1Ce volume de la Revue française des Affaires sociales est un numéro de mélanges. Trois thématiques se dégagent cependant de la diversité des approches et des champs de recherches : tout d’abord les politiques sociales dans plusieurs pays européens (France, Espagne et Scandinavie), ensuite les politiques sanitaires et, enfin, une thématique rarement abordée dans la revue : le militantisme.
? Les politiques sociales
2Sous le terme très général de politiques sociales ont été regroupés des articles qui traitent, d’une part, de politiques publiques françaises en la matière et, d’autre part, d’aspects particuliers de la protection sociale dans des pays du sud et du nord de l’Europe. Le rapprochement de ces articles permet toutefois de faire émerger des problématiques qui traversent les dispositifs et les États, il s’agit :
- du délicat sujet de la décentralisation des dispositifs sociaux eux-mêmes, de leur gestion et de leur financement, qui questionne l’égalité de traitement des bénéficiaires en fonction des solutions adoptées ;
- de la transformation des modèles de protection sociale tels qu’ils se sont construits dans la deuxième moitié du XXe siècle.
Quelques aspects de politiques sociales en France
… en faveur des personnes âgées
3Deux articles s’intéressent aux politiques en faveur des personnes âgées. C’est sur le rôle et l’évolution de l’action sociale des caisses de retraite que se centre l’article de Stéphane Cadiou et Bernard Gagnon. L’actuelle redéfinition des priorités – les populations les plus démunies – permet en effet de s’interroger sur les transformations de la protection sociale et, notamment, sur les tensions entre l’universalité des prestations et l’assistance aux plus défavorisés. Le second article analyse les choix opérés en matière de gestion pour les prestations destinées aux personnes dépendantes (PSD, APA) : échelon gestionnaire et nature de la prestation ne sont plus liés. L’auteur, Thomas Frinault, souligne que cette innovation en termes de droit social s’est accompagnée d’un changement tout aussi central : la gestion individualisée des prestations.
… et dans le domaine du logement social,
4Dans ce tout autre domaine, Hélène Frouard fait une analyse historique du processus qui a conduit à l’adoption du principe du « 1 % logement » obligeant depuis 1953 les entreprises françaises à investir dans le logement social. Le rôle mis en évidence des entreprises privées dans le développement de ce type de logement, invite à s’interroger sur leur place dans la construction des politiques sociales françaises au XXe siècle.
dans d’autres pays européens
5Depuis le début des années quatre-vingt, si l’Europe est affectée par le chômage de masse, certains pays sont plus touchés, c’est le cas de l’Espagne. La question de la lutte contre l’exclusion professionnelle dans ce pays est abordée ici par Emmanuelle Cayado, sous un angle particulier, celui de la distribution territoriale des compétences dans ce domaine. Elle met ainsi en évidence une tendance au renforcement des initiatives régionales et locales mais sans que soient remises radicalement en cause les prérogatives majeures de l’État espagnol.
6Après les changements introduits dans les années quatre-vingt-dix dans la couverture sociale qu’ils offrent, les États providence scandinaves constituent-ils toujours un modèle spécifique ? C’est la question que pose dans ce numéro Peter Abrahamson de l’université de Copenhague. S’appuyant d’une part sur ses propres recherches, et d’autre part sur les réflexions qui ont émergé de plusieurs colloques sur la question ainsi que du numéro consacré par la Revue française des Affaires sociales aux évolutions de l’État providence dans les pays du nord de l’Europe [1], l’auteur considère plutôt que les politiques sociales scandinaves connaissent actuellement un processus d’européanisation.
? Les politiques sanitaires
7On trouvera dans le présent numéro, l’histoire de deux dispositifs – très différents – mais particulièrement importants en matière de santé : le carnet de santé et l’hospitalisation à domicile (HAD).
8Le premier dispositif, plus que centenaire, concerne la santé des enfants : c’est en historienne que Catherine Rollet s’est penchée sur l’apparition à la fin du XIXe siècle d’un carnet destiné à consigner des éléments sur le développement des enfants. Elle fait ressortir l’origine privée de cette initiative et ses objectifs, sanitaires dès le départ ; elle observe aussi l’utilisation de ce carnet au cours des décennies et ses dernières évolutions. Si ce sont les mères qui ont rempli le carnet – elles en ont fait parfois un objet de mémoire familiale – jusqu’à ce qu’il devienne obligatoire et uniforme au milieu du XXe siècle, c’est depuis lors le médecin qui y consigne ses observations.
Quant à Angélique Sentilhes Monkam, c’est en médecin de santé publique qu’elle recherche dans l’histoire et l’évolution réglementaire de l’HAD ce qui, selon elle, caractérise ce dispositif : une situation paradoxale. Elle y fait le constat que l’hospitalisation à domicile est une structure particulièrement bien adaptée à la prise en charge de certains types de patients mais qu’elle demeure méconnue et relativement peu développée. L’auteure souligne cependant que cette situation évolue aujourd’hui favorablement.
? Le militantisme
9Enfin, le numéro se termine par une problématique complètement différente : pourquoi et comment devient-on militant ? Après une analyse théorique du militantisme, Dominique Baillet s’interroge, plus particulièrement, sur les motivations qui poussent les jeunes d’origine maghrébine, vivant en France, à s’engager dans la vie politique, et sur le sens que ces jeunes donnent à leur action politique. L’auteur propose une typologie d’une part des causes de ce militantisme et d’autre part des divers militantismes qu’il a identifiés.
Notes
-
[1]
« L’État providence nordique. Ajustements, transformations au cours des années quatre-vingt-dix », RFAS no 4 (numéro spécial) octobre-décembre 2003.