CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Professeur des universités à l’École normale supérieure de Cachan, Jacques Commaille est aussi président du conseil scientifique de la MiRe à la DREES. Et, lecteur occasionnel mais, convaincu, de la Revue française des Affaires sociales.

2Comment percevez-vous la Revue française des Affaires sociales ?

3Je suis frappé par la richesse des analyses proposées, ce qui témoigne de la qualité de la recherche effectuée dans les domaines de compétences de la revue. Cette revue possède tous les attributs d’une très bonne revue académique. Elle représente un excellent instrument de travail pour les chercheurs. Pour preuve, par exemple, l’usage fréquent que j’en fais dans mes enseignements au bénéfice de mes étudiants. Elle occupe une place originale dans le champ à côté de revues qui sont, soit plus généralistes, soit plus spécialisées. La seule revue avec laquelle elle mériterait peut-être d’être comparée est Lien social et Politiques et on imagine que des échanges pourraient être organisés entre ces deux revues.

4Pourtant, elle ne s’adresse pas uniquement à des chercheurs et des scientifiques ?

5Sans rien enlever à l’opinion très positive qu’on peut avoir sur la Revue française des Affaires sociales, il est néanmoins possible de considérer qu’il existe pour elle un problème de positionnement. Je serais curieux de savoir si une étude a été faite sur son lectorat et une évaluation de l’opinion de ce dernier concernant la politique éditoriale de la revue. Pour ce qui me concerne, j’estime qu’il y a une certaine ambiguïté portant sur les objectifs de la revue, sur ses cibles en terme de lecteurs : la Revue française des Affaires sociales est-elle d’abord une revue pour les professionnels du social, de la santé (fonctionnaires des administrations concernées, praticiens du social et de la santé, mouvements associatifs…) ? Est-elle une revue d’abord destinée aux chercheurs (chercheurs des grands organismes publics de recherche, universitaires) ? L’ambiguïté mériterait d’être levée et une doctrine ou une politique éditoriale clairement affirmée en la matière. Ceci interviendrait comme une nouvelle étape pour une revue qui a su se libérer d’un statut de simple organe d’expression d’une administration, mais peut-être au prix d’un accroissement d’« académisme », ce qui peut poser problème. De mon point de vue, la Revue française des Affaires sociales devrait être, en priorité, une revue destinée aux professionnels, ce qui n’enlèverait rien à l’intérêt que les chercheurs seraient toujours susceptibles de lui porter. Une telle option plus délibérée devrait entraîner des modifications dans la maquette et dans les contenus. Par exemple, le résumé des articles et la présentation des auteurs devraient être placés au début de l’article pour permettre à des lecteurs pressés de situer très vite le propos et d’où il vient. De même, des encadrés seraient bienvenus pour fournir des points d’informations sur la question faisant l’objet d’une analyse « savante ». Sur le contenu, la revue pourrait assumer d’être un véritable espace d’échanges et de confrontations. On pourrait ainsi concevoir des rubriques « Débats » liés au domaine sanitaire et social. En effet, beaucoup de questions font effectivement débat dans le domaine et ceci mériterait d’être nommé de front dans la revue. Enfin, je suis frappé par la pauvreté de la rubrique « Note de lecture » alors qu’il s’agit là d’un outil d’information de la plus grande utilité pour les professionnels. Les comptes rendus devraient être plus nombreux et porter aussi sur la littérature étrangère. Sur ce point, de façon plus générale, je trouve que les questions ne sont pas encore suffisamment traitées dans leur dimension européenne et, plus largement, internationale alors que c’est de plus en plus en référence à ces horizons que se construisent les politiques en la matière.

6Quels sont les articles ou les numéros qui vous ont le plus marqué ?

7Le numéro sur les réformes de la protection sociale en Europe est remarquable et, sans doute pour moi, exemplaire : les auteurs sont d’excellents spécialistes de la question, la dimension européenne est abordée de front, le dossier est parfaitement structuré.

8Que pensez-vous du lien entre les colloques et la revue ?
C’est bien, car il existe un vrai travail de transposition. La Revue française des Affaires sociales ne se contente pas de publier des « Actes », c’est-à-dire de reproduire tel quel le contenu des colloques. L’effort est fait de mettre en cohérence, de construire un ensemble équilibré d’articles autour de la thématique choisie. Ce choix de concevoir un numéro à partir d’une manifestation scientifique (colloque, séminaire ou encore programme de recherche réalisé sous l’égide de la MiRe ou de la DREES) me paraît offrir la possibilité à la Revue française des Affaires sociales de se situer positivement dans cette fonction stratégique d’intermédiaire entre la production de connaissances d’une part, et le besoin de connaissances d’autre part, exprimé par des professionnels engagés dans une action de plus en plus complexe sur le sanitaire et le social.

Mis en ligne sur Cairn.info le 01/03/2010
https://doi.org/10.3917/rfas.064.0126
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour La Documentation française © La Documentation française. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
keyboard_arrow_up
Chargement
Chargement en cours.
Veuillez patienter...