CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Suite à l’épisode du Fonds d’urgence sociale, le ministère de l’Emploi et de la Solidarité a demandé l’installation dans chaque département d’une Commission de l’action sociale d’urgence (CASU) – article 154 de la loi du 29 juillet 1998 contre les exclusions – chargée « d’assurer la coordination des dispositifs susceptibles d’allouer des aides, notamment financières, aux personnes et aux familles rencontrant de graves difficultés ». Ce dispositif de coordination prévoit l’installation dans chaque département de guichets polyvalents, l’utilisation d’un formulaire unique de demande d’aide et la création d’un répertoire des aides. L’article que nous présentons ici fait état d’un premier bilan, dix-huit mois après la parution de la circulaire ministérielle [4], de l’installation des CASU dans deux départements, le Nord et le Pas-de-Calais.

2L’étude simultanée de la mise en place des commissions de l’action sociale d’urgence sur deux sites nous a mis en présence de modélisations assez différentes de ce que sont les CASU selon les lieux et selon les acteurs. D’un dispositif de coordination à un dispositif de distribution des aides, les interprétations sont larges et le texte de loi, au fil de ses transmissions, subit de nombreuses traductions. Si dans le Nord, la priorité s’est orientée vers la coordination des dispositifs d’aides sociales, dans le Pas-de-Calais, les efforts se sont concentrés autour de l’accès aux aides d’urgence. L’accueil réservé à la circulaire n’a pas non plus été le même : adopté d’emblée par les membres désignés de la CASU dans le Nord, le dispositif a été accueilli avec plus de prudence dans le Pas-de-Calais. Examinons plus précisément ces points à travers l’installation du dispositif dans chaque site et les réactions des partenaires concernés.

La mise en place de la CASU dans le Nord et dans le Pas-de-Calais : état des lieux

3La convention entre les deux pilotes de la CASU, le préfet et le président du conseil général, a été signée dans chacun des deux départements en décembre 1998

L’installation de la CASU dans le Nord

4La CASU du Nord a bénéficié au début de son installation d’un soutien politique important qui s’est traduit par une mise en place rapide des instructions de la circulaire. Il n’y a pas eu au niveau des pilotes et des partenaires du département de débats de fond sur le projet. D’emblée les instructions de la circulaire ont été adoptées et les premières réunions de la CASU étaient consacrées à la mise en place des outils de la commission avec le souci de suivre au plus près les instructions de la circulaire. La commission départementale a été déconcentrée en instances locales, appelées Commission de l’action sociale d’urgence locale – CASUL – et la mise en place des outils, le guichet, le formulaire et le répertoire, a été confiée à quatre groupes de travail. Installées progressivement au cours de l’année 1999, les huit commissions locales réparties par arrondissement constituent pour l’heure des lieux d’informations sur les avancées de la commission départementale et des lieux d’échanges pour les acteurs locaux.

5L’installation de « lieux » [5] d’accueil polyvalents a fait l’objet d’un cahier des charges précisant les critères à remplir pour chaque organisme se présentant comme lieu d’accueil polyvalent. Les centres communaux d’action sociale (CCAS), les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM), les caisses d’allocations familiales (CAF) et la Mutualité sociale agricole (MSA) ont, sous réserve de leur acceptation, d’emblée été reconnus lieux d’accueil. En janvier 2000, on dénombrait 219 [6] lieux d’accueil polyvalents dans le Nord. Un logo est même prévu pour distinguer ces lieux.

6Le formulaire de demande d’aide a été renommé dans le Nord « fiche de situation », les membres de la CASU voulant indiquer par cette terminologie leur intention de faire de ce document un outil de diagnostic global des situations rencontrées et non pas simplement un accès direct à une aide financière. Ce document de huit pages rassemble l’ensemble des informations concernant la demande d’aide, les observations de l’accueillant, l’identification précise de l’accueillant, de l’organisme d’accueil, et du demandeur – adresse, téléphone, numéros de sécurité sociale, d’allocataire CAF ou de MSA, d’Assedic, et données sur la situation familiale et professionnelle – et enfin la date de réception de la demande. Les domaines du logement, des ressources mensuelles, des charges mensuelles, des crédits en cours et des dettes sont abordés successivement.

7En ce qui concerne la constitution du répertoire, les membres de la CASU se sont interrogés sur la nature des aides à y intégrer. Le répertoire dont la parution est prévue en cours d’année 2000 comprend, après un consensus général, les aides sociales légales au niveau national, les aides extra légales au niveau départemental et les aides extra légales locales. Il semble toutefois que beaucoup de partenaires hésitent à faire part de l’ensemble de leurs aides à la CASU.

8La circulaire prévoit une formation pour les agents au guichet d’accueil polyvalent. La CASU du Nord a prévu lors de ses premières réunions des modules de formation sous forme de sessions de cinq journées pour 1 500 agents, et financés par l’État.
Le bilan de l’année 1999 en ce qui concerne l’installation de la CASU dans le Nord apparaît donc relativement positif : les huit commissions locales sont installées, elles se sont réunies trente-cinq fois dans l’année, le recensement des lieux d’accueil polyvalents s’élève au chiffre de deux cent dix-neuf, un premier exemplaire de la fiche de situation est sorti en octobre 1999, et le répertoire des aides se constitue progressivement. Cependant, l’année 2000 se montre plus calme. Il règne comme un climat d’essoufflement et de stagnation dans l’avancement des travaux depuis le premier semestre de cette année. Deux raisons semblent expliquer ce ralentissement. D’une part, la CASU du Nord ne bénéficie plus du soutien politique qui au départ avait permis une mise en route rapide de l’installation du dispositif, et d’autre part, la déclinaison au plan local de l’ensemble des outils conçus au niveau départemental semble plus difficile à réaliser. L’utilisation concrète de la fiche de situation pose question : doit-on y avoir systématiquement recours ou non ? La longueur et la densité du document découragent certains. Les critères requis pour être admis lieux d’accueil polyvalents risquent d’entraîner un effet d’éviction important au niveau des organismes locaux. La crainte d’une surcharge de travail et d’une désorganisation territoriale de la gestion des personnes défavorisées [7] constituent les principaux motifs de refus d’être lieu d’accueil polyvalent. Le consensus général qui s’est établi au niveau départemental ne se retrouve pas au niveau local et les partenaires locaux ont pour un certain nombre vécu ce dispositif comme une imposition, voire une ingérence.

L’installation de la CASU dans le Pas-de-Calais

9C’est dans un autre climat politique et selon un déroulement différent que la CASU du Pas-de-Calais a été mise en place. Le projet n’a pas été reçu de manière aussi inconditionnelle que dans le Nord et en particulier le principe du guichet d’accueil polyvalent n’a pas été retenu. Le dispositif CASU dans le Pas-de-Calais semble avoir hérité en grande partie de la philosophie du FUS. Les dispositions prises par les membres de la CASU vont dans le sens d’un accès plus facile aux aides, mais ne s’orientent pas vers un dispositif de coordination de l’ensemble des organismes à la manière du département voisin. Les partenaires ont, en outre, souvent fait remarquer l’existence de réseaux d’aides d’urgence pour les personnes défavorisées dans le département. Une certaine hésitation sur le fond donc, mais aussi une certaine hésitation dans la forme : c’est de manière progressive et pragmatique que la commission départementale a décidé de mettre en place les instructions ministérielles. Il a été décidé de déconcentrer la commission départementale et d’expérimenter quelques sites locaux avant de généraliser l’installation de commissions locales. Au premier semestre 1999, trois CLASU – Commission locale de l’action sociale d’urgence – ont été testées au niveau des unités territoriales. Un an plus tard il est décidé de généraliser ces instances locales, au nombre d’une petite dizaine, non pas au niveau des unités territoriales comme il avait été pensé dans un premier temps, mais selon un découpage proche de celui des arrondissements.

10Le formulaire de demande d’aide et le répertoire ont été confiés à un groupe technique de travail constitué des représentants techniques de chacun des partenaires départementaux.

11Intitulé « formulaire unique de demande financière d’urgence » et réalisé au premier semestre 2000 dans l’esprit du formulaire utilisé pour le FUS, cet imprimé ne répond pas exactement aux indications de la circulaire. Il ne s’agit pas d’un document polyvalent, capable de restituer la globalité de la situation pour orienter la demande vers l’institution la plus appropriée et la traiter, mais d’un formulaire unique, peu dense – deux pages recto verso – permettant l’octroi d’une aide d’urgence en fonction des informations relevées – situation personnelle du demandeur, identité, coordonnées, situation familiale et professionnelle, logement, ressources et charges autres que celles incluses dans le forfait calculé pour le formulaire. Le principe du guichet polyvalent ou de toute autre structure spécifique pour coordonner et orienter les personnes n’ayant pas été envisagé c’est donc la procédure habituelle qui est utilisée : les travailleurs sociaux qui reçoivent habituellement les personnes en difficulté sont désignés pour instruire les dossiers. En cas de situations complexes, ils sont chargés de présenter les dossiers en commissions locales. Ce formulaire a été expérimenté sur la ville d’Arras début mai 2000. En ce qui concerne le répertoire des aides, celui-ci se présente sous la forme d’un classement thématique « pauvreté – précarité » en cinq catégories : énergie, eau, téléphone [8] ; logement ; formation et reclassement professionnel; aide alimentaire; santé. Le recensement des aides auprès des principaux organismes administratifs et sociaux n’a pas posé de problèmes majeurs. Par contre l’opération semble quasiment impossible pour les 900 centres communaux d’action sociale du département et pour le secteur associatif.

12L’observation, au niveau local, du fonctionnement des commissions sur les sites expérimentaux révèle encore de nombreux points obscurs quant au fonctionnement concret de ce dispositif. Il n’y a pas par exemple de procédures uniformes pour choisir les dossiers qui doivent passer en CASU. Dans un lieu on prend systématiquement l’ensemble des demandes de secours, dans un autre, on choisit ce qu’on estime un « cas d’école ». Les partenaires des CASU locales observées se montrent insatisfaits de leur marge de manœuvre : tout se passe comme si ces réunions locales servaient de lieu d’observatoire pour la CASU départementale, sans fournir aux acteurs locaux la possibilité de débattre et d’agir ou même de donner leur avis sur les dossiers.
Mise en place rapidement dans le Nord, reçue avec plus de modération dans le Pas-de-Calais, la CASU du Nord et celle du Pas-de-Calais achèvent leur phase d’installation. L’idée de coordonner les dispositifs d’aide sociale n’est pas nouvelle, mais inlassablement elle pose les mêmes problèmes d’installation et les mêmes enjeux institutionnels et politiques pour les acteurs concernés par l’intervention sociale.

Le partenariat et les enjeux politiques et institutionnels de la CASU

13Comme pour le FUS, on retrouve deux groupes principaux d’acteurs autour des CASU. Le premier groupe, rassemblant les acteurs centraux du dispositif, que sont la préfecture et le conseil général – les deux pilotes désignés des CASU –, et les institutions traditionnelles de l’action sociale à savoir la direction départementale des Affaires sanitaires et sociales (DDASS), l’Union départementale des centres communaux d’action sociale, les CPAM, l’ARCAF [9], la MSA et la caisse régionale d’assurance maladie et les Assedic. Dans chaque Commission de l’action sociale d’urgence locale, on retrouve un représentant du premier cercle.

14Le second groupe est composé d’acteurs plus divers. On y trouve à titre d’exemple les associations caritatives, le service solidarité d’EDF-GDF, la commission de surendettement de la Banque de France, etc. Au niveau des commissions locales, la présence de ces membres varie selon les lieux. On peut ainsi y rencontrer des représentants des associations caritatives comme la Conférence Saint-Vincent-de-Paul, le Secours catholique et le regroupement des associations caritatives « Carrefour des solidarités » [10], des représentants de la Banque de France au titre de la commission de surendettement et des représentants des permanences d’accueil, d’information et d’orientation (PAIO).

15Il faut ajouter à ces deux groupes, des institutions, ou acteurs du social, absents des commissions de l’action sociale d’urgence, soit par choix, soit parce que non invités aux réunions. On souligne en particulier l’absence des associations de chômeurs et celle de l’????. Au niveau local, la participation des chômeurs a été discutée dans le Nord. À Maubeuge et à Tourcoing, les CASUL ont pris contact avec les représentants de chômeurs et l’????.

Les pilotes du dispositif: l’État et le département

16L’observation des débats autour de la CASU et des attitudes des deux copilotes, l’État et le département, dans les deux départements révèlent la présence d’une relation de partenariat complexe entre d’un côté la préfecture et la DDASS et de l’autre le conseil général.

17Dans le Nord, la volonté émanant de la DDASS et de la préfecture de suivre au plus près les instructions de la circulaire était sans ambiguïté. Le conseil général, malgré une position officielle participative, est apparu dans les faits beaucoup moins mobilisé par la mise en place de la CASU. Il semblerait que la révision de l’organisation des services internes du conseil général explique cette faible mobilisation, qui a néanmoins été ressentie par les autres partenaires, qui sont allés jusqu’à qualifier son attitude de « réticente ».
C’est un schéma quasi inverse que l’on constate dans le Pas-de-Calais. Le conseil général tient un rôle moteur dans la mise en place de la CASU et son volontarisme en la matière n’est ignoré d’aucun des partenaires. C’est à partir de son découpage territorial que les CLASU ont dans un premier temps été envisagées, et c’est lui qui assure l’animation des instances locales. La part largement majoritaire des représentants du conseil général en commission locale vient renforcer son action prédominante [11]. De fait, dans le Pas-de-Calais, le conseil général se trouve être « l’impulseur » de la CASU. L’État à côté du département se montre relativement moins porteur du projet, même s’il adhère à l’idée de la coordination des dispositifs d’aide. La DDASS qui se veut participative n’a pas prévu d’engager de moyens supplémentaires. Elle affiche la volonté de garder un certain contrôle du dispositif et témoigne de la volonté de participer au travail de coordination des dispositifs d’aides. Avant la circulaire de 1998, la DDASS avait eu l’idée de réactiver la circulaire d’application d’un décret de 1959 [12].

Les institutions sociales traditionnelles

Les communes : l’hétérogénéité de l’implication des CCAS

18Les centres communaux d’action sociale sont certainement ceux qui affichent les positions les plus extrêmes et les plus diverses à l’encontre de la CASU. Dans les deux départements, une partie des centres affiche un scepticisme prononcé dans le dispositif. Se présentant comme instances traitant quotidiennement de l’urgence sociale, les CCAS craignent dans le Pas-de-Calais de « casser les dynamiques locales instaurées », ou dans le Nord, de voir leurs manières de faire modifiées. La crainte de perdre leur autonomie et le sentiment d’être « instrumentalisé » sont également des motifs régulièrement avancés par les CCAS. Pour autant, cette position n’est pas représentative de l’ensemble des centres. Certains adhèrent entièrement au principe de coordination du dispositif et voudraient même aller plus loin en préconisant une harmonisation des systèmes d’aides.

Les CAF : une réaction mitigée

19Selon les lieux, les caisses d’allocations familiales ont eu un comportement différent [13]. Pour le Nord, on note par exemple l’attitude très impliquée d’une CAF alors qu’une autre se montre au contraire très réservée. Ce comportement de réserve de certaines CAF vis-à-vis des CASU s’explique par leur politique d’action sociale. Une caisse, par exemple, rappelle que : « L’urgence n’entre pas dans ses missions : la CAF fait de l’action sociale et non de l’aide sociale ». Elle met alors en avant son domaine d’action privilégié celui des familles. Pour autant, cette CAF désire participer en partie à la CASU. Si elle refuse d’être un lieu d’accueil, elle accepte en revanche de recevoir et d’étudier les fiches de situation qui lui parviendront.

Les autres partenaires

20Parmi les autres partenaires, les positions sont diverses. Présent à la CASU départementale du Nord et dans trois commissions locales, EDF-GDF, représenté par son conseiller solidarité, voit dans ce dispositif le moyen de faire connaître auprès des professionnels du social et du public, sa politique de solidarité, avec le Fonds d’aide à l’énergie. Toutefois, ce partenaire conçoit la Commission de l’action sociale d’urgence uniquement comme un outil de coordination, il n’est pas question pour lui de leur confier le traitement des dossiers, et par conséquent il se refuse à se présenter comme lieu d’accueil polyvalent. Le même discours est tenu dans le Pas-de-Calais par le secteur associatif.

21Au terme de notre étude sur l’installation des CASU dans le Nord et dans le Pas-de-Calais, il apparaît que l’interprétation de la circulaire ministérielle demeure large au sein du système d’acteurs. Pour certains il y a insistance sur les fonctions de coordination, pour d’autres on privilégie le fonctionnement de la distribution des aides. L’accord semble unanime sur la nécessité de disposer d’un répertoire des aides des différentes institutions. Mais si la mise en œuvre d’un répertoire départemental semble une étape aisément franchie, sa déclinaison au plan local semble plus difficile. L’imprimé unique est à géométrie variable : imprimé polyvalent dans le Nord qui doit permettre l’instruction unique, il est plutôt considéré comme une base d’information minimale dans le Pas-de-Calais. Ici se reflètent les stratégies différentes qui ont été choisies – et dans lesquelles le poids des conseils généraux semble avoir été important. Néanmoins, dans les deux situations, les institutions demeurent attachées à leurs propres procédures d’instruction. Des questions concrètes de fonctionnement apparaissent : quand doit-on avoir recours à l’imprimé unique ? Certains disent dans tous les cas (certains CCAS) ; d’autres pensent qu’il doit servir uniquement dans certaines situations. Dans ce cas lesquelles et qui décide ? Dernier aspect, la notion de guichet polyvalent est diversement évaluée. Pour le Nord c’est une ambition clairement annoncée – création d’un logo, imprimé polyvalent, formation des agents d’accueil. Pour le Pas-de-Calais ce n’est pas un affichage principal, l’accent étant mis sur l’amélioration du système existant. Au-delà de cette différence dans l’affichage des priorités, on peut s’interroger sur la différence réelle une fois qu’on arrive au niveau du fonctionnement local. On peut toutefois sur ce dernier point supposer que dans le Nord l’usager aura plus de chance de connaître une simplification des démarches, alors que dans le Pas-de-Calais, cela lui sera beaucoup plus difficile, étant donné qu’aucune procédure concrète n’est mise en œuvre pour lui éviter « la tournée des guichets ».

22Enfin, au-delà des questions relatives à la mise en place d’un tel dispositif, c’est au niveau du sens même donné à l’intervention sociale sur le mode de l’urgence que l’on propose de réfléchir dans un dernier point.

L’action sociale d’urgence : une nouvelle politique sociale ?

Les CASU ou les « mal nommées »

Urgence sociale ou pauvreté chronique

23La terminologie employée pour désigner le système de coordination a suscité de nombreuses réflexions critiques auprès des partenaires. Le terme « urgence » tout d’abord est paru très inapproprié. L’argument avancé a consisté à faire remarquer que la Commission de l’action sociale d’urgence, si elle est bien un dispositif visant la coordination des systèmes d’aides, ne traite pas les situations d’urgence sociale des personnes en difficulté, au sens où la CASU ne permet pas de répondre dans un délai très bref à une détresse sociale. Si on lie l’urgence à un contexte de crise, elle réclame un système souple et adaptable. Or les procédures de coordination instaurées par la CASU semblent ajouter de par les délais de réunions et de par les procédures à suivre – dans le Pas-de-Calais la saisine de la CLASU se fait par l’envoi du dossier huit jours au minimum avant – des règles de rigidité supplémentaires. Il existe déjà par ailleurs des dispositifs ou des réseaux permettant de répondre en urgence : les CCAS et le secteur associatif déclarent traiter quotidiennement l’urgence.

24La CASU ne semble d’ailleurs pas plus devoir s’adresser exclusivement à des situations d’urgence sociale. Les dossiers complexes révèlent souvent des cas de pauvreté chronique. Cette idée évoquée régulièrement par les partenaires, et selon laquelle il y a confusion entre une situation d’urgence et une situation de pauvreté chronique, pose une autre question déjà présente lors de l’épisode du FUS, qui est celle de la définition de l’urgence [14].

25Dans ce premier bilan des CASU, il nous est impossible pour l’heure d’analyser les situations rencontrées en commissions, puisque celles-ci achèvent seulement leur mise en place. Toutefois, d’après le discours des partenaires, les CASU sont un outil de réflexion concertée sur des cas complexes, restés jusque-là sans solution. Mais rien ne vient explicitement distinguer si ces cas concernent des situations de précarité conjoncturelles ou structurelles. L’ambiguïté entre urgence et chronicité reste donc présente.

Le champ de compétence des CASU : aides légales et/ou aides extra légales

26Les incertitudes et les ambiguïtés relevées ci-dessus se redoublent dès qu’il s’agit de définir le champ des aides auxquelles s’appliquent les compétences des CASU. Les textes de loi restent vagues sur les aides concernées. Tel qu’il est noté dans l’article 154 de la loi contre les exclusions, la CASU « est chargée d’assurer la coordination des dispositifs susceptibles d’allouer des aides, notamment financières, aux personnes et aux familles rencontrant de graves difficultés ». Dans la circulaire relative à la CASU [15], on parle de coordination « des divers dispositifs d’aide existants ».

27S’agit-il de l’ensemble des aides sociales ou seulement des aides dites extra légales [16] ? Notons déjà que cette distinction entre les aides n’est pas d’une clarté absolue et les interprétations peuvent varier quant à la distinction entre légal et extra légal. La notion d’extra légal est elle-même relative, elle ne veut pas dire discrétionnaire ou absence de critères et de règles

28Il semble y avoir un accord assez large sur l’idée que les CASU ont compétence pour l’ensemble des systèmes d’aide. Mais beaucoup de nuances peuvent être introduites sur cet accord global. Après tout, pourquoi y aurait-il matière à discussion sur l’application de règles de droit ? Il y a cependant bien un domaine jurisprudentiel de l’aide sociale.
Pour chaque institution qui délivre des prestations d’aide sociale, il y a donc une frontière interne entre ce qui relève, on pourrait dire, des missions légales, du fonctionnement ordinaire, et ce qui relève de l’application et de l’appréciation locales. Il semble que le fonctionnement encore embryonnaire des CASU vienne interroger cette frontière.

Action sociale et aide sociale [17]

29L’utilisation du terme « action sociale » dans la dénomination fait aussi problème. On retrouve à cette occasion un débat sur la répartition aide sociale/action sociale. Y a-t-il confusion des deux ? L’action sociale se résume-t-elle à la distribution des aides ? Derrière le débat sémantique, par exemple pour une CAF « action sociale » signifie clairement politique locale concernant les aides extra légales des caisses – la politique « d’action sociale des caisses », « la CAF fait de l’action sociale et non de l’aide sociale » – il y a vraiment un débat de fond sur politique d’aide sociale versus politique d’action sociale. La terminologie choisie – Commission de l’action sociale d’urgence – favorise la confusion entre politique d’action sociale et politique d’aide sociale. Dans une période récente, l’État a rappelé que si l’aide sociale était bien une compétence départementale, l’action sociale demeurait une compétence de l’État. Cette position est-elle en train de changer ? Existe-t-il encore une politique d’action sociale ? Si oui quel est son périmètre ? Qui pilote ou quels sont les modes de pilotage locaux ?

L’urgence comme mode d’intervention

30L’urgence dans l’intervention sociale pose deux questions quant à l’évolution de cette intervention. La première concerne la manière d’intervenir auprès de la personne ou de la famille en difficulté : les pratiques développées dans les dispositifs d’urgence tendent à développer une action ponctuelle au détriment d’une intervention préventive et d’un accompagnement social. La seconde question interroge plus généralement le développement de l’urgence dans les pratiques des pouvoirs publics, comme l’illustre la loi contre les exclusions et les conséquences en termes de droit et d’égalité de traitement de chaque citoyen.

Intervention ponctuelle – accompagnement social

31La crainte clairement exprimée par certains acteurs sociaux de la CASU est celle d’une substitution de l’intervention sociale en termes d’aides ponctuelles à l’intervention sociale en termes d’accompagnement dans la durée, soit une action sociale qui se résumerait à la distribution des aides. La manière de concevoir et d’utiliser le formulaire unique est très révélatrice sur ce point. Dans le Pas-de-Calais, le formulaire se présente comme un outil permettant de trouver le plus facilement possible la procédure de financement et non pas de donner « un panorama global de la personne » [18]. Dans le Nord, au contraire, le contenu assez lourd – huit pages – du formulaire suscite chez quelques-uns un sentiment de satisfaction : « l’octroi de secours suppose de pouvoir accueillir la personne et de prendre du temps pour l’écouter. […]. Il est prévu un espace de recueil de la parole du demandeur qui signe le formulaire », même si certains redoutent justement la longueur de ce formulaire et sa lourdeur avec les pièces justificatives.

32Dans leur mise en place, les CASU n’offrent pas une vision très claire sur ce problème. Mais les partenaires qui travaillent dans la proximité, et notamment les CCAS, se montrent soucieux de conserver les principes de l’action sociale classique, à savoir la responsabilisation de l’usager, la prévention, son droit et la cohésion entre le projet individuel et le projet social. Avec la CASU les diagnostics prenant en compte la dimension globale des difficultés rencontrées par chaque individu risquent de disparaître au profit d’une démarche plus rapide, mais aussi plus limitée, réduite à une dimension administrative et technique. L’impression « d’un droit de tirage » est dénoncée. La dimension de l’accompagnement, du suivi, de la prévention, en un mot du lien social doit être préservée [19].

Entre l’urgence et le droit

33Répondre sur le mode de l’urgence à des situations de pauvreté chronique risque d’induire une pérennisation [20] des aides ponctuelles de court terme. Il semble en ce qui concerne la CASU, qu’il s’agisse davantage d’une surenchère de langage, la CASU, de toute évidence, ne se présentant pas dans les faits comme un dispositif pour répondre à l’urgence. Cette surenchère au niveau du langage n’est cependant pas sans effet au niveau conceptuel sur la manière d’envisager l’intervention publique à venir au niveau des populations en grande difficulté.

34Problématique déjà évoquée lors des Fonds d’urgence sociale, l’orientation de l’intervention sur le mode de l’urgence tend à développer une forme de solidarité nouvelle – ou plutôt un retour aux anciennes solidarités – qui se place en dehors de l’action sociale globale de droit commun. Au-delà du mode d’intervention, l’action sociale d’urgence pose la question du statut du bénéficiaire de l’action sociale.

La rationalisation de l’intervention sociale

35Une autre question de fond suscitée par la mise en place des commissions de l’action sociale d’urgence a trait à la visibilité des aides. Deux aspects sont à développer, d’une part celui qui touche à l’autonomie des politiques institutionnelles – les CAF, la MSA, les CCAS, les associations, etc. – et d’autre part, celui qui touche aux populations bénéficiaires.

« Les pauvres gagnent-ils à être connus ? »

36L’opacité si souvent reprochée, cette notion que chacun murmure dans les moments de complicité des conversations, voire, quelquefois – rarement – en allant jusqu’à évoquer le « clientélisme », cette notion doit être évaluée avec précaution. La transparence totale, à supposer qu’on puisse l’atteindre, est-elle souhaitable, et si oui, au bénéfice de qui ? L’opacité n’est pas seulement au bénéfice de ceux qui appliquent des règles ou leurs règles ou prennent des libertés – légitimes – avec les règles. Ne faut-il pas envisager sereinement qu’une certaine opacité demeure, prix à payer pour sauvegarder quelques marges de liberté pour les personnes, marges qu’il faudrait peut-être regarder de très près avant d’évoquer la fraude. Il ne s’agit pas d’institutionnaliser la fraude, après tout elle ne serait que la juste contrepartie d’un système purement discrétionnaire [21] mais de tendre à un système équilibré où les règles gagneraient en clarté dès lors qu’elles reconquerraient, dans leur application, des marges d’interprétation mais qui seraient cette fois elles-mêmes légalement définies.

37La connaissance, et en quelque sorte, la mise à plat de l’ensemble des aides, risquent pour certains établissements d’induire une nouvelle manière d’inventorier leurs aides, voire même de recenser tout court leurs aides. On pense ici en particulier au secteur associatif. Une personne de la direction départementale des Affaires sanitaires et sociales faisait remarquer que les associations « ne prévoient pas forcément de tenir une comptabilité analytique de leurs aides ». Soulignons ici l’importance de cette remarque derrière laquelle s’affiche le souhait d’une plus grande visibilité des aides établie cependant non plus à partir d’une clarification des procédures, mais de leurs postes d’affectation – énergie, eau, téléphone, logement… Cette démarche, qui s’inscrit donc dans une logique privilégiant le besoin des usagers, risque toutefois là encore d’introduire de nouvelles rigidités dans l’attribution des aides.

Une remise en cause de l’autonomie des politiques institutionnelles locales

38La mise en place des CASU a soulevé de nombreux enjeux politiques, institutionnels, mais aussi professionnels. Les centres communaux d’action sociale se sont sentis les plus menacés dans ce dispositif. Déjà sensibilisés avec la couverture maladie universelle, qui les prive d’un mode d’entrée privilégié des publics en grande difficulté, les CCAS voient dans la démarche de la CASU une nouvelle ingérence de la part de l’État. Le sentiment par ailleurs d’être tenus à l’écart pour certains, en raison même de la diversité et donc de la complexité de leur fonctionnement renforce ce sentiment.

39Les travailleurs sociaux regardent également la CASU avec une certaine méfiance : la volonté ou la pression que l’on peut constater dans certaines commissions locales d’orienter les démarches vers un accompagnement social, vient empiéter sur leur champ d’action et leur autonomie de décision et de choix.
Il existe une tension entre la définition légale d’un droit et les déclinaisons locales de l’application du droit. Dans son ensemble, depuis 1953, l’aide sociale évolue vers un régime de droit – l’aide sociale légale. Les FUS ont suffisamment été ressentis à cet égard comme un retour en arrière. Cela dit, l’efficacité dans la distribution des secours [22] n’implique t-elle pas des modalités d’application des règles qui s’éloignent d’un traitement administratif – bureaucratique ? – de la règle de droit [23]. Notons que dans cet interstice, qui est souvent une véritable béance, gît en grande partie toute l’existence du travail social qui est pour une grande part le lieu d’ajustement entre la règle et l’individu ou la situation à laquelle elle s’applique (la question des circonstances, des exceptions, de 1’« humain » etc.). C’est bien sûr une discussion immense qui est à nouveau ouverte : droit individuel/droit subjectif, droit à l’insertion, logique de besoin, interprétation locale de règles de droit dans des marges définies nationalement etc.

Révolution ou aggiornamento ?

40On est frappé par le fait que les questions qui surgissent sont au fond de très vieilles questions : lisibilité des aides, accès aux droits, coordination des acteurs, rapidité de traitement des demandes, existence de situations insolubles (mistigris), maquis législatifs…

41Tout se passe comme si, non seulement il n’y avait rien de nouveau (beaucoup reconnaissent quand même que la mise en place des CASU départementales a amélioré leur connaissance tant des systèmes d’aides existants que des institutions et des personnes qui les mettent en œuvre), mais surtout l’impression qui domine est que le système n’est pas au seuil d’une évolution rapide.

La coordination des systèmes d’aide sociale : un thème récurrent des politiques sociales

42L’objectif principal visé par la CASU est celui d’une coordination entre les différents dispositifs d’aide sociale. Il faut rappeler ici que cette volonté politique n’est pas nouvelle. En 1959, un décret avait déjà porté sur la coordination des services sociaux [24]. Ce décret instituait la création d’un comité de liaison et de coordination chargé d’établir un règlement et de préciser la répartition des tâches entre les services sociaux du département. Il était composé en majorité des mêmes membres que ceux que l’on retrouve dans la CASU – le préfet qui préside ce comité, le président du conseil général, l’Association départementale des maires de France, un représentant des caisses de sécurité sociales et des caisses d’allocation familiales…–

43On assiste donc plutôt à un nouvel épisode de l’histoire de la diaspora de l’aide sociale, qui semble s’être accrue depuis la décentralisation.
Si l’on accorde quelque crédit à la formule qui énonce que « le réel est ce qui revient toujours à la même place », il faudrait donc s’attacher à déceler les mécanismes qui au sein de l’aide sociale contribuent à construire les problèmes auxquels se heurtent aujourd’hui les CASU. Certains sont des héritages de l’histoire longue, d’autres sont peut-être liés à l’histoire plus récente et à des mouvements qui travaillent les politiques sociales.

Une démarche de long terme

44La volonté de coordonner l’ensemble des dispositifs d’aide sociale afin d’assurer au demandeur un meilleur accès à l’ensemble des droits et des aides auxquels il peut prétendre est repris par l’ensemble des partenaires sociaux. La CASU de ce point de vue est perçue comme un moyen de lutte contre les lourdeurs administratives et les dysfonctionnements qui peuvent résulter de la complexité de la législation en la matière. Cependant cette opération est une mesure de longue envergure, qui ne pourra aboutir que par des étapes progressives et le soutien constant et global de l’ensemble des acteurs du social. Le non-aboutissement du décret de 1959 en est une illustration.

Conclusion

45Sans revenir à la généalogie immédiate des CASU liée à l’épisode des Fonds d’urgence sociale, il faut resituer le contexte d’ensemble qui amène à la loi de 1998 et qui est travaillé par deux mouvements contradictoires : l’affirmation du droit d’un côté, et la volonté d’individualiser le droit, de l’autre. Ce mouvement n’est pas radicalement nouveau, mais il prend une acuité plus forte avec l’augmentation du chômage, la décentralisation et la genèse de politiques sociales pilotées localement, la création du revenu minimum d’insertion (RMI), la polarisation du débat social sur la notion d’exclusion et la montée en puissance de la catégorie d’insertion.

46À cela s’ajoutent deux éléments conjoncturels : la reprise économique et des politiques publiques qui desserrent la contrainte du chômage et ouvrent un nouvel horizon – peut-être temporaire et illusoire – vers le plein emploi et un retour à des politiques sociales « ordinaires », et aussi la création de la CMU qui change la donne également au niveau de l’aide sociale, puisque l’accès à l’aide médicale était une voie d’entrée importante dans les systèmes d’aide. Ce dernier élément semble jouer fortement sur les CCAS pour lesquels une partie de leur clientèle – la plus importante ? –, accède au guichet par le biais de l’aide médicale.

47L’ensemble de ces éléments ouvre donc une conjoncture nouvelle pour recalibrer les interventions des différents acteurs. Est-ce une occasion pour revisiter le multipilotage de l’action sociale, redéfinir les compétences ? Pour prolonger cette réflexion il faudrait tenir compte de la montée en puissance des villes et des communautés d’agglomérations comme échelon de gestion de certaines politiques publiques et notamment des politiques sociales.

48Face à ces enjeux, la définition des compétences des CASU semble décalée [25], et peut-être faussement ambitieuse.

49Mais au-delà des éléments de la conjoncture, la mise en place des CASU [26], remet au jour des problèmes de fond.

50On a déjà cité la distinction – a-t-elle un sens ? – entre aide sociale et action sociale et les questions de pilotage de l’une et de l’autre ou des deux confondues.
Les CASU deviendront-elles un énième lieu de discussion sur des situations irrésolues, du fait que les règles qui permettraient leur résolution n’existent pas, d’où leur aspect récurrent dans l’histoire de l’aide sociale, ou l’instrument – l’un des instruments – qui permettrait les réglages du droit et les pilotages territoriaux des politiques sociales ? Cela échappe à leur définition. Mais si c’est en amont de ces commissions que le problème peut se résoudre, elles peuvent peut-être contribuer à définir le cadre dans lequel cette résolution doit être recherchée.

Notes

  • [1]
    Cet article s’appuie sur un rapport réalisé par Michel Autès, Bernadette Délaval et Sergine Vaubourgeix (équipe IFRESI – LILLE) portant sur la mise en place des CASU dans le Nord et dans le Pas-de-Calais pour le ministère de l’Emploi et de la Solidarité, mai 2000.
  • [2]
    Laboratoire CLERSE, IFRESI, CNRS.
  • [3]
    Laboratoire CLERSE, IFRESI, CNRS.
  • [4]
    Circulaire MES/CAB/98-005 n° 98-537 du 30 juillet 1998 relative au développement du Fonds et des missions d’urgence sociale. Mise en place des Commissions de l’action sociale d’urgence et d’une mise en réseau des points d’accueil des différents organismes (non parue au Journal officiel).
  • [5]
    Le terme de « lieu » a été préféré à celui de « guichet ».
  • [6]
    À l’époque de notre enquête, la situation était très évolutive. Les chiffres que nous rapportons ici ont donc pu varier depuis.
  • [7]
    Un partenaire fait remarquer : « Chacun connaît ses pauvres ».
  • [8]
    Un arrêté récent du 10 mai 2000 – cf. JO du 16 mai 2000 – prévoit une réduction tarifaire pour les titulaires de minima sociaux de leur facture téléphonique afin de permettre l’accès ou le maintien d’une fourniture minimale de téléphone.
  • [9]
    L’ARCAF, Association régionale des caisses d’allocations familiales, est une association de coordination des huit CAF du Nord.
  • [10]
    Pour la CASUL de Dunkerque.
  • [11]
    Par exemple, à la CLASU de Boulogne-sur-Mer, sur les onze membres on y compte cinq représentants du conseil général : le responsable de l’UTASS, le chef du service social, le chef de service ASE, le chef du service insertion et le contrôleur aux aides sociales.
  • [12]
    Cf. infra : « La coordination des systèmes d’aide sociale : un thème récurrent des politiques sociales ».
  • [13]
    Sur les huit CAF du département du Nord, quatre se sont présentées comme lieu d’accueil polyvalent, et trois ont refusé. Mais ce chiffre peut encore évoluer.
  • [14]
    Mieux connaître les publics, les problèmes et Us pratiques révélés par la mise en place des Fonds d’urgence sociale en France, 1999, rapport au ministère de l’Emploi et de la Solidarité sous la coordination de Denis Bouget, rapport de synthèse, p. 100.
  • [15]
    Circulaire MES/CAB/98-005 n° 98-537 du 30 juillet.
  • [16]
    Secours exceptionnels ou prestations d’action sociale comme on dit dans les CAF ?
  • [17]
    L’utilisation du terme « aide sociale » n’est pas à prendre dans son sens restrictif d’aide monétaire. On note d’ailleurs que dans la circulaire, – le terme « d’allocation d’aide sociale obligatoire » est utilisé une fois – que le terme « d’aide » est très souvent utilisé : « aide d’urgence », « dispositifs d’aide et de secours », « divers systèmes d’aide existants ». Pour notre part, on entend par « aide sociale », une prestation d’ordre monétaire, donc une distribution de secours financiers. Par « action sociale », le champ considéré est plus vaste : il ne s’agit pas uniquement d’une allocation monétaire, mais d’une action collective, sous forme de mise à disposition d’un service, ou d’accès à des équipements, ou encore d’actions de prévention.
  • [18]
    Discours d’un partenaire interviewé.
  • [19]
    Cf. Monique Sassier, « Urgence sociale, de la réalité au mythe », Actualités sociales hebdomadaires, n° 2052, 2 janvier 1998, p. 19-21.
  • [20]
    La circulaire relative au développement du Fonds et des missions d’urgence, commence ainsi : « La présente circulaire a pour objet d’assurer la pérennité de l’action menée depuis le début d’année dans le cadre du Fonds et des missions d’urgence sociale. »
  • [21]
    Et quel sens cela aurait-il alors de parler de fraude ?
  • [22]
    On entend ici par efficacité la rapidité qui est souvent le vrai sens de l’urgence.
  • [23]
    On rejoint ici la tension entre præcor et quæstio, c’est-à-dire le droit précaire d’un côté, soumis à appréciation et donné et enlevé par la parole ou par la prière, et d’un autre côté le droit donné par l’enquête, un droit créance.
  • [24]
    Décret n° 59-146 du 7 janvier 1959 relatif à la liaison et à la coordination des services sociaux.
  • [25]
    Est-il suffisant d’évoquer les aides sociales et opportun de mettre en avant la notion d’urgence ?
  • [26]
    Encore faut-il rappeler ici que l’on observe leur mise en place et les négociations auxquelles celle-ci donne lieu et non pas leur fonctionnement de croisière.
Français

Résumé

L’installation des commissions de l’action sociale d’urgence dans les deux sites du Nord et du Pas-de-Calais offre une modélisation différente de ce que peuvent être les CASU – dispositif de coordination ou dispositif de distribution – et soulève la question récurrente des enjeux institutionnels et politiques pour chacun des acteurs du social. Accueilli favorablement dans le Nord par les partenaires départementaux et mis en place rapidement dans un souci de respect rigoureux des instructions ministérielles, le dispositif CASU a fait l’objet dans le Pas-de-Calais d’une plus grande réserve. Mais, quel que soit le déroulement de la mise en œuvre de ce dispositif, dix-huit mois après la parution de la circulaire, le fonctionnement des CASU dans les deux sites enquêtés n’est pas encore véritablement opérationnel. La déclinaison au niveau local, notamment, rencontre beaucoup d’écueils. Ce dernier épisode, que constituent les CASU, dans la longue histoire de la coordination des dispositifs d’aide montre une nouvelle fois que la coordination nécessite au préalable de nombreux consensus et accords sur le domaine d’action dans lequel on entend agir et sur la manière d’intervenir. La coordination ne paraît possible qu’au prix d’une rationalisation des aides et des démarches qui risque en dernier recours d’agir au détriment des principaux bénéficiaires de l’intervention sociale.

Sergine Vaubourgeix [2]
Laboratoire CLERSE, IFRESI, CNRS.
  • [2]
    Laboratoire CLERSE, IFRESI, CNRS.
Michel Autès [3]
Laboratoire CLERSE, IFRESI, CNRS.
  • [3]
    Laboratoire CLERSE, IFRESI, CNRS.
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/06/2010
https://doi.org/10.3917/rfas.011.0217
Pour citer cet article
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