CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1 Les difficultés d’insertion ou de réinsertion professionnelle sont l’une des caractéristiques majeures du handicap psychique lié à la schizophrénie. Seuls 10 à 20 % des personnes souffrant de cette pathologie ont un emploi et ceux qui en avaient un avant le début de la maladie le perdent fréquemment ou éprouvent de grandes difficultés à le garder lorsque la maladie est installée (revue dans McGurk et Mueser, 2004). D’autre part, l’absence d’emploi est fortement liée à l’absence d’autonomie financière et aux difficultés d’insertion sociale des personnes, et contribue à alourdir le coût financier et social de la maladie. L’obtention d’un emploi est une demande particulièrement fréquente des patients car l’insertion professionnelle contribue à leur processus de rémission en leur procurant un sentiment de responsabilité et de réalisation personnelle (Provencher et al., 2002).

2 Alors que la perspective de travailler a été longtemps inexistante pour les personnes atteintes de schizophrénie, des progrès substantiels dans le domaine de l’insertion et de la réinsertion professionnelle ont été réalisés depuis une dizaine d’années. Les bilans d’orientation professionnelle, les aides pour obtenir et maintenir un emploi (i. e., services de soutien à l’emploi) et la prise en compte des désirs et de la motivation des personnes favorisent leur mise ou remise au travail (McGurk et Mueser, 2004). En effet, de nombreuses études attestent de l’efficacité des services de soutien à l’emploi pour l’obtention d’un travail rémunéré qui s’accorde avec les particularités de la personne souffrant d’une psychose chronique (pour une revue récente, voir Bond, et Drake Becker, 2008). La possibilité de travailler représente également, pour les jeunes patients ayant présenté un seul épisode de psychose, un enjeu majeur de santé (prévenir le développement ou l’exacerbation d’une maladie mentale) et économique (empêcher le développement à long terme d’une situation sans emploi). Les services de soutien à l’emploi, adaptés aux besoins de la personne et visant une intervention précoce, semblent constituer une stratégie d’intervention prometteuse pour contrer les difficultés d’insertion professionnelle de cette population (Killackey, Jackson, et McGorry, 2008).

3 Cependant, malgré cette évolution favorable, force est de constater que les tentatives d’insertion ou de réinsertion professionnelle échouent encore très souvent. Seul un tiers environ des personnes insérées professionnellement travaille un nombre d’heures significatif (Crowther et al., 2006), et la durée de l’emploi n’est souvent que de quelques mois. De plus, la proportion de personnes insérées en milieu ordinaire de travail reste très faible.
Afin de surmonter les obstacles à l’emploi, l’identification des facteurs impliqués dans les difficultés d’insertion professionnelle fait l’objet d’un intérêt croissant dans la littérature scientifique. La difficulté, voire l’incapacité de réaliser certaines tâches professionnelles expliquent en partie ces échecs, soulignant la nécessité de mieux comprendre les relations qui unissent la maladie et les difficultés d’insertion professionnelle. Les déficits cognitifs (i. e., déficits touchant les fonctions mentales qui permettent l’acquisition et le traitement de l’information qui nous entoure) et les symptômes cliniques de la schizophrénie sont les deux principaux facteurs incriminés dans ces difficultés :

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  • Il est aujourd’hui bien établi que les personnes atteintes de schizophrénie ont des déficits des fonctions cognitives, notamment de l’attention, de la mémoire de travail (i. e., mémoire qui permet de maintenir l’information de manière temporaire, le temps de traiter d’autres informations), de la mémoire à long terme (i. e., mémoire qui permet de stocker une quantité d’information pendant un long laps de temps) et des fonctions exécutives (i. e., fonctions qui facilitent l’adaptation de la personne à des situations nouvelles) (Heinrichs et Zakzanis, 1998) [1]. Ces déficits sont fortement reliés aux perturbations de la vie quotidienne et de l’insertion sociale (e. g., Green, Kern et Heaton, 2004). Les déficits cognitifs contribuent également de manière significative aux difficultés d’insertion professionnelle (revue dans McGurk et Mueser, 2004). Plus particulièrement, ils prédisent de moins bonnes performances professionnelles, évaluées par le montant du salaire et le nombre d’heures travaillées, et entraînent une augmentation de l’usage des services de soutien à l’emploi (i. e., plus de contacts avec les spécialistes de l’emploi et plus d’heures d’accompagnement sur le site du travail).
  • L’intensité des symptômes cliniques dans la schizophrénie est également reliée aux difficultés d’insertion professionnelle (revue dans McGurk et Mueser, 2004). La relation observée concerne essentiellement les symptômes négatifs (i. e., manque ou absence de comportements spontanés ou attendus, tels qu’un retrait social et/ou émotionnel, une perte de volonté, de plaisir, etc.). Plus les personnes souffrant de schizophrénie présentent des symptômes d’évitement et d’inattention sociale, plus elles requièrent un accompagnement de la part de spécialistes du soutien à l’emploi. En effet, ces personnes échouent à s’engager d’une manière adéquate dans des relations professionnelles procurant un soutien naturel au travail (Zito et al., 2007). Les symptômes négatifs sont cependant moins prédicteurs des performances professionnelles à long terme que les déficits cognitifs (McGurk et Mueser, 2006).
Si les études plaident en faveur de l’existence de relations étroites entre les déficits cognitifs et les difficultés d’insertion professionnelle, la nature de ces relations est restée longtemps inconnue en l’absence d’un modèle théorique de ces relations. Or la compréhension de celles-ci est un prérequis pour développer de manière rationnelle des interventions visant à améliorer le fonctionnement cognitif des patients schizophrènes dans la perspective d’une meilleure insertion professionnelle.
McGurk et Mueser (2004) ont élaboré un tel modèle (voir figure en annexe), le seul existant à ce jour, à partir d’une analyse détaillée de la littérature consacrée aux relations entre déficits cognitifs et réinsertion professionnelle. Ce modèle présente deux caractéristiques principales :

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  • La première est de reposer sur la notion d’une hiérarchie des processus cognitifs, allant des facteurs généraux, tels que la vitesse de traitement de l’information, et des processus cognitifs les plus élémentaires, tels que ceux impliqués dans l’attention, jusqu’aux processus les plus intégrés, tels que ceux impliqués dans la mémoire et les fonctions exécutives. Cette hiérarchie est importante à prendre en compte dans la mesure où elle implique que les déficits cognitifs élémentaires sont susceptibles de retentir sur les fonctions cognitives plus intégrées.
  • La deuxième caractéristique du modèle est de considérer que les structures de réinsertion professionnelles peuvent compenser les effets des déficits cognitifs élémentaires sur le travail, mais qu’elles compensent plus difficilement les déficits des fonctions cognitives les plus intégrées. Il est donc postulé que les fonctions cognitives élémentaires (la vitesse de traitement de l’information et l’attention) sont étroitement reliées au niveau d’insertion professionnelle : plus ces fonctions sont altérées, plus le niveau d’insertion est faible et donc l’aide à la réinsertion importante. En revanche, les déficits des fonctions cognitives supérieures (la mémoire et les fonctions exécutives) sont à la fois reliés au niveau d’insertion professionnelle et à la qualité du travail. Dès lors que les personnes prises en charge par les structures de réinsertion professionnelle présentent des altérations des fonctions cognitives supérieures, seules des mesures de remédiation cognitive spécifiques pourraient permettre d’améliorer à la fois le niveau d’insertion professionnelle et la qualité du travail effectué par ces personnes. Ce modèle pourrait donc s’avérer utile pour comprendre les relations entre les déficits cognitifs et le niveau de réinsertion professionnelle, mais également pour identifier, pour une personne particulière, les fonctions cognitives sur lesquelles les interventions de remédiation doivent porter préférentiellement.
Ce modèle a fait l’objet de premières analyses empiriques par McGurk et Mueser (2006), indiquant que les relations entre le fonctionnement cognitif, l’usage des services de soutien à l’emploi et la performance au travail reflètent des interactions dynamiques et évolue dans le temps. Au départ, l’usage des services d’aide à l’insertion professionnelle jouerait un rôle important dans l’obtention d’un emploi et dans les performances professionnelles, notamment grâce à l’efficacité des spécialistes à identifier les emplois adaptés aux particularités des personnes. Sur le long terme, ce sont les déficits cognitifs qui auraient un impact plus important sur le maintien d’un emploi et sur les performances professionnelles. De plus, ils ne seraient pas complètement compensés par les services de soutien à l’emploi. Par conséquent, la mise en place de stratégies de remédiation cognitive pour prendre en charge les déficits cognitifs pourrait optimiser le fonctionnement au travail de personnes souffrant de schizophrénie.

6 La mise en évidence des liens entre troubles cognitifs et handicap psychique a pour corollaire le développement de méthodes de remédiation cognitive visant à combattre les limitations d’activités dans la vie quotidienne et la restriction de participation aux rôles personnels et sociaux liées au handicap psychique. Différentes études (e. g., Bell et al., 2008) indiquent l’intérêt de combiner les approches de remédiation cognitive et de services de soutien à l’emploi pour améliorer le fonctionnement professionnel. Les méthodes de remédiation cognitive ont pour objectif d’accroître l’adaptation à la vie quotidienne, l’autonomie, la qualité de vie et l’insertion sociale et professionnelle des personnes. Le bénéfice recherché peut concerner une situation déterminée, par exemple l’acquisition d’une habileté sociale ou professionnelle particulière. Il peut également consister en la généralisation du bénéfice obtenu dans une situation particulière à l’ensemble des situations proches.

7 La plupart des approches de remédiation actuellement élaborées, reposent sur des programmes d’entraînement des fonctions cognitives déficitaires, notamment attentionnelles, mnésiques et exécutives, reposant sur la passation répétée de batteries d’épreuves cognitives. Une méta-analyse récente (McGurk et al., 2007) a montré que la remédiation cognitive exerce un effet bénéfique sur le fonctionnement cognitif des personnes souffrant de schizophrénie. Cependant, les quelques études qui ont étudié la généralisation de l’amélioration sur le fonctionnement quotidien et/ou professionnel des personnes, but ultime d’une remédiation cognitive, ne montrent pas de résultats probants. En fait, la plupart des études ayant décrit des interventions cognitives chez les personnes présentant une schizophrénie ne reposent pas sur une analyse détaillée des déficits cognitifs des personnes considérées individuellement, ainsi que de leur fonctionnement au quotidien et/ou professionnel. Les programmes de remédiation seraient plus efficaces si les stratégies mises en place étaient individualisées et adaptées aux problèmes spécifiques rencontrés par la personne (McGurk, Mueser et Pascaris, 2005).

8 Ainsi, une tout autre approche consiste à construire, en référence à un modèle théorique de la cognition, une remédiation « sur mesure » tenant compte du profil cognitif propre à chaque personne. Il s’agit d’identifier, pour chaque personne, quelles sont les fonctions cognitives perturbées et quelles sont celles préservées, d’analyser les processus cognitifs impliqués dans les situations professionnelles et/ou quotidiennes où la personne est en difficulté et, après avoir mis en perspective ces deux séries de données, d’élaborer des interventions spécifiques de remédiation. Ces interventions centrées sur des situations précises peuvent suivre trois directions, selon la nature et la gravité des difficultés identifiées :

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  1. Utiliser des facteurs d’optimisation afin d’améliorer ou de faciliter les capacités fonctionnelles (par exemple, dans le domaine de la mémoire, susciter la mise en œuvre d’opérations d’encodage et de récupération plus efficaces) ;
  2. Apprendre aux personnes des connaissances spécifiques (faits ou habiletés) en utilisant des techniques d’apprentissage appropriées qui limitent la production d’erreurs ;
  3. Aménager l’environnement des personnes et confier une partie des fonctions déficitaires à un support physique afin de diminuer l’impact des déficits cognitifs sur le fonctionnement professionnel (par exemple, dans le domaine de la mémoire, l’utilisation d’un carnet mémoire).
Il existe à ce jour très peu d’études ayant adopté une telle démarche dans la schizophrénie (e. g., Kern et al., 2002 ; McGurk et al., 2005).

10 L’étude que nous présentons dans cet article avait deux objectifs complémentaires basés sur le modèle de McGurk et Mueser (2004).
– Le premier était d’analyser spécifiquement une partie du modèle, à savoir la nature des relations entre les déficits mnésiques, la symptomatologie négative et le comportement au travail de personnes atteintes de schizophrénie.
– Le deuxième était de développer une approche de remédiation des déficits cognitifs « sur mesure » et ciblée sur les difficultés fonctionnelles rencontrées par chaque personne prise individuellement. Conformément au modèle de hiérarchie des processus cognitifs de McGurk et Mueser (2004), les fonctions cognitives sur lesquelles les interventions de remédiation devaient porter préférentiellement étaient identifiées pour chaque personne en particulier. Les prises en charges cognitives ont concerné les déficits de mémoire à long terme, de mémoire de travail et du contrôle attentionnel. De plus, les programmes de remédiation cognitive ont visé des difficultés rencontrées au travail mais également des plaintes émises par les patients dans leur vie quotidienne. Dans cette optique, notre approche individualisée de remédiation cognitive, peu exploitée à ce jour dans la schizophrénie, a fait l’objet de premières études sur le plan de l’insertion à la fois professionnelle et sociale.

Méthodologie

11 L’étude présentée dans cet article [2] a été réalisée dans le cadre d’une collaboration avec l’association Route Nouvelle Alsace (RNA), dont l’objectif est la réinsertion professionnelle de personnes présentant un handicap psychique. Dans cette perspective, cette association a développé trois structures de réinsertion, un Établissement et service d’aide par le travail (ESAT), une Entreprise adaptée (EA) et un Service d’insertion en milieu ordinaire de travail (SIMOT). L’ESAT est une structure qui propose un travail à raison de 28 heures par semaine, sans impératif de rendement, encadré par des moniteurs professionnels et une infirmière chargée du suivi médico-social. Le travailleur ne reçoit pas de salaire véritable, mais perçoit une garantie de ressources allouée par l’État. L’Entreprise adaptée propose un véritable contrat de travail à plein-temps ou à mi-temps avec des impératifs de production, assorti d’un salaire et d’un accompagnement réalisé par les seuls moniteurs. Enfin, le Service d’insertion en milieu ordinaire de travail propose un accompagnement individuel et personnalisé de travailleurs bénéficiant d’un emploi classique, non protégé.

Partie 1 : étude des relations entre déficits cognitifs, symptomatologie clinique et insertion professionnelle

Participants

12 Trente-neuf personnes ont été recrutées : vingt et une personnes travaillant à l’ESAT, onze personnes travaillant à l’EA et sept personnes travaillant en milieu ordinaire. Elles répondaient aux critères de schizophrénie ou de déficit schizo-affectif du DSM-IV, et présentaient un état clinique et une insertion professionnelle stabilisés depuis au moins six mois. Les personnes présentant des antécédents neurologiques ou une dépendance aux drogues ont été exclues.

Évaluations

13 Les fonctions cognitives ont été évaluées à l’aide d’épreuves cognitives spécifiques (voir tableau 1) et comprenaient : la mémoire à long terme (verbale et visuelle) ; la mémoire de travail ; les fonctions attentionnelles ; les fonctions exécutives. Le bilan cognitif comportait deux sessions d’une durée de 1 h 30 chacune. La symptomatologie clinique a été évaluée lors d’un entretien semi-structuré d’environ une demi-heure à l’aide de l’échelle Positive and Negative Syndrome Scale (PANSS; Kay et al., 1986). Enfin, la qualité du travail a été évaluée à l’aide du Work Behavior Inventory (WBI; Bryson et al., 1997). Celui-ci est un instrument d’évaluation du comportement au travail conçu spécifiquement pour les personnes atteintes d’une maladie psychiatrique. Il se compose de 35 items répartis en cinq sous-échelles (7 items par sous-échelle) évaluant les habiletés sociales, les capacités de coopération, les habitudes de travail, la qualité du travail et la présentation personnelle. La cotation était réalisée après une période d’observation directe de la personne au travail et un entretien avec son responsable du lieu de travail. Cette partie de la recherche a nécessité la traduction et la validation préalable du WBI.

Tableau 1

Bilan cognitif

Tableau 1
Fonctions cognitives évaluées Épreuves cognitives Mémoire épisodique verbale • Mémoire logique (MEM-III, Wechsler, 2001) • Rappel libre/indicé à 16 items (Van der Linden et al, 2004). Mémoire épisodique visuelle • Reconnaissance de visages (MEM-III) Mémoire de travail • Séquence lettre s-chiffres (MEM-III) • Mémoire des chiffres (MEM-III) Attention divisée • Attention divisée TEA (Zimmerman et Fimm, 1994) Attention soutenue • Continu ou s Performance Test (Cornblatt, Risch, Faris, Friedman, et Erlen-Meyer-Kimling, 2004). Vitesse de traitement de l’information non verbale • Temps de réaction des tests de la TEA (flexibilité, go-nogo II, incompatibilité) et du code de la WAIS-III (Wechsler, 2000). Fonctions executives : • Flexibilité • TMT B-A (Reitan, 1958) • Flexibilité TEA • Inhibition • Go-nogo II TEA • Incompatibilité TEA • Planification • Test des 6 éléments (Garnier, Enot-Joyeux, Jokic, Le Thiec, Desgranges, & Eustache, 1998) • Test des commissions (Martin, 1954) Estimation de l’intelligence prémorbide • Version française de l’échelle National Adult Reading Test (Mackinnon et Mulligan, 2005)

Bilan cognitif

Analyses statistiques

14 Des analyses de régression multiple pas à pas (inclusion ascendante) ont été réalisées pour déterminer les variables explicatives du comportement au travail de personnes schizophrènes. Avec un effectif réduit de trente-neuf participants et pour ne pas ainsi affecter la puissance statistique, seules les trois variables explicatives concernant le fonctionnement mnésique ont été prises en compte pour une analyse : la mémoire épisodique verbale différée (i. e., mémoire des informations personnellement vécues dans le passé proche et lointain), la capacité d’apprentissage en mémoire épisodique verbale et la mémoire de travail. Les données brutes obtenues aux tests mnésiques ont été transformées en données standardisées (Z-scores) basées sur les normes publiées des tests. Ces scores obtenus aux différents tests ont été moyennés pour chaque variable cognitive étudiée afin d’obtenir un score global. Le score obtenu à la sous-échelle évaluant les symptômes négatifs de la PANSS a également été introduit comme variable explicative. Des analyses de régression multiple pas à pas ont été conduites pour chaque variable dépendante : le score total et les scores obtenus aux cinq sous-échelles du WBI.

Partie 2 : programme de remédiation cognitive individualisée

Participants

15 Sept personnes issues de structures de réinsertion professionnelle (association RNA de Strasbourg) et sociale (asbl Réflexions de Liège) ont été incluses dans un programme de remédiation cognitive individualisé. Les personnes répondaient aux critères de schizophrénie du DSM-IV, leur état clinique et leur insertion professionnelle étaient stabilisés depuis plus de 6 mois et elles ne présentaient pas d’antécédents neurologiques ou une dépendance aux drogues. Elles ont été recrutées sur la base des difficultés objectives qu’elles rencontraient dans leur activité professionnelle et/ou quotidienne, difficultés dont elles se plaignaient et qui étaient attestées par leur entourage et/ou par un moniteur d’encadrement. Les critères d’inclusion pour la remédiation cognitive impliquaient également une conscience suffisante de la part des personnes de leur pathologie et de leurs difficultés cognitives, et une motivation à s’inscrire dans un tel programme.

Évaluations

16 Avant toute intervention de remédiation cognitive, une évaluation des fonctions cognitives a été réalisée à l’aide du bilan présenté ci-dessus. Elle a été complétée chaque fois que nécessaire par des épreuves cognitives permettant d’approfondir l’évaluation d’un ou plusieurs domaines cognitifs spécifiques posant problème pour la personne. La symptomatologie clinique a été également évaluée. Le fonctionnement de la personne à son travail et/ ou dans son quotidien a fait l’objet d’une évaluation approfondie à l’aide de différents questionnaires et d’entretiens. Ces évaluations ont été répétées à la fin de la période de remédiation pour les comparer aux évaluations réalisées avant la remédiation.

Méthodes et analyses statistiques

17 La méthodologie du cas unique a été utilisée. L’approche de remédiation cognitive consistait à cibler de manière spécifique des objectifs de remédiation cognitive en lien direct avec les difficultés que chaque personne, prise individuellement, présentait dans sa vie professionnelle et/ou quotidienne (i. e., difficultés fonctionnelles). Pour cela, la phase d’évaluation pré-intervention avait pour but, d’une part, d’identifier la ou les composantes cognitives déficitaires, les éventuelles capacités préservées et de possibles facteurs d’optimisation (i. e., performances cognitives préservées sur lesquelles la remédiation peut s’appuyer pour compenser d’autres performances cognitives déficitaires) et, d’autre part, d’interpréter les difficultés fonctionnelles à partir du profil de déficits cognitifs de la personne. Ces deux types d’informations (profil cognitif et analyse des difficultés fonctionnelles) étaient ensuite confrontés pour l’élaboration de stratégies de remédiation spécifiques centrées sur les différents objectifs fonctionnels établis en concertation avec la personne. L’efficacité et la spécificité des interventions ont été évaluées à l’aide d’un paradigme en lignes de base multiples, adaptées à une approche en cas unique. Cette évaluation reposait à la fois sur des mesures cognitives, des mesures du fonctionnement professionnel et/ou quotidien et des mesures de la symptomatologie clinique. Des analyses statistiques utilisant la méthode du chi-carré ont été réalisées pour comparer les scores pré et post-remédiation. Une comparaison des scores obtenus au bilan cognitif pré et post-remédiation était également réalisée pour identifier des changements éventuels du fonctionnement cognitif suite à la remédiation cognitive. Les remédiations cognitives étaient réalisées sur une période de 3 mois, à raison de deux séances par semaine d’une durée chacune de 90 minutes.

Résultats

Étude des relations entre déficits mnésiques, symptomatologie clinique et insertion professionnelle

18 Les résultats de l’analyse de régression multiple indiquaient que le seul prédicteur du score total à l’échelle évaluant le comportement au travail des personnes en situation de handicap psychique était la mémoire épisodique verbale différée qui expliquait 19 % de la variance. Concernant les composantes du comportement au travail, la mémoire épisodique verbale différée expliquait 26 % de la variance dans la qualité du travail, 15 % de la variance dans les capacités de coopération et 11 % de la variance dans la présentation personnelle. La capacité d’apprentissage en mémoire épisodique verbale expliquait 11 % de la variance dans les habitudes de travail. La mémoire de travail n’intervenait pas comme variable explicative des composantes du comportement de la personne au travail. Enfin, les symptômes négatifs expliquaient 25 % de la variance dans les habiletés sociales et 14 % de la variance dans la présentation personnelle (voir résultats détaillés, tableau 2). Ainsi, les habiletés sociales étaient uniquement expliquées par la symptomatologie négative, les capacités de coopération et la qualité du travail uniquement par la mémoire épisodique verbale différée, et les habitudes de travail par la capacité d’apprentissage en mémoire épisodique verbale.

19 Seule la composante « présentation personnelle » était expliquée par deux prédicteurs, la mémoire épisodique verbale et les symptômes négatifs, les deux rendant compte de 25 % de la variance.

Tableau 2

Résultats des analyses de régression multiple

Tableau 2
Variable dépendante Variable explicative Part de variance expliquée Équation pour la variable explicative Équation pour le modèle Score total Mémoire différée 18 % F (1,35) = 8.33 p = 0.007 R2ajusté =. 22 F (3,35) = 6.29 p = 0.005 Habilités sociales PANSS négatif 25 % F (1,35) = 11.97 p = 0.01 R2ajusté = 0.27 F (3,35) = 8.16 p = 0.001 Capacités de coopération Mémoire différée 15 % F (1,35) = 6.12 p = 0.02 R2ajusté = 0.13 F (3,35) = 2.97 p = 0.04 Habitudes de travail Potentiel d’apprentissage 11 % F (1,35) = 4.46 p = 0.04 R2ajusté = 0.08 F (3,35) = 4.46 p = 0.04 Qualité du travail Mémoire différée 26 % F (1,35) = 13.05 p < 0.001 R2ajusté = 0.24 F (3,35) = 7.13 p = 0.002 Présentation personnelle PANSS négatif 14 % F (1,35) = 5.84 p = 0.02 R2ajusté = 0.18 F (3,35) = 5.21 p = 0.01 Mémoire différée 11 % F (1,35) = 4.36 p = 0.04

Résultats des analyses de régression multiple

Approche de remédiation cognitive individualisée et centrée sur les difficultés d’insertion professionnelle et/ou de la vie quotidienne dans les 7 cas étudiés

20 Cas 1  : Une première étude (Offerlin-Meyer et al., 2007) a été réalisée avec une personne schizophrène travaillant à l’ESAT de l’association RNA. Elle présentait des déficits spécifiques en mémoire de travail qui concernaient les fonctions de charge mentale (i. e., stockage et manipulation de l’information) et de gestion des interférences (i. e., coordination de deux tâches simultanément). Ces déficits ont été mis en relation avec trois séries de difficultés dans la vie quotidienne et professionnelle de la personne : mémoriser simultanément plusieurs informations, effectuer une tâche dans un environnement bruyant et se concentrer. Pour cette personne, un programme de remédiation de la mémoire de travail (Duval, Seron et Coyette, 2008) ciblé sur les fonctions « charge mentale » et « gestion des interférences » a été appliqué selon deux étapes successives : le but était, dans un premier temps, de rendre la personne capable d’acquérir des stratégies cognitives soulageant la charge mentale et limitant les interférences et, dans un deuxième temps, d’appliquer ces stratégies dans des tâches de la vie quotidienne. De nettes améliorations ont été obtenues dans les tâches ciblées et se sont généralisées à d’autres fonctions qui n’avaient pas fait l’objet d’une remédiation spécifique. Concernant le parcours professionnel de cette personne, il est à noter qu’à mi-revalidation, elle a intégré l’EA avant d’obtenir un mi-temps en contrat à durée indéterminée en milieu ordinaire de travail.

21 Cas 2  : Dans une deuxième étude réalisée chez une personne schizophrène travaillant à l’Entreprise Adaptée de RNA, des difficultés du contrôle attentionnel ont été mises en relation avec de fréquentes pensées intrusives qui perturbaient son activité professionnelle. Le but de la remédiation cognitive était d’apprendre à la personne à augmenter ses capacités de contrôle attentionnel (i. e., allouer son attention de manière flexible) et à réduire la tendance à la focalisation attentionnelle sur soi par une technique d’entraînement de l’attention (Attention Training Technique, Wells, 2005). La technique consiste en des exercices d’attention auditive externe ciblés sur trois fonctions attentionnelles : l’attention sélective (i. e., capacité à maintenir son attention sur un stimulus ou une tâche en cours), la flexibilité attentionnelle (i. e., capacité à déplacer son attention entre plusieurs stimuli) et l’attention divisée (i. e., capacité à réaliser plusieurs tâches en même temps). Des exercices à domicile étaient inclus pour permettre le transfert des bénéfices à la vie quotidienne et professionnelle. Les fonctions cognitives ciblées spécifiquement par le programme se sont grandement améliorées et cette amélioration s’est maintenue 6 mois après la remédiation. La personne rapportait une réduction des pensées intrusives dans sa vie quotidienne et professionnelle et une augmentation du contrôle attentionnel sur ses pensées. Son comportement au travail s’est amélioré sur les 6 mois après l’intervention. De plus, une réduction de la symptomatologie positive (e. g., délires, méfiance) en lien avec les pensées intrusives était observée après la remédiation et sur la période de suivi à 6 mois.

22 Cas 3  : Une troisième étude (Offerlin-Meyer et Danion, 2007) a été réalisée chez une personne schizophrène qui travaillait également à l’ESAT de l’association RNA. Les difficultés émises par la personne étaient cependant centrées sur sa vie quotidienne : retenir l’histoire d’un livre, se souvenir d’articles faisant pourtant référence à son sport favori, ou encore se rappeler du contenu du journal télévisé. Le bilan cognitif a permis de confirmer les plaintes de la personne en objectivant des difficultés à organiser l’information à l’encodage qui se traduisent notamment par des difficultés à mémoriser et à restituer des récits, indépendamment de la modalité de présentation (écrit, oral). Ces observations ont mené à l’élaboration d’une intervention focalisée sur l’apprentissage d’une stratégie de structuration de l’encodage, afin de pouvoir mémoriser un matériel cohérent et significatif comme le contenu d’un livre, ou d’articles de journaux. Après l’intervention cognitive, la personne rappelait près de 85 % d’informations, alors que son score n’était que d’environ 30 % en pré-remédiation. En ce qui concerne les tâches de mémoire épisodique verbale, une amélioration des performances était observée. La personne affirmait être en mesure de mieux organiser son travail et par conséquent de mieux se souvenir de ses actes ou lectures. Ces progrès étaient également observés et confirmés par ses parents.

23 Cas 4  : Dans une quatrième étude (Levaux et al., 2008), une personne schizophrène présentait un déficit spécifique de mise à jour en mémoire de travail (c’est-à-dire une difficulté à modifier de façon flexible et continue le contenu de la mémoire de travail en fonction de l’arrivée de nouvelles informations). Ce déficit a été mis en relation avec les difficultés rencontrées par la personne dans sa vie quotidienne : suivre une conversation ou une émission de radio, comprendre le déroulement d’un récit lu. Sur la base du profil cognitif et des plaintes de la personne, un programme de remédiation de la fonction de mise à jour de la mémoire de travail (Duval et al., 2008) a été élaboré et appliqué. Dans un premier temps, le but était de rendre la personne capable d’acquérir des stratégies cognitives soulageant la charge mentale subie par la mémoire de travail, grâce à des exercices de mises à jour de complexité croissante. Dans un deuxième temps, la personne a appris à appliquer ces stratégies dans des tâches de la vie quotidienne impliquant la fonction de mise à jour. Les résultats de l’étude ont montré l’efficacité et la spécificité de l’intervention centrée sur la mise à jour et la généralisation des effets bénéfiques aux activités de la vie quotidienne de la personne.
Cas 5  : Les résultats de ce programme de mise à jour en mémoire de travail viennent d’être répliqués chez une deuxième personne schizophrène dont le profil cognitif et les plaintes émises orientaient également la prise en charge vers la mémoire de travail. Les résultats obtenus après remédiation sont à nouveau très encourageants, tant sur le plan des améliorations cognitives que sur le plan des améliorations fonctionnelles. Un suivi à long terme est en cours.
Cas 6 et 7 Une sixième étude (pour la présentation d’un des deux cas, voir Levaux et al., soumis) a été réalisée chez deux personnes schizophrènes présentant différentes difficultés dans la vie quotidienne, lesquelles ont nécessité la mise en place d’interventions spécifiques. Face à des difficultés de mémorisation de textes (livres, articles) communes aux deux personnes, une stratégie d’organisation du matériel à l’encodage et à la récupération leur a été apprise (telle que celle employée dans l’étude décrite ci-dessus, Offerlin-Meyer et Danion, 2007). Une intervention centrée sur la mémoire de travail a été proposée afin de diminuer les difficultés exprimées par les deux personnes pour suivre les conversations ainsi que les émissions TV ou radios. Pour l’une des personnes qui se plaignait d’oublier des rendez-vous ou des tâches à effectuer dans sa vie quotidienne, l’utilisation d’un carnet-mémoire (agenda) lui a été apprise. Pour l’autre personne qui éprouvait des difficultés à apprendre les informations factuelles nécessaires à l’obtention de la partie théorique du permis de conduire, une technique d’apprentissage sans erreur a été appliquée. Ces différentes interventions centrées sur les plaintes ont été parfaitement acceptées par les deux personnes. Suite à l’intervention, celles-ci étaient autonomes dans l’application des stratégies apprises, montraient des améliorations sur toutes les mesures de résultats et faisaient état de progrès dans leur vie quotidienne pour tous les objectifs ciblés. La spécificité des interventions a été démontrée par le fait que d’autres fonctions cognitives déficitaires mais non prises en charge ne montraient pas d’amélioration chez les deux personnes. Par ailleurs, un suivi à long terme (3 ans après la fin de la prise en charge) a été réalisé chez l’une des deux personnes et a démontré le transfert durable des différents apprentissages dans la vie quotidienne.

Discussion et conclusion

24 Dans l’étude présentée dans le présent article, deux types d’investigation ont été réalisés :

  • d’une part, une analyse de la nature des liens entre les fonctions mnésiques, les symptômes négatifs et le comportement au travail des personnes schizophrènes ;
  • d’autre part, une approche de remédiation cognitive individualisée et centrée sur les difficultés de la vie professionnelle et quotidienne.
L’analyse de l’influence des fonctions mnésiques et de la symptomatologie négative sur le comportement au travail des personnes schizophrènes indique que la mémoire épisodique verbale différée a un impact sur la mesure globale du comportement, les capacités de coopération, la qualité du travail et la présentation personnelle. La capacité d’apprentissage en mémoire épisodique verbale joue un rôle dans les habitudes de travail. En revanche, la mémoire de travail ne semble pas exercer une influence sur le comportement au travail. Enfin, les symptômes négatifs déterminent en partie les habiletés sociales et la présentation personnelle.

25 Ces résultats concordent avec ceux d’une étude réalisée par Evans et ses collaborateurs (2004). Celle-ci a examiné les facteurs prédictifs cognitifs (apprentissage verbal, mémoires à long et court terme, attention, vitesse de traitement de l’information et fonctions exécutives) et cliniques (symptomatologie) du comportement au travail de personnes souffrant de schizophrénie. Les auteurs ont montré que la mémoire différée intervenait, de manière identique aux résultats de notre étude, dans la mesure globale du comportement ainsi que dans les capacités de coopération et la qualité du travail. De plus, les symptômes cliniques étaient liés, comme dans notre étude, aux habiletés sociales. Il semble ainsi que des relations fortes existent entre, d’une part, la rétention en mémoire à long terme et les symptômes cliniques, et d’autre part, des composantes spécifiques du comportement au travail chez les personnes schizophrènes bénéficiant de structures de réinsertion.

26 Il sera intéressant de poursuivre notre étude pour l’analyse du modèle complet de McGurk et Mueser (2004) en incluant d’autres facteurs cognitifs (fonctions exécutives et attentionnelles) afin d’affiner la nature des relations entre les différents domaines cognitifs (attention, fonctions mnésiques et fonctions exécutives), la symptomatologie clinique et le niveau d’insertion professionnelle. Cependant, comme précisé dans l’étude de McGurk et Mueser (2006) et afin de considérer le caractère dynamique temporel de ces relations, il sera pertinent de les analyser en tenant compte du nombre d’années d’usage des services de soutien à l’emploi par les personnes schizophrènes. Enfin, la nature complexe des relations envisagées dans cette étude met en évidence la nécessité de mener des prises en charge individualisées qui permettent de prendre en compte les particularités d’une personne en interaction avec son environnement professionnel.

27 Les résultats des sept remédiations cognitives réalisées à ce jour sont très encourageants dans la mesure où ils témoignent de l’efficacité des interventions de remédiation mises en place. Ils indiquent qu’une remédiation de fonctions cognitives taillée sur mesure en fonction des difficultés rencontrées par les personnes dans la vie professionnelle et/ou quotidienne, et élaborée spécifiquement sur base d’une exploration individualisée du fonctionnement cognitif, constitue une approche prometteuse. De plus, ces interventions ont été très bien acceptées par les personnes qui disaient être motivées par leur(s) objectif(s) concrets et fixés en lien avec les difficultés rencontrées dans leur vie quotidienne et/ou professionnelle. Deux d’entre elles présentaient des plaintes en lien direct avec la réalisation de leur travail à l’association RNA. Suite à l’application d’un programme de remédiation ciblé qui a concerné des fonctions cognitives intégrées (la mémoire de travail et le contrôle attentionnel), ces personnes ont rapporté des améliorations dans la qualité de leur travail. De plus, par la suite, l’une des personnes a connu une ascension professionnelle en intégrant progressivement le milieu ordinaire de travail. Ces résultats préliminaires vont dans le sens d’un réel bénéfice de ce type d’intervention cognitive pour compenser les déficits cognitifs par rapport à la qualité du travail et le niveau d’insertion professionnelle.
Les interventions futures devront également se fonder sur des évaluations encore plus détaillées afin d’explorer plus finement les processus cognitifs impliqués dans les activités de la vie professionnelle et/ou quotidienne. Il s’agira par exemple d’évaluer les capacités de la personne en lui demandant de simuler ces activités ou, autant que possible, de l’observer directement dans la réalisation d’activités réelles. Une identification plus précise des processus cognitifs impliqués dans des activités spécifiques de la vie professionnelle et/ou quotidienne devrait conduire à une meilleure sélection des stratégies à adopter en fonction de différents types de difficultés fonctionnelles et de différents types de déficits cognitifs. Il importe néanmoins que cette évaluation dans la vie quotidienne et/ou professionnelle et les analyses de tâches qui en découlent soient toujours réalisées en référence à un cadre interprétatif cognitif. Il reste, évidemment, à continuer l’évaluation des effets à long terme de ce type d’intervention. Enfin, il est important de souligner que ce type de remédiation devrait idéalement être effectué au sein de structures pluridisciplinaires proposant des prises en charge coordonnées, notamment pharmacologique, psychothérapeutique, cognitive et sociale, pour une meilleure efficacité.

Annexe

Modèle des relations entre la cognition, les symptômes et l’insertion professionnelle dans la schizophrénie

figure im3

Modèle des relations entre la cognition, les symptômes et l’insertion professionnelle dans la schizophrénie

Source : d’après McGurk & Mueser, 2004)

Notes

  • [*]
    Marie-Noëlle Levaux : Unité de psychopathologie cognitive, Université de Liège et Unité INSERM 666, « Physiopathologie clinique et expérimentale de la schizophrénie », Strasbourg.
  • [**]
    Isabelle Offerlin-Meyer : Unité INSERM 666 (Strasbourg) et Hôpitaux universitaires de Strasbourg, Service de psychiatrie I.
  • [***]
    Frank Larøi : Unité de psychopathologie cognitive (Liège).
  • [****]
    Martial Van der Linden : Unité de psychopathologie cognitive (Liège) et Secteur de psychopathologie et neuropsychologie cognitive, Université de Genève.
  • [*****]
    Jean-Marie Danion : Unité INSERM 666 (Strasbourg) et Secteur de psychopathologie et neuropsychologie cognitive (Genève).
  • [1]
    Voir également dans ce numéro l’article de Christine Passerieux et Nadine Bazin : « La rééducation cognitive : évaluation des résultats » (ndlr).
  • [2]
    Cet article est issu d’une recherche financée dans le cadre du programme de recherche de la Mire (Mission Recherche de la DREES) sur le Handicap psychique (appel d’offres 2005).
Français

Résumé

Les difficultés d’insertion professionnelle sont l’une des caractéristiques majeures du handicap psychique lié à la schizophrénie. Les troubles cognitifs et les symptômes cliniques en sont la cause principale. Cependant, la nature de leurs relations avec l’insertion professionnelle reste mal connue. Cet article présente les résultats d’une étude examinant l’influence des fonctions mnésiques et des symptômes négatifs sur 5 composantes du comportement au travail chez 39 personnes schizophrènes en réinsertion professionnelle. Un deuxième volet de l’étude présente une approche de remédiation cognitive « sur mesure » qui cible des objectifs en lien direct avec les difficultés professionnelles et/ou quotidiennes de la personne. Les programmes ont concerné les fonctions mnésiques et le contrôle attentionnel. Les analyses indiquent que la mémoire à long terme verbale exerce une influence sur les capacités de coopération, la qualité du travail et la présentation personnelle. La capacité d’apprentissage d’informations verbales joue un rôle dans les habitudes de travail. La mémoire de travail qui permet le traitement et le maintien de l’information à court terme ne semble pas exercer une influence sur le comportement au travail. Enfin, les symptômes négatifs déterminent en partie les habiletés sociales et la présentation personnelle. Les résultats des interventions cognitives montrent leur efficacité pour compenser les déficits cognitifs dans l’insertion professionnelle et sociale.

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Marie-Noëlle Levaux [*]
Doctorante à l’université Louis-Pasteur de Strasbourg, attachée à l’unité INSERM 666 de Strasbourg et à l’unité de psychopathologie cognitive de l’université de Liège. Ses domaines de recherche portent sur la schizophrénie et la prise en charge cognitive.
  • [*]
    Marie-Noëlle Levaux : Unité de psychopathologie cognitive, Université de Liège et Unité INSERM 666, « Physiopathologie clinique et expérimentale de la schizophrénie », Strasbourg.
Isabelle Offerlin-Meyer [**]
Neuropsychologue aux hôpitaux universitaires de Strasbourg, au sein de l’équipe clinique du professeur Jean-Marie Danion et doctorante à l’université Louis-Pasteur de Strasbourg. Ses domaines de recherche portent sur la schizophrénie et la prise en charge cognitive.
  • [**]
    Isabelle Offerlin-Meyer : Unité INSERM 666 (Strasbourg) et Hôpitaux universitaires de Strasbourg, Service de psychiatrie I.
Frank Larøi [***]
Docteur en sciences psychologiques, assistant-chercheur à l’unité de psychopathologie cognitive de l’université de Liège. Ses recherches portent sur la schizophrénie, les hallucinations et idées délirantes, la mémoire, la conscience de la maladie dans les psychoses, les émotions et cognition.
  • [***]
    Frank Larøi : Unité de psychopathologie cognitive (Liège).
Martial Van der Linden [****]
Docteur en sciences psychologiques, professeur extraordinaire à la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation et directeur de l’unité de psychopathologie cognitive de l’université de Liège, professeur ordinaire à la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation et directeur de l’unité de psychopathologie et neuropsychologie cognitive de l’université de Genève. Ses domaines de recherche portent sur la neuropsychologie et la psychopathologie cognitive de l’adulte.
  • [****]
    Martial Van der Linden : Unité de psychopathologie cognitive (Liège) et Secteur de psychopathologie et neuropsychologie cognitive, Université de Genève.
Jean-Marie Danion [*****]
Docteur en médecine, professeur à la faculté de médecine de Strasbourg, praticien hospitalier, directeur de l’Unité INSERM 666 : « Physiopathologie et psychopathologie cognitive de la schizophrénie ». Ses domaines de recherche portent sur la psychopathologie cognitive de la schizophrénie.
  • [*****]
    Jean-Marie Danion : Unité INSERM 666 (Strasbourg) et Secteur de psychopathologie et neuropsychologie cognitive (Genève).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 01/03/2010
https://doi.org/10.3917/rfas.091.0237
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