérature théorique et empirique sur ce sujet.
  • [9]
    La méthode de la disposition à payer (ou évaluation contingente) consiste à interroger un échantillon d’individus sur la somme qu’ils seraient prêts à payer pour conserver un état de santé de référence grâce à un programme de santé, afin de mesurer la valeur qu’ils attribuent à ce programme de santé. Il s’agit donc d’obtenir une révélation des préférences, basée sur les principes de l’économie du bien-être, en tenant compte de l’ensemble des effets de la maladie (coûts médicaux, indirects et intangibles).
Français

Résumé

Les liens entre état de santé et activité professionnelle constituent aujourd’hui une dimension incontournable de plusieurs champs de l’intervention publique (retraites, santé publique, emploi…). Qu’il s’agisse d’évaluer l’impact de la santé sur le maintien en emploi ou l’effet des conditions de travail sur la santé, les économistes développent aujourd’hui des travaux permettant de mieux saisir ces interactions et de participer à un meilleur éclairage des décisions publiques. Un état de santé dégradé apparaît clairement comme un frein à l’activité et un motif de départ précoce en retraite. Outre l’ensemble des mesures de santé publique visant à améliorer l’état de santé général de la population, ces études conduisent à s’interroger sur le rôle spécifique du milieu professionnel dans la préservation de la santé des salariés. Néanmoins, l’évaluation de la prévention en santé au travail comme la prise en compte des effets néfastes du travail sur la santé se heurtent à des phénomènes de sous-déclaration et de sous-reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles. Surmonter ces obstacles est un enjeu pour les analyses économiques.

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Thomas Barnay
Maître de conférences en sciences économiques à l’université Paris-Est - Créteil (UPEC), chercheur à l’ERUDITE et à la Fédération de recherche du CNRS-TEPP (FR 3126). Ses recherches portent sur les causalités entre les statuts d’occupation et l’état de santé et sur les conséquences du vieillissement démographique.
Damien Sauze
Maître de conférences en sciences économiques à l’université de Bourgogne, Laboratoire d’économie et gestion (UMR CNRS 5118). Ses recherches portent sur l’analyse économique de la santé au travail et les risques psycho-sociaux en Europe.
Hélène Sultan-Taïeb [*]
Maître de conférences en sciences économiques à l’université de Bourgogne, Laboratoire d’économie et gestion (UMR CNRS 5118). Ses recherches portent sur l’économie de la santé au travail : analyse des expositions professionnelles (risques psychosociaux au travail et cancérogènes), de leurs impacts économiques, de leurs déterminants et des politiques de prévention.
  • [*]
    Thomas Barnay : université Paris-Est - Créteil (UPEC) ; ERUDITE et Fédération de recherche du CNRS-TEPP (FR 3126).
    Damien Sauze et Hélène Sultan-Taïeb : université de Bourgogne, Laboratoire d’économie et gestion (UMR CNRS 5118).
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 09/02/2011
https://doi.org/10.3917/rfas.104.0007
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