CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Comme d’autres activités de services, et peut-être davantage encore, dans la mesure où les notions de vieillissement et d’innovation (ou de changement) sont souvent considérées comme contradictoires à différents titres, les services de soins aux personnes âgées (SSPA) souffrent d’une image négative en termes de potentiel d’innovation. Cet article [1] a pour objet de rompre avec ce préjugé, en tentant de rendre compte des multiples facettes de l’innovation et plus généralement du changement dans ce type d’activité. Il s’appuie sur un bilan de la littérature nationale et internationale, sur une série d’entretiens auprès des professionnels concernés et sur le traitement préliminaire d’une enquête postale réalisée dans plusieurs pays européens et aux États-Unis (cf. encadré 1). Il s’agit de recenser des cas d’innovation significatifs ou plus incrémentaux en insistant sur leur diversité et par conséquent sur l’impuissance des dispositifs statistiques existants à en rendre compte. Mais il s’agit surtout d’en proposer une grille analytique, qui permette d’ordonner cette diversité. Cet article vise donc moins à théoriser la problématique de l’innovation dans ce secteur particulier, qu’à fournir une grille simple d’identification et de recension la plus complète possible de l’innovation.

Encadré 1 : Méthodologie

Notre travail de recensement de l’innovation dans les SSPA s’est appuyé sur trois démarches différentes :
  • un bilan de la littérature nationale et internationale. Nous avons en particulier examiné les résumés de plusieurs centaines de communications à différents colloques nationaux et internationaux de gériatrie et de gérontologie, qui fournissent des indications précieuses sur les innovations les plus significatives du moment ;
  • la réalisation d’une vingtaine d’entretiens auprès de professionnels des SSPA (directeurs et cadres d’institutions d’hébergement des personnes âgées, responsables d’associations, ingénieurs et chercheurs spécialisés dans les gérontechnologies…). Les discussions ont été organisées selon une grille d’entretien ouverte destinée à collecter des informations : i) sur la nature de l’innovation (en retenant une définition large et ouverte de celle-ci) ; ii) sur ses modes d’organisation, ses déterminants et ses freins. Le présent article est centré essentiellement sur le premier point ;
  • l’exploitation préliminaire de la partie française d’une enquête postale réalisée dans quinze pays européens et aux États-Unis. Cette enquête postale comportait en effet une question ouverte destinée à recenser des exemples d’innovations de différents types. Cette question ouverte est formulée de la manière suivante : « Merci de décrire le changement, qui vous semble le plus significatif, introduit dans votre organisation ces trois dernières années, qu’il s’agisse d’un nouveau service, d’un nouveau moyen de production ou de livraison des services, d’une nouvelle structure organisationnelle ou d’une nouvelle manière d’interagir avec les clients ou les autres organisations ». On a ainsi disposé, dans le cas de la France, d’une soixante de questionnaires exploitables, en ce qui concerne les SSPA.
Nous n’avons pas réalisé d’entretiens auprès des personnes âgées ellesmêmes ou de leur famille. Mais nous avons bénéficié, dans une certaine mesure, de l’expérience d’un des coauteurs de cet article, praticien hospitalier, professionnel du soin aux personnes âgées.

2Compte tenu de son objet, notre article retient volontairement une définition large et ouverte de l’innovation. Ce choix se manifeste à la fois dans la nature de l’innovation prise en compte (innovation organisationnelle, innovation technologique, innovation de produit-service…) et dans le degré de nouveauté de cette innovation (innovation radicale, mais aussi innovation mineure ou incrémentale relevant éventuellement de la simple adaptation ou du changement). L’innovation est ainsi envisagée de manière subjective, la nouveauté n’étant pas appréhendée de manière absolue mais relative. Elle est également envisagée de manière extensive afin d’embrasser à la fois l’innovation produite en interne et l’innovation issue de l’extérieur, c’est-à-dire adoptée.

3Ce travail est organisé en six sections. La première est consacrée, d’une part, à une réflexion sur les difficultés de définition, d’identification et de délimitation des activités de SSPA et, d’autre part, à l’élaboration d’une grille d’analyse très simple de l’innovation dans cette activité. Cette grille, élaborée de manière à la fois déductive et inductive, renonce au recours direct aux typologies habituelles de l’innovation (innovation de produit, innovation de process) en mettant l’accent sur les principales cibles possibles de cette activité. Les sections suivantes examinent en détail ces différentes cibles : en premier lieu, l’environnement matériel et immatériel, c’est-à-dire les formules d’accueil et les technologies ; ensuite l’environnement humain, c’est-à-dire la famille et les soignants ou aidants professionnels ; enfin, l’environnement institutionnel et l’innovation institutionnelle, c’est-à-dire les différents mécanismes de régulation (publics, mais aussi privés) introduits afin de soutenir l’offre et la demande : procédures de certification ou d’accréditation, de financements, établissement de normes et contrôle des normes, etc.

Les services de soins aux personnes âgées : de la définition d’un service complexe à une typologie des cibles de l’innovation

4Il est difficile de définir et d’identifier l’activité de soins aux personnes âgées. Tout d’abord, elle ne constitue pas une catégorie comptable bien identifiée. Ensuite, elle se heurte à deux ambiguïtés sémantiques relatives aux notions de « soins » (qui recouvrent des activités diverses) et de « personnes âgées » (qui supposent la fixation d’un seuil arbitraire au-delà duquel un individu bascule dans cette catégorie). Enfin, les services de soins aux personnes âgées (SSPA) chevauchent d’autres catégories, elles-mêmes très mal identifiées. Tel est le cas, par exemple, des « services de proximité », catégorie fourre-tout qui traduit un processus d’externalisation du travail domestique.

Du triangle au polygone des SSPA

5L’économie des services nous fournit cependant une grille analytique qui permet de rendre compte d’une manière satisfaisante de la prestation de services de soins aux personnes âgées. Dans sa version élémentaire, cette grille qu’on désigne désormais comme « le triangle des services » (Gadrey, 1996) définit tout service comme un ensemble d’opérations diverses de traitement réalisées par le prestataire sur un support, entretenant des liens divers avec le client sans pour autant que soit élaborée une marchandise susceptible de circuler économiquement indépendamment de ce support (triangle P-C-S de la figure 1). Ces opérations de traitement visent à transformer de différentes manières l’état du support. Les principaux supports envisagés sont les suivants : des biens ou des systèmes techniques, des informations codifiées, l’individu (client, usager) lui-même dans ses caractéristiques physiques, intellectuelles ou de localisation spatiale, et des organisations, là encore sous leurs différents aspects (techniques, structures, compétences et savoirs collectifs). La nature des opérations de traitement est fonction bien évidemment du type de support cible envisagé : réparation, transport, maintenance, transfert, gestion, analyse…

6Dans le cas des services de soins aux personnes âgées, le client (destinataire) est la personne âgée et le support de la prestation est l’individu luimême dans ses caractéristiques physiques, intellectuelles ou de mobilité (si l’on retient une définition médico-sociale du soin). Mais tout autre support peut être envisagé si l’on retient une définition plus large.

7En réalité, si l’on veut tenir compte de certaines spécificités des services de soins aux personnes âgées, il faut complexifier la représentation sans pour autant changer fondamentalement la définition (cf. figure 1). En effet, pour obtenir une définition et une représentation plus précise des SSPA, il peut être utile d’enrichir le triangle initial en introduisant (Gadrey, 1994) :

  • le système de régulation, c’est-à-dire l’ensemble des institutions (publiques ou privées) qui exercent des fonctions d’évaluation, de certification, de contrôle, de financement, etc. ;
  • la relation salariale entre les agents prestataires du SSPA et l’organisation prestataire lorsqu’elle existe ;
  • la famille de la personne âgée, qui peut exercer une fonction de prescription ou une fonction de prestataire, sous différentes formes, en particulier lors du maintien de la personne âgée à domicile. Le cas échéant (S, C, P’) elle constitue un autre triangle des services, qui peut se substituer à la prestation du prestataire professionnel (P, C, S) ou la compléter. On notera également que la famille peut être bénéficiaire de la prestation d’assistance, dans le cadre d’une relation d’aide aux aidants ;
  • les intermédiaires, en particulier les associations ou autres organismes qui exercent une activité de mandataire, d’information, de conseil, de recommandation…

Figure 1

Du triangle des services (en pointillés) au polygone des services de soins aux personnes âgées

Figure 1

Du triangle des services (en pointillés) au polygone des services de soins aux personnes âgées

Les relations internes au polygone ne sont pas exhaustives. (adapté de Gadrey, 1994)

8En introduisant ces différents acteurs, on substitue au triangle des services initial un polygone des services.

Les cibles de l’innovation dans les SSPA

9La définition précédente du service et son illustration par le polygone du ou des services mettent en évidence les supports de la prestation et ses différents acteurs. Elles nous fournissent également une heuristique qui permet d’identifier (directement ou indirectement) les cibles possibles de l’innovation dans les SSPA. Cette démarche déductive (dans une certaine mesure) ne se suffit pas à elle-même. Il est nécessaire de la confronter à la réalité. Ainsi, en confrontant le polygone des services (qui fournit une topographie virtuelle des lieux possibles d’innovation) à un survey de la littérature nationale et internationale [2] et à notre propre investigation empirique préliminaire, on peut mettre en évidence les cibles suivantes (cf. figure 2) :

  • les structures ou plus généralement les formules d’accueil. Il s’agit des organisations prestataires (O) au sens large, c’est-à-dire au sens de formules organisationnelles de prestation sous leurs multiples formes (institutions, formules à domicile, réseaux, etc.). Ceci signifie que plusieurs structures ou organisations (au sens strict) peuvent intervenir dans l’élaboration d’une formule d’accueil : des structures d’hébergement, mais aussi des structures externes de prestation de service (associations, entreprises, etc.). Ces deux groupes constituent des cibles potentielles de l’innovation ;
  • les technologies. Il s’agit d’un ensemble d’artefacts matériels ou immatériels (systèmes techniques, architecture et ergonomie, méthodes…) ;
  • la famille de la personne âgée (P’), qui peut constituer l’un des principaux prestataires de SSPA ou simplement jouer un rôle d’intermédiaire et de prescripteur, voire, dans certains cas, être bénéficiaire (ou cobénéficiaire) de la prestation d’assistance ;
  • le personnel « soignant » ou plus généralement l’agent prestataire de services (P) ;
  • les services fournis à la personne âgée, qui diffèrent selon le support envisagé (la personne elle-même dans ses différentes caractéristiques, les biens qu’elle possède ou utilise…) ;
  • l’environnement institutionnel (I), qui constitue une cible d’innovation particulièrement importante depuis quelques années. Cet environnement institutionnel oriente de manière fondamentale les autres trajectoires d’innovation.

Figure 2

Les cibles de l’innovation dans les SSPA

Figure 2

Les cibles de l’innovation dans les SSPA

10Les deux premières cibles constituent ce qu’on peut désigner comme l’environnement matériel et immatériel de la prestation de SSPA ; les deux suivantes, l’environnement humain des SSPA.

11Ces différentes cibles de l’innovation sont « déduites », pourrait-on dire, de la définition fondamentale de la notion de SSPA. Elles sont donc stables et pérennes. Ce sont ce caractère structurel, ce degré de généralité et cette pérennité qui nous permettent d’envisager, avec une certaine rigueur, l’usage de ces cibles comme typologie de l’innovation.

12Ces différentes cibles peuvent évidemment se recouper. Le lancement d’une nouvelle structure d’accueil peut s’accompagner de la mise en œuvre de nouveaux systèmes techniques, de l’expérimentation de stratégies diagnostiques ou thérapeutiques, de l’offre de nouveaux services, d’une organisation innovante de l’environnement humain (personnels ou proches de la personne âgée). Néanmoins, ces différentes formes d’innovations peuvent également voir le jour dans des établissements déjà existants. Il faut donc être en mesure de les isoler.

13Une identification de l’innovation selon la « cible » est, nous semble-t-il, beaucoup plus « aisée » pour les professionnels concernés par les soins aux personnes âgées, que les traditionnelles distinctions que la science économique établit entre l’innovation de produit, l’innovation de process et l’innovation organisationnelle. En effet, dans certaines situations, ces distinctions s’avèrent difficiles à mettre en œuvre (à la fois sur le plan théorique et pratique). La perspective en termes de « cibles » retenue ici, évite ces difficultés sans pour autant renoncer à ces catégories utiles et nécessaires. Ainsi, par exemple, la cible « type de formule d’accueil » correspond à l’innovation organisationnelle au sens large. Elle couvre à la fois la construction de nouveaux établissements (au sens architectural et de l’organisation interne), mais aussi l’instauration de relations nouvelles entre les différents intervenants dans la prestation de SSPA (relations externes, réseaux). Les systèmes techniques (lorsqu’ils sont utilisés par des établissements prestataires de service) pour se substituer à du personnel sont le plus souvent des innovations de processus. Mais il peut s’agir aussi d’innovations de produit (c’est fréquent dans les formules « à domicile »). Quant aux (nouveaux) services offerts, ils constituent des innovations de produit, mais leur fourniture ou leur mise sur le marché peut s’appuyer sur des innovations de process et d’organisation, ce qui rend difficile la séparation entre les différentes formes d’innovation.
Il s’agit maintenant d’examiner plus en détail ces principales « cibles » de l’innovation dans les services de soins aux personnes âgées. Notre objectif n’est pas simplement de recenser des exemples d’innovation pour chacune des cibles retenues. Au-delà de cet aspect d’audit de l’existant, il s’agit d’explorer et d’organiser les boîtes noires que constituent ces cibles, pour comprendre les mécanismes qui orientent l’innovation et tenter d’en dégager une grille générale d’analyse.

Les types de formules d’accueil des personnes âgées

14Cette première cible rend compte des multiples formules d’hébergement et d’assistance de la personne âgée. Elle constitue un gisement important d’innovations, fortement influencé par les dynamiques institutionnelles nationales. On peut dire que la « topographie » ou la structure générale de cette cible est identique dans tous les pays européens : les différentes for-mules d’accueil (en tant que formule générique ou « dominant design ») sont partout présentes, mais avec des poids respectifs variables. En revanche, les trajectoires d’innovation, qu’il s’agisse de la montée en puissance d’une formule générique au détriment d’une autre (trajectoires d’innovation horizontale) ou de la multiplication des variantes au sein d’une formule générique (trajectoires d’innovation verticale) diffèrent en fonction des dynamiques économiques, culturelles et institutionnelles.

La topographie des formules d’accueil des personnes âgées

15La comptabilité nationale est un outil précieux pour réaliser un tel exercice topographique. Elle distingue, par exemple, en France, deux types de formules d’accueil des personnes âgées : les établissements pour personnes âgées d’une part et l’aide à domicile d’autre part (Neiss et Rouveira, 1996 ; Neiss, 1998).

16Les établissements pour personnes âgées peuvent eux-mêmes être divisés en deux groupes. Le premier, qui dépend des communes et des départements, est constitué essentiellement de maisons de retraite et de logements-foyers (ensemble de petits logements autonomes possédant des services collectifs à usage facultatif : restaurant, infirmerie, etc.). Le second est constitué de structures (les services de soins de longue durée) rattachées aux hôpitaux, qui assurent l’hébergement des personnes qui n’ont plus d’autonomie de vie et dont l’état nécessite une surveillance médicale constante. Depuis la réforme de 1999, l’ensemble de ces établissements est réuni dans une catégorie intitulée « Établissements pour personnes âgées dépendantes » (EHPAD) dès lors qu’ils ont signé la convention tripartite.

17Au sein des services d’aide et de soins à domicile, qui peuvent être rendus soit au domicile de la personne âgée soit au logement-foyer, on distingue généralement les services d’aide ménagère (préparation des repas, courses, ménages…) et les services de soins à domicile (soins infirmiers quotidiens d’hygiène et de nursing, sur prescription médicale). Ces prestations peuvent être réalisées par différents types de prestataires.

18Mais ces catégories officielles cachent la diversification et le renouvellement des formules d’accueil, autrement dit l’innovation dans les formules d’accueil.
De manière plus générale, et pour simplifier, la topographie de la « cible » formules d’accueil s’organise autour de quatre entités dont la première relève de la sphère informelle et les trois autres de la sphère formelle (cf. figure 3) : le maintien à domicile « informel » ; le maintien à domicile « formel » ; les formules intermédiaires et les institutions.

Figure 3

La topographie générale des formules d’accueil des personnes âgées

Figure 3

La topographie générale des formules d’accueil des personnes âgées

19Autrement dit, les formules d’accueil s’articulent entre deux pôles : celui du maintien à domicile de la personne âgée et celui de son hébergement collectif en institution. Entre ces deux pôles s’insèrent de multiples formules intermédiaires.

20La formule « maintien à domicile » peut se réaliser selon le mode informel (c’est-à-dire par la mobilisation informelle de la famille, généralement des femmes : les épouses, les filles, les belles-filles) ou selon le mode formel (le « marché » et/ou le réseau, c’est-à-dire le recrutement de professionnels fournissant un service marchand, que ces professionnels soient salariés d’une firme, d’une association, ou de la personne âgée elle-même). Le plus souvent ces deux modes (formel et informel) sont combinés.

21Les formules intermédiaires se définissent par le renoncement de la personne âgée à son domicile et par son insertion dans un réseau de prestataires divers (sous différents aspects : nature de la prestation, forme juridique d’exercice, mode de mobilisation…). L’exemple type de ces formules intermédiaires est le foyer-logement qui s’est développé en France à partir des années soixante-dix. Les résidences services et les maisons communautaires en sont d’autres exemples.

22Le « maintien à domicile formel » et les formules intermédiaires ont en commun d’inscrire la transaction de SSPA dans le marché et/ou le réseau (dans de multiples configurations). Autrement dit, les SSPA sont externalisés et pris en charge par le marché (quand ces SSPA sont marchands) ou le réseau (lorsque les SSPA sont fournis par des professionnels rémunérés par des associations ou des organismes publics et insérés dans des réseaux associatifs de soutien) ou une combinaison des deux.

23L’institution, enfin, est la formule d’hébergement qui s’apparente à la « hiérarchie » en tant que forme de gouvernance. En effet, il s’agit d’un mode d’hébergement collectif dans lequel la personne âgée reçoit en interne l’essentiel des services dont elle a besoin (l’hébergement, la restauration, le blanchissage). Les exemples types de l’institution sont l’hospice, la maison de retraite et les services de soins de longue durée des hôpitaux.

24Il est important cependant de nuancer ce schéma général.

25Les quatre pôles que nous venons de décrire sont bien évidemment des idéaux types. Ils correspondent bien à ce que la théorie évolutionniste, dans le champ de l’économie de l’innovation, appelle des « dominant designs » (Abernathy et Utterback, 1978), des « guides post technologiques » (Sahal, 1985) ou encore des « régimes technologiques » (Nelson et Winter, 1977), c’est-à-dire des artefacts de base dont la structure fondamentale a une certaine pérennité, même si ces artefacts ont des variantes dans l’espace et dans le temps.

26Les frontières des différents pôles ne sont pas strictement délimitées. Certaines formules peuvent se situer à la frontière de plusieurs pôles et leur affectation à un pôle plutôt qu’à un autre peut soulever des difficultés.

27L’informel (c’est-à-dire l’aide profane fournie par la famille) peut également coexister avec les formules d’accueil dites formelles ou professionnelles. C’est non seulement vrai pour le « maintien à domicile formel », mais aussi pour les formules intermédiaires et les institutions.
Les pôles extrêmes peuvent néanmoins se compléter dans certaines situations. Ainsi, une personne âgée maintenue à domicile (dans la sphère informelle et/ou formelle) peut de manière épisodique et transitoire, passer dans le pôle « institutions » dans le cadre de formules d’accueil dites de répit, par exemple qui seront analysées plus loin.

Les trajectoires d’innovation

28La dynamique de l’innovation dans les formules d’accueil peut être envisagée de deux manières différentes (qui ne sont pas contradictoires, et qui peuvent renvoyer à des horizons temporels différents) : une trajectoire d’innovation que nous qualifions d’horizontale, qui décrit le passage d’un « dominant design » à un autre, et une trajectoire que nous qualifions de verticale, qui décrit l’évolution au sein d’un « dominant design ».

Les trajectoires d’innovation horizontales

29Ces trajectoires décrivent l’évolution des formules d’accueil selon l’axe dessiné par l’analyse topographique précédente. Elles traduisent donc un changement de « dominant design ». Elles sont fortement orientées par des déterminants culturels et institutionnels, mais l’environnement de sélection marchand exerce également une influence fondamentale. Ainsi, dans les pays du sud de l’Europe (la Grèce, l’Espagne, l’Italie et le Portugal), la prise en charge de la personne âgée dépendante par la famille continue d’être considérée comme le mode d’accueil préférable alors que dans les pays du Nord (Suède, Danemark, Pays-Bas, Finlande) la préférence est accordée aux institutions spécialisées (Assous et Ralle, 2000 ; Valetas, 2002).

30En France, mais aussi dans d’autres pays européens, on peut dire que l’évolution horizontale s’opère depuis quelques années [3] par un déplacement de la « hiérarchie » vers le « marché » et/ou le réseau, autrement dit un déplacement dans le sens : institution ? formules intermédiaires ou institution ? maintien à domicile (cf. figure 4). Ainsi, la trajectoire horizontale de l’innovation a consisté à donner une préférence aux formules de maintien à domicile et à leur corollaire : la diversification des services offerts et l’innovation dans les organisations prestataires de services correspondantes (nous examinerons ce point particulier ultérieurement). Cette trajectoire horizon-tale a également consisté à substituer aux institutions, des formules intermédiaires mieux intégrées dans le système social. On est ainsi passé en France des établissements de masse et de grande taille (dont l’exemple type est l’hospice) à des établissements de plus petite taille (Argoud, 2000). Les évolutions horizontales s’expliquent à la fois par une saturation des places en institutions (rares et chères) et par une perception répulsive de celles-ci (Fior, 1997), qui renvoie à une image ancienne associée aux hospices : celle des « mouroirs ».

Figure 4

Les trajectoires d’innovation horizontales des formules d’accueil des personnes âgées

Figure 4

Les trajectoires d’innovation horizontales des formules d’accueil des personnes âgées

31Cette trajectoire horizontale n’est pas propre à la France. Ainsi, au Royaume-Uni, en Suède et au Danemark, on constate une semblable tendance à la réduction des hébergements hospitaliers de longs séjours (institutions) au bénéfice de petites structures d’accueil appuyées sur des services professionnels (formules intermédiaires) (Hugman, 1994 ; OCDE, 1996 ; Henrard, 1997). Le Danemark, en particulier, a mis en place « une politique générale de logements protégés faisant appel aux services », ce qui a conduit à une réduction sensible du nombre de personnes âgées en institution.

Les trajectoires d’innovation verticales

32Les trajectoires d’innovation que nous qualifions de verticales (cf. figure 5) traduisent la diversité ou la diversification des formules que l’on constate au sein de chaque pôle (c’est-à-dire au sein de chaque « dominant design »). Il s’agit d’en donner un certain nombre d’illustrations et de tenter de comprendre les critères qui orientent les directions des trajectoires d’innovation.

Figure 5

Les trajectoires d’innovation verticales des formules d’accueil des personnes âgées

Figure 5

Les trajectoires d’innovation verticales des formules d’accueil des personnes âgées

L’ordre des exemples proposés ne traduit pas une progression ordonnée de la trajectoire.

33La formule « maintien à domicile informel » a une capacité de diversification faible, qui tient précisément au caractère informel de l’aide apportée. On citera cependant à titre d’exemple les formules de placement en familles d’accueil, d’habitat partagé (lorsqu’une personne âgée partage son domicile avec quelqu’un en échange de certains services domestiques) ou encore les expériences dites d’habitat intelligent ou de « smart home », c’est-à-dire des domiciles adaptés sur les plans technologiques et architecturaux à la personne âgée. Ces dernières expériences renvoient cependant, il est vrai, essentiellement à la cible technologique de l’innovation.

34La formule « maintien à domicile formel » doit également sa capacité d’évolution aux modifications des configurations des réseaux de services dans lesquels elle s’insère. L’évolution de cette formule renvoie donc à l’évolution et à l’innovation qui affectent les cibles « services offerts » et les organisations prestataires de ces services, mais aussi les cibles « technologies » (smart home, par exemple, ici aussi). L’hospitalisation à domicile constitue une variante de cette formule générale.
Les formules intermédiaires sont nombreuses et jouissent d’une forte capacité de diversification. Cette orientation correspond à la volonté de reproduire au mieux « un foyer de substitution », un véritable domicile ou « chez soi » (Roger, 1997), qui s’insère dans un réseau de prestations de services internes et/ou externes. Comme pour les formules « à domicile », l’évolution de ces formules intermédiaires dépend de l’innovation relative aux organisations prestataires de services (nouveaux services offerts, nouveaux types de prestataires, nouvelles modalités de livraison du service, etc.). Cette trajectoire est déterminée par les critères suivants (dont certains ne sont pas indépendants les uns des autres) :

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  • une taille humaine ;
  • l’insertion dans la cité (proximité sociale externe). Cette orientation est illustrée, par exemple, par les « structures de proximité » telles que les « domiciles collectifs ». Il s’agit de structures implantées au cœur de l’environnement familier de la personne âgée (son quartier, sa commune), dans lesquelles la personne âgée possède un logement personnel et profite de services locaux de soutien à domicile (Neiss, 1998) ;
  • la montée en puissance de la relation de service (interne ou externe) ;
  • l’usage temporaire de la formule. Tel est le cas, par exemple, des résidences d’hébergement temporaire visant à faire face à des difficultés passagères, comme l’absence provisoire de la famille, l’inadaptation du logement en hiver… (Neiss, 1998 ; Badeyan et Colin, 2000) ;
  • l’usage à la carte (la flexibilité), la liberté de choix pour la réalisation de certains actes élémentaires de la vie quotidienne, la prise en compte de l’évolutivité des besoins de la personne âgée au fur et à mesure de son vieillissement et de l’élévation de son degré de dépendance.
Parmi les nombreuses formules intermédiaires existant en France, on peut citer les exemples suivants (Gallard, 1996, d’après Argoud, 2000) :

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  • les « domiciles personnels regroupés » : il s’agit de la concentration dans un même ensemble immobilier de plusieurs logements autonomes affectés à des personnes âgées disposant de contrats de locations ordinaires. Cette catégorie échappe aux statistiques ;
  • les « domiciles personnels protégés » : il s’agit de logements-foyers de petite taille dans lesquels la personne âgée est sous-locataire d’un intermédiaire (association, centre communal d’action sociale). L’intermédiaire sollicite des prestataires de service extérieurs pour maintenir la personne âgée dans ce foyer de substitution.
L’innovation dans le pôle « institutions » est liée principalement à la réduction de la taille des établissements (proximité sociale interne) et la spécialisation dans une pathologie spécifique, en particulier les pathologies fortement invalidantes telles que la maladie d’Alzheimer et les maladies psychiatriques. Bien entendu, ces deux critères techniques (taille, spécialisation) recouvrent de nombreux autres objectifs plus qualitatifs (humanisation, déconcentration, bien-être…). Il est possible de retracer les grandes étapes de la trajectoire verticale d’innovation, au sein du pôle « institutions », en France, en se donnant comme point de départ l’hospice (cf. Argoud, 2000 et encadré 2).

Encadré 2 : Les grandes étapes de la trajectoire verticale d’innovation et de changement au sein du pôle « institutions »

L’hospice est une formule d’hébergement ancienne caractérisée par sa promiscuité et la concentration exclusive des individus dans des « espaces collectifs » (en particulier le dortoir). La maison de retraite qui se substituera à l’hospice est beaucoup plus petite et fonctionnelle sur le plan architectural. Elle permet l’individualisation des chambres et la séparation des vieillards valides et des grabataires. Le programme des grands travaux de 1974 met en place des unités industrialisées de type hospitalier (dénommées V120, c’est-à-dire initialement 40 lits de moyens séjours et 80 lits de long séjour). À partir du milieu des années quatre-vingt, on assiste à la création des petites unités de vie de dix-quinze personnes (de niveaux de dépendance équivalents) au sein des maisons de retraite, qu’on appelle désormais des maisons d’accueil pour personnes âgées (MAPA). À la même époque apparaissent des MAPAD (maisons d’accueil pour personnes âgées dépendantes). Ensuite, on organise, au sein des MAPAD, des petites unités de vie séparées (appelées Cantou) pour accueillir des personnes âgées atteintes de démence [4]. Cette catégorie « petite unité de vie » recouvre désormais des formules très hétérogènes que Gallard (1996) réunit sous le terme de « domiciles collectifs de types communautaires » dont les principaux points communs sont les suivants :
  • elles sont de petite taille (échelle humaine) [5] et visent l’adaptation à des dépendances particulières ;
  • elles sont le fruit de l’expérimentation d’acteurs associatifs, sans l’encouragement et le soutien initial des pouvoirs publics (mêmes si ceux-ci peuvent être obtenus a posteriori) ;
  • elles sont difficiles à identifier initialement pour cette raison. Une autre for-mule est apparue au sein de ce pôle « institutions ». Ce sont ce que Gallard (1996) appelle les « domiciles collectifs de type hôtelier » : il s’agit de petits établissements (grands appartements, mini-maisons de retraite) où l’espace personnel est généralement la chambre, qui ont massivement recours aux services collectifs et aux personnels spécialisés (salariés de la structure pour l’essentiel). Ce qui les différencie des « domiciles collectifs de types communautaires » (type Cantou) c’est la présence permanente de personnels d’accompagnement dans les domiciles communautaires.
De semblables trajectoires verticales sont à l’œuvre dans tous les pays développés, qu’il ne s’agit pas ici pour nous de retracer. Nous nous contenterons simplement de signaler que la plupart de ces pays ont mis en place des unités spécialisées de traitement de la démence (cf. Holmes, Teresi et Ory (2000) qui ont consacré un ouvrage collectif aux différentes formules d’hébergement et de soins dédiées aux personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer et de démence, en Europe, aux États-Unis et en Australie).

37On notera, pour conclure ce point, que certaines formules d’hébergement sont communes au pôle « institutions » et au pôle « formules intermédiaires ». Par exemple, l’accueil de nuit, l’accueil de jour ou encore l’hébergement temporaire peuvent être pris en charge au sein d’institutions existantes (maisons de retraites, etc.) ou être organisés en tant que formules intermédiaires autonomes et spécialisées. On ajoutera également que d’autres innovations organisationnelles (qui ne relèvent pas de la fonction d’hébergement cette fois) peuvent voir le jour au sein du pôle « institution » : tel est le cas, par exemple, des centres d’expertise gérontologique qui apparaissent dans certains hôpitaux. Ces centres d’expertise gérontologique sont des structures de consultations externes spécialisées réunissant différents types de praticiens (gériatres, neuropsychologues, neurologues, psychiatres, ophtalmologistes, orthophonistes, rééducateurs, etc.) et mobilisant des technologies particulières (IRM, scanner par émission de positrons, par exemple).
Les innovations relatives à la cible « formules d’accueil » sont avant tout des innovations organisationnelles dans la mesure où elles se manifestent par la mise en place d’une organisation au sens large, c’est-à-dire à la fois une organisation interne et un système de relations externes, etc. Cependant, une nouvelle formule d’accueil ne se réduit pas à ce contenant. Elle véhicule aussi un contenu nouveau, qui peut affecter une, plusieurs, voire l’ensemble des autres cibles de la prestation de soins aux personnes âgées (systèmes techniques, traitements, services offerts, personnels, etc.) et entraîner des innovations de produit ou de process. De ce point de vue, une nouvelle formule d’accueil correspond à ce que les spécialistes du marketing appellent un « nouveau concept » (nouveau concept hôtelier, de restauration, d’hypermarché…).

Les technologies

38La seconde cible de l’innovation est la technologie. Dans les SSPA, comme dans les autres secteurs de services (C. et F. Gallouj, 1996 ; F. Djellal et al., 2004), cette cible de l’innovation est abondamment traitée par la littérature. Une discipline nouvelle est même apparue qui est baptisée la « gérontechnologie ». Il s’agit ici aussi d’une cible particulièrement hétérogène, dont les principaux critères discriminants sont les suivants : la localisation des technologies, leur objet, leur nature. En effet, certaines technologies sont introduites dans des institutions (structures d’hébergement, mais aussi organisations prestataires), d’autres dans les domiciles (y compris les domiciles de substitution fournis par les formules intermédiaires d’hébergement), d’autres encore dans ces différents endroits à la fois. Un certain nombre d’entre elles enfin visent à mettre en relation les différentes entités (c’est le cas de la télématique, par exemple).

39Ces technologies peuvent avoir pour objet le traitement de l’état de santé de la personne âgée (traitement médical au sens strict). Mais elles peuvent viser d’autres objets :

  • aide à la vie quotidienne (on parle parfois de technologies domestiques ou de technologies supplétives), il s’agit par exemple d’assister techniquement la personne âgée dans certains aspects matériels ou immatériels de la vie quotidienne, en particulier, la mobilité, l’alerte de l’entourage ou des prestataires concernés, dans certaines circonstances (par exemple, en cas d’incident) ;
  • traitement de l’environnement d’hébergement de la personne âgée sous différents aspects : traitement informationnel, traitement matériel, méthodes, architecture (au sens du traitement des matériaux, mais aussi des espaces, etc.) ;
  • soutien technologique au prestataire de service (association, société) dans la réalisation de la prestation. Cela concerne l’ensemble des « technologies » utilisées par les organisations prestataires de service (« à domicile ») pour rendre leurs services.
Bien qu’il puisse exister certaines zones de chevauchement, on opposera les technologies « ayant un objet médical au sens strict » et les technologies « ayant un objet non médical ». En ce qui concerne la nature des technologies, il faut distinguer (lorsque c’est possible, ce qui n’est pas toujours aisé) les systèmes techniques matériels et les technologies immatérielles (les méthodes, etc.). Mais là encore, il n’est pas rare que les deux soient mis en œuvre simultanément.
Pour simplifier, nous renoncerons au premier critère (celui de la localisation des technologies). Il est alors possible de construire une typologie des cibles technologiques en croisant les critères relatifs à l’objet (médical ou non strictement médical) de la technologie et à sa nature matérielle ou immatérielle (cf. tableau 1). Il faut cependant nuancer cette typologie (et donc le tableau 1) par les remarques suivantes :
  • la frontière entre les innovations médicales et non médicales n’est pas toujours claire. Par exemple, la télésurveillance peut être considérée comme relevant du domaine médical lorsqu’elle est mise en œuvre dans une chambre d’hôpital pour alerter le personnel soignant ; elle peut être affectée au champ non médical lorsqu’elle est utilisée à domicile, comme système d’alerte de la famille ;
  • la frontière entre la nature matérielle et la nature immatérielle de la technologie n’est pas toujours simple à établir. C’est en particulier le cas dans le domaine de l’innovation architecturale et de l’ergonomie. En effet, l’innovation dans ces domaines mêle de manière parfois inextricable des aspects matériels et immatériels. De même, les méthodes d’évaluation de la dépendance, par exemple, peuvent être matérialisées (ou non) dans des programmes et des systèmes informatiques ;
  • nous avons volontairement donné un sens restrictif au « traitement de l’environnement d’hébergement ». Il concerne essentiellement l’organisation matérielle et immatérielle des prestations au sein des institutions et des formules intermédiaires. Ainsi, les aspects architecturaux ne relèvent pas de cette dimension, mais plutôt des « opérations d’aide à la vie quotidienne ».

Tableau 1

Une typologie des cibles technologiques dans le domaine des SSPA

Tableau 1
Médicales Non médicales (d ’aide à la vie quotidienne de la personne âgée, de traitement de l ’environnement d ’hébergement, de traitement de la prestation de service) Technologies matérielles – Télémédecine (pour différents objets : avis médical, enseignement à distance, interventions podologiques en maison de retraite). – Télésurveillance : (par exemple, un système pour détecter les mouvements nocturnes d’une personne âgée dans sa chambre d’hôpital…). – Télé-réhabilitation : par exemple, utilisation des technologies, dans le traitement de la démence, pour compenser le handicap et pour stimuler le patient. – Médications diverses (innovations biomédicales ou biopharmacologiques). – Robots miniaturisés en chirurgie. – Thérapies géniques. – Cultures d’organes ou de tissus de remplacement… Technologies d ’aide à la vie quotidienne (technologies domestiques) : – télésurveillance : système d’alerte en cas de chute ou de malaise, etc. ; – technologies d’assistance de la personne âgée : ex. : fauteuils roulants électriques perfectionnés, mise à la disposition de fauteuils dans des lieux publics (hôpitaux, aéroports) accessibles comme les caddies des supermarchés ; – technologies architecturales (aspects matériels) : ex. : baignoires adaptées, toilettes adaptées, cuisine adaptée ; – biens de consommation et d’équipement adaptés en particulier sous l’angle ergonomique (user-friendliness) ; – technologies à usage collectif : système de transport urbain adapté aux personnes âgées et handicapées. Technologies de traitement de l ’environnement d ’hébergement : – technologies de gestion des structures d’accueil (informatique de gestion) ; – technologie de traitement de la matière au sein des structures (technologies de nettoyage, de restauration, de blanchissage…). Technologies utilisées par les organisations prestataires de services : – matériels de transports des repas à domicile ; – systèmes informatiques adaptés. Technologies immatérielles Méthodes de mesure (évaluations gérontologiques, stratégies diagnostiques) : – grille AGGIR ; – grille Colvez ; – ADL (Activities of Dayly Life Living) ; – Mini Mental State ; – MNA (Mini Nutritional Assessement). Technologies immatérielles d ’aide à la vie quotidienne (technologies domestiques) : – technologies architecturales et ergonomie (aspects immatériels) : par exemple architecture d’intérieur, organisation efficiente des espaces ; – usage des couleurs et des lumières dans les unités de déments. Stratégies thérapeutiques (protocoles de soins) : – protocoles escarres ; – CLUD (comité local de lutte contre la douleur). Technologies (immatérielles) de traitement de l ’environnement d ’hébergement : – gestion des repas (nécessitant organisation particulière des cuisines) ; – protocoles de nettoyage des surfaces ; – protocoles de blanchissage ; – protocoles d’élimination des déchets. Technologies (immatérielles) mobilisées par les prestataires : organisation générale d’une association ou d’une entreprise, innovations de process.

Une typologie des cibles technologiques dans le domaine des SSPA

Les technologies matérielles

40Les technologies matérielles sont les plus connues et les plus spectaculaires. Ce sont celles qui sont le mieux éclairées par les outillages statistiques nationaux et internationaux. Le manuel d’Oslo de l’OCDE (1997), par exemple, s’intéresse exclusivement aux innovations technologiques de produit et de process.

41Ces technologies matérielles désignent :

  • les systèmes techniques de soins, qu’il s’agisse de la mise en place de technologies spécifiques aux soins de la personne âgée ou de l’application à ce domaine particulier de technologies génériques utilisées dans d’autres circonstances. On peut citer, à titre d’exemple des technologies spécifiques, la télémédecine, la télésurveillance, la télé-réhabilitation, les médications diverses (innovations biomédicales ou biopharmacologiques) ;
  • les applications particulières de technologies génériques qui concernent celles orientées vers l’aide à la vie quotidienne, c’est-à-dire l’ensemble des systèmes techniques d’assistance à la personne âgée (qui peuvent être installés dans la structure d’accueil ou à son domicile) : technologies d’alerte, technologies d’assistance, technologies architecturales, biens de consommation et d’équipement adaptés ;
  • l’ensemble des systèmes techniques de gestion des structures d’accueil et d’organisation des prestations en leur sein (informatique, technologie de la restauration, du nettoyage, du blanchissage) ;
  • enfin, les systèmes techniques mobilisés par les organisations prestataires pour réaliser leurs prestations (matériels de transport des individus, matériels de transport des repas, systèmes informatiques).
Cependant, la question du rapport de la technologie et de l’innovation technologique (matérielle) aux personnes âgées ou plus généralement à l’âge n’est pas épuisée par la perspective précédente. Il est en effet possible d’envisager cette question sous d’autres perspectives, en particulier en distinguant :
  • les technologies nouvelles spécifiques à la vieillesse. Il s’agit de technologies d’assistance conçues spécifiquement (et exclusivement) pour les besoins des personnes âgées (en particulier dépendantes). On peut citer, parmi d’autres, les exemples suivants : la mise au point de nouveaux types de fauteuils roulants, les protecteurs de hanche (pour limiter les fractures de col du fémur en cas de chute). Il faut noter que ces technologies qui sont spécifiques peuvent par la suite perdre leur spécificité et viser l’ensemble du public (exemple : les simplifications des programmations et des modalités d’utilisation des matériels audiovisuels domestiques) ;
  • les technologies traditionnelles non spécifiques, qu’il s’agit d’adapter aux « seniors » (à leur baisse d’aptitude). Il s’agit de technologies « grand public » (produits de consommation et d’équipement) que la personne âgée connaît bien pour les avoir utilisées, mais pour lesquelles l’âge induit une baisse de compétences (visuelle, motrice, auditive, etc.). Tel est le cas par exemple de la téléphonie, des distributeurs de billets, etc., des distributeurs d’essence, des titres de transport ;
  • les technologies nouvelles non spécifiques qu’il s’agit également d’adapter aux seniors. Il s’agit là encore de technologies à vocation universelle, mais qui sont nouvelles. Le cas le plus évident est l’internet, qui pour pouvoir être utilisé par certaines personnes âgées, nécessite des interfaces adaptées (des souris particulières, des claviers et des écrans adaptés, etc.).
Dans ces deux derniers cas, il s’agit en quelque sorte de lutter contre « la mauvaise maîtrise des outils sociaux de la vie courante », c’est-à-dire « l’illettrisme technologique » (Bouchayer et Rozenkier, 1997) qui est source, tout comme l’autre, de marginalisation et d’exclusion sociale.

42Cette perspective permet, en particulier, d’enrichir l’analyse des technologies matérielles ayant un objet non médical.

43D’autres perspectives d’analyse du rapport entre l’innovation technologique et le vieillissement sont possibles. Nous ne ferons que les évoquer ici. Il s’agit, tout d’abord, de la question de la propension des personnes âgées à adopter des innovations. La thèse qui est fréquemment défendue ici est que les personnes âgées ont une attitude plutôt conservatrice, autrement dit une réticence à consommer des produits innovants (cf. Collerie de Borely, 1998 ; Bouchayer et Rozenkier, 1997). Il s’agit également, au niveau macroéconomique, de l’analyse de l’impact, jugé négatif, du vieillissement de la population (et du poids croissant des dispositifs de retraite) sur les ressources allouées au développement technologique.

44On notera que l’Union européenne a lancé plusieurs programmes de recherche sur le thème « vieillissement et technologies », qui couvrent une grande partie des thématiques évoquées précédemment (cf. Bouchayer et Rosenkier, 1997).

Les technologies immatérielles

45Dans le domaine des SSPA, les technologies immatérielles (qu’on pourrait également appeler les technologies invisibles) sont également très nombreuses. On peut de nouveau en rendre compte simplement en distinguant celles (particulièrement nombreuses) qui sont orientées vers le traitement médical, celles qui visent d’autres objets (services, management) (cf. tableau 2).

Tableau 2

Les technologies matérielles et les personnes âgées

Tableau 2
Définition Exemples Technologies spécifiques Technologies conçues spécifiquement pour les besoins des personnes âgées. – Fauteuils roulants (non spécifiques aux personnes âgées). – Protecteurs de hanche. Technologies non spécifiques (anciennes) Technologies anciennes « grand public » qu’il faut adapter aux handicaps des personnes âgées. – Téléphonie. – Distributeurs en tous genres (billets de banque, titres de transport, timbres postaux, essence…). – Audiovisuel domestique (simplification des télécommandes de TV, des programmations de magnétoscope, etc.). – Aménagements internes de l’automobile. – Aménagement des transports collectifs. Technologies non spécifiques (nouvelles) Technologies nouvelles « grand public » qu’il faut adapter aux handicaps des personnes âgées. – Internet.

Les technologies matérielles et les personnes âgées

Les technologies ayant pour objet le traitement médical

46On peut isoler deux groupes particulièrement féconds, en particulier lorsqu’on examine les communications aux récents colloques internationaux de gérontologie (Gerontology, 2001) : celui des méthodes de mesure ou de diagnostic, celui des stratégies thérapeutiques.

47La question des méthodes de mesure ou de diagnostic constitue un champ de recherche et d’innovation particulièrement fécond, qui se décline à une multitude d’objets : l’évaluation du degré de démence, du risque (par exemple de chute), de la dépendance, de la mémoire, de la douleur (qui peut être déclinée à différents types de patients, en particulier des personnes âgées incapables de communiquer), la conception d’indicateurs de bien-être adaptés à la personne âgée, d’indicateurs de qualité de vie (Dubuisson et Gardeur, 2000), etc. (cf. annexe). Les trajectoires d’innovation dans ce domaine des méthodes d’évaluation sont orientées par les éléments suivants : l’objet ou cible de la mesure, le niveau d’application initial (local, national, international), le degré de nouveauté de la méthode.

48Il existe ainsi une multitude de grilles d’évaluation internationales validées et utilisées en France, qui mettent l’accent soit sur la dimension médicale, c’est-à-dire sur l’identification de pathologies psychiques ou physiques, soit sur la capacité à effectuer les activités de la vie quotidienne (Borrel, 1996 ; Dubuisson et Gardeur, 2000 ; Le Bihan, 2002 ; Bontout et al., 2002) : la grille ADL (Activities of Dayly Living), le Mini Mental Status, le Clinical Dementia Rating, l’échelle Lawton et Brody (ou IADL), etc. Mais il existe aussi une grande quantité de grilles d’évaluation nationales (en se contentant du cas de la France, on citera la grille AGGIR : autonomie gérontologique groupes iso-ressources, la grille Colvez, l’indicateur EHPA : enquête auprès des établissements d’hébergement pour personnes âgées, ANGELIQUE : application nationale pour guider une évaluation interne de la qualité pour les usagers des établissements). Il existe enfin des grilles locales (c’est-à-dire propres à une région, une municipalité voire une institution).
L’innovation peut consister à introduire de nouveaux systèmes d’évaluation orientés vers des objets nouveaux (voire une association de plusieurs objets nouveaux et/ou anciens). Elle peut consister à adapter des outils existants à de nouveaux contextes : les simplifier, les généraliser.

Les technologies immatérielles non médicales

49Il semble possible de distinguer, comme pour les technologies matérielles non médicales, celles dont l’objet est l’assistance à la vie quotidienne, celles dont l’objet est le traitement de l’environnement d’hébergement, et celles dont l’objet est le bon fonctionnement interne de l’organisation prestataire. Le premier sous-groupe réunit les innovations architecturales (d’organisation des espaces). C’est un champ d’innovation particulièrement dynamique. Il s’agit de concevoir des « espaces » de vie adaptés aux personnes âgées dépendantes ou handicapées. Le design de l’espace (ou de l’environnement) des institutions pour personnes âgées vise plusieurs objectifs : encourager l’exercice physique, favoriser l’échange social et encourager l’indépendance et l’autonomie. On notera, que dans certaines écoles d’architecture, et dans certains pays, il existe désormais des cours et des diplômes de « design for aging ».

50Les innovations immatérielles relatives aux traitements de l’environnement d’hébergement (exemple : gestion des repas, protocoles de nettoyage, etc.) constituent le deuxième sous-groupe.

51Enfin, le troisième regroupe les méthodes mises en œuvre par les prestataires de service pour améliorer leur fonctionnement et la fourniture de leur prestation.

Les services offerts

52Le potentiel d’innovation associé à cette cible est considérable. Les catégories généralement retenues par la comptabilité pour rendre compte des services offerts aux personnes âgées sont, rappelons-le, d’une part les services d’aide ménagère (préparation des repas, courses, ménages…) et d’autre part les services de soins à domicile. Mais, virtuellement, toute prestation de service existante peut être adaptée à la population des personnes âgées et venir enrichir l’offre des prestataires.

53On peut dire, d’une certaine façon, que cette diversification des services est un mode d’innovation particulièrement aisé (pourvu que les conditions de solvabilisation de la demande soient réunies) dans la mesure où il s’agit d’ajouter des services périphériques ou de permettre l’accès à ces services périphériques. Ce raisonnement est valable, quelle que soit la formule d’accueil, c’est-à-dire qu’il s’agisse de formules à domicile ou de formules en maison d’accueil.

54De nouveau ici, il peut être intéressant d’introduire un certain ordre dans cet ensemble ouvert de « prestations » possibles. Cependant, s’agissant de la question de l’innovation, il ne paraît pas opportun de fixer une frontière à ce type de prestation de service orientée vers la personne âgée. On propose ainsi de distinguer cinq groupes de services :

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  • services de soins médicaux et paramédicaux (soins infirmiers, toilette) ;
  • services de maintien physique, esthétique, culturel et intellectuel (sport, coiffeurs, visites, loisirs, bibliothèques, etc.). Il s’agit là de services d’ordre social et culturel visant à lutter contre l’isolement de la personne âgée ;
  • services domestiques (ménages, courses, jardinage, bricolage, repas…).
Il s’agit de l’externalisation du travail domestique :

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  • service de mobilité spatiale (transport) ;
  • autres services adaptés à la personne âgée.
Les quatre premières catégories sont les plus fréquemment évoquées dans la littérature. Mais les nouvelles prestations destinées aux personnes âgées peuvent se situer en dehors de ces catégories. C’est la raison pour laquelle, il est utile d’introduire une catégorie résiduelle.

57Les nouvelles prestations sont envisagées ici, de manière autonome, comme cible de l’innovation. Mais il est évident, que ces nouvelles prestations peuvent s’inscrire dans une formule d’accueil particulière, de même qu’elles peuvent s’appuyer sur des innovations technologiques.
L’innovation dans ces « services offerts » peut recouvrir des réalités différentes :

  • l’adjonction de nouveaux services à une offre existante pour un prestataire donné ;
  • l’amélioration d’un service déjà offert ;
  • l’instauration d’un guichet unique ;
  • la mise en place de nouvelles configurations de « réseaux de service » (c’est-à-dire la mise en relation d’intervenants multiples sous des formes variées) ;
  • les nouvelles offres institutionnelles de services (nouveau type de prestataire)…

L’environnement humain (soignants professionnels et parents)

58Comme nous venons de le voir, les cibles de l’innovation dans le domaine des services aux personnes âgées sont ces personnes âgées elles-mêmes (dans leurs différentes dimensions), mais aussi leur environnement physique et technique, etc. Une autre cible de l’innovation prend de plus en plus d’importance depuis quelques années. Il s’agit de l’environnement humain de cette personne âgée, qu’il s’agisse de ses proches ou du personnel soignant.

59En effet, ces derniers subissent un stress particulièrement éprouvant, qui a des origines à la fois physiques, psychologiques, sociales et financières (Andrieu et Bocquet, 1999 ; Dutheil, 2001). Ce « fardeau » ou cette « charge » des soignants « care giver burden » oriente différentes trajectoires d’innovation qu’il s’agit donc d’identifier. Plusieurs distinctions (que nous ne ferons qu’évoquer) présentent un intérêt pour comprendre la nature des dispositifs d’innovation associés à ce fardeau :

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  • au sein de l’environnement des SSPA entre les soignants et les parents ;
  • parmi les parents, entre les véritables soignants et les autres ;
  • parmi les parents soignants, entre ceux qui sont eux-mêmes des personnes âgées et les autres.
En effet, ces différentes distinctions peuvent alimenter des dispositifs d’innovation spécifiques. Il existe ainsi des innovations orientées vers chacune de ces catégories particulières (par exemple, des innovations orientées vers le problème du fardeau des soignants ou de la famille).
L’examen de la littérature permet de distinguer deux principaux groupes d’initiatives (innovantes) orientées vers la prise en charge de ce fardeau : les initiatives visant à l’évaluation de celui-ci et celles orientées vers sa prise en charge et sa réduction.

L’évaluation du fardeau comme cible de l’innovation

61Ce premier groupe d’initiatives est le plus simple à identifier. Il réunit les très nombreuses initiatives consacrées à l’amélioration des outils existants ou à la mise au point de nouveaux outils d’évaluation du fardeau. On peut citer parmi d’autres (cf. tableau 3) l’échelle de Zarit qui évalue le fardeau des aidants familiaux de malades déments. Cette échelle de Zarit est également appelée « Inventaire de fardeau ». Elle comporte 22 questions cotées de 0 à 4 avec un score global variant de 0 à 88. Un score inférieur ou égal à 20 témoigne d’une charge faible ou nulle ; un score supérieur à 60 indique une charge lourde. Mais il existe d’autres outils d’évaluation du fardeau, qui sont moins utilisés en France, par exemple l’échelle d’épuisement de Pines « Pines burnout scale », l’échelle de Cope « Cope Index », etc.

Tableau 3

Les domaines d’innovation associés à la cible environnement humain

Tableau 3
Domaines d’innovation Exemples Évaluation du fardeau Méthodes de mesure (technologies immatérielles de mesure). – Pines burnout scale. – Cope Index. – Zarit burden inventory. Gestion du fardeau Technologies (matérielles ou immatérielles) de gestion du fardeau. – Programmes multimédias de formation, d’information et de conseil des aidants. – Lignes d’appel destinées aux aidants. Institutions (de gestion du fardeau), dispositifs de répit. – Gardes de nuit itinérantes. – Groupes de parole.

Les domaines d’innovation associés à la cible environnement humain

62Il s’agit de nouveau ici de technologies immatérielles, mais orientées cette fois vers une cible qui n’est pas la personne âgée elle-même, mais l’environnement humain de celle-ci. Cette innovation est généralement orientée vers les directions suivantes : l’invention d’outils de mesure complètement nouveaux, l’adaptation d’outils existants à des patients différents, la simplification des outils existants lorsqu’ils sont jugés trop lourds à mettre en œuvre (exemple le Zarit simplifié).

La gestion du fardeau comme cible de l’innovation

63Le second groupe d’initiatives (cf. tableau 3) est plus complexe, dans la mesure où il réunit des dispositifs hétérogènes de gestion du fardeau de l’environnement humain de la personne âgée. Il faut se limiter ici aux dispositifs explicitement orientés vers la gestion de ce fardeau, pour éviter un chevauchement trop important avec les innovations associées aux cibles précédentes. En effet, de manière générale, on pourrait considérer que le recours aux services, le recours aux structures d’accueil, le recours aux technologies sont des stratégies de réduction du fardeau. Malgré cette restriction du champ, la diversité des formes d’innovation reste importante. On propose ainsi de distinguer deux grands groupes parmi les initiatives explicitement vouées à la réduction ou à la gestion du fardeau, les technologies d’une part, les institutions d’autre part. Parmi les « technologies de gestion du fardeau » on peut citer : les lignes d’appel fournissant aux familles, par téléphone, des informations et de l’aide ; les programmes multimédias de formation, d’information et de conseil destinés aux aidants.

64En ce qui concerne les innovations de type « institutionnel » on peut citer, parmi d’autres, les initiatives suivantes :

  • la constitution de groupes de support aux familles soignantes. Il s’agit de groupes de parole, qui favorisent les échanges d’expérience dans les soins prodigués ;
  • la mise au point de « sessions de formations » spécifiques aux soignants familiaux ;
  • la constitution de « caregiver support centers ». Il s’agit d’organisations fournissant divers services aux soignants familiaux dans différents domaines : répit, support, conseils juridiques, informations, formation, prévention, etc. ;
  • les dispositifs de répit pour les vacances. Il s’agit de dispositifs permettant le transfert de la personne âgée vers un endroit de vacances tout en assurant la continuité des soins ;
  • plus généralement, les dispositifs de répit pour soignants familiaux, quelle que soit la période. Il s’agit de centres d’accueil provisoire explicitement orientés vers le répit.

L’environnement institutionnel

65Depuis quelques années, de nombreuses innovations ont vu le jour dans l’environnement institutionnel des SSPA (en particulier des services d’aide à domicile). Il n’est pas question ici de retracer l’histoire des politiques publiques liées aux SSPA. Nous nous contenterons de recenser un certain nombre de dispositifs institutionnels récents, pour la France. On peut classer ces dispositifs en deux groupes (en réalité souvent étroitement corrélés) dont on se contentera ici de donner quelques illustrations : les innovations institutionnelles relatives à la demande et celles relatives à l’offre.

Les innovations institutionnelles relatives à la demande

66En France, les principales innovations institutionnelles récentes relatives à la demande ont porté sur la solvabilisation de celle-ci. En effet, il s’agissait de faciliter l’externalisation du travail domestique et la réduction du travail au noir en mettant en place un certain nombre de dispositifs d’incitation. Ces principaux dispositifs sont le chèque emploi-service et le titre emploiservice. Ces différentes expériences françaises ont eu un certain écho auprès de la Commission européenne (Cabot, 1999).

67Le chèque emploi-service a été mis en place en 1995. C’est un système qui permet à un particulier de rémunérer une prestation de service à domicile en évitant l’essentiel des formalités administratives habituelles liées à l’embauche d’un salarié. Ces formalités administratives sont reportées sur un organisme national. Lors de sa phase expérimentale, l’usage du chèque emploi-service était limité à huit heures de travail hebdomadaire. Il ne connaît plus depuis 1996 de limitation horaire.

68À cette même date (1996), un autre instrument de solvabilisation et de simplification a été lancé : il s’agit du titre emploi-service (TES). Cet instrument fonctionne sur le principe des tickets restaurants. Les TES sont émis par des sociétés habilitées, qui les cèdent à des comités d’entreprise ou en l’absence de comités aux employeurs directement. Ces derniers les attribuent aux salariés qui les utilisent pour payer les services à domicile effectués par des prestataires agréés.

Les innovations institutionnelles relatives à l’offre

69Les trajectoires d’innovation sont orientées ici par la volonté de faciliter l’émergence d’offres structurées et professionnalisées. La construction de la qualité est donc un enjeu central (Méran, 2001). Elle peut être organisée par l’État ou les prestataires eux-mêmes en tant que profession.

70Ainsi, des instituts de formation ont vu le jour, créés par la FEPEM (Fédération nationale des particuliers employeurs), les grands réseaux associatifs et le Syndicat des entreprises de services à la personne (SESP), les fondations de France, MEDERIC (assurances), des laboratoires (IPSEN, EISAI).

71Par ailleurs, le statut d’organisme agréé de services aux personnes a été créé en 1992 pour garantir une certaine qualité d’offre en particulier dans le domaine de la garde d’enfant au domicile des parents et dans celui de l’assistance aux personnes âgées ou handicapées. Cet agrément est attribué aux associations à but non lucratif impliquées dans ces domaines.

72En 1996 (loi de janvier 1996), le système d’agrément est modifié de deux manières. Tout d’abord, le statut d’organisme agréé – et donc le marché – est ouvert aux entreprises privées de services aux personnes. Ensuite, l’agrément est proposé sous deux formes différentes : un agrément simple pour les associations et les entreprises qui n’interviennent pas dans les services destinés aux personnes fragiles (la garde d’enfants et l’assistance aux personnes âgées) et un agrément « qualité » pour celles qui interviennent dans ces secteurs particuliers.

73On assiste également à la mise en place d’une certification de service. Deux processus de certification ou de normalisation (pour les services d’aide à domicile dont l’aide aux personnes âgées dépendantes est une composante essentielle) existent à l’heure actuelle. Le premier « QUALICERT » a vu le jour en 1999 sous l’égide du Syndicat des entreprises de services à la personne (SESP) et le second est porté, sous l’égide de l’AFNOR, par les principales associations de services aux personnes réunies au sein du groupement GERIAPA.

Conclusion

74Après être resté longtemps cantonné à l’alternative domestique ou hospice, le marché des services de soins aux personnes âgées a connu d’importants bouleversements en raison de l’importance de la composante « personnes âgées » dans nos sociétés. On pourrait dire que les sociétés développées contemporaines sont de plus en plus des sociétés des services, de l’information et des personnes âgées, autrement dit des sociétés du troisième secteur et du troisième âge.

75Il n’est donc pas étonnant que la problématique de l’innovation prenne une place croissante dans les SSPA, comme dans toute activité économique créatrice de richesse et porteuse d’avenir. Comme, d’autres activités de services, et peut-être davantage encore, dans la mesure où les notions de vieillissement et d’innovation sont considérées comme contradictoires à différents titres, les SSPA souffrent d’une image négative en termes de potentiel d’innovation. La grille très simple que nous avons proposée en termes de cible d’innovation nous paraît être en mesure de permettre d’identifier (d’une manière plus complète que les indicateurs officiels traditionnels tels que ceux du manuel d’Oslo de l’OCDE) ce potentiel d’innovation.
Une autre question importante qui n’a pas été abordée dans cet article, exclusivement consacré aux formes de l’innovation, est celle des modalités d’organisation et des acteurs de cette innovation. Cette question mériterait une exploration particulière. On peut néanmoins noter, comme bien souvent dans les services, l’absence de départements formalisés de Recherche et Développement ou d’innovation. Les projets d’innovation et de changement sont élaborés et mis en œuvre par des groupes de projets, et on peut faire l’hypothèse que les projets d’établissement et les mécanismes d’accréditation jouent un rôle essentiel dans les stratégies et les modes d’organisation de l’innovation et du changement. Par ailleurs, il est évident que les facteurs institutionnels jouent un rôle central dans cette dynamique de l’innovation. Nous avons simplement évoqué précédemment un certain nombre de dispositifs institutionnels. Mais les conséquences de ces dispositifs sur les trajectoires d’innovation et de changement des prestataires de SSPA méritent d’être explorés en profondeur. En effet, comme dans d’autres secteurs économiques (en particulier les secteurs financiers), le déterminant institutionnel peut être une source essentielle d’innovation par différents mécanismes, en particulier des mécanismes de contournement des normes, de négociation ou de dérogation.

Annexe : Quelques exemples de grilles d’évaluation (anciennes ou récentes)

76Grille AGGIR (Autonomie gérontologique groupe iso-ressources) : cette grille (adoptée depuis 1997 comme grille nationale d’évaluation) permet d’évaluer la perte d’autonomie d’une personne âgée et d’établir des groupes homogènes de personnes dépendantes. Elle s’appuie sur des variables évaluant, d’une part, la perte d’autonomie physique et psychique (ex. : cohérence, orientation, habillage…) et, d’autre part, la perte d’autonomie domestique et sociale (gestion, cuisine, ménage…). Sur cette base, elle distingue six groupes de dépendance ou groupes iso-ressources (GIR) qui vont de GIR 1 (personnes âgées confinées au lit ou au fauteuil, dont les fonctions intellectuelles sont gravement altérées) à GIR 6 (toutes les personnes qui n’ont pas perdu leur autonomie pour les actes discriminants de la vie courante). Chaque groupe iso-ressource est associé à un certain niveau de charge en soins de base. Le groupe GIR détermine l’attribution de l’allocation personnalisée autonomie.

77Grille Colvez : il s’agit d’une grille de mesure de la dépendance (à visée épidémiologique) centrée sur l’évaluation de la perte de mobilité (dépendance physique). Elle comporte quatre groupes : niveau 1 : personnes confinées au lit ou au fauteuil ; niveau 2 : personnes non confinées au lit ou au fauteuil, ayant besoin d’aide pour la toilette et l’habillage ; niveau 3 : personnes ayant besoin d’aide pour sortir (mais n’appartenant pas aux niveaux 1 et 2) ; niveau 4 : autres personnes (considérées comme non dépendantes).

78Indicateur EHPA : il doit son nom à l’enquête auprès des établissements d’hébergement pour personnes âgées (EHPA) au cours de laquelle il a été utilisé pour la première fois en 1990. Il évalue à la fois les dépendances physiques et psychiques en croisant les quatre groupes de la grille Colvez avec deux groupes de dépendance psychique (associés l’un à la dépendance relative aux problèmes d’orientation spatio-temporelle et l’autre à la dépendance relative aux troubles du comportement). Il existe ainsi huit groupes EHPA allant de EHPA 11 (dépendance psychique et confinement au lieu ou au fauteuil) à EHPA 24 (pas ou peu de dépendance).

79Indicateur de Katz et grille des activités de la vie quotidienne (grille ADL : Activities of Dayly Living) : cet indicateur international mesure l’aptitude de la personne âgée à réaliser six activités de base de la vie quotidienne à savoir : i) faire sa toilette ; ii) s’habiller ; iii) aller aux toilettes et les utiliser ; iv) se coucher ou quitter son lit et s’asseoir ou quitter son siège ; v) contrôler ses selles et ses urines ; vi) manger des aliments déjà préparés. L’altération d’une ou plusieurs ADL indique une perte d’autonomie importante. Le score ADL est utile pour les personnes âgées ayant une dépendance sévère, si celle-ci est modérée (score ADL de 6), il est préférable d’utiliser l’échelle IADL ou échelle de Lawton et Brody.

80Échelle Lawton et Brody : l’échelle des activités instrumentales de la vie quotidienne (IADL : Instrumental Activities of Dayly Living) ou échelle de Lawton et Brody est relativement ancienne (1969). Elle évalue la capacité à réaliser un certain nombre d’activités instrumentales de la vie quotidienne (utiliser le téléphone, faire les courses, préparer son repas, faire le ménage, laver son linge, utiliser les transports urbains, manipuler de l’argent, prendre ses traitements médicamenteux.) et identifie les tâches pour lesquelles le sujet a besoin d’une aide.

81Mini Mental Status (MMS) : ce test (dont la première version a été mise au point en 1975) est le plus utilisé pour apprécier les troubles cognitifs. Il évalue l’état psychologique du patient âgé en quantifiant ses capacités dans les cinq domaines suivants : i) l’orientation ; ii) l’apprentissage ; iii) l’attention et le calcul ; iv) la mémoire de rappel ; v) le langage. La note maximale est de 30 points. Un score inférieur à 24 points indique des troubles cognitifs, sans qu’il s’agisse nécessairement d’une démence.

82Clinical Dementia Rating (CDR) : cet outil international d’évaluation des différents stades de la démence, s’appuie sur la quantification (note maxi-male : 18) des six capacités suivantes : i) mémoire ; ii) orientation ; iii) jugement ; iv) comportement social ; v) comportement à la maison ; vi) soins personnels.

83MNA (Mini Nutritional Assessement) : cet outil est utilisé dans les institutions de soins, pour identifier les risques de malnutrition chez la personne âgée. Il s’agit d’une échelle clinique comportant dix-huit items, qui ne nécessite aucun examen paraclinique (biologie ou radiologie). Le score maximum est de 30. Un score supérieur à 20 indique un bon état nutritionnel. S’il est inférieur à 17, le sujet souffre de malnutrition. ; entre 17 et 24 il y a un risque de malnutrition.
ANGELIQUE (Application nationale pour guider une évaluation interne de la qualité pour les usagers des établissements) : cet outil d’auto-évaluation de la qualité au sein des établissements de SSPA lancé en juin 2000 et centré sur la personne âgée, comporte quatre modules : i) attentes et satisfaction des personnes âgées et de leurs proches ; ii) solutions fournies aux personnes âgées en termes d’autonomie, d’accompagnement et de soins ; iii) l’établissement et son environnement ; iv) démarche qualité.

Notes

  • [1]
    Cet article s’appuie sur un rapport de recherche réalisé pour la Commission européenne (Innovation in the Service Sector : Issues at Stake and Trends).
    Nous remercions vivement pour leurs précieux commentaires les deux rapporteurs anonymes de la revue.
  • [2]
    Nous avons, en particulier, examiné les résumés de plusieurs centaines de communications à différents colloques internationaux de gériatrie.
  • [3]
    Cette tendance est néanmoins érigée en tant que principe depuis relativement longtemps. On l’associe souvent aux préconisations du rapport Laroque de 1962.
  • [4]
    On remarquera que l’innovation dans les structures d’hébergement s’accompagne d’une innovation sémantique. Ainsi, « les maisons de retraite » sont rebaptisées MAPA ou MAPAD. Aujourd’hui on parle d’EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes). Cependant, une dénomination n’élimine pas l’autre, ce qui entretient une certaine confusion.
  • [5]
    On constate ainsi que la recherche de la petite taille est une trajectoire d’innovation partagée par les institutions et les formules intermédiaires.
Français

Résumé

Le vieillissement et l’innovation sont souvent considérés comme des phénomènes contradictoires. Cet article, consacré à l’innovation et au changement dans les services de soins aux personnes âgées (SSPA), vise à tenter de rompre avec ce préjugé. En s’appuyant en particulier sur une définition des services de soins aux personnes âgées inspirée de l’économie des services, cet article propose une grille simple d’analyse de l’innovation en termes de « cibles ». Ces cibles, qui permettent de contourner les catégories économiques habituelles (innovation de produit, innovation de process) sont les suivantes : les formules d’accueil, les technologies (matérielles et immatérielles), les services offerts, l’environnement humain (soignants et parents), l’environnement institutionnel.

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Faridah Djellal
Maître de conférences à l’université de Lille 1, membre du centre lillois d’études et de recherches sociologiques et économiques (CLERSE) et de l’Institut fédératif de recherche sur les économies et les sociétés industrielles (IFRESI). Son principal thème de recherche actuel est l’innovation dans le domaine des services.
Faïz Gallouj
Professeur à l’université de Lille 1, membre du centre lillois d’études et de recherches sociologiques et économiques (CLERSE) et de l’Institut fédératif de recherche sur les économies et les sociétés industrielles (IFRESI). Son principal thème de recherche actuel est l’innovation dans le domaine des services.
Karim Gallouj
Docteur en médecine et praticien hospitalier au centre hospitalier intercommunal de Wasquehal, centre de gériatrie Le Molinel.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/03/2010
https://doi.org/10.3917/rfas.043.0137
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