CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 – Introduction [1]

1Étudier la sexualité sous l’angle socio-économique est une démarche difficile, et c’est sans doute ce qui explique qu’elle n’est pas si courante. Comme le montre, par exemple, la consultation des anciens numéros de la Revue française de socio-économie, seul un article a abordé à ce jour la sexualité, sans d’ailleurs que l’objet soit le cœur de l’analyse. Dans l’article qui est consacré au traitement par Pôle emploi des petites annonces à destination des acteurs et des figurants, l’auteur montre que les scènes de nus font systématiquement l’objet d’un traitement particulier de la part des fonctionnaires de l’agence pour l’emploi [Sigalo Santos, 2014]. Quoique légales, ces annonces sont mises à part dans un fichier spécifique et systématiquement vérifiées par le service juridique. Luc Sigalo Santos observe que ces offres, qui sont nombreuses, « ne font presque jamais l’objet d’une publicité large de la part des conseillers, qui préfèrent s’adresser directement aux figurants expérimentés en la matière » [Sigalo Santos, 2014, p. 24]. Pôle emploi craint en effet les critiques politiques et médiatiques qui pourraient accompagner la publication de ces offres, ce qui est significatif du statut particulier qu’occupent les activités sexuelles dans le monde socio-économique.

2Politiquement et moralement contestées, mais aussi invisibilisées, les activités ayant trait à la sexualité posent problème [Lieber et al., 2010]. Elles peinent à être considérées comme des activités économiques légitimes, y compris d’un point de vue scientifique. Viviana Zelizer [2005] note à ce titre que la sociologie économique a longtemps privilégié l’étude des « vrais marchés », au détriment d’autres formes économiques « contestées » [Steiner et Trespeuch, 2014], qu’elles soient informelles, domestiques ou touchant à l’intimité. Il convient dès lors de penser pleinement l’articulation entre sexualité et économie, en dépassant les antagonismes traditionnels entre ces « mondes hostiles ».

3Étudier la dimension socio-économique des activités sexuelles est d’autant plus utile que celle-ci occupe généralement une place marginale dans les travaux en sciences sociales sur la sexualité, comme le montre par exemple la lecture des textes classiques que sont L’esclavage sexuel de la femme de la sociologue Kathleen Barry [1982], Le contrat sexuel de la politiste Carole Pateman [2010] et « Le marché aux femmes » de l’anthropologue Gayle Rubin [2011]. Ces trois recherches, traduites de l’anglais, abordent la sexualité sous l’angle du consentement, du contrat, du rapport au travail et de l’esclavage, en prenant la prostitution comme analyseur. Elles éclairent la dimension politique des rapports sociaux de sexe, mais accordent relativement peu de place aux conditions socio-économiques de production, de commercialisation et de consommation des services sexuels. C’est plus généralement vrai des nombreuses recherches sur la sexualité, notamment consacrées à l’« industrie pornographique » ou aux « marchés de la rencontre », qui utilisent les mots « économie » et « marché » comme des synonymes et ont souvent un usage très libre, voire métaphorique, de notions centrales telles que celles de valeur ou de prix[2]. L’analyse des activités sexuelles contre compensation gagne ainsi à s’enrichir des apports de la (nouvelle) sociologie économique, et plus spécifiquement de la littérature sur les marchés [Steiner, 2005 ; Dauter, Fligstein, 2007].

4Penser ainsi les économies de la sexualité permet d’éviter une analyse économicisante ou de rapporter les pratiques sexuelles à des comportements « rationnels » [Becker, 1991]. La sexualité humaine s’inscrit dans des structures sociales qui cadrent les pratiques et les représentations [Bozon et Leridon, 1993] et dans un ensemble d’engagements affectifs et sentimentaux. Il convient donc de l’envisager comme un objet autant économique que moral, politique, culturel ou symbolique, c’est-à-dire comme un « phénomène social total » [Balandier, 1984]. Une telle approche permet de produire des théories alternatives à celles qui naturalisent les pratiques sexuelles en les rapportant à des pulsions individuelles ou à des préférences universellement partagées, comme le font parfois les biologistes, les médecins et les psychanalystes, mais aussi certains sociologues et économistes. Privilégier une entrée socio-économique de la sexualité permet de contester la vision d’un individu flottant dans l’espace social et de proposer un cadre d’interprétation alternatif plus « réaliste ».

5Ce dossier de la RFSE comporte quatre articles de recherche rédigés à partir d’enquêtes empiriques originales et portant sur des réalités aussi variées que les agences matrimoniales au tournant des XIXe et XXe siècles (Claire-Lise Gaillard), l’escorting d’hommes à destination d’hommes en France (Vincent Rubio), les « bienfaiteurs » au Burundi (Anne-Claire Courtois) ou encore les « female sex workers » au Vanuatu (Alice Servy) ; et un autre visant à appréhender de façon plus théorique la question du genre (Mathieu Trachman). Il comporte aussi une note et synthèse de recherche portant sur l’intérêt de la sociologie économique pour l’étude de la sexualité (Michel Bozon) et un débat et controverse sur la thématique des « économies numériques de la sexualité » où, à partir d’une réflexion sur les sites web et réseaux sociaux pour adultes, Marie Bergström, Catherine Deschamps et Philippe Steiner nourrissent le débat actuel sur le « capitalisme de plateforme » [Srnicek, 2018], ses algorithmes et ses acteurs sociaux. Le dossier se clôt enfin par un entretien avec Susanna Paasonen, Kylie Jarrett et Ben Light sur la question des politiques de modération des grandes plateformes numériques vis-à-vis des contenus pornographiques (Florian Vörös).

6Les questionnements des contributeurs et contributrices de ce numéro, issus majoritairement d’autres traditions disciplinaires que la socio-économie, éclairent sous un nouveau jour des thèmes classiques comme le travail, l’argent, le marché et l’organisation, et en révèlent certains impensés. Ils contribuent par leurs réflexions à sortir la sexualité de son exceptionnalité. Le fait même de publier ce numéro dans une revue généraliste telle que la RFSE, non spécialisée dans le genre ou la sexualité, participe aussi de ce mouvement de décloisonnement.

7La suite de cette introduction est organisée en trois sections. Les catégories « travail », « argent et marché » et « organisation » sont successivement mobilisées pour questionner les apports et limites des recherches en sciences sociales sur la sexualité et montrer en quoi les articles réunis dans ce numéro enrichissent le débat sur les économies de la sexualité.

2 – Le travail sexuel : une pensée de l’émancipation et de la domination

8Pour comprendre les rapports complexes entre économie et sexualité et, plus particulièrement, pour aborder la question du travail sexuel, on peut revenir sur les nombreux débats autour de la prostitution [Mathieu, 2015, 2016]. Rétrospectivement, les recherches sur le sujet peuvent schématiquement se classer en deux camps opposés [Bernstein, 1999]. Le premier camp, réunissant différentes approches dites « abolitionnistes », appuie ses réflexions sur ce que l’on peut appeler le « paradigme de l’oppression » [Weitzer, 2012]. Ces travaux réduisent la prostitution à l’exploitation du corps des femmes dans un contexte patriarcal, voire l’envisagent comme un esclavage sexuel incompatible avec la dignité humaine et avec l’idée même de travail. L’activité doit à ce titre être interdite ou strictement contrôlée au nom de la protection des prostituées, vues comme des victimes. Le second camp considère la prostitution comme potentiellement émancipatoire, et comme une forme de « travail du sexe » ou de « travail sexuel » [Merteuil et Schaffauser, 2017]. Sans nier les formes de discriminations et d’oppressions, ces recherches et réflexions qui portent à la fois sur les femmes et les hommes soulignent l’agentivité des « travailleuses et travailleurs du sexe ». Elles plaident en faveur d’une décriminalisation et d’une reconnaissance de l’activité comme un travail à part entière [Simonin, 2016].

9Une partie des approches féministes insiste sur les contraintes économiques et sur la violence pour expliquer l’entrée des femmes dans le travail sexuel. La sexualité vénale résulterait de la place subordonnée des femmes dans le salariat, et des contraintes économiques qui pèsent sur elles. La faiblesse des opportunités professionnelles favoriserait l’entrée dans des activités « déviantes » comme la prostitution. Ces explications s’accompagnent souvent de l’idée sous-jacente, défendue également par certains sociologues, que « les pratiques sexuelles ne sont pas des pratiques comme les autres » [Lahire, 2016, p. 77]. Dans ce numéro, l’article « Dépendance et intimité. Les dimensions non marchandes du commerce de la sexualité » de Mathieu Trachman rappelle cependant que l’analyse féministe ne se réduit pas à ces questionnements. S’appuyant sur les recherches de Sonia Dayan-Herzbrun [1982], et notamment sur le concept de dépendance affective, puis revisitant la sociologie des transactions intimes de Viviana Zelizer, le sociologue appelle à saisir la manière dont chacun et chacune définit ce qu’il ou elle met de soi dans les relations, de manière à décrire la diversité des arrangements possibles au croisement de l’économie et de l’intime.

10Qu’il s’agisse de créer du lien ou de gagner de l’argent, la sexualité s’inscrit dans des logiques intimes et amoureuses qui elles-mêmes résultent de négociations et d’un travail relationnel. Une telle lecture permet de dépasser l’opposition classique entre « oppression » et « émancipation », ce qu’illustre bien Alice Servy dans ce dossier, par son article « Female sex worker : circulation et impact d’une catégorie de santé publique au Vanuatu ». Tout en considérant les rapports économiques, de sexe, de classe, de génération et de nationalité, l’auteure insiste sur l’éventail de situations prostitutionnelles. Il convient ainsi de considérer, à la suite de Gail Pheterson que « les femmes peuvent à certains moments être victimisées dans leur quête d’une plus grande agentivité et à d’autres moments obligées de prendre des initiatives transgressives dans leur tentative d’échapper à la contrainte » [Pheterson, 2001, p. 27], et que la prostitution peut jouer un rôle dans ces trajectoires de vie.

11Les controverses sur la prostitution, au cœur des sex wars angloétasuniennes des années 1980, se sont étendues dans les décennies suivantes à d’autres formes de travail sexuel, et en particulier aux conditions de travail et d’emploi des personnes engagées dans l’industrie pornographique [Dworkin, 1981 ; Trachman, 2013]. Les approches par le « travail émotionnel » [Hochschild, 2017] ont quant à elles contribué à rendre visibles les processus d’apprentissage, les techniques du corps [Mauss, 1950], mais aussi les difficultés émotionnelles et les plaisirs des acteurs et actrices de ces marchés.

12Les activités de travail impliquant une dimension sexuelle sont souvent éprouvantes physiquement et émotionnellement [Sanders, 2004], et font l’objet de revenus fluctuants. Les carrières sont souvent courtes et les reconversions d’autant plus difficiles que les trajectoires professionnelles sont généralement marquées par un éloignement du salariat et des protections sociales qui lui sont associées. Ces difficultés sont parfois accentuées par les politiques publiques qui poussent les personnes déjà précaires à prendre des risques – comme le non-port du préservatif – pour maintenir leurs revenus [Le Bail et Giametta, 2018]. Le travail du sexe permet en même temps, pour certaines personnes, d’avoir accès à une rémunération plus élevée que celle à laquelle elles peuvent prétendre pour des emplois dits « traditionnels » [Lieber et al., 2010]. Il permet également à certains et certaines de se découvrir, d’explorer leurs limites, comme le rapporte Élisabeth Bernstein à propos d’escorts qui se « se sentent “sexy”, “belles” et “puissantes” face aux éloges constants de leurs clients » [Bernstein, 2007, p. 100, notre traduction].

13De la lecture des recherches récentes en sciences sociales émergent trois questionnements, correspondant à autant d’axes à même d’améliorer la compréhension du fonctionnement des commerces et du travail de la sexualité. Le premier axe concerne la diversité des profils sociologiques des individus engagés dans le travail sexuel, et l’attention particulière accordée à l’âge, au sexe, à l’orientation sexuelle, à l’origine sociale et géographique, ainsi qu’aux capitaux des individus [voir par exemple : Bernstein, 2007 ; Gaissad, 2019 ; Jones, 2015 ; Lévy et Lieber, 2009]. La prise en compte de la diversité des profils sociologiques est particulièrement utile dès lors qu’il s’agit de saisir le travail sexuel à la lumière des parcours de vie et des trajectoires de migration [Agustín, 2007 ; Darley, 2007 : Roux, 2011], ou d’éclairer les conditions d’entrée et de sortie des activités [Pryen, 1999 ; Sanders, 2007].

14Le deuxième axe a trait aux économies de la sexualité, qu’il envisage comme des espaces relationnels [Mathieu, 2000] dans lesquels les pratiques de chaque individu dépendent du regard, des échanges et des comportements des autres : législateurs, proxénètes, policiers [Jakšić, 2016 ; Mainsant, 2014], clients et spectateurs [Sanders, Brents et Wakefield, 2020], acteurs associatifs et institutionnels, gestionnaires de plateformes pornographiques [Paasonen, Jarrett et Light, 2019], etc. Comme le note le sociologue nord-américain Ronald Weitzer [2009] dans un article synthétisant les dernières études sociologiques sur le « sexwork », certains groupes demeurent encore sous étudiés, comme les clients ou les manageurs.

15Un troisième ensemble d’analyses inscrit le travail dans les « géographies » spécifiques de chaque activité et contribue à dessiner une riche cartographie du travail et des commerces de la sexualité. Tandis que, au même titre que la prostitution de rue, les clubs de strip-tease [Bruckert, 2002 ; Chapkis, 2000] ont fait l’objet de nombreuses enquêtes, d’autres espaces ou activités ont été moins étudiés : c’est par exemple le cas de l’assistance sexuelle pour personnes handicapées [Brasseur, 2017], de l’animation érotique par messagerie [Stoian, 2009] ou du lap dance [Barton, 2006]. La question des lieux d’exercice et des conditions de recrutement est également une dimension essentielle de l’analyse du travail sexuel. Exercer sur la voie publique [Deschamps, 2006], par téléphone [Sala, 2010] dans les bois [Amaouche, 2010], en maison close [Brochier, 2005], chez le client [Bigot, 2009] ou sur le web [Rubio, 2013 ; Jones, 2020 ; Brasseur et Finez, 2019] a des effets déterminants sur la sécurité, le confort et les logiques de solidarité entre travailleuses et travailleurs, mais également sur les dynamiques de contrôle social des activités.

3 – L’encastrement de la sexualité marchande : affects, argent et intérêts

16Dans le domaine de la sexualité, l’argent n’est pas seulement un impensé, c’est aussi l’opérateur qui permet de tracer des frontières entre les pratiques légitimes et celles qui ne le sont pas. On oppose ainsi classiquement les relations prostitutionnelles, qui reposent sur un échange monétaire, et le mariage (et les relations de couple), assimilable à un contrat non monétaire. Cette opposition, qui permet de garantir « l’ordre familial et sexuel dominant », en stigmatisant les femmes qui tentent d’échapper à la norme du mariage hétérosexuel monogame [Fossé-Poliak, 1984, p. 264], est cependant superficielle dès lors que l’on considère le problème sous l’angle des conditions d’usage physique (sexuel et non sexuel) des femmes par les hommes. D’un côté, la prostitution consiste en une vente qui se limite à l’usage physique sexuel, même si cet usage « revêt des formes qui semblent éloignées du strict rapport sexuel, et présente des parentés avec les conduites de prestige, le maternage, etc. » [Guillaumin, 1978, p. 13]. De l’autre, le mariage « étend l’usage physique à toutes les formes possibles de cet usage, dont précisément et centralement (mais entre autres) le rapport sexuel » [ibid.].

17Le concept d’« échange économico-sexuel » de Paola Tabet permet de dépasser les oppositions basées sur l’argent et de questionner les formes de compensation, monétaires ou non, qui accompagnent les échanges sexuels. L’anthropologue rassemble dans une même catégorie « tous les actes, tous les rapports sexuels entre hommes et femmes, alors que les diverses sociétés les distinguent si fortement » [Tabet, 1987, p. 12]. Une telle démarche permet d’envisager les échanges sous l’angle d’un continuum. Pour saisir la place des femmes dans ces échanges, Tabet en envisage trois aspects. Le premier considère les « carrières conjugales » des femmes, c’est-à-dire les passages d’une forme de relation à l’autre pour une même personne. Le deuxième critère étudie les modalités de la relation : durée, place de la composante affective, existence d’avantages domestiques, etc. Le troisième critère se concentre sur la dimension économique de la relation : s’agit-il d’une relation de service ? Fait-elle l’objet d’une compensation sous forme de don ou d’un paiement ?

18Le cadre analytique de Tabet a montré sa pertinence pour analyser les formes de sexualité transactionnelle, en particulier lorsque les études l’enrichissent d’une perspective en termes de rapports sociaux d’âge, de classe, de sexualité, etc. [Broqua et Deschamps, 2014]. Anne-Claire Courtois, dans ce numéro, actualise ainsi l’analyse de ces relations ambiguës dans son article « Une ration contre un soir au cabaret : pratiques et représentations des “bienfaiteurs” et “sugar daddies” au Burundi ». L’analyse de l’auteure se centre sur les relations cachées qu’entretiennent de jeunes femmes « cheffes de ménages » socialement isolées, généralement à la suite d’une grossesse précoce et de l’expulsion du foyer paternel, avec des « bienfaiteurs ». Catégorie propre à la société burundaise, le « bienfaiteur » subvient aux besoins de première nécessité des femmes cheffes de ménage en échange de rapports sexuels occasionnels et de sorties dans des bars. La générosité théorique de ces hommes appartenant au voisinage ou aux cercles de la famille élargie peine cependant à cacher les rapports de genre et de séniorité qui traversent les échanges. La faiblesse de leurs dons rend impossible l’autonomisation des femmes et, partant, participe à la reproduction d’un système de domestication de la sexualité qui trouve son origine dans la période précoloniale.

19Quel type de relations entretiennent les personnes engagées dans des formes de sexualité transactionnelle ? Et la circulation d’argent implique-t-elle nécessairement des échanges froids et intéressés ? La mise en évidence de l’intrication des échanges marchands et non marchands, qui constitue un des apports importants de la sociologie économique [François, 2008], peine curieusement à être envisagée dès lors qu’il s’agit d’analyser les commerces de la sexualité. Dans un article consacré au « lien marchand » publié dans la Revue française de sociologie, Pascal Chantelat fait de la prostitution une forme paradigmatique de relation marchande, à la fois interindividuelle (car mettant en jeu des corps proches physiquement) et impersonnelle (car dénuée de toute forme de dimension affective entre les échangistes) [Chantelat, 2002, p. 533]. À l’appui de cet argumentaire, développé au détour d’une note de bas de page, aucune preuve empirique n’est apportée, la relation prostitutionnelle jouant le rôle de référent abstrait. De la même manière, Pierre Bourdieu, dans La domination masculine, considère l’amour vénal comme une « véritable contradiction dans les termes » [Bourdieu, 1998, p. 150]. D’un côté, « l’île enchantée de l’amour » appartiendrait à l’univers du désintéressement et protégerait le « corps sacré » des dangers du marché. De l’autre, le commerce et le travail seraient synonymes d’intérêt et de profit. La prostitution impliquerait nécessairement des « agents quelconques, c’est-à-dire indifférents et interchangeables », engagés dans des « transactions temporaires et purement instrumentales » [Bourdieu, 1998, p. 149], sans sentiments possibles.

20Les enquêtes dévoilent pourtant une réalité plus subtile, et montrent au contraire que les travailleuses et travailleurs du sexe ne sont pas des personnes interchangeables, et qu’elles et ils peuvent entretenir avec leurs clients des liens durables et personnalisées mêlant affects et intérêts [Mayer, 2013]. Le développement de l’escorting dans les années 1990 s’accompagne par exemple d’une transformation de la nature de ce type de relations [Bernstein, 2007]. Les escortgirls et escortboys, qui exercent leur activité dans des espaces privés, répondent à des demandes qui ne se réduisent pas à la satisfaction de « pulsions sexuelles ». En quête d’« authenticité limitée » (bounded authenticity), les clients orientent leurs choix en fonction des pratiques, des tarifs et des critères physiques des prostituées, mais également en fonction d’autres critères comme la possibilité de pouvoir discuter avant, pendant ou après l’acte sexuel, ou encore de partager un moment agréable [Bernstein, 2007]. Une partie des clients recherche également une relation intime et réciproque que la taxinomie profane appelle la GFE ou « girlfriend experience », script sexuel que l’on retrouve par ailleurs dans les shows pornographiques par webcam des « camgirls » et « camboys » [Brasseur et Finez, 2019].

21Comme le montre Vincent Rubio dans l’article qu’il publie dans ce numéro, « Les clients d’escortboys : les ambivalences d’une économie de la prostitution en ligne », le débordement de l’échange est l’un des risques auxquels les travailleuses et travailleurs du sexe sont confrontés. Pour vivre de leur activité, les escorts s’engagent dans une relation de complicité et donnent des preuves d’intimité, tout en gardant une distance suffisante pour éviter de trop s’attacher ou que leur partenaire ne tombe amoureux. La mise à distance est cependant rendue difficile par le fait que certains clients essaient d’infléchir la signification de la relation, par exemple en invisibilisant l’acte de paiement ou en effaçant la dimension monétaire de l’échange (acheter des cadeaux, inviter au restaurant, partir en voyage, etc.).

22À rebours des représentations du sens commun, dans l’univers de la prostitution aussi la figure de l’homo œconomicus apparaît comme un « monstre anthropologique » [Bourdieu, 1997, p. 61]. Les marchés de la sexualité ne sont pas, en effet, dans leur essence, différents des autres marchés ; et les mêmes outils peuvent être utilisés pour les analyser sociologiquement. C’est ce à quoi nous invite dans ce dossier Michel Bozon, par sa note et synthèse de recherche : « Qu’apporte une perspective socio- économique à la connaissance de la sexualité ? ». L’auteur montre comment les relations et les désirs sexuels sont travaillés par l’argent et les biens matériels, par les dispositifs de qualité sur les marchés et par les capitaux des individus. Fort de ces constats, il convient également d’interroger les conditions de genèse des dispositions économiques des individus impliqués dans l’échange.

23Une telle démarche permet de comprendre comment, au sein d’un même « marché sexuel », peuvent coexister une pluralité de conduites dans lesquelles la rationalité calculatrice occupe une place plus ou moins centrale. Pour saisir les mécanismes de coordination des offres et des demandes de services sexuels, la sociologie de la sexualité gagnerait également à s’emparer des questions et des propositions théoriques de la sociologie économique : notamment à propos des stratégies de positionnement des acteurs face à la concurrence [White, 2002], des dispositifs qui rendent possibles les agencements marchands [Callon, 2017], du travail d’évaluation/valorisation des biens et services échangés [Vatin, 2009], ou encore des logiques de détermination des prix [Beckert, 2011].

4 – Contestation, intermédiation et organisation des marchés de la sexualité

24Les réflexions sur les formes de sexualité transactionnelle laissent souvent dans l’ombre les situations dans lesquelles la production des services sexuels n’incombe pas uniquement à des individus, mais engage aussi des organisations. Quand la loi les y autorise et quand la demande existe, des entrepreneurs investissent au grand jour le domaine de la sexualité. La libéralisation des mœurs des années 1960-1970 s’accompagne ainsi du développement d’une industrie du cinéma pour adultes à destination d’un public gay [Escoffier, 2007] et hétérosexuel [Trachman, 2013]. Faire commerce du fantasme des consommateurs devient alors une affaire de professionnels, avec ses codes, ses normes et ses cultures. C’est dans le même mouvement qu’apparaissent des boutiques spécialisées dans la vente d’objets pornographiques [Coulmont, 2007]. Le développement de cette économie des sex-shops mobilise un ensemble d’acteurs qui participent à la production de l’offre : des fabricants d’accessoires, des distributeurs, des vendeurs, etc. Elle implique aussi d’autres acteurs qui régulent cette activité ou contestent sa moralité : des militantes féministes [Comella, 2017], des associations de riverains, des élus politiques, des policiers et des juges [Coulmont, 2014], etc. Bref, elle engage la société dans son ensemble, et notamment des représentants de la puissance publique qui, au nom de la protection des « publics faibles », met en place dès les années 1970 une surtaxation spéciale sur les films pornographiques [Trachman, 2014]. Une telle politique témoigne du rôle central de l’État dans l’organisation des marchés [Bourdieu, 1997]. À travers l’attribution d’aides (destinées par exemple aux biens culturels légitimes) et de pénalités (qui touchent les activités contestées, comme la pornographie), la puissance publique façonne politiquement et moralement les espaces marchands.

25La « contestation » [Steiner et Trespeuch, 2014] ne se restreint pas aux marchés de la pornographie, comme l’illustre l’article de Claire-Lise Gaillard « Des mariages à tout prix ? Genèse, contestation et régulation du marché de la rencontre (1840-1940) » dans ce numéro. L’auteure documente le développement des premières agences matrimoniales en France, et les critiques dont elles font l’objet. Ces entreprises spécialisées aident des clients (et dans une moindre mesure des clientes) à trouver leur partenaire, responsabilité qui incombait jusqu’alors à la communauté : familles, amis, connaissances, etc. En facilitant les rencontres, les « entremetteurs » permettent aux familles de garantir leur intérêt économique, tout en préservant l’intégrité morale des futurs époux qui n’ont pas à parler d’argent. Ce faisant, selon la rhétorique des agences, loin d’avilir le mariage, le développement d’un marché de l’intermédiation contribuerait au contraire à le préserver. Les propriétaires des agences matrimoniales sont donc à la fois des entrepreneurs économiques et des « entrepreneurs de morale économique » [Steiner et Trespeuch, 2014].

26Pendant longtemps minoritaire et dévalorisé [Bozon et Héran, 1988], le recours à des intermédiaires est devenu de plus en plus commun, notamment sous l’effet du développement du numérique. Les sites web de rencontres ont modifié les sociabilités amoureuses et sexuelles, notamment chez les plus jeunes. Leur usage a abouti à une « double privatisation de la rencontre » [Bergström, 2019, p. 206]. D’un côté, les relations s’autonomisent du contrôle des groupes de pairs (privatisation des comportements sexuels et amoureux), de l’autre, elles passent de plus en plus par des dispositifs numériques développés par des acteurs privés (privatisation économique). Le développement d’Internet a également des effets sur les marchés non numériques. Catherine Deschamps montre, dans le débat et controverse de ce dossier, que les sites web et applications de rencontres entrent en concurrence avec les espaces de sociabilité et de drague dits « traditionnels », notamment les bars gays et lesbiens qui, faute de clients, sont contraints de fermer.

27La démocratisation de l’accès à Internet a contribué à la prolifération des intermédiaires sur des marchés jusqu’ici relativement protégés. Comme le note Philippe Steiner dans le même débat et controverse, l’objectif de ces nouveaux acteurs marchands est de faciliter l’appariement des internautes, ce qui nécessite au préalable que chaque individu réalise un travail sur lui-même pour façonner ses caractéristiques personnelles et pour en faire des ressources valorisables et échangeables sur les plateformes. Un des exemples les plus probants est celui des applications de rencontres comme Tinder, mais des mécanismes similaires sont observables sur d’autres plateformes comme les « porntubes ». L’essor de ces nouveaux sites web, qui sur le modèle de YouTube diffusent gratuitement des vidéos réalisées à la fois par des « amateurs » et des « professionnels » [Mowlabocus, 2010], bouleverse la répartition de la valeur entre les différents protagonistes, et notamment entre producteurs et distributeurs de contenus. Parce que les plateformes d’intermédiation facilitent l’entrée sur le marché (il est possible, en quelques minutes, de créer un compte et de commencer à diffuser du contenu) et parce qu’elles promettent des gains importants aux internautes qui s’y investissent, elles s’assurent une production permanente de contenus par les « amateurs », véritable armée de réserve de l’industrie numérique.

28Le développement des plateformes pornographiques, qui a contribué à intensifier et à mondialiser la concurrence, a eu pour conséquence de dégrader les conditions de travail, d’emploi et de rémunération de ces travailleurs, souvent précarisés et aux marges de l’emploi. Tandis que quelques « stars » gagnent beaucoup d’argent, une grande masse d’individus travaille beaucoup, sans contrat de travail et sans garantie de rémunération décente [Velthuis et Van Doorn, 2020 ; Jones, 2020]. Les conclusions des enquêtes sur la pornographie numérique rejoignent celles des recherches récentes sur le capitalisme de plateforme [Srnicek, 2018], bien que ces dernières intègrent rarement les marchés de la sexualité et de l’intime dans leurs analyses.

29Pour terminer, on peut souligner deux tendances contradictoires qui traversent les espaces marchands de la sexualité. La première tendance est une tentative de normalisation des contenus et des activités valorisées par les plateformes numériques pour adultes. Les professionnels des marchés de la sexualité utilisent différents moyens (campagnes de publicité et interviews dans la presse généraliste, imitation de l’interface des sites web grand public, etc.) pour tenter d’euphémiser le caractère contestable des services qu’ils proposent. C’est ce que souligne Marie Bergström dans le débat et controverse de notre dossier, à propos des nouveaux entrepreneurs du sexe qui se présentent comme de simples « techniciens ». Cette banalisation est cependant contrariée. Elle fait l’objet de différentes formes de résistance de la part de l’État et des acteurs de l’économie, ce qui les pousse à diluer leurs activités sexuelles dans des groupes d’entreprises plus larges. Souvent basées dans des paradis fiscaux, ces entreprises se présentent sous des intitulés flous comme « digital entertainment company » ou « groupe spécialisé dans le développement et la valorisation d’audience ».

30La deuxième tendance, symétrique à la première, est une tentative de distinction des plateformes dites « mainstream », qui cherchent à se protéger de la « contamination » des contenus sexuels. Pour des raisons d’image, les revenus tirés de ces activités « sales » sont mis à distance, comme le montre l’interdiction des transferts monétaires issus de sites pornographiques par de nombreux services de paiement en ligne, et notamment PayPal. De la même manière, pour élargir leur marché, les géants du web sont en quête de respectabilité. Celle-ci passe paradoxalement par le recours en coulisse à des microtravailleurs précarisés ou à des prestataires confrontés à des contenus émotionnellement éprouvants [Casilli, 2019].

31L’analyse de Susanna Paasonen, Kylie Jarrett et Ben Light dans l’interview proposée dans ce numéro par Florian Vörös à propos du livre NSFW : Sex, Humor, and Risk in Social Media, interroge cependant la rationalité économique des politiques de modération de contenus. La récente décision du réseau social Tumblr d’interdire les images et vidéos à caractère pornographique, qui constituaient la majorité des contenus diffusés sur cette plateforme, a par exemple contribué à accélérer la chute de son cours de bourse. Ces stratégies de valorisation et dévalorisation des contenus pour adultes invitent ainsi à réfléchir à la manière dont les entrepreneurs du numérique peuvent s’enrichir à la fois avec et contre la sexualité. Gageons que les travaux futurs permettront d’enrichir l’analyse des socio-économies de la sexualité.

Notes

  • [1]
    Nous remercions Mathieu Trachman pour ses commentaires sur une première version de cette introduction.
  • [2]
    Pour un aperçu des travaux récents sur la question de la valeur, voir les deux numéros « Valeur et capitalisme », publiés dans la RFSE [Benquet et Sobel, 2019 ; Benquet, 2020].

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Pierre Brasseur
Université Grenoble Alpes, Institut de recherche et de documentation en économie de la santé – Pacte
Jean Finez
Université Grenoble Alpes, Pacte
Mis en ligne sur Cairn.info le 24/11/2020
https://doi.org/10.3917/rfse.025.0015
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