CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1La réflexion bioéthique répond à la volonté de maîtriser les évolutions liées aux progrès des sciences de la vie, de la médecine et des technologies. Son domaine est donc large. Elle s’intéresse non seulement aux pratiques biomédicales où l’humain est l’objet d’interventions mais aussi aux biotechnologies qui visent les manipulations sur les animaux et les végétaux [1]. Or, ces actions peuvent engendrer des risques d’atteintes à l’homme. De ce fait, le besoin de normes s’accroît.

2À l’origine du mouvement bioéthique – dans les années soixante – la régulation de ces pratiques a été essentiellement confiée à la profession médicale. La réflexion bioéthique a pris la suite des interrogations déontologiques qui ont toujours existé même si ceux qui mènent cette réflexion ne sont plus seulement les sociétés médicales savantes et le Conseil de l’ordre des médecins mais aussi des comités d’éthique. Des recommandations, des avis ont été émis. Mais, face aux pouvoirs donnés au corps médical par les progrès des sciences de la vie et des technologies [2], ces normes sont apparues insuffisantes et le milieu médical, voire la communauté scientifique dans son ensemble, ont réclamé du « juridique ». Le droit a donc été sollicité pour venir interdire ou encadrer un certain nombre de pratiques. En France, le passage de l’éthique au droit [3] s’est opéré alors que beaucoup d’autres Etats n’ont pas encore franchi cette étape laissant le pouvoir de régulation aux scientifiques et aux médecins. Ainsi, dans notre pays, la norme juridique occupe aujourd’hui une place importante, même si, en parallèle, la communauté médicale continue d’élaborer des règles de bonnes conduites.

3L’ampleur des enjeux liés à ces pratiques biomédicales a conduit à une mondialisation de la régulation. La nécessité de créer des normes internationales tient à rois éléments majeurs. D’abord, parce qu’elles ont un lien avec les droits de l’homme [4], les questions posées par la biomédecine ou les biotechnologies demandent une réponse universelle. En effet, les prérogatives données à la communauté médicale, notamment avec l’avènement de la génétique, sont telles que les droits fondamentaux des personnes mais également l’espèce humaine sont menacés. Cette crainte est amplifiée par le fait que les progrès de la biologie peuvent aussi conduire l’environnement à porter atteinte à l’homme [5]. Ainsi, la bioéthique, parce qu’elle touche à ce qui doit être universellement défendu, l’homme et ses droits essentiels, appelle à un droit commun des nations [6].

4Ensuite, les enjeux financiers de la biomédecine mais surtout des biotechnologies sont majeurs et le risque d’une prédominance de la valorisation économique est évident. En effet, le développement des bio-industries dans le commerce international, à travers les médicaments, l’agriculture, l’environnement, est aujourd’hui important. La mondialisation de la réflexion sur ces problèmes devient donc indispensable [7]. Il est nécessaire de prévoir, au plan international, des garanties afin d’éviter que les avancées de la science et de la technique, du fait de cette donnée économique, mettent en péril les droits et les libertés de l’homme.

5Enfin, dans ce contexte de mondialisation, avec la libre circulation des biens et des services qui s’étend désormais à des éléments et produits du corps humain et à des activités scientifiques et médicales, des stratégies de contournement des législations nationales sont à craindre. La médecine et la recherche s’exercent de plus en plus sans considération de frontières. Dans bien des cas, il est possible de détourner une interdiction en franchissant la frontière [8] ou en naviguant dans les eaux internationales [9] ! L’internationalisation des marchés fait naître la nécessité d’un droit international.

6Néanmoins, en matière de bioéthique, comme en d’autres domaines, l’élaboration et l’application d’une législation mondiale se heurtent aux limites de l’ordre juridique international notamment à l’inexistence d’un pouvoir législatif autonome par rapport aux États ou à la faiblesse des sanctions en cas de violations des dispositions internationales [10]. De plus, ce domaine de la régulation, à savoir la bioéthique, accroît les difficultés. Si le droit international est toujours écartelé entre le désir de produire un droit uniforme et le souci de préserver les diversités, expression de la richesse des cultures [11], il l’est encore davantage dans le cadre de la biomédecine. Trouver des consensus dans ces hypothèses où les différences culturelles, religieuses, et les disparités sociales, économiques ou politiques sont importantes, est ici complexe. La recherche de la règle du plus petit dénominateur commun est particulièrement ardue.
C’est la raison pour laquelle, au plan mondial, la régulation des pratiques biomédicales s’est essentiellement opérée en dehors du droit. Les normes existantes sont, en grande partie, celles adoptées par les organisations non gouvernementales (ONG) médicales et, plus récemment, par les comités d’éthique internationaux. L’élaboration d’un droit international (une hard law[12] par opposition à la soft law[13]) ne s’opère que de façon limitée.
Ainsi, en matière de bioéthique, le droit ne remplit pas tout l’espace de la normativité. La juxtaposition de normes juridiques et para-juridiques existe au plan interne comme au plan international. Néanmoins, une distinction apparaît. La norme juridique émerge essentiellement au plan national alors qu’elle reste rare au niveau international. En revanche, la normativité para-juridique, si importante dans le domaine biomédical, reste principalement l’œuvre des instances internationales même si elle existe au plan interne.

Normes juridiques : prédominance du national sur l’international

7L’examen du droit positif démontre qu’il existe, aujourd’hui, un droit de la biomédecine [14] mais que celui-ci est essentiellement composé de dispositions de droit interne, l’avènement d’un droit international s’avérant délicat.

Consécration forte d’an droit national

8Les questions éthiques liées aux pratiques médicales ne sont pas nouvelles ; seul le terme « éthique » est d’utilisation récente dans ce domaine d’activité. Depuis la naissance de l’acte médical, le médecin s’est interrogé sur ce qu’il pouvait faire et la déontologie a offert un certain nombre de réponses. Mais, en augmentant les pouvoirs d’intervention sur l’homme, les progrès réalisés en matière biomédicale ont généré de nouvelles peurs, de surcroît collectives. Même en devenant juridiques par leur source puisqu’elles sont adoptées par décret, les normes déontologiques sont apparues impuissantes à régler certaines difficultés rencontrées par la communauté médicale et la demande de droit s’est faite plus pressante.

9Pendant un certain temps, les règles de droit commun qu’elles soient de droit public (droit constitutionnel [15], libertés publiques, droits de l’homme, droit administratif…) ou de droit privé (droit des personnes, droit de la responsabilité, droit des brevets, droit pénal, droit des assurances…) ont semblé suffisantes pour réglementer les pratiques biomédicales ou les biotechnologies. Avant l’adoption des lois dites de bioéthique en 1994, le juge avait été amené à se prononcer sur un certain nombre de situations liées à la bioéthique. Il avait notamment interdit la recherche sur des personnes en état de mort cérébrale sans consentement [16], la pratique des mères porteuses[17] ou les transferts d’embryon post-mortem dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation [18]

10Entre ce dispositif juridique et l’obligation pour le juge prévue à l’article 4 du Code civil [19] de trouver des solutions à toute question posée, la nécessité d’élaborer une législation spécifique était niée. Le pouvoir essentiel appartenait alors au magistrat qui avait mission de découvrir, dans les textes de droit commun, les règles permettant de réguler les pratiques biomédicales.

11Mais, le corps médical a persisté dans sa quête de normes juridiques spécifiques. En effet, si pour le juriste, le vide juridique n’existe pas notamment parce que le juge a toujours l’obligation de résoudre les difficultés, la pratique aussi bien médicale qu’industrielle avait besoin de connaître ses limites en amont de toute action plutôt que d’être obligée d’engager une procédure judiciaire qui aurait duré des années pour connaître la règle applicable. C’est dans le domaine de la recherche sur l’homme que l’exigence de droit s’est d’abord fait sentir et que le législateur a fini par intervenir [20]. En 1994, des dispositions applicables à l’ensemble des pratiques biomédicales (inviolabilité, non-patrimonialité du corps humain…) ont ensuite été inscrites dans la loi [21].

12Parallèlement à ce dispositif législatif, à partir du Préambule de la Constitution de 1946 auquel renvoie celui de la Constitution de 1958, le Conseil constitutionnel a fait du respect de la dignité humaine un principe à valeur constitutionnelle [22], principe qui semble dominer l’ensemble de la matière.
Ainsi, le droit de la biomédecine se compose aujourd’hui d’un arsenal juridique spécifique. La particularité de ce droit tient à son caractère « révisable ». En effet, un certain nombre de lois sont adoptées avec une révision programmée au terme de cinq années d’application [23]. De même, le Conseil constitutionnel a été amené à se référer au caractère provisoire des règles admises [24]. Si cette caractéristique peut paraître surprenante au regard de l’exigence de sécurité attachée à la règle juridique, elle tient à la prise en compte de l’extrême rapidité des évolutions scientifiques et, incidemment à la prudence qui doit entourer nos choix sociétaux.
Un droit national de la biomédecine existe donc. Mais, au regard des sources du droit, si la loi nationale est importante, le droit international occupe lui aussi une place essentielle. Ce constat paraît cependant difficile à faire en matière de bioéthique où le rôle des États reste relatif.

Émergence timide d’un droit international

13Le cap passé par la France en élaborant un dispositif juridique spécifique à la biomédecine ne semble pas avoir été franchi dans les mêmes proportions par la communauté internationale. Les traités sont peu nombreux [25].

14Cette pénurie d’un droit international de la bioéthique trouve une explication dans le fait que le droit de la biomédecine a pris une sorte d’ancrage dans les droits de l’homme [26]. Les règles juridiques relatives aux libertés fondamentales consacrent des droits, communs à tous les hommes, qui s’imposent comme une source essentielle de protection face aux risques d’atteinte aux personnes dans leurs caractères universels [27]. La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, du 4 novembre 1950, offre un certain nombre de possibilités pour régler des situations dans le domaine de la biomédecine. Elle traite du droit à la vie, de l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants, du respect de la vie privée… De même, les pactes internationaux de New York du 19 décembre 1966 relatifs « aux droits civils et politiques » et « aux droits économiques, sociaux et culturels » proclament le principe du respect de la dignité humaine ainsi que le droit à la vie, le principe du consentement en matière de recherche sur l’homme, le respect de la vie privée, le droit à la santé, l’accès aux soins… [28].

15En pratique, les juges européens appliquent ces textes généraux à des situations liées à la bioéthique [29], même s’ils ont tendance à renvoyer les questions controversées au législateur national [30]. Dans une affaire où un enfant était né d’une insémination artificielle avec donneur (IAD) au sein d’un couple dont l’un des membres était transsexuel, la Cour européenne des droits de l’homme a admis que l’article 8 de la Convention européenne qui garantit le respect d’une vie familiale ne pouvait conduire à imposer aux États l’obligation de reconnaître officiellement comme le père de l’enfant une personne qui n’est pas le père biologique. Cette décision se fondait sur le fait que, les questions liées à l’assistance médicale à la procréation ne donnant pas lieu à des communautés de vue entre les États membres du Conseil de l’Europe, une large marge d’appréciation devait être laissée aux États [31].

16En outre, parce que la bioéthique touche, en toile de fond, à des questions relevant du culturel ou du religieux, elle accroît les difficultés à concevoir des règles universellement admises. Et, même une fois élaborées, de telles normes juridiques internationales risquent de poser des problèmes d’application face à l’absence de juridiction permettant d’en assurer le respect.

17Si l’essor du droit international se heurte à beaucoup de résistances, son existence ne peut néanmoins être contestée.

18Le droit communautaire a été le premier à s’intéresser à certaines questions touchant à la biomédecine et aux biotechnologies car, du fait de la finalité économique de l’Union européenne, des dispositions sur les médicaments, les produits dérivés du sang et du plasma, les biotechnologies ont été adoptées [32]… Si ces textes communautaires, spécifiques à un domaine déterminé, prennent le plus souvent la forme de simples directives, ils constituent une source de droit dans la mesure où ils doivent être transposés en droit français. Néanmoins, les difficultés d’application auxquelles ils peuvent donner lieu (comme en témoigne l’exemple de la directive 98/44 du 6 juillet 1998 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques [33] qui tarde à être transposée par la France malgré les « consignes » de la Cour de Justice des Communautés européennes [34]) limitent la portée de ces normes juridiques.

19La Convention européenne de biomédecine du 4 avril 1997 [35] et les protocoles additionnels [36] sont les uniques traités consacrés officiellement à la bioéthique. De grands principes tels que la primauté de l’être humain, le principe du consentement libre et éclairé en matière biomédicale, le respect de la vie privée, l’interdiction de toute discrimination à l’encontre d’une personne en raison de son patrimoine génétique ou l’interdiction du profit à partir du corps humain et de ses parties sont proclamés.

20Mais le pouvoir effectif de cette convention européenne reste limité. D’abord, son objectif n’est que de définir des principes à partir desquels des réglementations nationales « aussi universelles et homogènes que possible » pourront être élaborées [37]. Ensuite, même si ce texte a vocation à l’universalité (son article 34 prévoit que le Comité des ministres du Conseil de l’Europe peut inviter les États non membres du Conseil de l’Europe à adhérer à cette convention), en pratique, il n’a pas été massivement signé et ratifié (cette convention n’a été ratifiée que par onze États). De plus, tout État peut ratifier la convention en exprimant une réserve sur une disposition à partir du moment où cette dernière est incompatible avec une loi nationale ! Enfin, la portée de ce texte repose essentiellement sur des mécanismes internes. Il appartient, en effet, à chaque État de prendre les mesures nécessaires pour son application [38], d’assurer la protection juridictionnelle qui pourrait permettre de faire cesser ou d’empêcher une atteinte illicite aux droits assurés par la Convention [39] et de prévoir les sanctions appropriées en cas de manquement aux dispositions de ce texte [40]. La garantie des droits inscrits dans la convention repose donc principalement sur le juge national [41], le seul contrôle international aménagé étant la possibilité pour le secrétaire général du Conseil de l’Europe de demander aux États les « explications requises sur la manière dont (leur) droit interne assure l’application effective de toutes (ses) dispositions »[42].
Ces différentes réserves illustrent les limites du droit international. Ces dernières tiennent à deux facteurs essentiels. La législation internationale en matière de biomédecine se cantonne à l’énoncé de principes généraux dont le contenu est difficilement identifiable. De par les diversités culturelles, la définition de la dignité humaine peut-elle être identique ? En outre, la portée effective des textes internationaux est tributaire du degré d’adhésion des États membres. Ces constats accentuent le besoin de renforcer la portée du droit international lorsque des questions aussi fondamentales, notamment le respect de l’espèce humaine, sont visées.
Ainsi, en matière biomédicale, si la Convention européenne de biomédecine est la première pierre d’un édifice juridique international, sa vocation à l’universalité n’est encore qu’illusoire. En fait, la normativité d’ordre international reste, pour l’essentiel, para-juridique.

Normes para-juridiques : prédominance de l’international sur le national

21Depuis l’apparition du phénomène bioéthique et avant l’intervention du droit, une régulation des pratiques s’est organisée à la demande du corps médical et des scientifiques en général. Les instances représentatives de ces milieux ont élaboré un ensemble de normes qui, malgré leur caractère non contraignant, joue un rôle indéniable.

22Ce dispositif normatif s’est considérablement développé car la demande de régulation ne provient plus exclusivement du milieu médical. Les acteurs économiques intervenant dans les domaines de la biomédecine et des biotechnologies ont pris conscience de l’attention portée par les consommateurs aux éventuelles répercussions des politiques commerciales. L’offre de produits ou de services ne peut se faire au détriment de valeurs fondamentales. Les débats autour des risques liés aux OGM (pour l’homme ou la nature) sont significatifs. Les entreprises commencent à élaborer des règles de bonnes conduites. De même, de plus en plus, la société civile s’informe sur ces questions de biomédecine et s’inquiète des dangers. Au sein d’associations ou de mouvements divers, des normes sont proposées.

23Si les instances productrices de ces règles existent aussi bien au plan international qu’au plan interne, la portée des normes édictées à ces différents niveaux n’est pas identique.

Les instances productrices de normes para-juridiques

24À l’origine, les normes appliquées en matière de bioéthique étaient non juridiques du fait de leur source. En effet, au plan national, à côté des règles déontologiques qui, elles, sont juridiques parce qu’adoptées par décret [43], la communauté scientifique et médicale a élaboré des normes professionnelles diverses pour encadrer les nouvelles pratiques. A partir de leurs réflexions, l’Ordre des médecins, les sociétés médicales savantes, dont l’une des principales est l’Académie nationale de médecine [44], certains groupements de médecins comme, par exemple en matière d’assistance médicale à la procréation, les CECOS, ont dégagé des règles de l’art diffusées dans le milieu médical sous forme d’avis, de codes de bonnes conduites-Dans l’après-guerre, ce mouvement s’est internationalisé sous l’influence d’organisations non gouvernementales, et principalement des ONG médicales. L’Association médicale mondiale (AMM) qui fédère des associations médicales [45] et le Comité international des organisations des sciences médicales (CIOMS) [46] sont les plus influentes [47].

25Mais les enjeux de la biomédecine et des biotechnologies étant multiples et variés, l’intervention des seules ONG médicales était insuffisante. Ces instances n’étaient pas représentatives de certaines populations (notamment des patients) ou de certaines activités liées à la biomédecine (le secteur industriel, l’environnement…). Ainsi, à côté de ces ONG, la réflexion bioéthique a conduit, d’abord au plan local – essentiellement des comités d’éthique hospitaliers [48]–, ensuite aux plans national et international, à la création de comités d’éthique. Si les comités locaux d’éthique répondaient à la demande des médecins inquiets de l’extension de leurs pouvoirs sur l’homme, les instances de réflexion éthique créées au niveau national et international ont eu pour objectif d’introduire la société civile dans la discussion sur ces questions éthiques. La mission du Comité consultatif national d’éthique est, en effet, de répondre aux interrogations de l’opinion publique face aux défis posés par les sciences de la vie [49].

26Au plan international ou simplement européen, des comités d’éthique se sont aussi créés dont les trois principaux sont le Comité international de bioéthique institué auprès de l’Unesco [50], le Comité directeur de bioéthique attaché au Conseil de l’Europe [51] et le Groupe européen d’éthique des sciences et des nouvelles technologies créé au sein de l’Union européenne [52]. L’objectif commun de ces instances est de dégager, par l’échange et la discussion pluridisciplinaires, des principes et des valeurs communes.

27Parallèlement à cette tendance des instances non gouvernementales à élaborer des normes para-juridiques et peut-être poussés par elle, les États ou certaines organisations internationales ont pris un ensemble de mesures spécifiques à la bioéthique, normes non juridiques mais qui jouent également une fonction dans la régulation des pratiques biomédicales. Les résolutions de l’Assemblée générale de l’Organisation mondiale de la santé, les « Guidelines » élaborées par cette instance, les déclarations adoptées par la conférence générale de l’Unesco dont la Déclaration universelle sur le génome humain du 11 novembre 1997 ou encore, au plan communautaire, les résolutions du Conseil des ministres et du Parlement européen en sont des illustrations. De même, au niveau interne, un certain nombre d’agences nationales (comme l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé) ont été créées et se sont vu confier le pouvoir de prendre des recommandations [53].
Ainsi, un ensemble de normes non juridiques régule les pratiques dans les domaines de la biomédecine et des biotechnologies. L’emprise de celles-ci est loin d’être négligeable.

La portée des normes para-juridiques

28L’influence de ces normes dans la régulation des pratiques biomédicales est particulièrement significative au plan international. L’absence de mobilisation des États sur ces questions (et incidemment l’insuffisance de droit) [54] conduit inévitablement à laisser un pouvoir important aux instances internationales productrices de ces normes para-juridiques[55]. En revanche, au plan interne, l’intervention du législateur a eu pour conséquence de restreindre le rôle de ces organisations (instances corporatistes, comités d’éthique).
Malgré cette différence de degrés d’influence, ces avis, recommandations…, élaborés aussi bien au niveau national qu’international, concourent à la constitution d’un système normatif et ceci à un double titre. En effet, si ces instructions n’ont pas de valeur juridique, elles ont une certaine autorité qui peut aller jusqu’à celle de la règle juridique dans son effectivité. De plus, ces normes préparent parfois le droit lui-même [56].

L’autorité des normes para-juridiques

29Elle tient à celle des instances qui les énoncent. Les organisations professionnelles du monde de la recherche, de la médecine, voire des industries pharmaceutiques ou biotechnologiques ont élaboré des codes de bonnes pratiques et codes professionnels. Cette mission répond au besoin de dispositions spécifiques généré par la technicité des domaines visés mais aussi par le souci de crédibilité de la recherche et du commerce international. Mais ces règles de l’art n’ont aucune force juridique contraignante et ne peuvent a priori être intégrées au droit, voire à un ensemble normatif.

30Or, si de nombreux textes publiés par des organes non politiques, comme les organisations non gouvernementales (ONG) et les comités d’éthique internationaux, formalisent seulement des normes éthiques et non des règles juridiques, en pratique, ils influencent les comportements, individuels ou étatiques. Le Serment de Genève adopté par l’Association médicale mondiale [57], code d’éthique de cette organisation [58], s’impose à ses membres qui sont des associations médicales nationales. L’application effective de ces normes justifie alors de les rapprocher du droit de la biomédecine. Les frontières entre le droit et le non-droit s’enchevêtrent dès lors que les normes non juridiques s’appliquent. Ce constat peut conduire à s’interroger sur ce qui fait, aujourd’hui, le droit : sa source ou son application effective ?

31La portée de ces normes para-juridiques est renforcée lorsque, élaborées par des ONG ou des comités d’éthique, elles sont validées par les instances d’une organisation internationale intergouvernementale (l’Organisation mondiale de la santé, l’Unesco…) [59]. Les normes de la bioéthique découlent en partie de ces déclarations solennelles à valeur indicative ou incitative. L’exemple de la Déclaration universelle sur le génome humain adoptée par l’Unesco en novembre 1997 est intéressant à cet égard.

32Dans certains États, en l’absence de textes juridiques sur la bioéthique, cette soft law peut même tenir lieu de droit. Dans le cadre des recommandations de l’Association médicale mondiale qui revêtent parfois une telle autorité, la Déclaration d’Helsinki du juin 1964 constitue la référence internationale en matière d’expérimentations médicales sur l’homme.

33L’autorité attachée à ces textes sans valeur juridique est liée à l’absence, voire à l’insuffisance de droit. C’est la raison pour laquelle les normes para-juridiques internationales jouent un rôle majeur alors que leurs homologues nationales ont une portée moindre. Au plan national, si les règles déontologiques, professionnelles ont longtemps fonctionné comme des substituts au droit [60], elles ont été reléguées au second plan lors de l’adoption de dispositions juridiques. Les avis des instances représentatives de la profession médicale ou du Comité consultatif national d’éthique ne sont qu’indicatifs.
L’application effective de ces différentes normes para-juridiques permet cependant de les rapprocher des règles juridiques. Ce lien entre ces deux catégories de normes est renforcé par l’influence que le para-juridique a parfois sur la constitution du droit.

Influence des normes para-juridiques sur l’élaboration du droit

34Elle est incontestable même si elle s’opère à des degrés variables. Le rapport entre le droit et les normes para-juridiques peut tenir à ce que les textes juridiques renvoient expressément aux règles déontologiques ou aux normes élaborées par les organisations non gouvernementales [61]. Mais, il peut être inversé. Les déclarations, résolutions ou autres textes sans force obligatoire constituent parfois la première étape vers l’admission d’une règle juridique.

35Cette emprise est importante au plan international [62]. L’énoncé de certaines normes para-juridiques a été repris dans des textes de droit. Le principe de la nécessité d’un consentement libre pour pouvoir procéder à une recherche sur un individu a trouvé son fondement dans le Code de Nuremberg et, depuis, a été intégré dans de nombreux textes juridiques comme l’article 7 du Pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques ou l’article 5 de la Convention européenne de biomédecine [63].

36Ce processus d’intégration de normes para-juridiques dans le droit se vérifiera encore dans l’avenir. La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 8 décembre 2000, texte uniquement déclaratoire, sera sûrement intégrée prochainement dans les traités.

37Les travaux des comités internationaux d’éthique participent eux aussi à l’élaboration du droit. À côté du Comité directeur de bioéthique du Conseil de l’Europe qui a été chargé de préparer la Convention européenne de biomédecine, le Comité international de bioéthique de l’Unesco et le Groupe européen d’éthique des sciences et des nouvelles technologies sont invités à contribuer à la formation de la règle juridique [64]. La Déclaration universelle sur le génome humain préparée par le CIB et adoptée par l’Unesco en 1997 aura certainement la même vocation que la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, à savoir de lancer un appel à tous les États pour qu’ils introduisent, dans leur législation, des dispositions contenues dans ces textes [65].

38Ces normes para-juridiques internationales jouent aussi un rôle dans la préparation des droits nationaux. Lors de l’examen du projet de révision des lois dites de bioéthique[66] devant le Parlement français, la référence aux normes établies par les ONG ou par les comités d’éthique a été expressément faite [67].

39L’influence des normes para-juridiques nationales sur la création de droit est, elle, beaucoup moins importante, excepté celle des règles déontologiques qui est maximale puisque ces dispositions deviennent juridiques par leur adoption par décret [68]. Néanmoins, dans ce champ hors du droit, il est intéressant de noter le rôle de plus en plus grand que semble assumer le Comité consultatif national d’éthique. Si cette instance n’a qu’une mission consultative, en pratique, elle semble marquer, de plus en plus, la législation de son empreinte. L’examen des mesures adoptées par le législateur en 1994 permettait déjà de déceler cette influence [69]. La multiplication récente des sollicitations du CCNE par le pouvoir politique révèle l’amplification du processus [70].

40Au vu de tous ces éléments, il apparaît que la régulation des pratiques biomédicales dépend de cet ensemble de normes diverses. La question est alors de savoir s’il y a une complémentarité ou, au contraire, une concurrence entre les normes nationales et internationales ? La réponse ne peut être que nuancée. Complémentarité et concurrence se combinent. En effet, la complémentarité tient à ce qu’il est inutile pour un État de prévoir un certain nombre de garanties, surtout lorsqu’elles se veulent protectrices des droits de l’homme, si la règle peut être contournée dans un autre lieu. Seul le droit international peut éviter cet écueil.
Mais la concurrence est aussi présente dans la mesure où, même s’il reste plus proche de la philosophie du droit et se limite à l’énoncé de grands principes, le droit international a autorité sur le droit national. Au plan mondial, les travaux à venir de l’Unesco et de l’Assemblée générale de l’ONU constitueront certainement une base solide pour inscrire la discussion à l’échelon universel et ceci, notamment, parce que l’autorité attachée à ces déclarations internationales semble témoigner de l’émergence d’un courant de pensée international, d’une opinion publique mondiale en construction [71].
L’idée de concurrence des normes nationales et internationales doit donc être omniprésente. De ce constat, l’enseignement à tirer ne doit-il pas être que chaque État doit avoir conscience du rôle qu’il doit jouer face à l’étendue des enjeux de la biomédecine et des biotechnologies et, incidemment, de l’engagement que les citoyens peuvent attendre de lui ? Nous en sommes convaincus. Reste à la France mais aussi peut-être à l’Europe de l’être…

Notes

  • [*]
    Professeur à la faculté de droit et de science politique de Rennes I, directeur du centre de recherche juridique de l’Ouest (IODE, UMR CNRS n° 6050).
  • [1]
    Sont notamment visées les questions de bio-industrialisation de la faune et de la flore (production d’OGM, clonage animal à des fins d’élevage et de production de médicaments,…).
  • [2]
    La maîtrise de la reproduction, de l’hérédité ou du système nerveux.
  • [3]
    De l’éthique biomédicale aux lois bioéthiques, D. Thouvenin, RTD Civ., 1994, p. 717. De l’éthique au droit en passant par la régulation professionnelle, CRJO Rennes, rapport MiRe/GIP Justice, septembre 1999.
  • [4]
    Par exemple, les risques de discrimination sont nombreux face aux informations résultant de l’utilisation de la génétique sur l’homme.
  • [5]
    La modification du potentiel génétique des animaux ou des végétaux peut avoir des incidences sur l’homme notamment par l’alimentation ou par les xénogreffes.
  • [6]
    Les États et le droit de ta bioéthique, N. Lenoir, RD San. Soc., 1995, p. 257.
  • [7]
    La question des brevets est au cœur de ces questions.
  • [8]
    L’Affaire Blood a été révélatrice des moyens de contourner les interdits étatiques dans le domaine sensible des procréations médicalement assistées : Le droit communautaire dévoyé : le cas Blood, J.-S. Bergé, JCP, 2000, I, 206.
  • [9]
    Le gynécologue italien, Severino Antinori, menace actuellement de mener son entreprise (réaliser un clone humain) sur un bateau dans les eaux internationales. Le Monde. 7-8 avril 2002.
  • [10]
    « Bioéthique et droit international », S. Maljean-Dubois, Annuaire français de droit international, 2000, p. 85.
  • [11]
    Produire l’homme : de quel droit ? Étude juridique et éthique des procréations artificiel les », J.-L. Baudouin, C. Labrusse-Riou, Les voies du droit, PUF, 1987, p. 273.
  • [12]
    Le « droit dur » entendu comme la règle de droit.
  • [13]
    La soft law est définie comme la normativité émanant d’institutions créées par une initiative privée ou mixte à l’exclusion de tout accord intergouvernemental regroupant des personnes privées ou publiques, physiques ou morales, de nationalités diverses. Voir Droit international public, Nguyen Quoc, D. Daillier, P. Pellet, 6e édition, Paris, LGDJ, 1999, p. 694.
  • [14]
    « La biomédecine, nouvelle branche du droit ?» in Normativité et biomédecine, B. Feuillet-Le Mintier, actes du Colloque international de novembre 2001, CRJO Rennes, à paraître.
  • [15]
    Si le recours au droit constitutionnel est envisageable, peu de règles ou de principes inscrits expressément dans la Déclaration des droits de l’homme et des libertés fondamentales de 1789 ou le Préambule de la Constitution de 1946 ont une portée relative aux questions de bioéthique.
  • [16]
    CE, 2 juillet 1993, AJDA, 1943, p. 579.
  • [17]
    Cass. APl., 31 mai 1991, D, 1991, p. 417, n. D. Thouvenin.
  • [18]
    Toulouse, 18 avril 1994, JCP, 1995, 11, 22472, n. CL. Neirinck.
  • [19]
    « Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice ».
  • [20]
    Loi du 20 décembre 1988 sur la protection des personnes qui se prêtent à la recherche biomédicale.
  • [21]
    Loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative à la protection du corps humain ; loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal.
  • [22]
    C. Const. 27 juillet 1994, D, 1995, p. 237, n. B. Mathieu.
  • [23]
    La loi du 20 décembre 1988 sur la recherche biomédicale et la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal en sont deux exemples.
  • [24]
    Dans un des considérants de sa décision du 27 juillet 1994 (précitée), le Conseil constitutionnel a précisé qu’il statuait au « regard de l’état des connaissances et des techniques ».
  • [25]
    Voir infra.
  • [26]
    « Un nouvel ancrage des droits de l’homme », in Éthique médicale et droits de l’homme, M. Delmas-Marty, Inserm, Actes Sud, 1998, p. 314.
  • [27]
    Le droit international de la bioéthique : « jus gentium » ou « lex mercatoria » ?, C. Byk, JDI, 1997-4, p. 915.
  • [28]
    De même, la Convention internationale relative aux droits de l’enfant du 26 janvier 1990 se réfère au droit à la vie, droit de connaître ses origines, au droit à la santé.
  • [29]
    La Cour européenne des droits de l’homme s’est notamment prononcée sur l’hospitalisation des malades mentaux (CEDH, 24 octobre 1979, Winterwep c/Pays-Bas), sur le secret médical (CEDH, 25 février 1997, Z c/Finlande) ou, récemment sur le droit de mourir (CEDH, 29 avril 2002, Affaire B. Pretty c/GB).
  • [30]
    La Cour européenne des droits de l’homme tient compte des divergences ou convergences des droits nationaux pour tenir des positions de réserves. Arrêt Open Door et Dublin Woman c/lrlande, 29 octobre 1992, série A, n° 246, § 66 (droit à la vie et fœtus). Génome humain et droits fondamentaux, B. Mathieu, Puam, Economica, 2000, p. 18.
  • [31]
    CEDH, 22 avril 1997, Aff. X, Y, Z c/Royaume-Uni, 75/1995/581/667 §§ 44 et 51. D, 1997, p. 583, n. S. Grataloup.
  • [32]
    Directive 89/381 du 14 juin 1989 relative aux médicaments dérivés du sang ou du plasma humain, JOCE, L. 181, 28 juin 1989 ; directive 2001/20 du 4 avril 2001 relative à l’application de bonnes pratiques cliniques dans la conduite d’essais cliniques de médicaments à usage humain, JOCE, L. 121, 1er mai 2001.
  • [33]
    JOCE, L. 213, 30 juillet 1998.
  • [34]
    CJCE, 9 octobre 2001, Pays-Bas c/Commission, C 377/88.
  • [35]
    Le titre exact de ce texte, qui a mis de nombreuses années avant d’être adopté, est la « Convention pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine ». La Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine, L. Dubouis, RDr. San. Soc., 1998, p. 211. Cette convention est en vigueur depuis le 1re décembre 1999.
  • [36]
    Deux protocoles ont été adoptés, l’un du 12 janvier 1998 relatif à l’interdiction du clonage humain (entré en vigueur le 1er mars 2001), l’autre du 24 janvier 2002 relatif à la transplantation d’organes et de tissus d’origine humaine.
  • [37]
    Assemblée parlementaire, recommandation 1160 (1991), § 7; Recommandation 1100 (1989).
  • [38]
    Article 1, alinéa 2 de la Convention européenne de biomédecine.
  • [39]
    Article 23 de la Convention européenne de biomédecine.
  • [40]
    Article 25 de la Convention européenne de biomédecine.
  • [41]
    La Cour européenne des droits de l’homme ne peut que donner des avis consultatifs sur l’interprétation de la convention à la demande du gouvernement d’une des parties et ceci en dehors de tout litige concret devant une juridiction (article 29 de la Convention).
  • [42]
    Le rapport explicatif de la Convention prévoit néanmoins que « des faits constituant une atteinte aux droits énoncés dans cette convention pourraient faire l’objet de la procédure de recours prévue par la Convention européenne des droits de l’homme, s’ils constituent également une violation à l’un des droits reconnus dans cette dernière ».
  • [43]
    La déontologie médicale a intégré le droit depuis que le Code de déontologie est adopté par décret (actuellement décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995).
  • [44]
    L’Académie nationale de médecine a adopté des recommandations et publié des communiqués. Exemples : sur l’assistance médicale à la procréation (13 février 1996), sur le clonage (3 juin 1997)…
  • [45]
    Créée en 1947, l’AMM. a pour objectif de « servir l’humanité en s’efforçant d’atteindre les normes internationales les plus élevées en matière médicale, d’art médical, de déontologie médicale et de soins médicaux pour tous les peuples du monde ».
  • [46]
    La mission du CIOMS, créé en 1949 sous les auspices de l’Organisation mondiale de la santé, est de mettre en place un système de coordination entre organisations non gouvernementales et intergouvernementales.
  • [47]
    Peuvent également être cités le Mouvement universel de la responsabilité scientifique (MURS) créé en 1974, l’Association mondiale de psychiatrie, l’Association internationale « Droit, Éthique et Science » créée en 1989 ou l’International Association of Biœthics créée en 1992.
  • [48]
    Comités régionaux d’éthique rattachés aux CHU, comités d’éthique cliniques…
  • [49]
    L’article 1 du décret du 23 février 1983 instaurant le CCNE définissait ainsi sa mission : « donner un avis sur les problèmes moraux qui sont soulevés par la recherche dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé, que ces problèmes concernent l’homme, des groupes sociaux ou la société tout entière ».
  • [50]
    Ce comité est composé de personnes indépendantes (nommées par le directeur général de l’Unesco en fonction de leur compétence et de leur notoriété) et appartenant à des disciplines différentes.
  • [51]
    Le CDB n’est pas véritablement un comité d’éthique puisqu’il se compose de personnes mandatées par les gouvernements des États membres mais il mène néanmoins une réflexion sur les questions éthiques liées aux pratiques biomédicales.
  • [52]
    Ce groupe est indépendant (personnes nommées en raison de leur expérience) et pluridisciplinaire. Son rôle est notamment de conseiller la Commission européenne sur les aspects éthiques des biotechnologies.
  • [53]
    L’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES) a pour mission « d’élaborer et de valider des recommandations de bonnes pratiques cliniques et des références médicales et professionnelles en matière de prévention, dé diagnostic, dé thérapeutique et de soins palliatifs » (article L. 1414-2 2° du Code de la santé publique).
  • [54]
    Voir supra « Émergence timide d’un droit international».
  • [55]
    ONG médicales, comités internationaux d’éthique.
  • [56]
    « Droit déclaratoire et droit programmatoire : de la coutume sauvage à la soft law », in L’élaboration du droit international, R.-J. Dupuy, Pedone, 1975, p. 132. « Nonnes para-juridiques, système concurrent ou complémentaire. Le rôle des ONG internationales et de la soft law », L. Boisson de Chazournes et S. Maljean-Dubois, in Normativité et biomédecine. Colloque international de novembre 2001, CRJO Rennes, à paraître.
  • [57]
    Ce texte a été adopté en 1948 et a été, plusieurs fois, amendé.
  • [58]
    Ce code est considéré comme la version contemporaine du Serment d’Hippocrate.
  • [59]
    Le droit international de la bioéthique : « jus gentium » ou « lex mercatoria » ?, C. Byk, JDI, 1997-4, p. 928. Au sein de l’Unesco, à côté du Comité international de bioéthique, un comité intergouvernemental composé de représentants des États membres a été créé pour examiner les avis émis par le CIB.
  • [60]
    « Normes para-juridiques, système concurrent ou complémentaire. Le rôle des ONG internationales et de la soft law », L. Boisson de Chazournes et S. Maljean-Dubois, in Normativité et biomédecine, Colloque international CRJO Rennes, à paraître.
  • [61]
    En ce sens, voir notamment l’article 4 de la Convention européenne de biomédecine qui renvoie « aux normes et obligations professionnelles ».
  • [62]
    La Déclaration de Manille de 1981 adoptée par l’AMM. a eu une grande influence sur les normes juridiques adoptées ultérieurement sur la recherche biomédicale sur l’homme. Voir Les sciences de la vie en droit international : de la préhistoire du droit à l’établissement d’une coutume, C. Byk, GP, 18 octobre 2000, p. 4.
  • [63]
    Voir « La réglementation internationale », in Normativité et biomédecine, L. Dubouis, Colloque international CRJO Rennes, à paraître.
  • [64]
    Le CIB a mission d’élaborer un « instrument international » et les travaux du GCEB inspirent les projets de directives et de règlements communautaires ; voir Les normes internationales de la bioéthique, N. Lenoir et B. Mathieu, coll. « Que sais-je ? », PUF, p. 40.
  • [65]
    Les articles 19 et 20 de la Déclaration universelle sur le génome humain prévoient que les États s’engagent à mettre en œuvre le texte par toutes mesures appropriées.
  • [66]
    La révision n’a été initialement prévue que pour la loi n° 94/654 du 29 juillet 1994.
  • [67]
    Rapport d’information de M. A. Claeys, 11 juillet 2001, AN n° 3208, p. 24.
  • [68]
    Décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995.
  • [69]
    L’influence des avis du Comité consultatif national d’éthique sur la législation », in De l’éthique au droit en passant par la régulation professionnelle, P. Pedrot, rapport MiRe, CRJO, septembre 1999, p. 11.
  • [70]
    Le CCNE avait rendu un avis portant spécifiquement sur la révision de des lois « bioéthiques » (avis du 25 juin 1998).
  • [71]
    Les normes internationales de la bioéthique, N. Lenoir et B. Mathieu, coll. «Que sais-je ? », PUF, 1998, p. 5.
Français

Résumé

Parce que les enjeux liés aux pratiques biomédicales et aux biotechnologies sont majeurs, les normes déontologiques et professionnelles traditionnelles sont devenues insuffisantes et la demande de droit s’accélère. Au plan interne, la France s’est dotée d’un arsenal juridique permettant de répondre à cette sollicitation même si, en parallèle, elle a institutionnalisé une instance productrice d’éthique, le Comité consultatif national d’éthique. Malgré la nécessité croissante de suivre la même démarche au niveau international, l’intervention des États reste limitée et la régulation s’organise autour de normes para-juridiques élaborées par des instances essentiellement non gouvernementales (organisations internationales non gouvernementales, comités d’éthique internationaux). Si la complémentarité de ces normes juridiques et para-juridiques est un atout important, l’inévitable concurrence entre ces règles due à l’autorité du droit international sur le droit national doit conduire à sensibiliser les États à la mission essentielle qu’ils doivent jouer dans l’élaboration de textes internationaux.

Brigitte Feuillet-Le Mintier [*]
Professeur à la faculté de droit et de science politique de Rennes I, directeur du centre de recherche juridique de l’Ouest (IODE, UMR CNRS n? 6050), responsable du DESS droit, santé, éthique.
  • [*]
    Professeur à la faculté de droit et de science politique de Rennes I, directeur du centre de recherche juridique de l’Ouest (IODE, UMR CNRS n° 6050).
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/06/2010
https://doi.org/10.3917/rfas.023.0015
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