Introduction
1 Le besoin de moderniser l’État, en y développant la gestion par la performance, se trouve au cœur de la réforme budgétaire engagée avec la loi organique de 2001 (LOLF). Celle-ci suppose la généralisation d’une démarche visant à expliciter les objectifs de l’action publique et à en évaluer les résultats. Comme il n’y a pas de performances sans indicateurs appropriés, la définition de ceux-ci a retenu l’attention.
2 L’enjeu est d’importance car l’utilisation d’indicateurs imparfaits dans des mécanismes d’intéressement salarial ou d’allocation des moyens budgétaires peut parfois entraîner des effets indésirables, risquant de délégitimer le processus de réforme engagé, s’ils conduisent à gratifier des agents ou services ayant su utiliser les failles de ces mécanismes, ou s’ils favorisent une dégradation de l’offre de services utiles socialement, mais mal pris en compte par les systèmes d’indicateurs.
3 Pour surmonter ces obstacles, les mécanismes de gestion pour la performance doivent être fondés sur une compréhension profonde des problèmes d’information et d’incitation auxquels est confrontée la gestion publique, et des conditions à réunir pour les alléger. Le propos de cet article [4] est de fournir des points de repère économiques permettant de compléter les approches juridiques, sociologiques et managériales qui prévalent habituellement dans la réflexion sur les différents niveaux d’évaluation de l’action publique. À cet égard, l’analyse économique permet d’expliciter les contraintes informationnelles à prendre en compte, un objectif explicite d’intérêt social étant fixé. Du point de vue conceptuel c’est donc la théorie de l’agence, développée depuis vingt-cinq ans, notamment sous l’impulsion de l’école toulousaine (autour de Jean-Jacques Laffont et Jean Tirole) qui doit servir de base à l’analyse.
Les enseignements de la théorie de l’agence
4 L’évaluation de toute intervention publique doit considérer trois niveaux de problèmes : la définition de ses objectifs, qui renvoie notamment à la comparaison des coûts et avantages de l’action envisagée ; le choix des instruments pour atteindre ceux-ci ; et, s’il est recouru à la gestion publique, la performance de celle-ci en tant qu’organisation.
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Dans le domaine social, relèvent ainsi :
- du premier, les choix de niveau de protection, ou encore de l’importance des redistributions visées pour certaines catégories ;
- du second, le choix entre la fourniture d’une assurance publique ou la régulation de marchés privés, ou encore la question du recours à des mécanismes de solidarité établissant des droits plutôt que de l’assistance ;
- enfin le troisième niveau concerne tout ce qu’il est convenu d’appeler la « réforme de l’État » : gestion des hôpitaux, placement des chômeurs, prestations, etc.
6 Selon la théorie de l’agence, toute organisation repose sur un réseau de relations de type principal-agent ou mandant-mandataire, le « principal » étant, dans le langage de la théorie économique, celui qui est responsable de la définition des missions et l’« agent » celui qui est responsable de leur réalisation. À cet égard, la gestion publique se distingue de la gestion privée par les objectifs plus complexes de l’action publique et par la multiplicité des mandants. L’évaluation de la performance publique doit prendre ce contexte en compte.
Objectifs de l’action publique et multiplicité des tâches
Des objectifs multidimensionnels…
7 La notion de mission a été définie par Wilson (1989), dans son étude de la bureaucratie, comme une culture partagée par l’ensemble des membres d’une organisation. Cette notion vague a de nombreuses implications sur le fonctionnement du secteur public. Les objectifs de l’action publique sont en effet complexes, multidimensionnels et parfois flous, notamment quant aux pondérations des différents critères. Quelques exemples en donnent une illustration.
8 Une éducation de qualité implique ainsi l’acquisition de connaissances mesurées par des résultats à des tests standardisés ou à des concours mais aussi l’apprentissage de la citoyenneté et de la vie en société ou encore l’encouragement de l’esprit de créativité et de curiosité. Elle ne s’apprécie pas de la même manière selon que l’objectif assigné est l’instruction ou la réussite de tous. De même, l’université a des fonctions de délivrance des diplômes de l’enseignement supérieur mais également de recherche, les professeurs devant aussi participer à sa gestion. La nécessité, mise en évidence à l’occasion de la crise financière pour le privé, de s’assurer que la mesure de la performance intègre suffisamment les impacts à long terme de la gestion considérée, se pose donc avec autant d’acuité dans la gestion publique.
Et parfois contradictoires ce qui rend l’évaluation difficile…
9 La multiplicité des dimensions de l’action publique conduit à ce que l’activité quotidienne des agents de l’État est constituée d’une multiplicité de tâches. Or certaines tâches sont mesurables (par exemple par les coûts ex post), d’autres le sont imparfaitement (en tout cas à court terme) et d’autres encore sont non mesurables (comme certaines caractéristiques qualitatives). Cela est à l’origine d’une tension entre ces différentes dimensions lors de toute évaluation de la performance.
10 Ainsi, la mise en œuvre d’une tarification à l’activité des hôpitaux est conçue comme un contrat à prix fixe qui engendre une minimisation des coûts. Or celle-ci peut être obtenue par l’élimination des gaspillages de toute nature et par la recherche de l’efficacité productive mais aussi par une réduction de la qualité des soins fournis ou par une sélection des patients, l’hôpital refusant de traiter les cas les plus coûteux. La sélection des patients ou la qualité des soins étant imparfaitement mesurés, l’hôpital peut être incité à concentrer ses efforts sur la réduction des dépenses au détriment des efforts d’amélioration de la qualité ou d’accueil des patients les plus gravement atteints [5]. Cette problématique se retrouve dans l’ensemble de la fonction publique. Fonder les avancements des professeurs d’université sur des critères stricts de publications peut les inciter à délaisser leur activité d’enseignement ou leur participation à la gestion des établissements.
11 La répartition des effets sur les différentes tâches peut aussi dépendre des incitations différentes concernant chacune des tâches. Deux exemples peuvent aider à faire comprendre la réalité et la généralité du problème :
- la gestion des risques et de la sécurité, qui, sous des formes diverses, se trouve au cœur de beaucoup d’interventions publiques, et vis-à-vis desquelles le public attend beaucoup de l’État. Celle-ci comporte (au moins) une double dimension de prévention et de gestion des crises, les deux pouvant être contradictoires. Si un responsable est, en effet, jugé exclusivement sur la première, donc sa capacité à minimiser le nombre d’incidents ou d’accidents, il sera très fortement incité à retarder leur déclaration, ce qui peut s’avérer néfaste par rapport à la seconde dimension, qui réclame, en effet, de pouvoir s’organiser au plus vite, tant qu’il est temps…
- la gestion budgétaire. Dans ce cas, il y a conflit entre la capacité à tenir son « exécution », ou à limiter les besoins immédiats de crédits, et l’intérêt d’identifier tôt des dépenses inéluctables, pour les provisionner. La mesure de la performance des responsables concernés doit en tenir compte.
D’autant plus qu’il existe de nombreuses asymétries d’information…
12 Les difficultés d’évaluation des performances dans ce contexte de tâches multiples sont renforcées par les nombreuses asymétries d’information qui caractérisent l’activité du secteur public, dès lors que celui-ci est privé de l’information transmise par les marchés. La performance, dans toutes les composantes, dépend des efforts non observables effectués (aléa moral) mais aussi de caractéristiques exogènes également non observables (antisélection) telles que la compétence des agents. Cette conjugaison d’éléments d’aléa moral et d’antisélection renforce la complexité de l’évaluation. Elle peut engendrer des manipulations de l’information transmise lorsque celle-ci est non vérifiable.
Qui occasionnent des rentes informationnelles
13 La manipulation de l’information peut, en outre, être à l’origine de rentes informationnelles variables selon les modes de financement. Ainsi, si la gravité des pathologies est observable par les offreurs de soins, la tarification à l’activité aura, certes, des effets positifs en termes d’efficacité productive mais conduira à des rentes élevées lorsque l’hôpital accueillera des patients à coûts bas si le prix est fixé à un niveau élevé pour éviter la sélection. Le mode de paiement (c’est-à-dire le mode de financement des services publics) doit donc reposer sur un arbitrage entre l’« extraction » de la rente et l’efficacité, car le principal ou mandataire doit veiller à ne pas utiliser exagérément les gisements de productivité découverts par un mécanisme, pour que celui-ci conserve son caractère incitatif [6]. Si l’agent ou mandataire voit ses ressources réduites immédiatement à une concurrence des efforts de productivité qu’il a réalisés, on conçoit que l’incitation à les poursuivre soit faible. Un tel arbitrage doit être considéré dans un grand nombre de domaines de l’action publique.
La multiplicité des mandants
L’action publique se caractérise par un nombre élevé de parties prenantes…
14 L’activité du secteur public implique fondamentalement qu’un agent dépend de plusieurs mandants en raison des externalités associées à sa production. Cette multiplicité traduisant la multiplicité des parties prenantes, elle est largement incontournable, d’où la nécessité de chercher les solutions pour la gérer au mieux. Ainsi, les entreprises publiques doivent rendre compte à leur ministère de tutelle mais aussi au ministère des Finances. Un enseignant doit rendre des comptes à son principal, à l’inspection d’académie mais aussi aux parents d’élèves. Un médecin hospitalier est à la fois le mandataire de la direction de l’hôpital et des patients.
15 Pour les services fournis directement à la population, la qualité du service est particulièrement importante. Faire jouer aux usagers un rôle en intégrant leur satisfaction dans les règles d’évaluation et d’incitation peut accroître la performance à condition de bien analyser la structure des relations de type principal-agent ou mandant-mandataire caractéristique de l’activité concernée.
16 Les critères d’évaluation des principaux ou mandants étant différents, tout mécanisme d’incitation qui ne serait pas conçu conjointement est nécessairement d’une faible efficacité dans un contexte de tâches multiples. Si les tâches privilégiées par chaque principal ou mandant sont complémentaires, un problème de « passager clandestin » peut apparaître, chacun comptant sur l’autre pour mettre en œuvre les incitations adéquates. Si elles sont substituables, une dilution des incitations réduira leur efficacité. L’illustration de ces principes ne peut être ici qu’heuristique, sachant que, souvent, il y a un mix de complémentarités et de substitutions entre ces principaux ou mandants, selon les dimensions considérées. Par ailleurs, il faut évidemment examiner la manière dont les intérêts de l’agent ou mandataire sont plus ou moins spontanément en ligne avec les différents objectifs de ces mandants.
Qui ont des objectifs complémentaires…
17 Le problème de « passager clandestin » évoqué ci-dessus se rencontre dans les établissements dont le pilotage repose sur un partenariat entre différents niveaux d’autorités, locales et centrales, ou ceux associant les partenaires sociaux, comme c’est le cas des grandes assurances publiques. Cette configuration peut contribuer, en effet, à expliquer les difficultés rencontrées pour mettre en place des mécanismes de contrôle et de gestion des risques appropriés. Le cas de services extérieurs, qui relèvent à la fois d’une autorité territoriale (préfet ou recteur) et d’autorités sectorielles centrales peut aussi conduire à ce type de problème, qui nourrit, en pratique, les missions communes des corps d’inspection. Mais le phénomène de « passager clandestin » apparaît bien comme un phénomène profond et difficile à combattre (comme le suggère la théorie), quand il s’agit de passer aux « suites » de ces rapports, ou quand il s’agit d’animer, dans la durée, des lieux de coordination des administrateurs de l’État pour les établissements publics. D’où la nécessité d’organiser systématiquement la coopération des principaux ou mandants concernés.
Ou contradictoires, ce qui implique un effort de gouvernance particulier
18 Les cas de dilution des incitations apparaissent lorsqu’un service doit rendre compte à plusieurs tutelles d’objectifs complexes tels que : maîtriser les risques industriels ou sanitaires, tout en favorisant la compétitivité économique (industrie, économie, environnement), ou poursuivre une activité scientifique et universitaire, tout en assurant la présence et l’implication dans un service hospitalier (santé, université). Ce type de situation soulève, au sens propre, des problèmes de gouvernance, qui dépassent le champ des présentes réflexions. Mais ceux-ci ont aussi des implications directes pour l’évaluation de la performance. À cet égard, les deux recommandations que l’on pourrait suggérer sont les suivantes :
- s’astreindre, dans ce cas, à un effort particulier de formulation de la mission de manière à ce que l’agent ou le mandataire ait une vision claire de celle-ci, et des conditions dans lesquelles il devrait aborder les éventuelles situations de conflits d’intérêt ;
- s’inspirer de ce qu’ont fait les entreprises en développant des rapports particuliers, par exemple pour les aspects sociaux ou le développement durable, pour rendre compte à leurs différentes parties prenantes, étant entendu que leur crédibilité d’ensemble doit évidemment être assurée.
À la lumière de cette analyse, l’évaluation de la performance nécessite une véritable organisation, et la mise en place d’incitations individuelles appropriées intégrant une analyse expresse des externalités
Les asymétries d’information rendent l’évaluation de la performance délicate
19 La conjugaison de l’aléa moral et de l’antisélection rend difficile l’évaluation des agents et des services de l’État et ceci d’autant plus que leur activité s’exerce dans un contexte de tâches multiples. La rente informationnelle résulte du fait que le principal ou mandant a moins d’information que l’agent ou le service sur ce qui est possible ou sur la manière dont les objectifs du mandataire peuvent être mis en œuvre. L’agent ou le service peut donc exploiter cet avantage informationnel pour réduire son effort, que cet effort concerne la réduction du coût ou l’amélioration de la qualité du service rendu à la population. La fourniture de l’effort impliquant une désutilité pour l’agent ou le service, celui-ci s’approprie une rente qui, certes, n’a pas le caractère monétaire qu’a, par exemple, une rente de monopole, mais possède toutes les propriétés d’une rente en ce sens qu’un service identique pourrait être obtenu à un moindre coût ou qu’un service de meilleure qualité pourrait être obtenu au même coût.
20 La structure hiérarchique de l’administration contribue à l’émergence de relations du type principal-agent ou mandant-mandataire à plusieurs niveaux. À chaque échelon, un responsable supervise l’action de ceux qui sont à un niveau hiérarchique inférieur et rend compte de cette activité à un responsable hiérarchiquement supérieur. Une telle structure crée, naturellement, des possibilités de collusion entre les agents ou les services et leur superviseur dans le but d’accroître et de partager la rente informationnelle. Ces coalitions, qui s’exercent au détriment de l’intérêt général et des usagers, sont fréquentes dans le secteur public. Dans ce contexte, quelles incitations mettre en œuvre pour que les agents et les services agissent en conformité avec les missions du service public ? Pour répondre à cette question, notons, d’abord, que l’évaluation de la performance des agents doit être distinguée de celle des services (au sens large) dans lesquels les agents interviennent et de l’évaluation des politiques publiques.
Mesurer la performance nécessite de distinguer ce qui est endogène de ce qui est exogène
21 Chaque agent ou service de l’État agit dans un cadre statutaire défini par la loi, en fonction des politiques déterminées par le gouvernement et des directives qui lui sont assignées. Par ailleurs, les agences gouvernementales ont moins d’autonomie pour déterminer leur action que les entreprises privées. Elles agissent dans le cadre d’une contrainte budgétaire avec des dotations de facteurs fixes et des possibilités limitées de substitution entre ceux-ci. Au niveau décentralisé, la performance d’un agent ou d’un service est limitée par ces contraintes. L’efficacité de ces agents ne peut donc s’apprécier que de manière relative quand l’efficacité de l’action publique doit, quant à elle, s’apprécier globalement.
22 Par ailleurs, les résultats de l’action publique dépendent de variables exogènes qui doivent être prises en compte dans les évaluations. Ainsi l’état de santé d’une population, imparfaitement mesurable par des indicateurs d’espérance de vie, de mortalité ou de morbidité, dépend de la qualité des soins mais aussi des modes de vie, de l’alimentation, de l’hygiène ou des conditions d’habitat. De même, l’activité d’un commissariat ou d’une école ne peut se mesurer de la même manière dans une banlieue défavorisée ou dans un quartier riche. L’imputabilité des résultats, centrale dans la démarche évaluative, est donc difficile.
Les mécanismes incitatifs sont limités par la multidimensionnalité des tâches
23 Enfin, le caractère multidimensionnel des tâches réduit nécessairement la force des incitations. Lorsqu’il perçoit un salaire fixe, un agent public est peu incité à diminuer le coût de fourniture de son service si l’effort de réduction de ce coût implique une perte d’utilité. Cependant, si la qualité du service n’est pas observable, un mécanisme qui récompenserait ceux qui diminuent la dépense et pénaliserait ceux qui dépensent plus qu’une certaine valeur de référence, pourrait conduire à une baisse de la qualité, c’est-à-dire de la composante non observable de l’effort. À l’arbitrage rente-efficacité déjà mis en évidence s’ajoutent ainsi des arbitrages complexes entre les différentes tâches en fonction de leur mesurabilité, ce qui limite la force des incitations et contribue au maintien de certaines rentes. Pour limiter les possibilités d’effets pervers, il convient ainsi certainement de se contenter de niveaux d’incitation « intermédiaires ».
Dans le secteur public, ils se situent surtout au niveau des perspectives de carrière…
24 Pour achever cette mise en perspective de l’analyse économique de la gestion publique, il faut encore tenir compte de deux autres caractéristiques de l’activité. En premier lieu, il faut noter la faiblesse des incitations monétaires dans l’administration et l’importance du rôle des perspectives de carrière. Les primes individualisées et l’intéressement aux bénéfices constituent des modes monétaires d’incitation qui n’existent pas ou peu jusqu’à présent dans le secteur public. En revanche, l’effet que la performance d’un fonctionnaire peut avoir sur ses probabilités de promotion et donc sur sa carrière future joue un rôle essentiel.
25 Cette caractéristique du secteur public implique un raisonnement en plusieurs étapes. En tenant compte de l’effet futur de son effort, un agent public peut être incité à améliorer sa performance même avec un salaire fixe. Comme l’a indiqué Holmström (1982), un schéma d’incitation fondé sur les promotions futures suppose que la performance soit observable par ceux qui décident des promotions futures et que le coût associé au fait de signaler sa compétence future par un effort aujourd’hui, ne soit pas trop élevé. Par ailleurs, la question des incitations fondées sur les perspectives de carrière peut conduire à un effort d’autant plus grand que l’incertitude sur les aptitudes est élevée, les agents devant convaincre leur supérieur de leur qualité. Cependant, la force des incitations liées aux promotions se heurte au caractère multidimensionnel des tâches et à la complexité des missions. Comme l’ont montré Dewatripont et al. (1999), l’accroissement du nombre des tâches assignées à un agent réduit son effort total car le lien entre la performance et l’évaluation de la compétence par le supérieur hiérarchique devient trop lâche. Cette observation implique une corrélation entre la manière dont une organisation ou un agent doit rendre des comptes et la spécificité de ses objectifs. Enfin, un nouvel arbitrage peut être mis en évidence entre les variations de la performance globale et l’effort, les agents effectuant un effort pour convaincre de leur compétence d’autant plus important que l’incertitude quant aux résultats est grande. Le principal ou superviseur peut avoir intérêt à spécialiser les agents dans un sous-ensemble de tâches pour lesquelles il y a une corrélation entre l’effort et la compétence, ce qui peut s’effectuer au détriment des autres tâches, et donc de la performance globale.
Et doivent être en ligne avec la performance collective
26 En deuxième lieu, le secteur public se caractérise par l’importance du travail en équipe. Il convient d’en tenir compte dans la définition des incitations des services eux-mêmes (cf. Holmström, 1982). Celles-ci doivent, en effet, promouvoir des externalités positives quand la coopération des membres du groupe est un facteur important de réussite. Les incitations individuelles conduisent à des comportements de « passager clandestin » nuisibles aux résultats du groupe lorsqu’il existe des complémentarités dans la production. Rémunérer la performance individuelle peut, en outre, accroître le coût de la coopération et donc réduire la performance du groupe. Relier les rémunérations des agents aux performances du groupe peut, au contraire, inciter les membres du groupe à procéder à des évaluations internes (par les pairs), éliminant ainsi les comportements de « passager clandestin ».
Améliorer la gestion publique et son évaluation
27 La comparaison avec le contexte du secteur privé suggère, ainsi, à la fois un trait commun à savoir l’importance des problèmes d’agence à résoudre, mais aussi une différence notable à savoir un critère, à maximiser, de surplus social qui est encore plus difficile à identifier que ne l’est la valeur d’une entreprise. Elle met, en outre, en évidence l’absence des mécanismes de contrôle externe [7], qui renforcent les enjeux de la mesure de la performance dans le secteur public. S’il apparaît que cette mesure doit être effectuée au niveau microéconomique, il semble qu’elle ne puisse porter ses fruits que dans un environnement général favorable, ce qui est encore loin d’être le cas.
La mesure de la performance au niveau microéconomique reste imparfaite
Évaluer l’action publique nécessite de passer de l’activité aux résultats…
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La complexité des services publics et l’imprécision des objectifs à tous les niveaux de l’administration distinguent la performance publique de la performance privée. Les indicateurs pertinents sont souvent imparfaits voire inexistants, la production publique restant difficile à mesurer autrement que par son coût, et non par son output (ou produit) et a fortiori son outcome (ou résultat), dans de nombreux domaines. La difficulté de ce passage entre « activité » et « résultat » [8] ou service rendu résulte de ce que :
- lorsqu’il s’agit de services à l’usager, comme c’est le cas pour l’éducation ou la santé, il n’y a pas en général de référence marchande directe pour évaluer le service, et surtout la dimension qualité est très importante ;
- pour les services plus régaliens (sécurité publique, collecte de l’impôt, contrôle de la réglementation…), le service fourni s’apparente plutôt à un service « d’intermédiation », et donc à évaluer comme tel, en coût d’opportunité.
Ce qui est délicat et milite donc pour un « processus qualité » sur les données
29 Pour surmonter ces obstacles, les mécanismes de gestion pour la performance doivent, ainsi, être fondés sur une compréhension profonde des problèmes d’information et d’incitations auxquels est confrontée la gestion publique et des conditions à réunir pour les résoudre. Les difficultés rencontrées s’interprétant dans ce cadre d’analyse microéconomique, une approche trop centralisatrice et hiérarchique de la réforme de l’État, ignorant cette dimension, risque de retrouver les écueils de la planification centralisée dont les objectifs apparaissent très vite irréalistes ou non contraignants.
30 Les contraintes informationnelles mettent l’accent sur les questions de méthodes et d’organisation de l’évaluation. À cet égard, le rapport Atkinson (2005) a mis en avant le besoin de développer un processus qualité sur les données, ceux qui fournissent les « chiffres » devant avoir pleinement conscience des enjeux associés. Les difficultés méthodologiques pour passer d’indicateurs d’activité à une véritable mesure du service rendu le conduisent à admettre la possibilité de plusieurs systèmes d’indicateurs, dès lors que ceux-ci sont cohérents et que leurs développements respectent des cahiers des charges prédéfinis.
31 L’enjeu est d’importance car l’utilisation d’indicateurs imparfaits dans des mécanismes d’intéressement salarial ou d’allocation des moyens budgétaires risque, comme on l’a vu, d’entraîner des effets indésirables, qui pourraient délégitimer le processus de réforme engagé, s’ils conduisent à gratifier des agents ou services ayant su utiliser les failles de ces mécanismes, ou s’ils favorisent une dégradation de l’offre de services utiles, mais mal pris en compte par les systèmes d’indicateurs. Un autre risque est l’accumulation de travaux d’expertise coûteux n’aboutissant in fine qu’à confirmer l’insuffisance de résultats, mais visant à la rendre « compréhensible », affaiblissant, ce faisant, l’incitation à réorienter l’action.
En outre, il existe des risques de collusion
32 Enfin, il faut bien comprendre que tant qu’une rente informationnelle demeure, l’obtention de l’information pertinente sera toujours difficile, car ce n’est pas l’intérêt de l’agent ou des services supervisés de la révéler, tout mécanisme optimal à cet égard conduisant à la révélation de l’information privée au prix de la rétrocession à l’agent ou au service supervisé, d’une part, de la rente qui lui est associée. Il en résulte qu’un système de supervision aura alors une grande valeur, en permettant de relâcher ces contraintes informationnelles, et cela est bien l’objectif implicite au développement de systèmes d’indicateurs de performance. Mais sa mise en place rencontrera aussi des problèmes d’incitations, le superviseur et l’agence (si elle est du type le plus efficace) ou l’agent et son supérieur ayant intérêt à un comportement collusif, préservant la rente informationnelle pour se la partager.
33 Dans la littérature économique, ce problème est associé à la question du « contrôle des contrôleurs ». Celle-ci se pose dans toute institution, et apparaît centrale pour la compréhension de l’organisation des firmes et des relations entre managers et financiers. De manière générale, la gestion publique apparaît fragile à cet égard, en l’absence d’un mécanisme solide de contrôle externe. Dès lors, la fonction de supervision est soumise elle-même à des problèmes d’incitation et de risque de confiscation ou collusion. Seule la réintégration d’une forme de concurrence pourrait permettre d’échapper à ces dilemmes entre rentes et incitations. Elle pourrait prendre la forme d’une concurrence ex ante pour le marché (cf. Mougeot, Naegelen, 2005) ou d’une concurrence par comparaison (cf. Shleifer, 1985), le niveau de rémunération accordé à une agence pouvant dépendre des coûts observés dans des agences exerçant dans des conditions similaires ou dans d’autres régions. À cet égard, lorsqu’un secteur public coexiste avec un secteur privé (enseignement, santé, placement des demandeurs d’emplois), une démarche de benchmarking pourrait s’avérer très fructueuse.
34 Les indicateurs doivent donc être construits avec une perspective de supervision, mais aussi de diffusion de l’information pour éviter les collusions de groupes d’intérêt contre l’intérêt général et enfin de concurrence par comparaison pour inciter les acteurs à l’efficacité.
Ce qui fait que l’organisation de l’évaluation revêt une grande importance
35 L’organisation de l’évaluation revêt en elle-même une grande importance. Historiquement, la gouvernance de l’évaluation s’est vu accorder peu d’attention (Perbet, 2007). Or, la multiplication des échelons et l’opacité du système d’évaluation centralisé ont favorisé les comportements opportunistes jouant sur les défauts d’information, avec comme conséquence une occasion manquée d’aller vers l’excellence, et la consolidation des rentes locales et de l’absence de qualité, comme dans le cas de la réforme LMD (licence-mastère-doctorat) dans les universités (Belloc, 2005).
36 En outre, le modèle recherché pour l’évaluation ex post a souvent été celui d’une instance indépendante ayant le monopole de l’évaluation, avec l’espoir qu’émergerait ainsi un produit de qualité incontestable. En définitive, cela a conduit à des produits d’évaluation très hétérogènes. S’il semble nécessaire d’identifier en amont de manière précise les objectifs de l’institution évaluée, il convient ainsi de s’assurer également de la compétence des évaluateurs et de leur absence de conflits d’intérêts. On ne peut enfin qu’insister sur le besoin de « certification » du processus.
L’organisation de l’État limite la portée des mécanismes incitatifs
La capacité de gestion des acteurs est un enjeu…
37 S’agissant de la discrétion laissée aux acteurs, curieusement, les gestionnaires publics disposent de beaucoup de marge de manœuvre dans le choix du contenu de leurs interventions ou des services offerts, et sont fortement soumis à des contraintes dans la gestion de leurs moyens. On n’est plus éloigné d’une situation où l’offreur public choisit à la place de son client. Or, s’agissant de services, où l’enjeu de qualité est fort, l’offre publique devrait au contraire faire l’objet d’une démarche systématique de certification, pour répondre aux attentes réelles de l’usager, et ce au moindre coût [9].
38 La constitution des budgets opérationnels de programmes (BOP) et des unités opérationnelles (UO) de la LOLF et les protocoles de gestion afférents devraient systématiquement être examinées par rapport à ce critère (ce que suggèrent aussi Alain Lambert et Didier Migaud (2005) pour qui « la direction du Budget doit se livrer à un contrôle qualité des Projets annuels de performance »). Les modes d’évaluation des corps d’inspection et de contrôle devraient aussi en tenir compte, sachant que ceux-ci ne peuvent se contenter de regarder si les allocations budgétaires ne surcompensent pas les coûts engagés. On a vu, en effet, que ces coûts sont endogènes si bien que vérifier qu’aucune rente n’a été laissée, c’est s’assurer indirectement que le service n’avait aucune incitation à l’efficacité.
En particulier en ce qui concerne le personnel
39 L’appréciation de la possibilité de gérer met en cause, par ailleurs, les règles de gestion du personnel, qui constitue, en effet, le principal facteur de production des services publics. Au niveau de la LOLF, on pourrait envisager que les coûts correspondants soient imputés aux programmes les utilisant effectivement, dans une logique de coût complet ou de « qui décide, paye ». L’idée qu’en les concentrant sur les programmes support des ministères on élargit le champ des redéploiements possibles, bute encore sur ce problème d’incitation. Les services utilisateurs n’ayant pas de retour sur les gains d’efficacité qu’ils réalisent, leur intérêt est alors de les cacher… et de réclamer des effectifs au moment où l’actualité rend particulièrement sensible telle ou telle de leurs missions vis-à-vis du public. Le « grand » redéploiement escompté s’avère alors tout à fait virtuel. Il en va de même des réductions d’effectifs gérées en taux de remplacement des départs à la retraite. Si un tel ratio est, en effet, utile en termes de cadrage macroéconomique, ce ne peut être un instrument de gestion. Au niveau microéconomique, le renouvellement des effectifs d’un service a, en effet, d’autres causes qui peuvent de plus être stimulées et qui permettent aussi de gérer activement des formules de rémunération partiellement forfaitisées, dans les conditions discutées ci-dessus. L’affichage du taux de remplacement conduit, au contraire, à exonérer a priori d’effort les services qui ont des effectifs jeunes, même s’ils ont des gisements de productivité, et inciter les autres à chercher les bonnes justifications pour obtenir malgré tout le remplacement de leurs départs. Présenter en coût complet les programmes qui fournissent les services finaux à l’usager n’empêche pas, d’ailleurs, de faire apparaître aussi – mais autrement – les effectifs sur les programmes support, pour rendre compte de la fonction de gestion des ressources humaines qu’ils exercent. À cet égard, on pourrait imaginer une présentation en partie double de ceux-ci, faisant apparaître en recettes les services fournis aux autres programmes, ce qui obligerait à un dialogue sur les « prix de cessions internes » et la répartition des coûts communs.
La logique d’incitation microéconomique doit aussi être prise en compte dans la démarche de réorganisation
40 La production publique se situe essentiellement dans le champ des services. Les activités les plus comparables du privé sont réalisées par des entreprises dont la taille et la diversité des activités sont extrêmement variables. À cet égard, une affectation stricte entre un programme au sens de la LOLF, c’est-à-dire un type de service fourni, et une organisation unique peut soulever des questions au regard de la recherche d’incitations. Réduire la dispersion des services publics est une nécessité et l’argument de la multiplicité de leurs tâches n’est souvent qu’un argument mis en avant pour échapper à l’évaluation des performances. Pour autant, les économies d’échelle mises en avant dans les regroupements mériteraient d’être bien documentées. Les avantages à attendre en termes d’économies d’échelle sont, en effet, contrebalancés par les inconvénients d’une réduction des incitations résultant d’une certaine forme de concurrence (ne serait-ce qu’une concurrence par comparaison).
41 Le souci de simplification peut, ainsi, empêcher parfois l’émergence de structures et de modes d’organisation d’avenir de l’État. L’expérience du secteur privé montre, en effet, que le bilan des fusions-acquisitions est souvent incertain, car procédant d’une logique de « création d’empire » plutôt que de valeur, ou lorsque les entités rassemblées ont des cultures trop différentes, et n’ont pas envie de travailler ensemble. Souvent, le véritable argument sous-jacent à ce Big is beautiful est qu’on espère contourner ainsi les obstacles aux redéploiements des effectifs, l’idée étant que, si les redéploiements interstructures sont difficiles, on peut plus aisément réaliser des redéploiements internes. Cependant, les rigidités intrastructures peuvent être très fortes aussi [10]. De plus, ce regroupement peut, dans certains cas, accroître le pouvoir de monopole ou de blocage d’une corporation particulière.
42 Il paraît, en conséquence, souhaitable d’apprécier, au cas par cas, les possibilités de redéploiement progressif au sein d’une même entité ou, au contraire la nécessité de créer, en dehors, les structures dévolues aux missions nouvelles et donc de gérer explicitement le déclin d’entités ayant perdu leur véritable raison d’être, pour une raison ou une autre. La première solution suppose que les compétences dont on envisage le redéploiement soient effectivement appropriées (éventuellement après formation) aux missions nouvelles que l’on souhaite leur voir tenir, que ces missions nouvelles soient économiquement justifiées, c’est-à-dire que l’intervention publique que l’on développe, permette la correction d’une imperfection de marché et enfin que l’entité sur laquelle on s’appuie, dispose d’un portefeuille suffisant d’activités pérennes. Sinon, il vaut sans doute mieux envisager la création de structures nouvelles, qu’il faut protéger tant qu’elles n’ont pas atteint la masse critique permettant d’en faire un levier des redéploiements. Par ailleurs, il vaut souvent mieux accepter tôt les surcoûts liés au reclassement des agents affectés par les restructurations plutôt que d’escompter des redéploiements dont l’horizon effectif est en fait très éloigné, voire virtuel.
Conclusion
43 À la lumière des développements qui précèdent, il apparaît ainsi nécessaire que la réforme budgétaire incarnée par la LOLF soit accompagnée par la poursuite de la réforme du mode d’organisation de l’État. En effet, si plus de performance nécessite plus d’obligation de « rendre compte », celle-ci doit aller de pair avec plus de capacité de gestion. Or, malgré la fongibilité asymétrique des crédits à l’intérieur des programmes introduite par la LOLF, l’administration est encore largement organisée selon une logique de moyens et les opérateurs n’ont que peu de prise sur la nature des facteurs de production dont ils disposent.
44 Les indicateurs macroéconomiques ont un grand intérêt. Ils sont nécessaires pour aider les décideurs politiques, et en premier lieu la représentation nationale, à définir chaque année la part de la richesse nationale qu’il convient d’associer à chaque objectif de l’action publique par l’intermédiaire du projet de loi de finances. Toutefois, les principaux leviers de la performance de la gestion publique se situent au niveau microéconomique et des mécanismes d’action ainsi que des indicateurs qui leur sont directement associés, sont, à ce niveau, nécessaires. La clé de la performance publique se trouve certainement dans l’articulation entre ces deux gammes d’indicateurs.
45 En ce sens, il serait souhaitable de prolonger la réforme budgétaire en pensant de façon systématique l’articulation entre le niveau macroscopique et le niveau microscopique. Cette réforme légitime, en effet, à un niveau politique par l’intermédiaire des Programmes annuels de performance et des Rapports annuels de performance, non seulement les objectifs de l’action publique, mais aussi un programme d’actions et des indicateurs qui lui sont étroitement liés. Or, le New Public Management est, au contraire, basé sur un partage des rôles clair entre le pouvoir politique, qui prend les décisions stratégiques et fixe les objectifs, et l’administration, qui prend les décisions opérationnelles.
46 Il convient de prendre en compte explicitement le fait que chaque acteur a tendance à celer les informations dont la divulgation pourrait constituer une menace pour ses intérêts. De la même manière, il paraît illusoire de négliger les obstacles que constituent les biais idéologiques, le refus de reconnaître ses erreurs ou l’arrivée de nouveaux responsables qui veulent davantage se distinguer de leurs prédécesseurs qu’élaborer ou mettre en œuvre des politiques basées sur des faits (evidence-based policies).
47 Au niveau de l’administration, ces obstacles peuvent être très largement atténués par des contrats pluriannuels réellement incitatifs. On pourrait, ainsi, imaginer la création d’un dispositif de Contrats d’objectifs et de gestion, du type de celui qui existe dans le domaine de la sécurité sociale (cf. Caussat, Chemla, 2010), entre le ministère du Budget et les ministères dits « dépensiers ».
Notes
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[1]
Dominique Bureau : professeur chargé de cours à l’École polytechnique.
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[2]
Michel Mougeot : professeur à l’université de Franche-Comté.
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[3]
Nicolas Studer : chargé d’études sur l’évaluation à la DREES.
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[4]
Cet article reprend certains développements du rapport Performance, incitation et gestion publique réalisé en 2007 par Dominique Bureau et Michel Mougeot pour le Conseil d’analyse économique (rapport n° 66).
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[5]
Comme le montrent Holmström et Milgrom (1986), mettre des incitations fortes sur une dimension de l’activité (ici l’efficacité productive) implique des effets sur les activités complémentaires ou substituables quand des incitations aussi fortes ne peuvent être mises en œuvre sur celles-ci.
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[6]
Du fait de sa capacité d’engagement limitée, l’État souffre d’un manque de crédibilité intertemporelle, que la vision pluriannuelle encore limitée dans la LOLF ne permet pas de soulager. On ne peut donc que regretter l’utilisation excessive de mesures d’exécution budgétaire « à un coup », qui engendre ce qu’on appelle des effets de « cliquet » et peut donc être source de rigidités très fortes, les agents ou services anticipant très bien que les capacités qu’ils révèlent aujourd’hui conduiront à leur fixer des objectifs encore plus stricts demain, les incitant à « cacher » celles-ci, si le taux de retour pour eux est insuffisant.
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[7]
Pour pousser la comparaison un peu plus loin, on pourrait penser que le pouvoir exécutif joue le rôle que joue le directoire dans le système de société anonyme à l’allemande. Le Parlement jouerait alors le rôle du conseil de surveillance (en particulier après la récente réforme constitutionnelle), la Cour des comptes contribuant au contrôle externe en éclairant les choix des électeurs (la sanction ne pouvant être que démocratique).
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[8]
Aujourd’hui, malgré sa complexité, ce processus tend même à déborder sur la comptabilité nationale (Hel-Thelier, 2007).
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[9]
Ou laisser aux usagers leur autonomie, par exemple dans le choix d’un établissement scolaire ou de santé, afin de créer une concurrence par comparaison.
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[10]
En tout état de cause, les gains escomptés des réformes de structure ne peuvent se concrétiser sans la constitution d’un marché du travail interne à l’administration plus flexible. Celui-ci se limite en effet aujourd’hui essentiellement à un processus de remplacement de postes vacants.