Dimensions de l’identité

1Le dossier thématique de ce numéro s’intéresse à différentes dimensions de l’identité. Il s’appuie sur la réflexion menée à l’occasion de l’exploitation dans le cadre d’un appel à projets de recherche des données de l’enquête nationale de l’INSEE intitulée « Histoire de vie », qui a eu lieu en 2003.

2L’enquête visait en effet à saisir les composantes de l’identité en repérant la manière dont les personnes définissent leur(s) identité(s), comment celles-ci se combinent et quels sont les processus de construction du lien social. Un appel à projets de recherche a été lancé par la Mission Recherche (MiRe) de la DREES auprès des chercheurs de différentes disciplines en sciences humaines et sociales en 2004 [1]. Il leur proposait de mobiliser et d’exploiter les données de cette enquête pour conduire des recherches diversifiées autour de la question des identités. Quatre axes de recherches avaient été définis : trajectoires de vie et construction identitaire, intégration et référents identitaires, ruptures biographiques et remaniements identitaires, et déni identitaire et discriminations.

3« La notion d’identité a des définitions multiples dans la vie courante, les médias, les travaux philosophiques ou scientifiques […]. Or les définitions et les degrés de pertinence de cette notion sont au cœur de plusieurs paradoxes et polémiques qu’il importe de connaître et comprendre […] » Ainsi commence l’article de Claude Dubar qui introduit ce dossier. L’auteur se livre à une nécessaire mise à plat des différents usages de cette notion et en définit quatre types : l’usage philosophique, l’usage psychologique de l’identité du Soi, l’usage interactionniste et l’usage nominaliste fondé sur l’analyse des appellations, des trajectoires biographiques et des espaces d’identification.

4C’est essentiellement à ce dernier domaine que se sont intéressés les auteurs des autres articles qui composent ce dossier.

• Trois articles exploitent des données collectées dans l’enquête « Histoire de vie » dans le cadre du programme présenté plus haut :
  • le premier explore le sentiment d’appartenance à une classe sociale exprimé par les membres des professions intermédiaires lors de l’enquête. Agnès Pelage et Tristan Poullaouec cherchent à mesurer jusqu’à quel point ces membres sont réunis par un sentiment d’appartenance de classe ;
  • dans le deuxième, Maks Banens et Anne Marcellini présentent les résultats des travaux qu’ils ont menés avec leur équipe à partir de l’enquête, sur l’accès des personnes vivant avec un problème de santé durable et handicapant, à la vie de couple. S’il y a une forte diminution des chances de s’engager dans une vie de couple quand on vit avec un problème de santé nécessitant une aide humaine, ils constatent en revanche que lorsque le problème de santé apparaît en cours d’union, il y a un bon maintien des couples. Les auteurs montrent par ailleurs l’importance pour la vie de couple du rôle de la (re)construction identitaire comme « personne handicapée » ;
  • le troisième s’attache aux loisirs des populations issues de l’immigration. L’analyse des données de l’enquête en la matière, permet à Philippe Coulangeon de faire apparaître qu’alors que culture savante et culture de masse sont couramment opposées, les pratiques observées apparaissent assez peu sensibles à l’« origine ». En revanche, hommes et femmes ne sont pas égaux face aux pratiques savantes. Enfin, les seules activités pour lesquelles s’observent des écarts importants selon l’« origine » sont celles qui échappent à la fois à l’influence des médias et à celle de l’école.
• À partir d’archives et de récits de vie, l’historienne Anne-Sophie Bruno analyse le cas des migrants venus de la Tunisie postcoloniale dans les années soixante au regard de la question de l’identité. La décolonisation ayant été, en effet, l’occasion d’une redéfinition de la hiérarchie des populations qui prévalait auparavant, leur situation est emblématique des difficultés éprouvées par les individus pour faire coïncider la perception de leur identité personnelle avec la façon dont l’administration définit les catégories de population auxquelles les individus sont rattachés.

La situation des soins palliatifs en France

5Hors dossier, l’article de Jean-Christophe Mino et Anne Frattini passe en revue la situation des soins palliatifs en France et leur développement, dans une perspective de recherche en santé publique combinant études et interventions réalisées par les auteurs au cours des dix dernières années. Le panorama qu’ils tracent montre le caractère paradoxal de la situation, les insuffisances en matière d’organisation et les difficultés à améliorer cette dernière.

Le ministère du Travail a 100 ans : élaborations et mises en œuvre de ses politiques

6Une rubrique consacrée à l’actualité de la recherche présente une sélection de travaux, qui viennent d’être achevés, issus du programme de recherche : « Élaborations et mises en œuvre des politiques du travail : le ministère du Travail et la société française au xx^e siècle ».

7Lancé par le Comité d’histoire des administrations chargées du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (CHATEFP), ce programme a été conçu par la Mission Recherche (MiRe) de la DREES et l’Institut en recherches économiques et sociales (IRES) et a bénéficié du soutien financier de la DARES. Il s’est inscrit dans le cadre du centenaire du ministère du Travail et la Prévoyance sociale, qui a eu lieu en 2006. Il comportait un appel à projets qui entendait susciter des recherches visant à éclairer l’élaboration et la mise en œuvre des politiques dont le ministère du Travail a eu, ou a encore la charge, dans les champs du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle, de la prévoyance sociale et du logement social.
Dans ce numéro, on trouvera les notes de synthèse de cinq rapports de recherches effectuées dans ce cadre et qui portent sur :

8

• le rôle de l’administration centrale dans la fabrication du droit du travail par Jean-Luc Bodiguel et Jean-Pierre Le Crom ;
• le Comité du travail féminin crée en 1965 et supprimé en 1984 par Anne Revillard ;
• le rôle du ministère dans la protection sociale des travailleurs migrants dans l’entre-deux-guerres par Caroline Douki, David Feldman et Paul-André Rosental ;
• la régulation des relations professionnelles dans le secteur du grand commerce alimentaire de 1950 à nos jours par Sophie Le Corre et Jean Saglio ;
• l’émergence des statistiques du travail entre 1891 et 1967 par Béatrice Touchelay.