1Le salariat féminin joua un rôle important dans le développement industriel de l’Europe au XIXe siècle. Il fut pourtant décrié par les penseurs sociaux, philanthropes conservateurs, comme théoriciens socialistes. On y vit l’expression de la surexploitation ouvrière et un facteur de risque pour l’institution familiale. À la fin du XIXe siècle, le maintien au foyer de la femme apparaissait comme un indice d’aisance en milieu ouvrier, garantie d’une bonne tenue du ménage et d’une bonne éducation des enfants. Pendant la Première Guerre mondiale, les femmes furent massivement requises dans les usines, du fait de la mobilisation des hommes au front, mais leur nombre décrut dès le retour de la paix. Pourtant, ce fut dans l’entre-deux-guerres qu’on vit apparaître un nouveau modèle de salariat féminin, « bourgeois », celui-là, d’abord simplement pour les jeunes filles, puis pour les femmes mariées. Associé à la scolarisation croissante des filles, ce nouveau salariat fut vécu par les intéressées comme un instrument d’émancipation. C’est comme tel qu’il se généralisa progressivement après la Seconde Guerre mondiale dans toutes les couches de la société, ce qui contribua profondément à transformer la place des femmes, non seulement dans le monde du travail, mais aussi dans l’espace familial et dans la société dans son ensemble. Les combats féministes en Europe portent aujourd’hui sur l’égalisation des conditions salariales, l’uniformisation des carrières et des salaires, la question du « plafond de verre », celle de l’imposition d’un temps partiel non souhaité, mais non sur la condition salariale partagée entre hommes et femmes, devenue non seulement un fait massif, mais aussi une norme sociale admise et valorisée par la très grande majorité de la population.
2Au vu de cette histoire européenne, brièvement rappelée ci-dessus, l’observation des transformations en cours dans un pays comme le Maroc, où l’industrialisation et la salarisation qui s’ensuit sont beaucoup plus récentes, et où la condition de la femme est marquée par un autre sous-bassement culturel du fait notamment, mais pas uniquement, de la place culturelle et juridique qu’y occupe l’Islam, apparaît particulièrement intéressante. Deux ouvrages récents de Leila Bouasria et Chadia Arab apportent, à cet égard, de riches éclairages qui se complètent [1].
3Leila Bouasria, professeure à la Faculté des lettres et sciences humaines d’Ain Chock à Casablanca, présente, sous le titre Les ouvrières marocaines en mouvement, les résultats de ses enquêtes sur les ouvrières de l’industrie de la confection à Casablanca, qui avaient fait l’objet d’une thèse soutenue dans cette ville en 2010. Il s’agit d’enquêtes menées dans les années 2000, qui ont déjà fait l’objet de diverses publications sous forme d’articles. Ces enquêtes ne se sont pas déroulées dans les usines, mais dans l’espace familial. Elles n’ont pas porté sur le travail proprement dit, mais sur la reconfiguration des rapports de genre qui se produit quand les femmes disposent d’un revenu salarial régulier. Chadia Arab, chargée de recherches en géographie au CNRS, est quant à elle spécialiste de la migration marocaine en Europe, thème de la thèse qu’elle a soutenue en 2007 et qui a fait l’objet d’un premier livre en 2009 [2]. Son récent ouvrage porte sur l’immigration pendulaire de femmes marocaines dans la province andalouse de Huelva en Espagne pour le ramassage des fraises. Il s’appuie sur des enquêtes menées dans les années 2010. Chadia Arab a suivi ces ouvrières dans les exploitations agricoles en Espagne, mais aussi dans leur région d’origine au Maroc. En dépit de la différence des terrains – industriel dans la ville de Casablanca au Maroc ou agricole en Andalousie en Espagne –, de la date des enquêtes et des méthodes d’investigation, ces deux ouvrages conduisent à des réflexions convergentes sur le rôle majeur de l’accès au salariat dans l’émancipation des femmes marocaines en dépit, dans un cas comme dans l’autre, de conditions de travail pénibles et de situations d’emploi précaires.
4L’industrie de la confection fut la première à se développer au Maroc, dès les années 1970-1980, dans le sillage des premières « délocalisations » en Europe du Sud (Espagne, Portugal) et en Turquie. Elle a ensuite subi la concurrence d’industries à plus bas coût de main-d’œuvre dans les pays asiatiques (Bangladesh, Vietnam, etc.), ce qui a conduit à une certaine dégradation des conditions d’emploi (pression des donneurs d’ordre, sous-traitance en chaîne, sous-déclaration de main-d’œuvre, etc.). Ce secteur est aujourd’hui au Maroc entre les mains du patronat local, ce qui le différentie du secteur de l’automobile, qui s’est plus récemment développé dans la région de Tanger au sein de « zones franches », où les grandes entreprises d’équipementiers gèrent la main-d’œuvre selon des standards internationaux [3]. L’industrie de la confection utilise massivement de la main-d’œuvre féminine, jugée à la fois de plus grande dextérité, plus soigneuse et plus fiable.
5Si Leila Bouasria n’étudie pas les conditions de travail, ce qui en transparaît tout au long de son ouvrage en montre la dureté : horaires lourds (la durée légale du travail au Maroc est de 44 heures, mais la durée effective peut être plus élevée sans compensation salariale), couverture sociale pas forcément assurée en dépit de la loi, crainte permanente que l’usine ne ferme et qu’il ne soit pas possible de retrouver un emploi, enfin, salaires faibles (le salaire minimum mensuel marocain est aujourd’hui d’environ 260 euros). Il n’en est que plus frappant de noter que cette condition salariale, peu enviable eu égard aux standards européens, constitue pour ces femmes un puissant levier d’émancipation au sein de la cellule familiale. Leila Bouasria nous montre en effet qu’elles deviennent souvent les principales pourvoyeuses de ressources monétaires au sein du foyer, leur conjoint ne travaillant pas ou « bricolant » irrégulièrement.
6Il faut à cet égard rappeler une configuration particulière de la condition féminine en pays musulman : si les femmes ne sont pas supposées travailler à l’extérieur, la contrepartie en est que les hommes ont moralement la charge de l’entretien du foyer. Ainsi, quand les femmes bénéficient d’un revenu salarié, elles ne manquent pas de rappeler qu’il s’agit d’un revenu personnel. Si elles l’utilisent souvent, par nécessité, au profit de l’ensemble de la cellule familiale (avec une prédilection pour tout ce qui concerne l’entretien de la maison, l’élevage et l’éducation des enfants), elles ne manquent pas de faire savoir aux hommes que c’est parce qu’ils ne parviennent pas à tenir le rôle social que leur affecte la tradition. Elles peuvent aussi capitaliser pour elles-mêmes : investir dans un logement à leur seul nom ou s’acheter des bijoux, notamment. Les femmes perçoivent avec une grande acuité la tension de valeurs dans laquelle elles se trouvent vis-à-vis du travail salarié. Elles continuent à le caractériser par l’expression de tamara (travail-peine) par opposition aux tâches ménagères, lieu naturel d’accomplissement de la vocation féminine, mais sont pourtant parfaitement conscientes du pouvoir nouveau dans le couple que leur confère ce statut de pourvoyeuse de ressources monétaires. Leila Bousria nous montre les conflits familiaux que provoque cette configuration, mais aussi les ruses qui peuvent être utilisées pour maintenir en apparence la prééminence masculine. Ainsi du cas de cette femme qui glisse discrètement un billet à son époux pour qu’il puisse autoritairement l’envoyer faire des courses en présence de visiteurs. Il en est de même en ce qui concerne le partage des tâches domestiques quand les hommes accomplissent discrètement des tâches réputées féminines (cuisine, linge), du fait des contraintes salariales des femmes, mais que, hommes et femmes, craignent le regard porté sur ce non-respect de la répartition convenue des rôles sociaux par l’environnement (famille, voisinage).
7L’ouvrage de Leila Bouasria fournit une riche sociographie de ces ouvrières casablancaises, surtout dans la première partie consacrée aux « modalités de répartition de l’argent dans le couple » où la sociologie économique de Viviana Zelizer est convoquée à juste titre [4]. Dans cette société où le mariage relève encore souvent d’une démarche explicite de composition d’intérêts, où il est perçu, négocié et rétrospectivement jugé comme tel, la logique des « transactions intimes » de la sociologue américaine s’applique particulièrement bien. La seconde partie sur la répartition des tâches dans le couple et la troisième sur la conflictualité sont moins documentées. On regrettera toutefois que les choses soient vues exclusivement à travers le regard féminin. Sans doute, dans le contexte marocain, était-il difficile à une chercheuse de faire parler de façon symétrique les hommes et les femmes. Mais on est parfois gêné par des caractérisations des représentations et comportements masculins à partir du seul discours féminin, même si ces femmes se révèlent souvent d’excellentes sociologues. L’ouvrage est par ailleurs souvent inutilement alourdi par des références appuyées aux travaux français sur la sociologie de la famille et des rapports sociaux de sexe, comme si des exemples extraits de la littérature française pouvaient fortifier les conclusions tirées des enquêtes marocaines en dépit des différences de contexte. On est étonné par exemple quand l’autrice souligne, en s’appuyant sur Dominique Méda, que « les hommes sont structurés de façon quasi exclusive par le travail… », alors que toute son étude montre que, précisément, ce n’est pas le cas au Maroc, en tout cas si on pense le travail sous le registre du salariat, dont les hommes sont souvent plus éloignés que les femmes.
8Sous le registre de l’écriture, l’ouvrage de Chadia Arab se lit plus facilement. Moins volumineux, d’une rédaction plus fluide, en dépit de redondances qui auraient facilement pu être corrigées et de certaines imprécisions sur la conduite de l’enquête [5], il se présente comme une enquête monographique multi-située, où la montée en généralité se fait discrète. Il n’en est que plus frappant que les conclusions de ces deux ouvrages convergent.
9L’enquête de Chadia Arab porte sur une configuration d’emploi très particulière qui apparaît à certains égards, en dépit (ou peut-être au contraire à cause) de ce qu’elle est plus récente, qu’elle se joue du côté septentrional de la Méditerranée et qu’elle se conforme formellement aux normes d’un droit européen du travail, plus violente socialement que celle des ouvrières non déclarées de la confection de Casablanca. Il s’agit en effet de l’emploi de femmes pratiquant une migration pendulaire saisonnière dans le cadre d’un accord conclu en 2005 entre la mairie socialiste de la petite ville de Cartaya et l’organisme public d’emploi marocain : l’Anapec. Cet accord, qui a bénéficié du soutien de l’Union européenne avait été jugé éthiquement exemplaire.
10La récolte de fraises, importante dans cette région, a, de longue date, mobilisé de la main-d’œuvre féminine étrangère. On a d’abord fait venir des femmes du Portugal proche, puis des Marocaines, mais aussi des Latino-Américaines et plus récemment des femmes d’Europe de l’Est, ainsi que des hommes du Mali. Le souci, politique, fut que cette migration saisonnière ne se traduise pas par une émigration clandestine. En 2002, avant les accords de 2005, le « taux de fuite » (c’est l’expression employée) des Marocaines était en effet, selon les statistiques officielles, de 90 % pour 500 contrats signés. Il a pu être ramené à 50 % en 2006 pour 1 800 contrats et à 4,5 % en 2008 pour 13 000 contrats. La crise de 2008 a ensuite réduit l’importation de main-d’œuvre marocaine, qui est passée de 17 000 à 6 000 contrats entre 2009 et 2010, puis aux environs de 2 000 au cours des années suivantes, ce qui a provoqué de l’amertume chez les femmes qui avaient accepté de rentrer au Maroc en échange de l’assurance de pouvoir retourner faire de nouvelles saisons en Espagne. Le mouvement a repris toutefois à partir de 2017 (environ 5 000 contrats), ce qui s’est traduit, sans que les chiffres aient été publiés, par une recrudescence des « évaporations » émanant de femmes qui se sont senties trahies par le fait de ne pas avoir été rappelées au cours des années précédentes et qui ont été tenté leur chance de régularisation en Espagne, voire en France. Le cap des 10 000 contrats est de nouveau franchi en 2018, année marquée par des scandales d’abus sexuels et de rapatriements forcés qui ont fait l’objet d’une large couverture de presse. L’Anapec organise actuellement les départs pour la saison 2019 avec un encadrement renforcé [6].
11La particularité de ces contrats, dits « en origine », est que, s’ils sont de droit espagnol (avec un salaire fixé au minimum espagnol), la main-d’œuvre est pré-recrutée à l’étranger et est soumise à l’obligation de quitter le pays dès la fin de la saison [7]. Après leur arrivée en Espagne, les femmes sont distribuées entre les employeurs en fonction de leurs besoins. Des « médiateurs » espagnols, en fait souvent eux-mêmes d’origine marocaine [8], ont été chargés de la gestion sur place de la main-d’œuvre. Leur fonction oscille entre contrôle politique et moral et travail social [9]. Un emploi constant n’est pas garanti aux femmes. Suivant le travail à accomplir, mais aussi les problèmes qui peuvent survenir, les personnes peuvent être réaffectées d’un employeur à l’autre, voire être renvoyées avant terme au Maroc. Pour être éligibles à ce programme, les femmes doivent être veuves ou divorcées et avoir des enfants de moins de quatorze ans. La préoccupation sociale (offrir des ressources aux plus nécessiteuses) ne cache pas l’objectif de garantie du retour régulier de ces femmes, dont les enfants sont, d’une certaine manière, « pris en otage ». Les « répétitrices » (celles qui ont déjà fait une saison et sont revenues) sont pour cette raison privilégiées. Par ailleurs, le pré-recrutement local au Maroc, assuré région par région et même village par village par l’Anapec et les autorités locales, permet aux pouvoirs marocains de le gérer conformément à ses propres préoccupations politiques.
12Mutatis mutandis, cette organisation ne peut manquer d’évoquer les formes de « salariat bridé » qui ont existé au XIXe siècle après la suppression de l’esclavage pour assurer un flux régulier de main-d’œuvre dans les colonies européennes, même s’il s’agit ici de durées d’« engagement » courtes [10]. Les récits suggestifs que fournit Chadia Arab des conditions de recrutement, de transport, de logement de ces femmes confirment cette impression. La plupart des recrutées sont des femmes de zones rurales retirées du Maroc, qui, pour la première fois, quittent leur environnement social, prennent la route et la mer (ce qui les terrorise) et se retrouvent en pays étranger, logées dans des conditions communautaires (8 par chambre) dans des baraquements parfois (pas toujours) insalubres.
13Pourtant, à raison, Chadia Arab, même si elle évoque une « immigration jetable », n’adopte pas une posture misérabiliste et montre le bénéfice que ces femmes tirent du dispositif. Le danger récurrent des enquêtes sur l’immigration est que l’on décrit la situation d’arrivée et ses conditions dégradées au regard de la norme du pays d’accueil, mais pas la situation de départ. L’ethnographie multi-située pratiquée par Chadia Arab lui permet d’éviter cet écueil. Elle ne sous-estime aucunement la violence sociale subie par ces femmes en Espagne : la pénibilité du travail, la culpabilité vis-à-vis des enfants abandonnés au Maroc, la dureté des conditions de vie dans la promiscuité, au moindre coût, pour ramener le plus de liquidités possible au Maroc, l’encadrement social policier humiliant (comme ces femmes à qui on impose le port d’un gilet jaune quand elles sortent de la propriété, censément pour les protéger sur la route, mais surtout pour contrôler les risques d’évasion), les abus parfois subis, même s’ils ne sont pas la norme… Mais la principale violence est bien au Maroc, dans ce qui a conduit ces femmes au départ. Sans époux (veuves, divorcées ou mères célibataires), elles ne subissent pas chez elles que la misère, mais souvent, aussi, l’opprobre social. Le départ en Espagne peut initialement renforcer ce jugement social négatif : elles sont de « mauvaises mères », elles partent se prostituer… mais le retour avec de l’argent leur permet de retrouver, non seulement de l’aisance, mais aussi de la considération. Elles équipent le foyer, font construire une maison, redeviennent des personnes respectables. Par ailleurs, en Espagne, elles peuvent faire de nouvelles expériences, s’habillent en jeans plutôt qu’en djellabah (plus commode pour travailler dans les champs), parfois rencontrent des hommes (Chadia Arab évoque notamment les cas de mariage avec des Maliens au mépris de la stigmatisation des sub-Sahariens au Maroc), parviennent parfois à s’installer en Europe. Ainsi, ces femmes, qu’elles optent pour un retour au Maroc ou pour l’émigration en Europe, trouvent, grâce à cette expérience salariale, une nouvelle dignité et une plus grande maîtrise de leur destin. On voit donc à l’œuvre chez les ramasseuses de fraises de Huelva, comme chez les ouvrières de la confection de Casablanca, le pouvoir social qui émane de l’argent du salariat.
14Karl Marx, connu pour être le théoricien de l’aliénation salariale, avait montré en son temps le pouvoir libérateur de cette institution fondée sur un principe de subordination impersonnelle et limitée. C’est pourquoi il avait insisté sur le progrès que constituait le salariat par rapport aux formes antérieures de subordination, qui sont quant à elles personnelles et totales. Dans son article « Travail salarié et capital », il soulignait en 1849 que « le travailleur [salarié] n’appartient pas à tel bourgeois ; il appartient à la classe des bourgeois » [11], ce qui lui permet de circuler à sa guise sur le marché du travail. Cent soixante-dix ans plus tard, il est étonnant de constater que l’approfondissement de la mondialisation du capital associée à la crainte migratoire génère encore des formes salariales où la mobilité est entravée. Certes, les dames des fraises ne sont pas la propriété d’un employeur en particulier, mais leur droit à circuler sur le marché du travail est très limité, dans le temps comme dans l’espace. Pourtant, l’accès au salariat reste pour elles, comme pour les ouvrières de la confection de Casablanca, émancipateur, par le double pouvoir que confère la monnaie : pouvoir marchand direct et pouvoir indirect, symbolique.
15Ces constats invitent à réfléchir sur la puissance du moteur social que constitue l’extension du capitalisme et de son institution connexe, le salariat. Il ne s’agit pas de porter des jugements de valeur. Les sociétés « traditionnelles », où des règles sociales limitent la poursuite de l’intérêt, ont leur grandeur et la généralisation des relations monétaire induit de nouvelles formes d’aliénation que nous connaissons bien. Mais on ne peut ni négliger les formes de violence sociale qui caractérisent les sociétés précapitalistes ni ignorer la dimension émancipatrice du salariat, notamment pour les populations féminines. Alimenté par ce puissant moteur, celui de l’expansion du capital et des opportunités salariales qu’elle génère, se poursuit aujourd’hui à l’échelle du globe un processus social qu’avaient analysé en leur temps, chacun à sa manière, les grands penseurs du XIXe siècle, Marx et Tocqueville, Durkheim et Simmel [12].
Notes
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[1]
Leila Bouasria, Les ouvrières marocaines en mouvement. Qui paye ? Qui fait le ménage ? Et qui décide ?, coll. « Mondes en mouvement », Paris, L’Harmattan, 2013, 330 p., bibliographie, préface de Mohamed Tozy.Chadia Arab, Dames de fraises, doigts de fée. Les invisibles de la migration saisonnière en Espagne, Casablanca, En toutes lettres, coll. « Enquêtes », 2018, 187 p. postface de Houria Alami Mchichi.
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[2]
Chadia Arab, La circulation migratoire des Marocains entre la France, l’Espagne et l’Italie, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2009.
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[3]
François Vatin, « Tanger en toutes franchises. Mondialisation, industrialisation et question sociale », Esprit, n° 5, 2016, p. 85-96.
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[4]
Viviana Zelizer, « Transactions intimes », Genèses, n° 42, 2001/1, p. 121-144.
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[5]
L’enquête a été menée entre 2008 et 2010 en Espagne avec des entretiens réalisés auprès d’ouvrières, d’employeurs et de médiateurs et une observation participante. Une enquête par questionnaire a été réalisée en 2102 dans la province de Ksar el Kéfir au Maroc auprès de 65 femmes ayant travaillé au Maroc. Des investigations ponctuelles réalisées en 2017 ont permis de réactualiser un certain nombre de données. Entre-temps, le programme avait connu des aléas en raison de la situation très dégradée de l’économie espagnole après la crise financière mondiale de 2008.
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[6]
Entretien de l’auteur, mené avec Alexandra Bidet et Gwenaële Rot, à l’Anapec (Tanger) en janvier 2019. L’auteur poursuit actuellement en collaboration avec Alexandra Bidet, Gwenaële Rot et Jean-Bernard Ouedraogo des enquêtes sur le développement du salariat dans la région de Tanger dans le cadre d’un financement de l’Agence nationale de la recherche (projet Endless, géré par le centre Maurice Halbwachs, ENS/Ehess sous la coordination d’Alexandra Bidet.
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[7]
Ce cadre juridique existe depuis 2000 ; voir Emmanuelle Hellio, « Importer des femmes pour exporter des fraises (Huelva) », Études rurales, n° 182, 2008, p. 185-200.
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[8]
Il faut citer ce cas de ce Marocain, lui-même ancien immigré clandestin, chargé de convaincre ces femmes de ne pas « fuguer ».
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[9]
Ces médiateurs étaient salariés par une association espagnole : la Futeh (Fundación para los trabajadores extranjeros en Huelva). Celle-ci a été dissoute en 2012 dans le contexte de la crise espagnole et les médiateurs ont été licenciés, ce qui se traduit selon Chadia Arab par une détérioration du dispositif. L’envoi prévu en 2019 par l’Anapec d’un encadrement marocain constitue probablement une réponse à ce problème.
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[10]
Yann Moulier-Boutang, De l’esclavage au salariat. Économie historique du salariat brisé, Presses universitaires de France, Paris, 1998.
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[11]
Karl Marx, « Travail salarié et capital » (1849), in Karl Marx, Œuvres, Économie, tome 1, Gallimard, Paris, 1965, p. 201-229 : p. 205.
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[12]
François Vatin, L’espérance-monde. Essai sur l’idée de progrès à l’heure de la mondialisation, Albin Michel, Paris, 2012.