1Enseignant, chercheur, conseiller, président du pôle européen de santé, des centres d’action médico-sociale précoce de Lorraine, du Conseil national consultatif des personnes handicapées, assesseur à la chambre d’application des peines de la cour d’appel de Nancy, membre associé du Conseil national de sécurité civile… Au fil de toutes ces missions professionnelles, Jean-Marie Schléret est resté un fidèle lecteur de la Revue française des Affaires sociales.
2• Depuis quand lisez-vous la Revue française des Affaires sociales ?
3Depuis toujours, je crois ! Il s’agit d’une bonne revue transversale dont on a besoin, afin de prendre un peu de hauteur sur le quotidien. J’ai en charge le social sur la ville de Nancy depuis 1989 et c’est un secteur qui va aussi bien dans le champ de la protection de l’enfance, que dans celui de la dépendance des personnes âgées et handicapées mais aussi, dans celui des personnes en grande difficulté. Nous avons des revues, comme Le journal de l’action sociale, qui traitent très bien de chacun de ces aspects. Mais, seule la Revue française des Affaires sociales est un support doctrinal vraiment bien charpenté et documenté. Cette revue est extrêmement intéressante et nous sert, à nous, les praticiens du quotidien. De plus, elle ne se cantonne pas à du franco-français et réalise des comparatifs entre les différents pays européens.
4• Quels sont les numéros qui vous ont le plus servis au quotidien ?
5Je pense notamment au numéro de décembre 2000 sur « Les interactions entre l’emploi et la protection sociale ». C’est un sujet d’actualité mais toujours traité sous l’angle de la rentabilité sociale immédiate. Or, la Revue française des Affaires sociales a su l’aborder comme une réflexion sur une organisation de société. Le numéro de mars 2000 sur « Les réformes des systèmes de protection sociale » m’avait beaucoup intéressé. Le numéro sur la « Santé, responsabilité et décisions » en 1996 était tout aussi constructif. Plus avant encore, en 1993, « Modernisation et innovations dans les services publics » est un numéro concret qui aborde des aspects de recherche appliquée (comparaisons, pratiques…). Dans le même esprit, je retiens le numéro sur « La décentralisation à l’épreuve du social et de l’emploi ». Et au moment où le RMI était voté en 1989, c’est la Revue française des Affaires sociales qui a conduit des réflexions de fond dans « Revenu minimum et pauvreté en Europe du Sud » publié en 1991, avec un comparatif qui dépassait largement la France. Ce sont des numéros qui restent d’actualité et je ne peux pas les abandonner ! Il s’agit de documents qu’on conserve. D’ailleurs, j’archive de nombreux articles de fond comme ceux sur l’éthique médicale, la protection sociale…
6• De lecteur assidu de la Revue française des Affaires sociales, vous êtes passé de l’autre côté de la barrière et êtes devenu, le temps d’un numéro, auteur…
7En effet, c’était en 1997. Le comité de rédaction de la Revue française des Affaires sociales m’a demandé de participer à la rédaction collective d’un numéro spécial, le numéro hors série, sur « Le vieillissement comme processus ». En tant qu’acteur de terrain, j’ai travaillé spécifiquement sur l’article : « Les personnes âgées dans la ville, vers un contrat médicosocial ». C’était une expérience très positive et formatrice.
8• Existe-t-il des thématiques qui vous ont particulièrement intéressé dans le passé et que vous souhaiteriez voir traiter à nouveau dans la Revue française des Affaires sociales ?
9Oui, les articles sur le handicap m’ont toujours interpellé. Et encore davantage aujourd’hui parce que je préside le Conseil national consultatif des personnes handicapées. Je pense que le moment est venu pour la Revue française des Affaires sociales d’aborder ce sujet à partir de la nouvelle loi sur le handicap qui est aujourd’hui à son point d’aboutissement, puisque tous les décrets sont parus. La revue pourrait faire à la fois l’historique de la préparation de cette loi (avancées, reculs, changements de ministres…) et le premier bilan après un an et demi d’application. J’aimerais y participer au titre d’auteur. Nous sommes aujourd’hui à la croisée des chemins dans de très nombreux domaines. Par exemple : près de vingt ans après la mise en place du RMI, comment a-t-il été vécu ? Un autre sujet qui va devenir d’actualité dans les prochains mois, c’est la protection de l’enfance. Je serais également intéressé pour rédiger sur ce thème car c’est mon métier de base : pendant quinze ans, j’ai dirigé la consultation d’orientation éducative du tribunal de Nancy.
10• Trouvez-vous que la revue a globalement bien évolué et vieilli ?
11Oui, sauf le titre ! Il est temps de le changer. À oublier : « affaires sociales » ! Il y a quelque chose à inventer autour des thèmes sociaux, santé, prévention. La présentation générale (couverture et mise en page) mériterait aussi d’être modifiée, car elle ressemble beaucoup à une revue scientifique. Les travailleurs sociaux sont des personnes qui ont besoin d’avoir, à période régulière, des temps forts de réflexion et d’approfondissement. Or, à ce jour, la Revue française des Affaires sociales ne me semble pas assez attractive pour eux. Elle leur paraît, à tort, être une revue de recherche fondamentale alors qu’elle est, en fait, un document de recherche appliquée dont ils ont précisément besoin pour faire le bilan de leurs actions et trouver des lignes de perspectives. Il faut attirer ces lecteurs. La Revue française des Affaires sociales doit être une revue qu’on a envie de se passer, qui servirait de base à des échanges et des discussions… À ce titre, sa mise en ligne sur internet devrait être développée. C’est un média désormais incontournable.
• Qui sont les lecteurs réguliers selon vous ?
Ce sont des personnes qui réalisent des mémoires, des travaux de recherche sur des thèmes particuliers. Il s’agit surtout de chercheurs et d’universitaires. La revue a du mal à trouver sa place dans les instituts de travail social. Et je ne parle pas des collectivités où elle est absente. Les conseils généraux sont pourtant une cible potentielle. Cela pourrait passer par des liens avec des revues qui ont une certaine notoriété dans les collectivités et qui pourraient faire référence aux articles de la Revue française des Affaires sociales. Un travail de communication reste à faire…