CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Cet article est une réflexion, inspirée de la littérature sociologique sur les mouvements sociaux, autour de l’implication et de la mobilisation des SDF. Elle nous conduira à quelques remarques analytiques et théoriques sur les actions collectives impliquant des individus généralement considérés comme dotés de trop faibles ressources pour se mobiliser.

Le « mouvement social contre l’exclusion » : quelques précisions

2Dans l’analyse des actions très militantes développées par des associations comme le Droit au logement (DAL) ou le Comité des sans-logis (CDSL) un problème apparaît. Ces actions, plus ou moins conventionnelles, ont souvent été baptisées et présentées comme des actions collectives de SDF. Cet élément a certainement joué en leur faveur dans l’opinion publique.

3Nous soutiendrons cependant qu’il n’y a pas, à proprement parler, en France de mouvement social des sans-logis, des SDF ou des mal-logés. Il y a bien des actions collectives entreprises en leur nom, avec quelques personnes dans ces situations, au sein d’un mouvement social plus large qui s’est développé depuis le début des années quatre-vingt-dix. Il s’agit de ce que nous pouvons baptiser le « mouvement social de lutte contre l’exclusion », celui-ci ayant réussi à se cristalliser et à devenir un groupe de pression avec des soutiens dans la presse, dans l’opinion, dans l’administration et des accès aux cercles décisionnels. Si ce mouvement social a des racines politiques certainement ancrées à gauche de l’échiquier politique, des responsables des deux bords l’ont soutenu et/ou ont repris ses revendications et formulations.

4Conserver le terme de lutte contre l’exclusion, pour qualifier ce mouvement social, est approprié, et ce pour deux raisons. Tout d’abord c’est bien le terme générique, utilisé par les acteurs de ces actions comme par leurs commentateurs, qui rassemble une multitude d’actions en direction de problèmes différents mais qui sont réunis dans la thématique de l’exclusion (absence de logement, extrême pauvreté, faible accès aux biens culturels, etc.). Ensuite, quand bien même cette lutte contre l’exclusion ou les exclusions reste imprécise, elle a une résonance dans l’opinion publique ainsi qu’une délimitation, même floue, à l’intérieur des politiques publiques. À notre sens, il est tout à fait juste d’observer l’existence d’un « mouvement social de lutte contre l’exclusion », dont les actions collectives entreprises au nom des sans-abri, et en partie avec eux, font partie. Elles en constituent certainement un aspect à la fois fondateur et prééminent.

5Ce mouvement social, dans la classification classique proposée par Zald et McCarthy (1979), est une « industrie de mouvement social » (SMI) regroupant plusieurs organisations (SMO), dont des structures très protestataires comme le CDSL ou le DAL (ici des organisations professionnelles du mouvement social, professional SMOs), au sein du vaste secteur des mouvements sociaux (SMS) [1]. Les associations militantes, qui ne sont pas seules, y jouent un rôle central, en insistant fortement sur la problématique du logement.

6Pour l’étude de la place des SDF dans ce mouvement social on s’appuiera sur les avancées théoriques concernant l’analyse des mouvements sociaux, en particulier Chazel (1985, 1992, 1993a, 1997), Snow et ses collaborateurs (1993, 1998) et Cress et Snow (1996, 2000), ces derniers travaux alliant utilement perspectives théoriques et analyses empiriques sur les mobilisations des sans-abri aux États-Unis [2].

7On ne cherchera pas ici à savoir si le mouvement social de lutte contre l’exclusion correspond à un renouveau de ces « nouveaux mouvement sociaux » repérés dans l’après 68 et qui se sont depuis progressivement relâchés. On peut cependant considérer qu’on y retrouve bien certains éléments comme la rupture avec les anciens mouvements sociaux, une inventivité très nette dans les manifestations, un souci d’autonomie. L’analogie ne peut être trop fortement poussée car la plupart des revendications présentées par le mouvement social de lutte contre l’exclusion sont très matérielles. Il s’agit d’obtenir des logements, de l’argent, des papiers et pas directement ni dans l’instant de refaire la société. Ce mouvement social a donc un certain statut ambigu qui n’est pas encore totalement clarifié [3].
Sur le registre des actions collectives entreprises et soutenues en direction des sans-abri on doit pousser encore l’analyse pour tenter d’en dégager les traits caractéristiques.

Les SDF – tels qu’ils sont souvent dépeints – ne devraient pas se mobiliser

8La question de l’organisation des pauvres, des chômeurs, des sans-logis a déjà donné lieu à beaucoup de littérature. La mobilisation des pauvres est un objet d’étude classique sur les registres de l’organisation du mouvement et du recours à l’illégalité, ces deux registres étant parfois contradictoires (Piven, Cloward, 1977).

9C’est, en partie, par leurs activités protestataires que les populations à faibles ressources arrivent à avoir une expression politique. Il faut que les « sans-pouvoir » donnent de la visibilité à leurs problèmes pour amener les décideurs à entendre et traiter leurs revendications (Lipsky, 1968). Cette situation concerne typiquement les groupes de défense des sans-abri (qui au moins avant les premières années de la décennie quatre-vingt ne disposent pas de grands moyens), et à plus forte raison les groupes de sans-abri qui ne sont pas appuyés par des associations déjà structurées. Les actions de protestation ne peuvent en effet être organisées ex-nihilo. Elles ne peuvent être totalement spontanées. Par ailleurs elles doivent atteindre une cible plus large que le bâtiment ou la mairie occupée. À cet effet il est nécessaire d’être très médiatisé. Il faut chercher à ce que la contestation soit exprimée de manière audible, et qu’elle puisse être reçue en termes favorables dans l’opinion publique.

10Depuis l’étude célèbre de Lazarsfeld (1932) sur le chômage à Marienthal on sait cependant que la mobilisation collective des chômeurs, des personnes isolées au statut disqualifié, n’a rien d’aisé, ce constat classique étant soutenu par des enquêtes empiriques étayées plus récentes [4]. Alors que les plus pauvres pourraient être considérés comme n’ayant rien à perdre et tout à gagner, ils ne sont pas les premiers à s’investir dans les mouvements sociaux (Pinard, 1967).

11Il est désormais bien établi que les pauvres, les sans-abri, les chômeurs, se trouvent très souvent en situation de repli. Les chômeurs ne constituent pas des groupes soudés, mais des populations d’individus isolés, ou de familles, marqués par des sentiments de résignation, d’impuissance et/ou de faiblesse. Les chômeurs, comme les pauvres, ne disposent pas d’institutions pour les représenter. Ils n’ont pas de syndicats, et il semble que les syndicats professionnels s’en préoccupent peu. Des actions collectives de chômeurs, et a fortiori des actions collectives de sans-abri qui vivent des détresses et un isolement plus fort encore que des chômeurs logés conservant un soutien familial, sont donc, a priori, peu probables. Les SDF ayant encore moins d’éléments et/ou de supports (logement, famille, revenus sociaux) à défendre que les chômeurs, leur mobilisation collective est peu vraisemblable dans la mesure où il est établi, comme le souligne Chazel (1997), qu’on se mobilise toujours plus aisément dans un contexte de menaces que dans un contexte de conquêtes. Ce constat est confirmé théoriquement et empiriquement par des travaux américains sur la mobilisation des sans-abri (Snow et alii, 1998). Les mobilisations protestataires de SDF sont donc très difficiles à envisager dans la mesure où la constitution du groupe est très improbable. Avec une collectivité si faiblement soudée et si peu organisée, la protestation sera probablement rare ou à tout le moins éphémère [5].

12Ces analyses contemporaines confirment le propos de Simmel (1907) qui, dans son analyse fondatrice d’une sociologie de la pauvreté, considérait que la caractérisation, nécessairement négative, des pauvres en tant que pauvres, empêche précisément l’émergence d’un sentiment d’appartenance – sentiment qui pourrait être à la base d’appréciations collectives et, partant, de mobilisations collectives. « À cause de ce manque de qualification positive, la classe des pauvres (…) n’engendre pas, malgré leur position commune, de forces sociologiquement unificatrices ».
Une grande partie de la littérature consacrée aux homeless et aux SDF a dépeint ces personnes comme incapables d’engagement collectif. Les sans-abri seraient inaptes à la revendication collective comme à la défense mutuelle, en raison de l’absence d’objectifs communs. Le portrait général des sans-abri a longtemps été, en France comme aux États-Unis, celui d’individus passifs déjà incapables d’agir seuls (clochard parisien, tramp ou skid row man américain). Les associations et mouvements contemporains de défense des sans-abri seraient donc, pour reprendre l’expression utilisée outre-Atlantique par Blau (1992), des mouvements pour les sans-abri et non des mouvements par les sans-abri.

Agir pour les SDF, et, le cas échéant, avec les SDF

13Les spécialistes des mouvements sociaux ont commencé à s’intéresser aux actions collectives des sans-abri aux États-Unis à partir du milieu des années quatre-vingt. Quelques analyses ont permis de préciser ce qu’il en était de la place effective des sans-abri au sein de ces mouvements revendicatifs [6]. Il est légitime de s’interroger sur l’existence d’acteurs collectifs se revendiquant explicitement défenseurs, alliés, voire représentants des SDF. Historiquement, en France, le mouvement ATD s’était donné pour mission explicite d’assurer la représentation du « Quart Monde », de lui donner la parole et de favoriser son expression politique. Les voies de la protestation empruntées n’étaient toutefois pas aussi virulentes et éclatantes que dans le domaine de la lutte pour le logement telle qu’elle s’est récemment développée. En la matière ce sont les associations militantes comme le DAL ou le CDSL qui sont venues jouer ce rôle. Le DAL s’est même présenté dans ses tracts et publications comme le « syndicat » des mal-logés et des sans-logis, en s’exposant à la fois comme organe de représentation et comme prestataire de services. Le CDSL se présente lui comme « la principale association française de sans-abri, organisée par des sans-abri, ou d’anciens sans-abri » [7].

14Pour être précis et ne pas verser dans un débat sans fin sur la représentativité il faut immédiatement relever que peu de personnes SDF se sont effectivement mobilisées lors de ces différentes actions collectives, et que la plupart des dirigeants de ces associations nationales de défense des sans-abri étaient, et/ou sont encore, des militants politiques, généralement provenant de l’extrême gauche [8]. Les organisations de défense des sans-abri, en tout cas les plus importantes et les plus connues, ne peuvent être considérées comme des acteurs collectifs de sans-abri. Elles organisent les actions collectives en leur nom. Les associations comme le DAL et le CDSL se rapprochent bien de ce que Zald et McCarthy (1979) appellent des organisations professionnelles du mouvement social (professional SMOs), dont une des caractéristiques est d’agir pour, et le cas échéant avec (mais, ce n’est pas nécessaire) leurs publics de référence au nom desquels on se mobilise (Chazel, 1993b). Cress et Snow (1996, 2000) vont dans le même sens, pour caractériser certaines organisations travaillant dans le domaine de l’advocacy des homeless aux États-Unis [9].

15Se proclamer mouvements de chômeurs, d’exclus ou de SDF est un bon moyen pour conforter la légitimité de ses actions et obtenir la sympathie de l’opinion publique, même si on peut compter plus de militants politiques dans les rangs de ces associations que de personnes vivant les difficultés pour lesquelles il y a mobilisation. En réalité, chaque fois qu’un mouvement de chômeurs ou de pauvres s’amorce ou rencontre un certain succès, on s’inquiète de sa représentativité ou des manipulations dont les chômeurs et les pauvres seraient l’objet. En témoignent les débats autour du récent mouvement (hiver 1997-1998) qu’on a appelé « mouvement des chômeurs », mais qui dans notre vocabulaire est précisément une manifestation de ce mouvement social de lutte contre l’exclusion.
S’il est vrai que ces associations sont majoritairement composées de militants qui ne vivent pas les situations qu’ils dénoncent, il n’en reste pas moins qu’elles ont dans leurs rangs des personnes vivant les problèmes qu’elles combattent. On trouve bien parmi les responsables, les militants et les créateurs de ces associations, des personnes qui ont vécu ces situations avant de s’impliquer, ou qui la vivent encore au moment où l’association est créée. Elles ne représentent pas la majorité des personnes engagées, mais elles sont présentes.
Il est, à cet égard, indispensable de relever que certaines associations et initiatives collectives ont été incontestablement lancées et conduites par des personnes privées de logement. En 1989 une association « Galères Solidarité » avait été, créée, dans les Yvelines, sous l’égide de la DDASS, par un groupe de SDF (AFP, 7 avril 1989). Dans les années quatre-vingt-dix des associations comme « Paris Solidarité Métro » (présidée par un SDF qui a voulu se présenter aux présidentielles de 95) [10] ou « sans domicile solidarité » (SDS, créée en juin 1993) [11] ont connu une certaine visibilité en organisant diverses manifestations et pétitions. Le CDSL a lui aussi été constitué à l’origine par des personnes en grande difficulté. Localement, de petites coordinations de SDF se sont également constituées pour défendre un squat ou s’opposer à un arrêté municipal anti-mendicité. Remarquons encore que les rébellions dans certains centres d’hébergement comme au foyer George Sand (à partir de juillet 1995) ont été lancées par les SDF usagers de ces centres. Ce n’est qu’à partir du lendemain de leur action qu’ils ont bénéficié du soutien et de la logistique d’autres associations militantes. Des actions collectives entreprises directement par des SDF sont donc repérables [13]. La plus grande partie d’entre elles n’ont cependant pas réussi à perpétuer leurs activités. Ces associations ont pour la plupart disparu. Certaines se sont rapprochées d’associations protestataires plus structurées comme le DAL qui les ont intégrées ou qui les soutiennent totalement financièrement et organisationnellement.

Les obstacles théoriques à la mobilisation

16La question posée à partir de ces constats est double. Il s’agit de savoir comment les associations militantes peuvent s’inscrire dans la durée et comment des personnes SDF peuvent y participer. La réponse à la première question est assez simple. Elles ne peuvent durer que si elles sont appuyées, soit par d’autres associations, soit par des syndicats, soit par des mouvements politiques. Il faut toujours une organisation pour amorcer et soutenir la protestation car les SDF seuls ne peuvent s’organiser efficacement ne serait-ce que parce qu’ils n’ont pas de locaux pour se réunir. La réponse à la deuxième question est moins évidente.

17Les SDF auraient, à première vue, tout intérêt à se mobiliser collectivement pour investir les logements vacants, ou au moins pour participer aux actions visant à les aider. Mais la mobilisation collective ne va jamais de soi, notamment pour les personnes les plus en difficulté. Celles-ci peuvent ne pas s’engager dans des mouvements incertains (on ne peut présager de l’efficacité de l’action) et risqués (car s’inscrire dans l’illégalité est toujours hasardeux). Cette implication personnelle peut être coûteuse car elle demande du temps qui ne sera pas consacré à une gestion difficile de la vie quotidienne ou à des stratégies personnelles qui doivent permettre de retrouver un logement. Dans la hiérarchie des priorités des personnes SDF, la vie quotidienne est ainsi souvent privilégiée. Cela ne veut absolument pas dire qu’elles sont totalement en retrait de possibilités d’actions collectives, mais qu’il peut être coûteux et laborieux pour elles d’entrer dans des dynamiques de prise de parole, au sens d’Hirschman (1970).

18De nombreuses personnes SDF peuvent très rationnellement déclarer n’avoir ni le temps, ni la possibilité, ni le souhait de s’investir dans des actions collectives qui pourtant à titre individuel devraient les aider collectivement. Elles estiment que les coûts d’une action collective sont supérieurs aux bénéfices escomptés. Il s’agit là du paradoxe classique de l’action collective, connu sous le nom de paradoxe de Olson. Les SDF constituent un groupe latent, d’importance non négligeable, mais qui risquerait d’être « oublié » par les pouvoirs publics parce que les incitations individuelles à l’action collective ne permettraient pas l’émergence de groupes d’intérêt (Olson, 1966). Selon le célèbre paradoxe olsonien les SDF ne devraient donc pas se mobiliser. Et pourtant certains se mobilisent.

Les bonnes raisons individuelles des mobilisations collectives

19Soulignons qu’on ne sait pas grand-chose du nombre et de la proportion de SDF « militants ». Il est cependant bien probable que ces chiffres ne soient pas très élevés. Dans l’enquête menée par l’INED en 1998 auprès des sans-domicile de 16 à 24 ans à Paris et en banlieue proche, une question précise était posée pour dénombrer les personnes déclarant « faire personnellement partie d’un mouvement militant ou d’une association, par exemple en faveur des chômeurs ou pour le droit au logement » [14]. 5 % seulement des personnes enquêtées, alors que l’enquête se déroulait dans une période de forte activité du mouvement social contre l’exclusion (en l’occurrence le mouvement des chômeurs), répondaient affirmativement.

20Si le nombre de personnes impliquées est faible, il s’agit maintenant de comprendre pourquoi certains SDF se mobilisent plutôt que d’autres. On peut arguer de l’hétérogénéité de la population SDF, mais ceci n’explique pas grand-chose, dans la mesure où les associations militantes ont dans leurs rangs des personnes vivant des situations différentes. Pour dépasser le paradoxe de l’action collective, on peut avoir recours à l’explication, proposée par Olson, en termes d’incitations sélectives. Les responsables des associations peuvent abaisser les coûts de la participation en proposant des services et des issues personnelles aux SDF qui participent aux actions. Ils agrègent des biens individuels (en l’occurrence un logement réquisitionné) à un bien collectif plus général (un logement pour tous). Dans cet ordre d’idées, la mobilisation des SDF peut avoir lieu quand elle débouche sur des réponses pragmatiques. Il est à cet égard nécessaire que des acteurs extérieurs à la situation de SDF repèrent et accompagnent le potentiel de mobilisation des SDF en leur proposant des services concrets. C’est là un des rôles des organisations professionnelles du mouvement social, consistant à apporter une aide extérieure (Zald, McCarthy, 1979). Péchu (1996) dans ses observations détaillées de quelques-unes de ces mobilisations, rend bien compte de cette fonction des associations militantes. Les associations militantes proposent effectivement un relogement, aussi précaire et/ou illégal soit-il, à des personnes sans-abri. Mais, dans la mesure où elles ne disposent pas de logements en nombre important, il leur faut gérer d’autres ressources pour que des SDF, ou des mal-logés, restent dans leurs rangs. Les associations comme le DAL proposent donc des permanences pour appuyer, conseiller, orienter les SDF militants dans leurs démarches administratives. Cependant cela ne peut expliquer complètement l’implication de SDF car ils peuvent trouver ces services et ces aides matérielles ailleurs.

21Il faut alors remarquer que ces associations militantes ne proposent pas seulement des réponses concrètes et immédiates. Elles aménagent un cadre d’accueil qui permet aux personnes à défendre de se rencontrer, de se reposer, de discuter. Elles organisent des rencontres, des débats et des fêtes qui permettent de souder le groupe. Elles offrent donc des réponses, en nombre limité, mais également un lieu de sociabilité que des personnes SDF peuvent rechercher et trouver. Certains sans-abri s’affilient donc à ces associations et ces actions parce que l’atmosphère de l’accueil qu’ils y reçoivent leur plaît, parce que l’ambiance activiste qu’ils y trouvent les séduit. D’autres n’y adhèrent pas parce que l’environnement très militant peut ne pas leur convenir. Certains y viennent certainement par curiosité ou seulement dans l’attente d’une aide matérielle. Ils peuvent alors rester même s’ils ne trouvent pas ce qu’ils attendaient concrètement, mais parce qu’ils apprécient la convivialité et la qualité des liens qu’ils trouvent dans ces contextes. On peut en conclure que les SDF peuvent donc participer à des actions collectives non pas seulement pour des espérances utilitaristes de résultats immédiats par rapport à leur situation, mais aussi pour d’autres types de raisons. Tout d’abord ils peuvent adhérer aux valeurs véhiculées par une organisation, celle-ci ne défendant pas que des demandes matérielles mais aussi un projet de société. Plus prosaïquement, ils peuvent apprécier l’ambiance de militantisme, de réflexion ou de convivialité qu’ils trouvent dans ces organisations. En un mot, les SDF ne se mobilisent pas seulement parce qu’ils veulent maximiser leur intérêt individuel (rationalité instrumentale), mais aussi parce qu’ils ont des idées, des valeurs, des doctrines, auxquels, comme tout un chacun, ils ont de « bonnes raisons » d’adhérer [15].
L’action collective des SDF, avant d’être une mobilisation de SDF, est une action collective impliquant des militants. S’identifier aux militants peut être beaucoup plus gratifiant que d’être en permanence ramené à sa position disqualifiée. Par ailleurs, même si les probabilités d’accès à un logement sont faibles, l’implication dans la mobilisation peut tout de même déboucher sur des bénéfices concrets. Des enquêtes ethnologiques menées aux États-Unis sur la mobilisation des homeless (Cohen, Wagner, 1992) ont montré que l’action collective était possible et qu’elle pouvait avoir, à moyen terme, un impact sur les ressources matérielles. Ces enquêtes ont surtout permis de souligner que les mobilisations protestataires permettaient un développement des réseaux sociaux ainsi que l’affirmation – pour certains – d’une identité plus positive du sans-abri en tant que militant. Ceux-ci prennent alors des distances par rapport à leur rôle et à leur situation et se mettent à parler de « Nous » et non plus seulement d’eux-mêmes comme des isolés [16].

Des attentes concrètes, mais aussi des attentes symboliques

22Il serait faux de considérer que les SDF ne s’inscrivent dans ces actions collectives que par le désir de voir satisfaire un besoin immédiat (simple rationalité instrumentale). Il est nécessaire de prendre en compte, comme nous y invitent d’ailleurs les avancées de la littérature sur les mouvements sociaux, les dimensions symboliques et cognitives de ces adhésions [17]. On ne peut comprendre l’implication de personnes SDF dans ces actions sans considérer ces dimensions affectives, cognitives qui font que les personnes isolées trouvent dans ces groupes organisés, valorisant les relations interpersonnelles dans une ambiance sympathique, une sociabilité qui peut leur faire défaut dans leur isolement. Certaines personnes SDF participent donc, plus ou moins résolument, plus ou moins longuement, à ces mobilisations, parce que les associations militantes permettent des ajustements cognitifs que les SDF ne trouvent pas ailleurs. Le fait d’adhérer aux revendications politiques développées lors de ces actions, plus que la perspective (incertaine) de trouver une réponse à ses problèmes, explique une partie de la mobilisation de certains SDF. Par ailleurs les sentiments de honte, d’humiliation, d’inutilité, d’échec peuvent être surpassés dans l’action collective (Anderson, Snow, Cress, 1994). C’est plus l’attrait et l’intérêt psychologique de l’action que le calcul des résultats matériels escomptés qui pousse à la mobilisation. La mobilisation elle-même peut être une ressource « compensatoire » [18] qui permet de trouver dans l’action de quoi combler des manques caractérisant la vie quotidienne, en termes d’activités et de relations.

23Cette analyse de la mobilisation des SDF nous permet de repérer les capacités relationnelles et intentionnelles des acteurs sociaux SDF. On ne peut leur dénier toute rationalité ni limiter celle-ci à une unique rationalité de type utilitaire. Au contraire, comme d’autres acteurs sociaux, ils agissent en raison certes d’une utilité espérée, mais également de théories et de valeurs. C’est, entre autre, parce qu’ils ont la perception du caractère injuste et modifiable de leur situation que certains SDF peuvent se mobiliser. Ils ne sont pas seulement à la recherche des conséquences de la mobilisation (par exemple un logement), mais également dans l’affirmation de principes qui guident leurs actions. Les cadres d’interprétation de leur situation n’étant pas les mêmes pour toutes les personnes qui vivent ces conditions, leur niveau d’apathie ou d’effervescence protestataire ne seront, toutes ressources autres égales par ailleurs, pas les mêmes. On pourrait alors distinguer au sein de la population SDF, des carrières militantes, avec des réfractaires, des novices, ou des engagés. Il serait utile d’étudier ces carrières en fonction du passé professionnel, syndical et politique des personnes. Une figure importante serait certainement celle des « multi-militants » [19] présents dans des mobilisations différentes, pour les sans-abri, les sans-emploi, les sans-papiers, contre ou pour la mondialisation, etc.
L’étude des actions collectives, très voyantes, axées sur la problématique du logement qui se sont développées durant les années quatre-vingt-dix, nous rappelle également qu’il convient de ne pas sous-estimer le caractère organisé et structuré de l’action collective. Ce n’est pas parce qu’il y a du folklore, de l’effervescence, du tapage et de l’improvisation apparente qu’il n’y a pas une grande préparation, très rigoureuse, des différentes opérations. Soutenir la protestation au nom des sans-abri nécessite une organisation consistante qui permet aux personnes de s’inscrire et de rester dans le mouvement social.

SDF, organisations et issues du mouvement social

24On peut maintenant utilement systématiser les rapprochements que nous avons effectués entre les associations militantes comme le DAL et la famille des organisations professionnelles du mouvement social [20]. Peu de personnes concernées par la cause défendue sont effectivement présentes parmi les militants, notamment parmi les dirigeants [21]. Ces militants sont peu nombreux, mais ils sont soudés et motivés. Les appuis et ressources proviennent surtout de l’extérieur (dons, mécénat). Ces organisations apportent quelques réponses concrètes aux quelques SDF qui militent dans leurs rangs, et – surtout – elles soutiennent des revendications plus larges. Leur principal objet est d’avoir une influence sur les politiques publiques, en l’occurrence celles qui sont mises en œuvre en direction des sans-abri et du logement. Si au quotidien elles n’ont pas une influence majeure sur le cours ordinaire des politiques publiques, elles peuvent toutefois, lors d’événements extraordinaires ou dans des contextes particuliers, profondément bouleverser l’agenda politique. C’est effectivement ce qui s’est passé, par exemple, lors du « mouvement des chômeurs » (une expression très visible du mouvement social de lutte conte l’exclusion) qui a conduit à une réaction et une réflexion importante des pouvoirs publics.

25Ces organisations particulières mobilisent des ressources variées avec des modalités relativement originales. Les associations militantes, ne bénéficiant pas de subventions publiques, recherchent et trouvent des soutiens politiques, des militants, de l’argent (par des dons, des adhésions et des soutiens d’autres associations). Comme nous y invitent Cress et Snow (1996), il faut plus précisément caractériser ces ressources (morales, matérielles, informationnelles et humaines). On peut constater que ces organisations arrivent bien à se constituer un capital de ressources morales (sympathie dans l’opinion publique grâce au soutien de personnalités respectées), matérielles (des fonds, des locaux et des fournitures apportés par dons ou prêts des bénévoles et adhérents), informationnelles (des supports techniques pour l’organisation, apportés par d’autres associations) et humaines (des militants et des bénéficiaires potentiels). Elles communiquent en direction de l’opinion publique, elles se garantissent le parrainage de personnalités, elles s’assurent l’assistance matérielle d’autres associations, elles ont de nombreux contacts entre elles et avec d’autres organisations au sein du mouvement social de lutte contre l’exclusion, elles ont des permanents bénévoles pour des tâches concrètes ou des expertises. Des entrepreneurs politiques soutiennent le mouvement, des bénéficiaires potentiels s’y inscrivent (pour des raisons variées comme nous l’avons vu), des membres actifs y agissent. Des modes d’interprétation sont proposés par les militants, ce qui permet de dessiner les contours d’une vision politisée et conflictuelle de la question SDF, vision à laquelle peuvent adhérer une partie des personnes qui se trouvent effectivement sans domicile.

26Au-delà de son organisation, le mouvement social vise des produits de sortie. La mobilisation a en fait le plus d’« impacts » et de « conséquences », permettant corrélativement un recrutement plus large de participants, lorsque les attentes concrètes de l’organisation et celles de militants sont relativement (mais simultanément) atteintes. Les visées de l’association sont d’obtenir des ressources et des responsabilités dans la politique de prise en charge des phénomènes pour lesquelles elles organisent la mobilisation, mais aussi se voir reconnue une position d’interlocuteur légitime de la question SDF. Les visées des SDF mobilisés sont de se voir reconnus des droits, et d’obtenir quelques services ou équipements demandés lors des actions collectves [22]. La réussite des associations militantes est ainsi double, car elles ont pu à la fois acquérir une légitimité dans la question traitée en y faisant accéder leur formulation (surtout axée sur le logement), et offrir (ou plutôt permettre l’offre) de réponses (ponctuelles ou définitives) à quelques-unes des personnes concernées et mobilisées.

27La principale caractéristique de ces associations est de développer des stratégies d’action en direction essentiellement des pouvoirs publics. Elles n’ont pas pour fonction de reloger tous les mal-logés, ni d’abriter tous les sans-abri. Les actions collectives pour et avec les sans-abri sont surtout là pour relayer auprès des pouvoirs publics un problème qu’elles contribuent à formuler, surtout en terme de logement, et pour négocier des solutions. Ce constat est d’ailleurs établi depuis longtemps [23]. comme dans tout mouvement social, les organisateurs et les militants de ce mouvement se sont défini un adversaire. Ce n’est pas (en tout cas pas seulement) l’État ni les pouvoirs publics, ni les autres associations. C’est (surtout) le fonctionnement du marché du logement, et plus précisément les opérateurs qui sont décrits et décriés comme étant des spéculateurs. Accusant et désignant des grands propriétaires institutionnels, sinon comme responsables directs du problème, du moins comme redevables d’une certaine partie de la réponse, ces actions collectives se sont attiré la sympathie de l’opinion publique qui y trouvait une expression congruente avec tout ce qui était formulé sur la crise du logement, sur la spéculation immobilière et sur les scandales politico-financiers qui y étaient liés depuis le début des années quatre-vingt-dix.

28On a pu parler d’action publique « Robin des bois » pour caractériser les opérations de ces associations [24]. Il est vrai qu’il s’agit là d’actions sporadiques, envisagées comme une guerre juste, bénéficiant de la bienveillance de l’opinion, qui ne visent pas à apporter de solutions définitives au problème mais bien à offrir des issues à quelques personnes, et surtout à placer le problème sur l’agenda politique. Le terme d’action publique « Robin des bois » ne semble donc pas faux, même s’il paraît bien réducteur. En s’érigeant en défenseur des SDF et des mal-logés, et en exprimant leurs revendications en des termes simples qui rencontrent l’assentiment de la population, les associations militantes ont su à la fois se créer des ressources utiles et se poser comme des acteurs légitimes dans la confrontation et les tractations avec les pouvoirs publics.
* * *
Au terme de cette analyse soulignons que la période d’étude ne porte pas sur les événements les plus récents, notamment sur les évolutions des mobilisations et des priorités associatives. Il convient à cet égard de noter que le mouvement social contre l’exclusion s’est, avec le temps, progressivement institutionnalisé et routinisé, tandis que les associations protestataires se sont peu à peu notabilisées ; affaiblissant probablement leur potentiel protestataire, au moins sur la thématique du logement. L’effervescence contestataire a pu déplacer ses cibles, vers la question plus générale des droits, ou vers la thématique de la mondialisation. Il n’en reste pas moins que ce mouvement social, auquel des SDF ont assurément pu s’associer pour de bonnes raisons qui dépassent largement la seule attente matérielle d’un logement, aura marqué, voire même scandé, les interrogations et innovations de la fin du XXe siècle autour de l’exclusion. Pour autant bien des éléments constitutifs de ce mouvement social peuvent être analysés classiquement.

Notes

  • [*]
    Responsable du bureau de la recherche de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF).
  • [1]
    En anglais : Social Movement Industry (SMI), Social Movement Organization (SMO), Social Movement Sector (SMS).
  • [2]
    Pour cette partie nous avons également utilement consulté, sur le thème de l’action collective et des mouvements sociaux, Mann (1991), Fillieule, Péchu (193), Offerlé (1994), Neveu (1996).
  • [3]
    Sur l’analyse de la « nouveauté » de ces mouvements sociaux, voir Dubet (1993), voir également Sommier (2001).
  • [4]
    Voir les contributions de Isambert et Gehmacher dans l’ouvrage collectif sur Lazarsfeld publié par Lautman et Lécuyer (1998).
  • [5]
    Sur ce thème, d’un point de vue théorique, voir Oberschall (1973) et Chazel (1993a). D’un point de vue empirique, soulignons que les liens affinitaires ou communautaires dans 12 population SDF n’ont strictement rien d’évidents. Cependant quelques communautés particulières, comptant dans la population des sans-logis, ont pu s’organiser plus nettement et participer plus complètement et plus longuement à des actions collectives. C’est le cas, par exemple, des Maliens sans-logis en France.
  • [6]
    On pense notamment ici aux travaux menés par David Snow, soit seul, soit avec ses collaborateurs, en particulier Leon Andenon (1987, 1993, 1994, 1996). Signalons aussi les résultats de l’ethnographie réalisée par Cohen et Wagper (1992) auprès de 105 militants homeless.
  • [7]
    « L’association a pour objet l’accueil, le regroupement, l’accompagnement, la formation des personnes isolées sans-logis ou en situation de précarité, de leurs proches et des volontaires, afin qu’ils s’organisent entre eux et luttent pour retrouver collectivement leurs droits, (…), par l’interpellation des institutions, des pouvoirs publics et du gouvernement, en partenariat avec les associations partenaires » (article 2 des statuts du CDSL).
  • [8]
    Voir Péchu (1996), et « La nébuleuse des organisations de lutte contre le chômage » (Le Monde, 1er janvier 1998). Pour l’histoire du DAL et du CDSL voir Péchu (2001).
  • [9]
    Sur les activités (advocacy) des organisations en faveur de la défense des homeless, cf. notamment Hopper (1998) qui présente les multiples modes d’action (manifestations, actions juridiques, articles dans la presse, occupations d’immeubles, etc.) ainsi que la tension entre les mesures d’urgence et les appels à des politiques de plus longue haleine.
  • [10]
    Il s’agit de Daniel Hentzé, qui avait reçu alors le soutien de l’ancien président du Centre national des indépendants (CNI), le général Jeannot Lacaze. Hentzé, devenu employé municipal de la ville de Paris, fera encore parler de lui en 1999 et en 2000, lors du procès de l’épouse du maire de Paris, en organisant un comité de soutien au couple Tiberi (qu’ il lâchera d’ailleurs ensuite pour se rapprocher de Philippe Séguin, pendant la campagne municipale). Cf. « Pendant ce temps, Jean Tiberi s’occupe des plus démunis » (Le Monde, 19 octobre 1999). Pendant toute cette période il aura systématiquement été présenté comme un « ancien SDF ».
  • [11]
    Voir « Une nuit avec les membres de Sans Domicile Solidarité. Le cercle de nuit des SDF » (Libération, 12 juillet 1993), « Galériens de Paris » (Le Monde, 20 juillet 1993). Notons que cette association, comme d’ailleurs le projet de deux journaux de rue Le Réverbère et La Rue, est née avec le soutien des Compagnons de la Nuit – association d’accueil des SDF (et des « ADF » pour Avec Domicile Fixe) à Paris.
  • [13]
    Notons également que Georges Mathis, fondateur du très controversé journal de rue Le Réverbère, était lui aussi sans-abrri, fréquentant les divers services parisiens, quand il a fondé sol journal. À l’origine, dans l’idée de Mathis, il s’agissait de rassembler les sans-abri autour d’un projet commun. Ceci n’a pas abouti, la gestion étant réalisée par des personnes oui n’étaient pas SDF. En outre, Mathis a été condamné à des peines de prison avec sursis et des amendes substantielles pour l’emploi de salariés non déclarés, et surtout, en octobre 1997, pour injures raciales à la suite de plusieurs dérapages dans ses éditoriaux. Voir, par exemple, Libération, 25 septembre 1997.
  • [14]
    Tous nos remerciements à Maryse Marpsat pour ces informations précises. Pour une synthèse de cette enquête, cf. Marpsat, Firdion et Meron (2000).
  • [15]
    On s’appuie ici sur les travaux de Boudon sur la rationalité, élaborés dans une perspective compréhensive inspirée par Max Weber. Voir par exemple Boudon (1999).
  • [16]
    On trouve dans les travaux de Snow, Cress et Anderson les mêmes constats.
  • [17]
    Sur ce point, voir Chazel (1993a, 1997).
  • [18]
    L’expression est de Maurer (2001), dans sa riche analyse de la mobilisation des chômeurs (décembre 1997-mars 1998).
  • [19]
    Maurer (2001) repère différentes catégories de mobilisés dont les « multi-militants ». Sur les différentes carrières et les différentes générations militantes au sein de DAL, voir l’analyse approfondie de Péchu (2001).
  • [20]
    Sur le plan théorique général, voir Zald et McCarthy (1979) ; Chazel (1993b). Sur le point précis de ce type d’associations, aux États-Unis, cf. Cress et Snow (1996).
  • [21]
    Il faudrait faire une étude précise sur le DAL et le CDSL, on verrait peut-être des différences quant aux origines des différents responsables. En tout état de cause, Jean-Yves Cottin, président du CDSL a, lui, connu la rue.
  • [22]
    On reprend ici le dernier travail de Cress et Snow (2000) sur la question, où ils mettent l’accent sur le fait qu’on en sait beaucoup plus sur l’émergence, la participation et le recrutement des mobilisations, que sur leurs conséquences.
  • [23]
    Seyd (1975) dans son travail sur le cas anglais dans les années soixante-dix aboutit à ces conclusions.
  • [24]
    « Le DAL et l’effet Robin des bois » (Libération, 12 avril 1995) ; « Droit au logement fête ses 5 ans » (La Croix, 30 octobre 1995).
Français

Résumé

Cet article à visée analytique et théorique, renseigné aux sources de la littérature sociologique consacrée aux mouvements sociaux, porte sur l’évaluation et l’explication de la participation des SDF à des mobilisations et des protestations. Il s’agit ici d’analyser les raisons de l’implication de certains sans-abri dans des actions collectives entreprises et soutenues par des associations particulières. On s’inspirera des travaux français et anglo-saxons, classiques et plus récents, généraux et plus spécifiquement dédiés aux questions des SDF et des homeless.

Bibliographie

  • La bibliographie rassemblée et exploitée dans le cadre de cette contribution est consistante. Cet ensemble de références, qui se veut outil de travail, ne comporte que les titres expressément cités au cours du texte. De facture et de nature différentes, ces ouvrages et ces articles permettent un balayage des problématiques abordées.
  • Anderson (Leon), Snow (David), Cress (Daniel M.), « Negociating the Public Realm : Stigma Management and collective Action Among the Homeless », in Cahill (Spencer E.), Lofland (Lyn) (dir.), The Community of « The Streets », Greewich, JAI Press, 1994, pp. 121-143.
  • Blau (Jœl), The Visible Poor. Homelessness in the United States, New York, Oxford Univenity Press, 1992.
  • Boudon (Raymond), Le sens des valeurs, Paris, PUF, 1999.
  • En ligneChazel (François), « La mobilisation politique : problèmes et dimensions », Revue française de science politique, vol. 25, n° 3, 1975, pp. 502-515.
  • Chazel (François), « Mouvements sociaux », in Boudon (Raymond) (dir.), Traité de sociologie, Paris, PUF, 1992, pp. 263-312.
  • Chazel (François) (dir.), Action collective et mouvements sociaux, Paris, PUF, 1993a.
  • Chazel (François), « La place du politique dans les mobilisations contestataires : une découverte progressive », in Chazel (François) (dir.), Action collective et mouvements sociaux, Paris, PUF, 193b, pp. 145-161.
  • Chazel (François), « Introduction générale », Chazel (François) (dir.), Action collective et mouvements sociaux, Paris, PUF, 1993c, pp. 9-14.
  • Chazel (François), « Les ajustements cognitifs dans les mobilisations collectives », in Boudon (Raymond), Bouvier (Alban), Chazel (François) (dir.), Cognition et sciences sociales, Paris, PUF, 1997, pp. 193-206.
  • Cohen (Marcia B.), Wagner (David), « Acting on Their on Behalf : Affiliation and Political Mobilization among Homeless People », Journal of Sociology and Social Welfare, vol. 19, n° 4, 1992, pp. 21-40.
  • En ligneCress (Daniel M.), Snow (David A.), « Mobilization at the Margins. Resources, Benefactors, and the Viability of Homeless Social Movement Organization », American sociological Review, vol. 61, n° 4, 1996, pp. 1089-1109.
  • En ligneCress (Daniel M.), Snow (David A.), « The Outcomes of Homeless Mobilization. The Influence of Organizations, Disruption, Political Mediation, and Framing », American Journal of Sociology, vol. 105, n° 4, 2000, pp. 1063-1104.
  • Dubet (François), « Les nouveaux mouvements sociaux », in Chazel (François) (dir.), Action collective et mouvements sociaux, Paris, PUF, 1993, pp. 61-69.
  • Fillieule (Olivier), Péchu (Cécile), Lutter ensemble. Les théories de l’action collective, Paris, L’Harmattan, 1993.
  • Foscarinis (Maria), « Beyond homelessness. Ethics, Advocacy, and Strategy », Saint Louis University Public Law Review, vol. 12, n° 1, 1993, pp. 37-67.
  • Hirschman (Albert O.), Défection et prise de parole, Paris, Fayard, 1995 (1970).
  • En ligneHopper (Kim), Baumohl (Jim), « Held in Abeyance : Rethinking Homelessness and Advocacy », American Behavioral Scientist, vol. 37, n° 4, 1994, pp. 522-552.
  • En ligneHopper (Kim), « Du droit à l’hébergement au droit au logement. Quinze ans de mobilisation en faveur des sans-domicile aux Étas-Unis (1980-1995) », Sociétés Contemporaines, n° 30, 1998, pp. 67-93.
  • Lautman (Jacques), Lecuyer (Bernard Pierre) (dir.), Paul Lazarsfeld (1901-1976). La sociologie de Vienne à New York, Paris, L’Harmattan, 1998.
  • Lazarsfeld (Paul), Jahoda (Marie), Zeisel (Hans), Les chômeurs de Marienthal, Pais, Éditions de Minuit, 1991 (1932).
  • Lipsky (Michael), « Protest as a Political Resource », American Political Scierce Review, vol. 62, n° 4, 1968, pp. 1144-1158, trad. in Padioleau (Jean), L’opinion publique. Examen critique, nouvelles directions. Recueil de textes, Paris, Mouton, 1981, pp. 336-367.
  • Mann (Patrice), L’action collective. Mobilisation et organisation des minorités actives, Paris, Armand Collin, 1991.
  • Marpsat (Marye), Firdion (Jean-Marie), Meron (Monique), « Le passé difficile des jeunes sans-domicile », Population & Sociétés, n° 363, 2000.
  • Maurer (Sophie), Les chômeurs en action (décembre 1997-mars 1998). Mobilisation collective et ressources compensatoires, Paris, L’Harmattan, 2001.
  • Neveu (Erik), Sociologie des mouvements sociaux, Paris, La Découverte, 1996.
  • Oberschall (Anthony), Social Conflict and Social Movements, Englewood Cliffs, Prentice-Hall, 1973.
  • Offerlé (Michel), Sociologie des groupes d’intérêt, Paris, Montchrestien, 1994.
  • Olson (Mancur), Logique de l’action collective, Paris, PUF, 1978 (196).
  • En lignePéchu (Cécile), « Quand les exclus passent à l’action. La mobilisation des mal-logés », Politix, n° 34, 1996, pp. 114-133.
  • En lignePéchu (Cécile), « Les générations militantes à Droit au logement », Revue française de science politique, vol. 51, n° 1-2, 2001, pp. 73-103.
  • En lignePinard (Maurice), « Poverty and Political Movements », Social Problems, vol. 15, n° 2, 1967, pp. 250-263.
  • Piven (Frances Fox), Cloward (Richard), Poor People’s Movements. Why they Succeed, How they Fail, New York, Pantheon Book, 1977.
  • Portier (Nicolas), « Crise du logement : la longue marche vers la reconnaissance politique », Fondations, n° 2, 1995, pp. 53-69.
  • Salmon (Jean-Marc), Le Désir de société. Des restaurants du cœur au mouvement des chômeurs, Paris, La Découverte, 1998.
  • En ligneSeyd (Patrick), « Shelter : the National Campaign for the Homeless », Political Quarterly, vol. 46, n° 4, 1975, pp. 418-431.
  • Simmel (Georg), Les pauvres, Paris, PUF, 1998 (1907).
  • En ligneSnow (David), Cress (Daniel M.), Downey (Liam), Jones (Andrew W.), « Disrupting the “Quotidian” : Reconceptualizing the Relationship between Breakdown and the Emergence of Collective Action », Mobilization, vol. 3, n° 1, 1998, pp. 1-22.
  • Sommier (Isabelle), Les nouveaux mouvements contestataires. À l’heure de la mondialisation, Paris, Flammarion, coll. « Dominos », 2001.
  • Tilly (Charles), La France conteste, de 1600 à nos jours, Paris, Fayard, 1986.
  • Zald (Mayer N.), McCarthy (John D.) (dir.), The Dynamics of Social Movements. Resource Mobilization, Social Control, and Tactics, Cambridge, Winthrop, 1979.
Julien Damon [*]
Responsable du bureau de la Recherche de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF).
  • [*]
    Responsable du bureau de la recherche de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF).
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/04/2011
https://doi.org/10.3917/rfas.022.0065
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour La Documentation française © La Documentation française. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
keyboard_arrow_up
Chargement
Chargement en cours.
Veuillez patienter...