1Ce premier numéro de l’année 2007 est un numéro sans dossier thématique, ce qui permet d’accueillir des articles sur des sujets variés. Toutefois à l’exception de l’article d’Elizabeth Brown qui s’est intéressée à l’éducation des enfants dans le cadre familial, on notera que tous les autres articles interrogent l’État providence aussi bien d’un point de vue théorique qu’à travers l’examen de divers dispositifs de protection sociale (retraites, minima sociaux, système de santé).
Les femmes assument toujours une part prépondérante des activités parentales en France
2À partir des résultats de deux enquêtes effectuées en 1992 et 2003 et de leur comparaison, Elizabeth Brown [1] a analysé la participation de chacun des parents à des éléments constitutifs du cadre éducatif :
- la présence auprès des enfants en dehors du temps scolaire ;
- la fixation et le contrôle des règles de vie quotidienne ;
- l’éveil intellectuel et la participation à des activités extrascolaires.
Les dispositifs de minima sociaux ne permettent pas, notamment aux personnes isolées, d’échapper à la pauvreté
3Valérie Cohen et Brigitte Larguèze [2] se sont intéressées au vécu des personnes qui perçoivent depuis plusieurs années le revenu minimum d’insertion, l’allocation de solidarité spécifique ou l’allocation de parent isolé.
4Les entretiens qu’elles ont menés avec des allocataires en début ou en fin de parcours professionnel, ont fait apparaître la nécessité pour ces personnes de trouver des ressources complémentaires à celles procurées par les minima sociaux. Elles proviennent souvent de l’entraide familiale mais lorsque celle ci « est absente ou faible tant dans sa nature que dans son intensité, la quête d’autres sources de soutien s’impose pour [la] compenser ».
5Pour les personnes âgées, le minimum vieillesse a constitué le dispositif essentiel de leur protection sociale jusqu’au début des années soixante-dix. Depuis, avec l’arrivée à maturité des régimes de pensions de la sécurité sociale, le nombre de ces bénéficiaires n’a cessé de décroître. C’est ainsi qu’en 2005, 6 % des personnes âgées de plus de 65 ans, en majorité des femmes et des personnes isolées, percevaient encore le minimum vieillesse. Mais ce dispositif seul ne leur permet pas d’échapper à la pauvreté comme l’observent, sur la base de nombreuses données chiffrées, Hélène Chaput, Katia Julienne et Michèle Lelièvre [3].
Au Japon, l’évolution des modes de vie contraint à une réforme du système de pensions
6Le développement de l’activité professionnelle des femmes nippones a mis en évidence l’inadaptation du système de pensions à la nouvelle donne sociale ce qui a conduit à le réformer en 2004. Sayaka Dake [4], universitaire japonaise, décrit le système et ses réformes en faisant de fréquentes comparaisons avec la situation en France, ce qui permet au lecteur français de mieux apprécier les enjeux. La crise de confiance des assurés qui a résulté de ces difficultés, a eu pour conséquence de faire émerger un certain nombre de questions fondamentales pour le système japonais mais aussi pour tous les systèmes de protection sociale : la nature et l’étendue de la solidarité dans un système national ou encore le fondement de l’obligation d’être assuré et de cotiser.
Avec les assurances sociales, c’est la légitimité même de l’intervention publique qui s’est construite
7Les questions soulevées par Sayaka Dake rejoignent d’une certaine façon celles de Christophe Ramaux [5] sur l’État providence ou plus exactement l’État social. Il discute, vingt ans après sa parution en 1986, l’ouvrage de François Ewald L’État providence. Il se demande en effet si la référence aux catégories du risque et de l’assurance est susceptible de fonder une théorie de l’État social, (au sens large : la protection sociale, le droit du travail, les services publics et les politiques macroéconomiques de soutien à l’activité). Si les catégories du risque et de l’assurance sont précieuses pour rendre compte de la genèse de l’État social, pour lui, elles doivent être dépassées.
Le « médecin traitant » contribue à remettre en question l’ancien modèle de la médecine de ville en France
8Thomas Barnay, Laurence Hartmann et Philippe Ulmann [6] explorent une autre composante de la protection sociale : le système de soins. Ils analysent le sens et l’impact de la mise en place du « médecin traitant » sur les formes d’organisation et les outils de régulation du système. Cette réforme cumulée avec celles qui l’ont précédée, marque l’avènement d’un nouveau modèle de médecine ambulatoire, remettant ainsi peu à peu en question les principes de la charte de la médecine libérale. Certaines règles de l’ancien modèle perdurent cependant avec le maintien du paiement à l’acte et de la liberté d’installation des médecins ce qui conduit à des disparités territoriales d’offre de soins.
Notes
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[1]
Elizabeth Brown, « Les contributions des pères et des mères à l’éducation des enfants ».
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[2]
Valérie Cohen et Brigitte Larguèze, « “S’en sortir” sans pouvoir sortir des dispositifs : le cas d’allocataires de minima sociaux en début et en fin de parcours professionnel ».
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[3]
Hélène Chaput, Katia Julienne et Michèle Lelièvre, « L’aide à la vieillesse pauvre : la construction du minimum vieillesse ».
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[4]
Sayaka Dake, « Présentation du système japonais de pensions. Problématiques actuelles ».
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[5]
Christophe Ramaux, « Quelle théorie pour l’État social ? Apports et limites de la référence assurantielle. Relire François Ewald 20 ans après “L’État providence” ».
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[6]
Thomas Barnay, Laurence Hartmann et Philippe Ulmann, « Réforme du médecin traitant et nouveaux enjeux de la médecine de ville en France ».