? Introduction
1Le couple « besoin de santé – offre de soins » subit depuis plusieurs années des mutations.
2Certaines maladies autrefois létales se « chronicisent ». La population française vieillit. Les Français expriment le souhait d’être soignés chez eux (voire d’y finir leurs jours). Face à cela, l’offre de soins hospitaliers semble se rétrécir depuis les années quatre-vingt-dix. Le nombre de lits décroît. Les durées de séjours diminuent. Les prises en charge se restructurent et se transforment, alliant technicité et sécurité. En contrepartie, les alternatives aux soins en établissements hospitaliers croissent : notamment l’hospitalisation à domicile (HAD) qui a été reconnue en tant que structure hospitalière depuis l’ENHAD [1] 2000 puis comme substitutive de l’hospitalisation conventionnelle et non plus comme alternative (Com-Ruelle, 2003) par la circulaire DHOS/O no 2004-44 du 4 février 2004 relative à l’hospitalisation à domicile. Cette circulaire définit ainsi l’HAD : « Elle est chargée d’assurer au domicile du malade, pour une période limitée mais révisable en fonction de l’évolution de son état de santé, des soins médicaux et paramédicaux continus et nécessairement coordonnés. Ces soins se différencient de ceux habituellement dispensés à domicile par la complexité et la fréquence des actes ».
3Si l’HAD est très indiquée pour la prise en charge des patients complexes, multipathologiques, et/ou âgés ; elle demeure marginale en termes de développement.
4Le nombre de places en HAD est en effet faible. Fin 2004, 4 904 places d’HAD étaient autorisées. En 1998, l’HAD offrait 0,8 % de la capacité du parc hospitalier français. L’enquête du CREDES, en 1992, trouvait que 39 de ces structures généraient 1 864,80 équivalents temps pleins (ETP) qui représentaient 0,2 % de l’ensemble des ETP de l’hospitalisation française (Haury, 2000 ; Com-Ruelle, 1993). En 1992 toujours, l’HAD représentait 2 % de l’ensemble des journées d’hospitalisation dans la région parisienne (Robert, 2001). Les structures demeurent inégalement réparties, surtout concentrées en Île-de-France. 25 à 30 % de l’activité de l’HAD est aujourd’hui consacrée aux soins palliatifs [2] (Le Divenah, 2004).
5Cette situation constitue un paradoxe.
Au travers de l’histoire de l’HAD en France, dont les premières expériences remontent aux années cinquante, mais reconnue officiellement par la loi hospitalière du 31 décembre 1970 [3], nous voudrions montrer comment ce paradoxe a vu le jour, mais aussi comment, dans un avenir proche, il devrait pouvoir se résoudre. Nous n’abordons dans cet article [4] que le sujet de l’HAD généraliste et polyvalente, celle dont le principe est réaffirmé au fil des textes réglementaires, et laissons de côté celui des HAD spécialisées en pédiatrie, psychiatrie et périnatalogie dont l’approche nous semble devoir être différente (histoire divergente, objectifs et cahier des charges spécifiques).
? Le paradoxe
Une population cible croissante et complexe
6La dernière grande enquête qui a fait de l’HAD son objet d’étude, est l’ENHAD 1999-2000. Un premier volet de l’étude analysait l’état de santé des patients pris en charge par l’HAD :
- plus de la moitié (57 %) des patients sont atteints de cancers ;
- 45 % des nouvelles admissions et 62 % des personnes prises en charge depuis plus de trois mois sont des personnes âgées de plus de 65 ans ;
- parmi ces patients, 52,5 % sont déclarés dépendants, c’est-à-dire nécessitant des soins importants sur des longues durées ;
- les patients pris en charge par les HAD sont plus souvent en phase d’aggravation que de stabilisation ou d’amélioration alors, qu’initialement, l’HAD était conçue pour des patients hospitalisés qui étaient en état de poursuivre leur évolution, moyennant les traitements qui leur étaient administrés chez eux, il s’agissait de patients qui au pire étaient stabilisés, au mieux devaient voir leur état s’améliorer. La durée moyenne de séjour à l’hôpital oscille entre 26 et 29 jours. Les patients sont tous pris en charge à 100 % par l’assurance maladie ;
- 7 % d’entre eux sont en phase terminale. Les protocoles de soins palliatifs figurent parmi les protocoles principaux (18 %), (avec la chimiothérapie (22 %), les pansements complexes (14 %), les traitements intraveineux anti-infectieux ou autres (9 %) et les soins de nursing lourds (9 %) (Com-Ruelle, 2003).
En réponse, une offre de soins en restructuration…
Évolution des lits conventionnels
7Entre 1992 et 2002, le nombre de lits d’hospitalisation complète, toutes disciplines et tous secteurs confondus, diminue de 75 000 lits (540 100 à 465 500). Les durées moyennes de séjours à l’hôpital diminuent (de 6,5 jours en 1998 à 5,9 jours en 2002) (DREES, 2004, page 220). L’instauration de la tarification à l’acte devrait avoir pour effet, entre autres, de renforcer cette tendance.
8Les hospitalisations sont de plus en plus motivées par l’utilisation des plateaux techniques [7]. Ces derniers se concentrent sur certains établissements de santé. Ceux-ci doivent être géographiquement accessibles et atteindre une taille suffisamment critique pour pouvoir investir et gérer le matériel. Les autres établissements, dits locaux ou de proximité, voient s’amoindrir leur dimension technique au profit d’une activité de long et de moyens séjours et d’une plus grande ouverture sur la cité [8] (Raikovic, 2002).
Parallèlement à la fermeture des lits conventionnels, on assiste à un développement, dans le secteur libéral, des structures de soins infirmiers à domicile (SSIAD) et des réseaux, dans le secteur hospitalier, des alternatives à l’hospitalisation.
Évolution du secteur ambulatoire (SSIAD et réseaux)
Les SSIAD
9Les services de SSIAD se situent au carrefour de la vieillesse, de la perte d’autonomie et du handicap. Ils rencontrent toutes les difficultés inhérentes à leur position d’interface dans un environnement sanitaire et social cloisonné. Le nombre de places de SSIAD, au 31 décembre 2003, était de 77 720. Il est prévu d’atteindre 100 000 places en 2007 (Aubry, 2005). La charge en soins, notamment en ce qui concerne les seuls soins d’entretien et de continuité de la vie, pose des problèmes de financement par rapport à l’enveloppe financière allouée et il semble qu’il y ait une difficulté de recrutement des aides-soignant(e)s et auxiliaires de vie sociale.
10Le décret du 25 juin 2004 no 2004-613 relatif aux conditions techniques d’organisation et de fonctionnement des SSIAD, des services d’aide et d’accompagnement à domicile et des services polyvalents d’aide et de soins à domicile prévoit :
- de poursuivre la prise en charge des personnes de 60 ans, malades ou dépendantes ;
- de prendre en charge, d’une part, les personnes de moins de 60 ans atteintes de maladies chroniques ou de handicaps et présentant un taux d’incapacité au moins égal à 80 % et, d’autre part, des personnes atteintes de maladies chroniques, ce sans entente préalable ;
- et enfin, de rendre plus systématique les coordinations entre les SSIAD et au moins un service d’aide et d’accompagnement à domicile.
Les réseaux
11Les réseaux ont vocation à coordonner des soins. Ils mettent à disposition des professionnels libéraux exerçant dans la cité, des experts d’un domaine particulier : cancérologie, soins palliatifs, diabétologie, asthme, gérontologie… Ils constituent ainsi une seconde ligne de professionnels en principe non directement impliqués dans les soins. Ils sont encore dans une phase d’expérimentation [9] et certains d’entre eux ont développé d’ores et déjà une activité conséquente.
12Les réseaux investissent une forme d’offre de soins très complémentaire des HAD lorsqu’ils parviennent à conjuguer l’offre technique et la compétence relationnelle de leurs professionnels. Leurs conditions d’autorisation sont plus souples. Lorsque aucune HAD n’existe sur leur secteur géographique, ils peuvent être amenés à créer une petite HAD informelle autour du patient. Ceci est particulièrement vrai dans le domaine des soins palliatifs. Leur grand inconvénient est qu’ils transportent dans la cité le cloisonnement hospitalier du fait de leur spécialisation : ainsi un médecin généraliste doit-il travailler avec autant de réseaux qu’il a de problématiques à gérer : diabète, cancer, soins palliatifs, gérontologie… De plus, le concept des réseaux implique nécessairement que soient mises en œuvre de nouvelles manières de travailler ensemble (coopérations et collaborations). Ces nouvelles formes de coopérations nécessitent à leur tour de nouvelles modalités de rémunérations, qui sont innovées sous la forme de forfaits, susceptible d’intégrer le facteur « temps ». On conçoit cependant que ce secteur étant en pleine « révolution », sa visibilité n’est pas encore très grande.
Évolution des alternatives à l’hospitalisation et plus particulièrement de l’HAD
13Dans le secteur hospitalier, les alternatives à l’hospitalisation sont constituées par des structures d’hospitalisation à temps partiel, de jour ou de nuit, des structures d’anesthésie et de chirurgie ambulatoire et des structures d’hospitalisation à domicile.
1448 000 places ont été créées de 1992 à 2002 tandis que les 75 000 lits conventionnels étaient parallèlement fermés (DREES, 2004). Concernant la seule HAD, de 1993 à 2002, le nombre de structures passait de 41 à 76.
15Le nombre de places augmentait de 1 000 entre 1999 et 2004 portant le nombre de places répertoriées fin 2004 à 4 904 places.
16L’HAD est bien identifiée comme une structure appropriée pour la prise en charge de la population cible décrite (Com-Ruelle, 2003). L’HAD au fil de son histoire a acquis souplesse et adaptabilité mais aussi le savoir-faire technique, la qualité humaine et une grande capacité d’adéquation à l’environnement spécifique de chaque patient. Ces qualités la rendent non seulement compétitive mais aussi complète et globale. Nulle autre structure ne peut la remplacer à ce jour, pas même l’hospitalisation conventionnelle. Elle est plébiscitée par les usagers qui ont eu l’occasion de l’expérimenter à condition toutefois qu’elle intervienne en complémentarité (et non en rupture) avec l’hôpital traditionnel, et que les proches se sentent constamment soutenus (Com-Ruelle, 1994). Elle permet d’assurer certaines économies au regard des hospitalisations à temps complet auxquelles elle se substitue tout en procurant les mêmes qualité et sécurité de soins, voire même ce que Favrot a appelé un « gain de santé » [10] (Favrot, 1986).
Néanmoins, elle demeure non connue, mal développée.
une HAD peu développée et insuffisamment attractive
17Fin 2004, 4 904 places d’HAD sont autorisées, 91 établissements hospitaliers ont une HAD, 30 départements en sont dépourvus. Hormis l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (APHP) et Santé Service, les structures sont de petite taille, situées dans les agglomérations pour des raisons qui tiennent à des problèmes de transport et de sécurité des soins. Elles sont inégalement réparties, surtout concentrées en Île-de-France (Paris et sa région concentrent plus de 58 % des moyens avec dix services) (FNEHAD, 2001).
18Une récente prise de conscience des pouvoirs publics a conduit à un objectif de doublement du nombre de places, dans le cadre du plan « hôpital 2007 ». Ce plan et les crédits qui lui ont été alloués dans le cadre du plan urgences devraient porter le nombre de places d’HAD à 8 000 environ, avec une attention particulière pour les zones géographiques dépourvues.
19Ce paradoxe trouve ses origines mais aussi ses résolutions dans l’évolution historique et réglementaire de l’HAD. C’est ce que nous allons maintenant explorer.
? Tentative d’explication et de résolution de ce paradoxe par l’histoire
L’origine… l’instauration d’une discontinuité structurelle
20En 1945, le professeur Bluestone, chef de service à l’hôpital Montefiore de New York, se trouve confronté à une surpopulation de patients. Il décide d’en suivre certains chez eux. C’est ainsi qu’est créé en 1947 le Home Care, fondé d’emblée sur le principe du déplacement des médecins hospitaliers au domicile des patients.
21En 1951 a lieu en France la première expérience d’hôpital à domicile, sur l’initiative du professeur Siguier de l’hôpital Tenon à Paris, également confronté à un sureffectif de patients (Com-Ruelle, 1993 ; Corbasson, 1998). En 1957 est créée officiellement l’hospitalisation à domicile (HAD) de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris. L’objectif était univoque : il s’agissait de désencombrer les hôpitaux. Cette époque se caractérise entre autres par de longues durées moyennes de séjour, puisque les malades démarrent leur convalescence à l’hôpital. Il s’agit aussi « d’extraire du système sanitaire les personnes âgées valides ou semi-valides, de désencombrer les services d’aigus des cas sociaux qui y demeurent indûment ou prolongent pour des raisons sociales un séjour originellement justifié » (Bungener, 1988). Était également évoquée la possibilité d’offrir un relais de soins et de confort au malade, tout en optimisant sa réintégration dans le milieu familial. Le principe selon lequel l’HAD s’appuie sur la médecine libérale est d’emblée posé et ne sera plus jamais requestionné par la suite.
22Un an plus tard est créée, par le professeur Denoix de l’Institut Gustave-Roussy, la deuxième structure d’HAD à Puteaux destinée à des patients cancéreux et qui prend le nom de Santé Service (Cousteix, 2000). Consacrant le succès de ces initiatives, la première convention est signée en 1961 entre la Caisse primaire d’assurance maladie et l’HAD de l’AP-HP d’une part, Santé Service d’autre part.
23Les années qui suivent voient se multiplier le nombre de structures avec la création de l’HAD de Bagnolet et d’Amiens dès 1967. Au 1er janvier 2005, 142 structures sont répertoriées.
La figure 1 illustre la progression annuelle du nombre de structures d’HAD en France.
Nombre de structures d’HAD chaque année

Nombre de structures d’HAD chaque année
Quatre phases de structuration
24Les pouvoirs publics ont constamment accompagné la structuration des HAD. Entre 1967 et 1980, prévaut la structuration médicale et administrative autour de la loi hospitalière de 1970 et de la circulaire de la CNAMTS de 1974. De 1980 à 1992, s’installe une relative stagnation, du fait d’un vide juridique et d’une opacité de la situation sur le terrain. De 1992 à 2000, un intérêt renouvelé est porté aux HAD dans le cadre des décrets du 2 octobre 1992 faisant suite à la loi hospitalière de 1991. De 2000 à ce jour, une prise de conscience semble se faire autour du fait que le cadre réglementaire étant en place, l’HAD continue de se développer insuffisamment. La circulaire du 30 mai 2000 puis l’ordonnance de simplification du 4 septembre 2003 et enfin la circulaire du 4 février 2004 posent les bases nouvelles pour une intensification du développement de l’HAD.
De la première phase à la phase actuelle, ce sont les fondements même de l’HAD dans sa conception d’origine et donc dans sa raison d’être et ses objectifs qui évoluent. (cf. tableau 1).
Les quatre phases successives de la structuration des HAD

Les quatre phases successives de la structuration des HAD
? Les différentes étapes de la structuration de l’hospitalisation à domicile
Première phase : de 1967 à 1980, structuration médicale et administrative de l’HAD
25L’HAD est reconnue officiellement par la loi hospitalière du 31 décembre 1970 précitée. Elle définit les centres hospitaliers et les centres de convalescence et précise par rapport aux premiers que « les services des centres hospitaliers peuvent se prolonger à domicile, sous réserve du consentement du malade ou de sa famille, pour continuer le traitement avec le concours du médecin traitant » (article 4). Seuls les malades de l’hôpital public peuvent bénéficier d’une hospitalisation à domicile [11].
26Le 29 octobre 1974, la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) publie une circulaire qui fixe les premières règles devant présider à la création et au fonctionnement des HAD [12]. Elle fait le constat d’un développement désordonné et anarchique des structures d’hospitalisation à domicile et de soins à domicile, nouvelles formules de soins qui, entrant en concurrence les unes avec les autres, se révèlent pour l’assurance maladie coûteuses. Comme c’est à elle que revient la charge d’assumer ces coûts, la CNAMTS décide de rationaliser les modalités de distribution de ces soins et tout particulièrement de ceux de l’HAD, sujet exclusif de ce texte. C’est ainsi que la circulaire expose la situation, qu’elle juge insuffisamment organisée, et propose en annexe, des solutions (conditions médicales d’admission, convention type avec l’association ou l’établissement hospitalier qui pourvoit aux soins, règlement intérieur).
La situation en 1974
27À ce moment-là, le secteur de santé français se répartit entre deux secteurs que sont les soins aux malades ambulatoires ou à domicile et ceux prodigués aux malades hospitalisés.
28L’HAD se situe entre ces deux secteurs. La population ciblée est floue. Ces « nouveaux » patients doivent être trop malades pour relever du seul secteur libéral, puisqu’ils requièrent une forte densité de soins, mais pas assez cependant pour nécessiter d’être hospitalisés et bénéficier de la présence soignante 24 heures sur 24.
29Pour répondre à ce nouveau « besoin », des associations ou des services organisent des équipes salariées ou rémunérées à l’acte. Comme à l’hôpital, le patient ne paye que rarement les frais puisque le tiers payant est géré par la structure elle-même. Ces équipes sont secondées par des prestataires du secteur libéral… L’organisme passe convention avec l’assurance maladie pour déterminer les modalités de leur collaboration réciproque : procédure d’admission, de prolongation et de sortie. Il perçoit un prix de journée qui est en principe inférieur de plus de la moitié au prix de journée hospitalier et règle lui-même les fournisseurs.
Selon les analyses de cette époque, les avantages de ces nouvelles formules seraient de deux ordres :
- du côté du patient, son retour à domicile se trouve facilité et il bénéficie dans son environnement familial de soins performants. Les soins sont personnalisés et l’éducation de sa famille permet de s’en faire un allié de choix en qualité de soignants naturels ;
- en ce qui concerne l’aspect financier, les frais d’hôtellerie sont économisés de même que les frais d’amortissement de locaux aux équipements coûteux. Il ne s’agit d’une formule économique que si elle est comparée à un séjour équivalent dans un service de soins aigus. Son coût est cependant plus élevé que celui d’un séjour équivalent en maison de convalescence ou de repos ou surtout que les soins ambulatoires. L’avantage supposé en termes d’économies budgétaires dépend donc étroitement des indications de l’HAD. Ne sont en principe concernés par l’HAD ni les convalescents, ni les malades aigus, ni les malades ambulatoires. Or à ce moment-là, les indications sont floues. La prescription est laissée à la seule discrétion des médecins hospitaliers. Et la circulaire fait état de la difficulté de collaboration entre les hospitaliers et les libéraux.
La circulaire de 1974 propose un cadre médical et administratif
31La circulaire recense, d’une part, les affections ou interventions qui ne peuvent en aucun cas donner lieu à une HAD ainsi que, d’autre part, les conditions médicales impératives nécessaires à l’entrée en HAD : le patient admis en HAD est un patient déjà hospitalisé. Son état de santé ne justifie plus de prolonger l’hospitalisation mais nécessite tout de même des interventions fréquentes et complexes de médecins et d’auxiliaires médicaux. Ces interventions ne peuvent être assurées par les maisons de convalescence ou de repos ou surtout dans le seul cadre de soins ambulatoires. L’enquête sociale doit être favorable. L’admission ne peut se faire que dans la limite des places disponibles. La liste des indications usuelles comporte certaines fractures, les paralysies d’origine vasculaire ou neurologique, les maladies dégénératives du système nerveux comme la sclérose en plaques, des maladies rhuma-tologiques chroniques lors des poussées aiguës, l’artérite des membres inférieurs lors de ses poussées évolutives, les complications de la phlébite des membres inférieurs, l’insuffisance cardiaque, les cancers et les hémopathies, la cirrhose décompensée et les suites chirurgicales simples. Pour les autres indications, l’HAD est possible mais plus rare.
32Une convention est passée entre l’établissement gestionnaire et la CNAMTS. Cette convention précise le nombre de lits, les accords régulant la collaboration entre le secteur hospitalier et l’HAD, et décrit l’éventuel dispositif de paiement par tiers délégué retenu [13]. La durée de séjour est de vingt jours renouvelables avec l’accord du médecin conseil de la caisse d’assurance maladie. Le règlement intérieur de la structure d’HAD doit décrire et organiser les conditions de coordination des actions du médecin hospitalier, libéral et des auxiliaires médicaux. Il doit garantir le libre choix du patient et le libre exercice des professionnels, et exiger des médecins libéraux qu’ils s’y conforment.
La convention type n’aborde pas le contenu des prises en charges (fréquence des consultations du médecin traitant ou de passage des infirmières), jugé comme relevant du libre exercice des professionnels libéraux.
Deuxième phase : de 1980 à 1992, une phase de stagnation relative
33Les années 1981 à 1984 apparaissent comme une période de régression objectivée par une diminution du nombre d’entrées, de journées d’HAD, du taux d’activité. Plusieurs explications peuvent être évoquées.
34Le 12 mars 1986, le ministère des Affaires sociales et de la Solidarité nationale publie une circulaire relative à l’hospitalisation à domicile dans les établissements publics [14]. Le champ d’intervention de l’HAD est élargi. Des patients ne justifiant plus d’une hospitalisation peuvent bénéficier d’une HAD. Il n’est cependant pas précisé ce qui fait qu’un patient ne relève plus d’une hospitalisation conventionnelle tout en requérant toujours des soins en nombre et en intensité comparables.
35Tous les malades, y compris ceux qui sont sous appareillage, peuvent y être admis, à l’exception des malades mentaux. L’indication peut être posée en consultation externe : le patient ne nécessite plus d’être préalablement hospitalisé. On voit le nombre de pathologies différentes passer de 15 318 en 1982 à 34 063 en 1991. Cependant, le nombre de structures ne passe que de 28 en 1984 à 33 en 1989 (Com-Ruelle, 1994). La coordination des soins demeure assurée par un cadre infirmier permanent et c’est le médecin traitant, choisi par le malade, qui assure le traitement et la surveillance des soins. Sur le plan financier, cette circulaire précise que les HAD sont financées dans le cadre de la dotation globale et un tarif journalier est calculé conformément à l’article 31 du décret no 83-744 du 11 août 1983 [15].
36Dès lors, l’HAD apparaît comme se substituant à l’hospitalisation traditionnelle : la création de nouvelles unités ne peut s’effectuer qu’à la faveur d’un redéploiement interne au centre hospitalier ou à défaut, d’un redéploiement départemental pour les structures privées associatives [16]. Ces années voient donc se développer des structures de petite taille pour la plupart d’entre elles, en moyenne vingt places, très inégalement réparties sur le territoire.
37Dans le secteur privé, le développement d’autres alternatives à l’hospitalisation et en particulier des services de soins à domicile pour personnes âgées (décret du 8 mai 1991) explique les difficultés de l’HAD (Com-Ruelle, 1993). Dans le secteur public, en revanche, domine la méfiance des hospitaliers qui craignent que l’HAD ne représente une perte de pouvoir. Ils la considèrent comme une prise en charge « au rabais ». Bungener découvre en 1988 que la rubrique « soins médicaux » figurant sur le dossier d’HAD de certains hôpitaux est « systématiquement » vide, ce qui traduit assez bien la discontinuité médicale entre les services hospitaliers et l’HAD et illustre la difficulté pour les deux secteurs de travailler ensemble (Bungener, 1988). La culture hospitalière n’ayant pas « intégré » que l’HAD faisait partie de l’hôpital, le sentiment a persisté parmi les hospitaliers que le budget qui lui était dédié, était « détourné » des autres services conventionnels au profit du libéral, ou d’une forme d’hospitalisation « au rabais », qui, en tout état de cause, ne les concernait plus – et échappait certainement à leur pouvoir –. Ils considéraient que dans le cadre d’une enveloppe fixe, le montant de l’enveloppe allouée à l’établissement était d’autant « diminué ». Ce sentiment d’être spolié n’était en rien atténué par le fait que cette forme de prise en charge permettait à l’établissement de réaliser des économies tout en assurant le suivi des patients de l’hôpital. Alors qu’en toute logique les services d’HAD auraient dû se multiplier (besoin avéré, coûts vraisemblablement moindres, continuité de la prise en charge), on peut dire que c’est la culture médicale (cloisonnement entre les secteurs médicaux libéral et hospitalier, pouvoir médical) qui explique que cette logique n’ait pas pu s’imposer. Ceci n’a rien d’étonnant si l’on considère que le déclenchement de l’HAD était totalement dévolu aux médecins hospitaliers, d’une part, et que la responsabilité des prises en charges relevait du médecin traitant, d’autre part, alors qu’il n’intervenait ni dans le déclenchement ni dans la mise en œuvre de l’HAD… Les uns ne souhaitaient pas voir « s’échapper » leurs patients tandis que les autres ne souhaitaient pas endosser une responsabilité qu’ils estimaient ne pas leur incomber…
Bungener fait état par ailleurs de réticences de la part des promoteurs eux-mêmes, alors que sous l’angle économique, ceux-ci auraient pu se laisser convaincre mais qu’il en fut tout autrement. En effet, il semblait « évident » que l’économie réalisée grâce à l’HAD était réelle, liée au transfert des charges d’hébergement vers le domicile. On considérait que ceci s’effectuait avec de surcroît, une augmentation du bien-être pour le patient sans perte de l’efficacité médicale [17]. Pourtant, les organismes d’assurance maladie ne constataient pas une diminution équivalente du nombre de lits conventionnels ni une diminution du personnel affecté à la surveillance la nuit. Cette absence d’effet fut expliquée par une probable augmentation du nombre de malades traités pour un coût non accru, ce qui revient à dire que le coût moyen par patient avait diminué. Ce phénomène traduisait « l’ambiguïté fondamentale » du terme « alternative » à l’hospitalisation, que Bungener exprima ainsi : « Il ne s’agit plus de traiter un patient à l’hôpital ou à domicile mais de l’envoyer à domicile pour en accueillir un autre à l’hôpital ». La conclusion de la CNAM fut de dire que l’HAD revenait à créer de nouveaux niveaux de soins plutôt que de les remplacer (Bungener, 1988). Ce faisant, l’auteur remarque qu’aucune mesure fortement incitative ne fut décidée, ainsi que ce fut le cas aux États-Unis. Le Home Care américain (cf. encadré 1) a su se positionner d’emblée en complémentarité avec l’hospitalisation conventionnelle et en relais de celle-ci grâce à des mesures incitatives d’ordre financier qui avaient été prises : limitation du nombre de journées d’hospitalisation traditionnelle remboursables, arrêt de paiement pour les interventions réalisées à l’hôpital alors qu’elles auraient du l’être au domicile… (Bungener, 1988).
Encadré 1 : Comparaison Home Care américain et HAD française

38La persistance d’incertitudes quant au coût, qui – à ce moment-là – n’est pas encore précisément évalué, aux charges matérielles et affectives transférées sur le patient et son entourage, incite les pouvoirs publics, bien que convaincus que ce type de prise en charge semble utile, à la considérer encore, trente ans après sa création, comme une formule de soins à expérimenter, parce que tout simplement le manque d’expérimentation ne permet toujours pas de démontrer ni son utilité, ni son efficience, ni de déterminer les modalités optimales de cette offre de soins.
Troisième phase : de 1992 à 2000, la structuration de l’HAD par la loi
39La troisième phase découle directement de la loi de 1991 [18] et de ses décrets d’application du 2 octobre 1992.
40L’HAD y est clairement reconnue comme une alternative à l’hospitalisation traditionnelle et le concept de la coordination des soins y est pour la première fois mentionné avec la création du médecin coordonnateur et le requis d’une permanence des soins : « Les structures dites d’hospitalisation à domicile permettent d’assurer au domicile du malade, pour une période limitée mais révisable en fonction de l’évolution de son état de santé, des soins médicaux et paramédicaux continus et nécessairement coordonnés. Ces soins se différencient de ceux habituellement dispensés au domicile par la complexité et la fréquence des actes. Chaque structure d’hospitalisation à domicile intervient dans une aire géographique précisée par l’autorisation prévue à l’article L. 712-8. » [19] Peuvent être autorisés les projets de création de places répondant aux conditions fixées par l’article L. 712-9 du Code de la santé publique (compatibilité avec la carte sanitaire et le SROS, respect des normes techniques de fonctionnement).
41Ces places sont comptabilisées dans la carte sanitaire et sociale au sein des installations de médecine. Le personnel de l’HAD s’enrichit d’un médecin coordonnateur chargé d’assurer le bon fonctionnement médical de la structure et d’un cadre infirmier pour trente places autorisées. L’effectif doit comprendre au moins un auxiliaire médical pour six patients pris en charge. L’admission d’un patient n’est plus le seul fait d’un médecin hospitalier, mais peut être prescrite par les médecins libéraux après avis et accord du médecin coordonnateur de l’HAD. La permanence des soins et la continuité de la prise en charge enfin doivent être assurées 7 jours sur 7. Cette exigence induit la création d’un système de garde et l’équipement des équipes en système de communication à distance afin d’assurer une liaison permanente entre les patients, les familles et le personnel de l’HAD [20].
42Ces décrets stipulent cependant que toute création d’un lit d’HAD dans une zone sanitaire dont les moyens d’hospitalisation sont excédentaires dans la discipline concernée viendra en remplacement d’un lit d’hospitalisation traditionnel. Ce dernier sera en conséquence fermé. L’objectif de ce taux de change est de développer l’HAD à moyens constants. Ainsi, si l’excédent de moyens est inférieur à 25 % des besoins théoriques de la zone sanitaire, la création d’une place de structure alternative à l’hospitalisation entraîne la fermeture d’un lit d’hospitalisation à temps complet. Si l’excédent de moyens est supérieur à 25 %, la création d’une place entraîne la fermeture de deux lits, ce en médecine, obstétrique ou en soins de suite et de réadaptation [21].
43Ce taux de change contribuera à bloquer le développement de l’HAD publique qui apparaît plus que jamais comme concurrentielle de l’hospitalisation conventionnelle, dépendant du même budget, obligeant à la fermeture de lits conventionnels, tout en continuant d’apparaître peu crédible sur le plan de son efficience.
44Séduisante sur le plan théorique, l’HAD peine à convaincre quant à sa valeur ajoutée. Plusieurs auteurs se penchent dans les années quatre-vingt-dix sur les raisons de ce désintérêt (Favrot, 1986 ; Bungener, 1988 ; Com-Ruelle, 1993 ; 1994 puis 2003). Selon les acteurs on trouve les raisons suivantes.
45• Chez les médecins hospitaliers : perte de clientèle, perte du contrôle des prises en charges, méconnaissance du travail en collaboration avec le secteur libéral.
46Ceci intervient à une époque où le modèle hospitalier est largement dominant et les prises en charge très hospitalocentrées (au sens géographique du terme : c’est dans l’hôpital que tout se passe, et cela ne peut en aucun cas être au domicile).
47• Chez les médecins traitants : méconnaissance de l’existence de l’HAD et de son fonctionnement (en particulier les règles de prescription), refus de prendre en charge des pathologies complexes, d’une part, parce que ce n’est pas eux qui décident de l’HAD alors que ce sont eux qui doivent en assumer la responsabilité, d’autre part, par manque de formation et de compétences.
48Le paiement à l’acte ne favorise pas un mode de prise en charge qui devrait s’évaluer plutôt en temps passé au domicile du patient et en prestations relationnelles. Enfin, la liberté de choix du médecin traitant rend instable toute tentative de continuité des prises en charge.
49• À la CNAM : crainte d’un emballement des dépenses difficilement contrôlables par le truchement de prescriptions élargies à un large éventail de patients. Elle cherche par conséquent à instaurer des règles claires mais néanmoins restrictives dans un premier temps. En termes d’offre de soins, la CNAM craint de voir se développer une nouvelle offre de soins non ciblée qui se situerait entre l’hôpital et les soins ambulatoires et créerait un nouveau besoin (Bungener, 1988). En termes de coûts, l’HAD ne participant pas au PMSI [22], il n’était pas possible (avant l’ENHAD 2000 et l’instauration début 2005 de la tarification à l’acte) de connaître son activité réelle et donc encore moins de la valoriser. Com-Ruelle explique ainsi que « l’opacité du système n’était guère propice au développement de l’HAD et à une qualité identique des soins » (Com-Ruelle, 2005).
50• Chez les proches des patients mais aussi chez les patients eux-mêmes – qui expérimentent le transfert de charges – : réorganisation complète du domicile, fonctions quotidiennes (toilette, alimentation, élimination, mobilité, charges ménagères, lessives) d’autant plus lourdes que le patient perd son autonomie, présence permanente, réponse aux exigences nocturnes du patient, production domestique et production de soins (Bungener, 1988), sans compter l’angoisse, la solitude et la fatigue (Bungener, 1988 ; Com-Ruelle, 2003 ; Favrot, 1986).
51Com-Ruelle montra en 1994 que 71 % des personnes de l’entourage déclarent que l’HAD présente de nombreux inconvénients (Com-Ruelle, 1994). Près d’un tiers des patients ne savent pas ce qui les attend après avoir reçu les informations données « poursuivant ainsi un état de méconnaissance, d’incertitude et de dépossession du vécu, propre à la prise en charge hospitalière traditionnelle ». Si les deux tiers restants ont pu se forger une idée, c’est généralement en sous-estimant les charges et tâches qui allaient être les leurs (Bungener, 1988). L’enquête nationale, réalisée par le CREDES en 1992, confirme ces résultats. Elle montre que 11,3 % des non-admissions sont liées à un refus de la famille, 6,7 % font suite à un refus du malade et 6,1 % à un refus de l’un des médecins ou paramédicaux concernés. Ce sont 63 % des personnes de l’entourage des patients qui se plaignent de ressentir de l’angoisse à la perspective du retour des patients au domicile (Com-Ruelle, 1994).
Par la suite, le concept d’hôpital évolue, mettant l’accent sur les prestations procurées par l’hôpital grâce au développement d’un plateau technique qui optimise les manœuvres diagnostiques et autorise le développement des traitements en ambulatoire, notamment dans le cadre des HAD. L’indice de satisfaction des patients bénéficiant de l’HAD est de son côté excellent.
Et pourtant – à cause de toutes ces raisons évoquées plus haut – l’HAD demeure marginale et peu connue dans le système de soins français.
Quatrième phase : depuis 2000, un « nouvel essor »
La circulaire du 30 mai 2000 structure le contenu des prises en charge
52Faisant le constat que l’HAD est encore relativement peu développée en France, alors que son potentiel en termes de qualité de prise en charge des patients a été montré, le ministère de l’Emploi et de la Solidarité publie, le 30 mai 2000, une circulaire qui achève de définir le cadre de l’HAD [23]. L’objectif est d’en clarifier la place dans l’offre de soins et de susciter la confiance des acteurs susceptibles de la promouvoir.
53Cette circulaire aborde quatre points.
54– La nécessité de développer les HAD en région.
55– La nécessité d’un projet thérapeutique clinique et psychosocial. La coordination des soins continue d’être gérée en vertu de l’application de l’article R. 712-2-1 du Code de la santé publique mais il doit y avoir une évaluation médicale au moins hebdomadaire. Les soins infirmiers, lorsqu’ils sont quotidiens, doivent être réalisés par des infirmiers diplômés d’État ou, lorsqu’ils ne le sont pas, peuvent être complétés par des interventions autres : kinésithérapie, aide-soignante, conseils en diététique, prise en charge psychologique, prestations d’ergothérapie et prise en charge sociale.
– La requalification des séjours. Des catégories de séjour sont définies en fonctions du degré de dépendance (indice de Karnofski [24]), du type de soins et des modes de prise en charge prescrits. Le tableau 2 montre l’articulation entre ces types de séjour et leurs caractéristiques.
Prises en charge par les services d’HAD

Prises en charge par les services d’HAD
56– La qualité de la prise en charge. À nouveau, la circulaire rappelle que la qualité de la prise en charge dépend, pour une large part, des relations existantes entre les établissements de santé et l’HAD d’une part, les médecins traitants et l’HAD d’autre part. Dorénavant, l’HAD publique fait partie du projet d’établissement. Lorsqu’elle a un statut privé, elle doit passer une convention qui précise l’élaboration d’un projet thérapeutique, les modalités de liaison avec le médecin traitant, les conditions de réhospitalisation et lesmodalités de prise en charge des urgences. La répartition des rôles médicaux est clarifiée.
57Le médecin hospitalier prescrit des soins personnalisés au malade dont il s’occupe, élabore le projet thérapeutique avec l’équipe d’HAD, transmet les informations médicales, est expert auprès des HAD pour la pathologie et organise la mise à disposition des procédures et des protocoles complexes. Il participe à la formation des médecins traitants et s’engage à suivre le patient au niveau hospitalier et à le réhospitaliser si nécessaire.
58Le médecin traitant, librement choisi par le malade, doit se trouver en accord avec le projet thérapeutique et avec le principe du retour du patient chez lui. Il réévalue au domicile du patient son état de santé et adapte son traitement en lien avec le service de référence. Il décide éventuellement d’une réhospitalisation.
59Le médecin coordonnateur, référent médical de l’HAD, organise le fonctionnement médical et l’évaluation de la structure d’HAD. Il donne son avis à l’admission et à la sortie du patient d’HAD. Il évalue l’adéquation du projet avec les possibilités de l’HAD afin d’assurer au patient une sécurité maximale. Il coordonne les informations entre les différents praticiens. Il est responsable de la formation de l’équipe soignante, assure une évaluation de la qualité et participe aux décisions stratégiques.
60Le projet thérapeutique, clairement exposé et écrit, formalise l’ensemble des soins cliniques, psychologiques et sociaux envisagés pour le patient. Il résulte d’un consensus entre les trois médecins.
61L’équipe paramédicale donne son accord après avoir estimé la charge en soins dans le cadre d’une analyse de situation. Ce projet prévoit les possibilités du réseau informel que constituent la famille et l’entourage du patient et la part qu’il peut prendre dans l’ensemble du dispositif. Le service social de l’HAD prévoit la mise en place d’aides supplémentaires : aide ménagère, travailleuse familiale, repas à domicile et garde à domicile.
62L’équipe pluridisciplinaire réévalue régulièrement la situation du patient et envisage si cela s’avère nécessaire, l’accompagnement psychologique des patients et de son entourage. Pour ce faire, soit l’équipe comporte un psychologue, soit elle fait appel aux services d’un libéral qu’elle rémunère. Enfin, la mise en place des moyens matériels aux soins et au confort est assurée par le service administratif de l’HAD. La sortie du patient est organisée avec la mise en place des relais nécessaires. Lorsque le patient est suivi dans le cadre des soins palliatifs, l’équipe d’HAD peut poursuivre son intervention auprès de la famille pour apporter le soutien nécessaire dans les quelques jours qui suivent le décès du patient.
Les intervenants paramédicaux et sociaux libéraux sont susceptibles d’intervenir auprès du patient. Ils sont coordonnés par un infirmier ou un cadre infirmier. Le dossier de soins est constitué lors de la première visite auprès du patient à partir du projet thérapeutique. Il est mis à jour ensuite quotidiennement par chacun des intervenants, qu’ils appartiennent à l’HAD ou au secteur libéral. Selon la structure de l’HAD, la part de ces derniers est plus ou moins importante. Leur collaboration avec le service d’HAD doit être formalisée par une convention qui constitue un contrat d’objectifs et un cadre juridique. Le professionnel libéral s’y engage à respecter les pratiques de la structure en ce qui concerne la continuité des soins, les modalités de transmission des informations et la tenue du dossier de soins. Il accepte le principe de l’évaluation de la qualité des soins.
La circulaire insiste, en dernier lieu, sur le fait que compte tenu des pathologies graves prises en charge par l’HAD, le traitement de la douleur et les soins palliatifs font partie intégrante des activités de soins de l’HAD. Celle-ci doit assurer, en fonction des besoins, la prise en charge financière des gardes-malades, une permanence téléphonique 24 heures sur 24 avec une équipe de soins palliatifs et mettre en place des groupes de parole, des rencontres entre équipes et un soutien psychologique à l’intention des soignants. L’existence d’une formation continue aux techniques de soins, aux soins palliatifs et au traitement de la douleur fait partie des critères de qualité retenus (Anonyme, 2000).
L’ordonnance de 2003 supprime la carte sanitaire et le taux de change
63L’ordonnance no 2003-850 du 4 septembre 2003 rénove le schéma d’organisation sanitaire [25]. L’article 12 supprime le principe de l’opposabilité de la carte sanitaire à la création de nouvelles places d’HAD. L’article 8, quant à lui, supprime le principe du taux de change et abroge l’ancien article L. 6122-3 du Code de la santé publique. L’HAD constitue un nouveau volet du SROS troisième génération et s’intègre dans les politiques régionales. En particulier, afin de doter les zones géographiques qui en sont dépourvues, la création d’HAD ou d’antennes d’HAD doit être promue à partir des établissements de santé de proximité et des hôpitaux locaux conformément à la circulaire no 2003-257 du 28 mai 2003 relative aux missions de l’hôpital local.
La circulaire de la DHOS du 4 février 2004 relative à l’hospitalisation à domicile
64Cette circulaire (DHOS/O no 2004-44) réaffirme l’intérêt que portent les pouvoirs publics à cette forme d’hospitalisation. Il y est redemandé expressément que l’HAD, devenant un volet à part entière du SROS 3, soit l’objet d’une attention particulière de la part des agences régionales de l’hospitalisation (ARH), en particulier dans les zones géographiques qui en sont dépourvues. Le développement de l’HAD constituant un volet du plan consacré aux « urgences », elle bénéficie d’un accompagnement financier de 66 millions d’euros sur 2004 et 2005 (16 millions en 2004 puis 50 millions en 2005) afin d’atteindre l’objectif de 8 000 places. Le caractère généraliste et polyvalent de l’HAD y est réaffirmé.
La Tarification À l’Activité (T2A) du plan « hôpital 2007 »
65L’objectif de cette nouvelle approche budgétaire est de renforcer « l’intérêt à agir » des acteurs de santé tout en cherchant à assurer une meilleure équité dans l’allocation des ressources de santé (Com-Ruelle, 2005). L’ENHAD 2000 a permis de modéliser une grille tarifaire qui prend en compte le nombre de patients traités et leur mode de prise en charge (décrit par le protocole de soins principal, le premier protocole associé, le degré de dépendance du patient et la durée de séjour). Un coût médical de base journalier (CMBJ) remplace l’ancien coût journalier, sauf qu’au lieu d’être fixe quels que soient le patient et son mode de prise en charge, il devient pondérable par plusieurs coefficients : coûts de coordination médico-sociale et de fonctionnement de la structure d’HAD, protocole de soins principal, premier protocole associé, indice de Karnofski, et durée de séjour. L’étendue de la grille va de 44 à 577 euros par jour. Chaque changement de protocole de soins et de degré de dépendance initialise un nouveau séjour. On conçoit dès lors que, moyennant un codage sérieux et la compréhension des fondements de la T2A, les professionnels de santé disposent maintenant d’un outil puissant pour décrire leur activité au sein des HAD, activité qui devrait devenir apparente et perdre cette opacité qui explique en grande partie son incapacité à convaincre de son utilité et de son efficience.
? Conclusions
66Le principe de l’HAD constitue dès le début une réponse à deux nécessités : désengorger les hôpitaux et développer une prise en charge technique au domicile des patients.
67La première phase du développement des HAD correspond à une extension de l’activité hospitalière vers la ville et à la mise en place concomitante d’un frein majeur à ce développement qui est son rattachement à l’administration hospitalière. La méfiance des hospitaliers vis-à-vis des formes ambulatoires de prise en charge explique que l’effet de blocage se soit avéré si important si l’on se rappelle, qu’aux tous débuts, ce sont les hospitaliers seuls qui la prescrivent.
68Par la suite, la formule de l’HAD se cherche, oscillant entre alternative à l’hospitalisation, nouveau niveau de soins, pour finalement se stabiliser avec la dernière circulaire de la DHOS et être reconnue comme une offre de soins substitutive de l’hospitalisation conventionnelle.
69La période actuelle est marquée par une prise de conscience parmi les professionnels et parmi les administrateurs de la santé de ce que l’HAD présente des avantages qui lui sont propres et que l’on ne trouve pas dans l’hospitalisation conventionnelle, notamment pour la prise en charge des maladies chroniques et des patients en fin de vie.
70L’ordonnance du 4 septembre 2003 lève définitivement le blocage structurel lié à l’opposabilité de la carte sanitaire et au taux de change. Elle inscrit l’HAD comme un volet à part entière des SROS de troisième génération, du plan « urgences » et des politiques régionales. La T2A remplace le budget global et devrait permettre de lever le voile sur cette offre de soins très diversifiée et mal connue.
71Un nouvel essor est attendu dont on verra, dès la fin 2005, s’il répond aux attentes en particulier en ce qui concerne la création des 8 000 places prévues. L’HAD apparaît aujourd’hui comme une solution très satisfaisante, existante, offrant en outre un professionnalisme éprouvé fait d’efficacité, de souplesse et de l’adaptation nécessaire à la prise en charge des patients complexes.
72Les pouvoirs publics ont accompagné de très près le développement de l’HAD en adaptant la réglementation. Celle-ci s’inscrit dans une volonté de développer les structures existantes et d’en créer de nouvelles. Ce développement aurait pu entrer en synergie avec des politiques hospitalières désireuses de partager un budget global entre des offres de soins efficientes. Malheureusement il fut contré par une mauvaise compréhension de ce même budget global qui a conduit les professionnels à se « battre », pour au mieux conserver leurs lits au sein de leurs services, au pire éviter à tout prix que ceux-ci ne « sortent » de l’hôpital. Et culturellement, l’HAD n’était pas intégrée à l’hôpital même si elle était l’hôpital… Avec la T2A, une opportunité historique s’offre à l’HAD pour faire valoir ce qu’elle sait faire. Et il est certain qu’un réel savoir-faire s’est développé depuis cinquante ans qu’on l’« expérimente »…
73Tout cependant n’est pas résolu. Des obstacles persistent, importants. Citons en quelques-uns, non des moindres. La pénurie de soignants et la difficulté de leurs conditions de travail rendent le secteur peu attractif en termes de ressources humaines. La responsabilité qui pèse sur les médecins traitants et qui, depuis quelques années, se traduit par des poursuites au pénal et des condamnations, ne les incite pas à s’exposer sur des prises en charges qui peuvent s’avérer complexes et être ressenties comme risquées.
74Le rôle des médecins coordinateurs nécessite d’être codifié, reconnu notamment au sein des instances décisionnelles de l’hôpital, valorisé en termes de carrière et certainement redéfini dans un rapport plus étroit avec les patients plutôt qu’avec les tâches administratives auxquelles trop souvent ils demeurent cantonnés faute de temps pour exercer leur art. Ce point prend plus d’acuité si l’on considère que la permanence des soins en médecine libérale n’est plus une réalité dans de nombreux secteurs et que, par voie de conséquence, la permanence médicale des HAD doit être redéfinie.
75Au-delà des 8 000 places prévues, l’HAD devrait faire partie d’un ensemble constitué des autres alternatives, des hospitalisations complètes, des libéraux, des réseaux, des associations. Elle ne devrait plus être « oubliée » et nombre de ses obstacles ont été levés même s’il en persiste toujours (cf. tableau en annexe). C’est à elle que l’on devrait penser en tout premier lieu lorsqu’un patient qui ne nécessite pas une hospitalisation complète mais nécessite tout de même des soins techniques d’un certain niveau, est pris en charge.
On peut penser qu’alors une demande émergera de la part de ceux-là mêmes qui devraient la prescrire. Et il deviendra évident pour tout le monde qu’un pays comme la France, qui entend conserver un certain niveau de soins et de prise en charge, tout en reconnaissant que ses moyens sont limités, devra disposer de plus que 8 000 places.
L’HAD pourrait ne plus constituer un paradoxe mais bel et bien un modèle d’hospitalisation efficient et satisfaisant pour les usagers de la santé.

Notes
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[*]
Docteure en santé publique, médecin inspecteur en santé publique.
-
[1]
Enquête nationale sur les HAD. Cette enquête a été réalisée à la demande de la Direction des hôpitaux et de l’organisation des soins (DHOS) du ministère chargé de la Santé, conjointement à la CNAMTS, dans la perspective d’une meilleure convergence entre tarifs et charge en soins.
-
[2]
Rapport du comité de suivi du programme de développement des soins palliatifs. Les travaux du comité de suivi. Dr Aude Le Divenah (DHOS), Marie-Claude Dayde (infirmière), Dr Henri Delbecque.
-
[3]
Loi 70-1318 du 31 décembre 1970 portant réforme de l’hospitalisation (JO du 3 janvier 1971).
-
[4]
Cet article s’appuie sur le travail de recherche intitulé « La prise en charge de la fin de vie dans le cadre de l’hospitalisation à domicile : étude qualitative auprès des patients, de leur famille et des soignants », thèse de doctorat, spécialité : méthode d’analyse des systèmes de santé, option santé publique, université de la Méditerranée, faculté de médecine de Marseille, école doctorale des sciences économiques et de gestion, Laboratoire de santé publique (EA 3279 : Évaluation hospitalière – Mesure de la santé perçue).
-
[5]
Cette problématique de la prise en charge de la fin de vie constitue une préoccupation des pouvoirs publics chargés d’organiser l’offre de soins. Dernier en date et spécifiquement orienté vers l’organisation de la fin de l’existence dans notre société, le rapport parlementaire Léonetti qui a ouvert la voie à la loi relative au droit des malades et à la fin de vie du 22 avril 2005. Le rapport consacre tout un chapitre au droit aux traitements à domicile (chapitre 2.1.2.3, page 124).
-
[6]
En 1993, l’INSERM publiait une étude qui montrait que 66 % des Français mouraient en institution, 28 % chez eux et 6 % sur la voie publique. Or le sondage IFOP-Santé, réalisé en 1991, montrait quelques années auparavant que 68 % des Français souhaitaient mourir chez eux.
-
[7]
Blocs opératoires, salles d’accouchement, d’anesthésie et de réveil, unités de réanimation, sites d’imagerie (radiologie, scanners, IRM…), radiologie interventionnelle ou d’endoscopie, laboratoires d’analyses biologiques.
-
[8]
Circulaire no 2003-257 du 28 mai 2003 relative aux missions de l’hôpital local.
-
[9]
En ce qui concerne les seuls soins palliatifs, la SFAP et l’ORS de Franche-Comté ont recensé 93 réseaux de soins palliatifs répartis dans 58 départements et 23 régions, 11 d’entre eux ayant d’emblée une dimension régionale (SFAP, 2003). Six réseaux franciliens financés en 2003 par la Dotation régionale de développement des réseaux en Île-de-France (DRDR) ont pris en charge 864 patients, ce qui est considéré comme modeste, si l’on conserve à l’esprit qu’il ne s’agit que de soins de seconde ligne (URCAM, 2004).
-
[10]
Favrot considère que la famille produit non seulement des soins mais aussi de la santé. Elle assure tout d’abord « l’hôtellerie » avec les repas à préparer, adaptés à l’état du patient, et les lessives à réaliser, notamment pour ce qui concerne la literie… « Mais ce travail est à peine mentionné par les familles car il s’intègre facilement dans l’univers de l’activité quotidienne ». Les familles assurent également le dialogue et l’information des soignants, l’administration des médicaments ce qui constitue une gestion de la santé du malade. Elle assure les soins corporels ce qui selon la relation avec le malade peut s’avérer très lourd. Allant plus loin que cette simple gestion, la famille vise le maintien de l’autonomie physique et intellectuelle du malade, en termes d’espoir et d’objectifs. Enfin, la famille diagnostique, voire interprète, l’observation quotidienne qu’elle fait du malade : « Présente de façon continue auprès du malade, elle observe la moindre évolution et détient un ensemble d’informations qu’elle interprète à la lumière de son savoir, qu’il s’agisse d’un savoir scientifique ou du savoir transmis d’une génération à l’autre » (Favrot, 1986, p. 65).
-
[11]
Aucun décret d’application n’a suivi cette loi.
-
[12]
Circulaire de principe no 207 du 29 octobre 1974 de la CNAMTS. L’hospitalisation à domicile : conditions médicales d’admission – conventions types – règlement intérieur.
-
[13]
Soit les caisses intéressées règlent le médecin traitant directement, soit les honoraires de ce dernier sont pris en charge par l’HAD, ce afin d’honorer les deux principes directeurs : le malade est dispensé de débourser le montant des honoraires et le médecin est payé directement par un tiers délégué.
-
[14]
Circulaire no 141 du 12 mars 1986 du ministère des Affaires sociales et de la Solidarité nationale relative à l’hospitalisation à domicile dans les établissements publics. Non parue au Journal officiel. « L’hospitalisation à domicile recouvre l’ensemble des soins médicaux délivrés au domicile du patient dont l’état ne justifie pas le maintien au sein d’une structure hospitalière. Ces soins doivent être en nombre et en intensité comparables à ceux qui étaient susceptibles de lui être prodigués dans le cadre d’une hospitalisation traditionnelle ».
-
[15]
Décret no 83-744 du 11 août 1983 relatif à la gestion et au financement des établissements hospitaliers publics et privés participant au service public hospitalier (JO du 12 août 1983).
-
[16]
L’HAD étant une structure hospitalière, elle est entièrement soumise à la loi 79-1140 du 29 décembre 1979 relative aux équipements sanitaires (JO du 30 décembre 1979) confirmant celle de 1970 en matière de réforme hospitalière, et qui introduit le concept d’autorisation pour la création ou l’extension des structures d’HAD. Cette loi n’est pas suivie de décret.
-
[17]
L’auteur d’ailleurs remet en cause cette prémisse en rappelant qu’à l’époque les prix étaient administrés et ne reflétaient nullement les économies réellement effectuées.
-
[18]
Loi no 91-748 du 31 juillet 1991 (modifiée) portant réforme hospitalière, qui prévoit notamment la création des schémas régionaux d’organisation sanitaire (SROS), établit l’obligation du projet d’établissement, définit la notion de contrat d’objectif et de moyens et fixe pour les cliniques l’objectif quantifié national (OQN) (JO du 2 août 1991).
-
[19]
Article R. 712-2-1 du Code de la santé publique (décret no 92-1101 du 2 octobre 1992 relatif aux structures de soins alternatives à l’hospitalisation, article 1), Journal officiel no 234 du 8 octobre 1992.
-
[20]
Décret no 92-1102 du 2 octobre 1992 relatif aux conditions techniques de fonctionnement auxquelles doivent satisfaire les structures de soins alternatives à l’hospitalisationmentionnées à l’article L. 712-2 du Code de la santé publique en application de l’article L. 712-9 de ce même Code (Journal officiel no 234 du 8 octobre 1992).
-
[21]
Décret no 92-1100 du 2 octobre 1992 portant application de l’article L. 712-10 du Code de la santé publique (Journal officiel no 234 du 8 octobre 1992).
-
[22]
PMSI : programme de médicalisation des systèmes d’information.
-
[23]
Circulaire DH/EO2/2000/295 du 30 mai 2000 relative à l’hospitalisation à domicile.
-
[24]
Indice qui permet de « chiffrer » le degré de dépendance du sujet. Chaque palier de 10 % correspond à un degré de dépendance ou d’autonomie : à 100 % le patient est sain ; à 0 % le patient est décédé ; entre 10 et 30 % le patient est très dépendant ; au-delà de 40 % le patient conserve encore une certaine autonomie.
-
[25]
Ordonnance no 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de l’organisation et du fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d’établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation. (JOno 206 du 6 septembre 2003, p. 15391) et circulaire DHOS/2003/485 du 13 octobre 2003 d’application de l’ordonnance du 4 septembre 2003.