1Les progrès des sciences et des techniques trouvent dans la médecine une pleine expression : la pratique médicale gagne en efficacité et la recherche biomédicale en puissance d’intervention. En moins de vingt ans, la médecine et la biologie ont été bouleversées par des vagues d’innovation sans précédent. Accompagnant cette évolution, le niveau de responsabilité des acteurs s’accroît et une réflexion éthique de plus en plus globale s’impose. D’autant que parallèlement à la révolution scientifique et technique dont elle bénéficie, la médecine voit son champ s’élargir : de la fécondation aux âges extrêmes de la vie, de la restauration de la santé à sa préservation, de l’individu ici et maintenant à l’espèce humaine aujourd’hui et demain.
2Des tensions entre des devoirs contradictoires ou semblant l’être surgissent, les autonomies s’affrontent, les espaces de liberté se contraignent. Les situations sont inédites, les solutions partielles et les questions restent ouvertes appelant cependant des choix qui nous confrontent sans cesse à une question fondamentale : quelle attitude, quel comportement adopter pour rester fidèle à notre conception de la dignité humaine ? Un effort d’argumentation sans cesse renouvelé s’impose pour trouver des solutions provisoires à des conflits de valeurs en constante émergence et « chercher en soi-même des raisons de justifier un point de vue qui vaille aussi pour autrui ».
3Les repères et les critères permettant de fixer des limites aux demandes individuelles et collectives émanant tant des scientifiques, des praticiens, des médecins que des patients ou de leur famille, doivent être en permanence réinventés.
4Confronté à la nécessité de ne pas ralentir des progrès scientifiques susceptibles de faire reculer la maladie et le handicap mais aussi de garantir le respect de la personne humaine, le législateur a dans les lois de bioéthique de 1994 posé quelques grands principes et prévu de les réexaminer régulièrement pour prendre en compte les évolutions des sciences et des techniques. Au moment où va se poursuivre l’examen parlementaire des lois de bioéthiques en vue d’une révision qui a déjà pris trop de retard, ce numéro de la Revue française des Affaires sociales en abordant les questions du don d’organe, de la médecine prédictive, de la naissance et de la fin de vie, du handicap, de la brevetabilité du vivant et de la recherche, prend un relief tout particulier et répond au besoin de confrontation des points de vue qui nourrit la réflexion éthique.