CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 – Introduction

1La question de la rémunération des praticiens, particulièrement des médecins généralistes, a toujours été épineuse pour les pouvoirs publics. Le dernier conflit sérieux commencé en 2001 s’est traduit par la multiplication des jours de fermeture des cabinets. Il s’est définitivement terminé par un accord, en juin 2002, acceptant la hausse du tarif de consultation à 20 euros et du tarif de visite à 30 euros. L’accord a été signé par l’ensemble des organisations syndicales de médecins qui ont vu l’ensemble de leurs revendications financières satisfaites sans contreparties contraignantes pour leurs confrères. Toutefois, depuis cette date, il semblerait que les relations entre la tutelle et le corps médical évoluent vers l’essor de nouvelles formes de contractualisation.

2La situation actuelle doit être appréhendée avec une approche rétrospective. En effet, la relation médecin-patient, autrement appelée colloque singulier, est caractérisée depuis la loi fondatrice du 19 ventôse an XI (10 mars 1803) par une logique marchande assise sur le paiement à l’acte. Ce mode de rémunération se substitue, au début du xixe siècle, à une rémunération forfaitaire à l’année, notamment pour les classes aisées de la population [Grevet, 1976]. Le principe du libre choix du praticien par le patient s’appuie sur des notions de compétence, de savoir et d’expérience, en bref ce que l’un des initiateurs de la loi, Georges Cabanis, a appelé la « probité reconnue ». La valeur de l’acte correspond désormais à celle de la personne qui l’effectue, c’est-à-dire à la qualité socialement reconnue du producteur de soins. Ainsi, selon Michel Foucault [1963, p. 81], « à l’intérieur d’un libéralisme économique manifestement inspiré d’Adam Smith se définit une profession à la fois libérale et fermée ».

3Le paiement à l’acte constitue l’un des fondements indépassables du fonctionnement de cette profession. C’est l’élément le plus caractéristique de la médecine libérale, c’est également un point sensible qui suscite de vives réactions de la part des praticiens quand son existence est remise en cause. Il faut donc voir dans le paiement à l’acte un modèle, un point de convergence pour une grande partie de la profession médicale. Pourtant, toutes les études montrent que ce mode de rémunération est inefficace : il ne favorise pas la médecine préventive, ralentit le développement du partage des tâches et de la médecine de groupe, limite la coordination entre les médecines ambulatoire et hospitalière et reste une condition permissive aux dépassements d’honoraires [Askenazy et al., 2013].

4L’évolution du système de soins est marquée par une opposition dialectique entre marché et socialisation [2]. Historiquement, depuis 1803, plusieurs modes de régulation se sont succédé au sein du système de soins. Chacun d’entre eux est caractérisé par un degré d’opposition plus ou moins fort entre marché et socialisation. Jusqu’en 1980, le développement de la socialisation a accompagné l’essor du paiement à l’acte. Mais depuis 1980, un double mouvement se dessine. D’abord, une remise en cause de la socialisation est renforcée par un développement des mécanismes de copaiement (assurances complémentaires, reste-à-charge). Ensuite, la tutelle a favorisé l’essor de différents types d’incitations qui prennent la forme d’une rémunération à la performance. La remarchandisation de la santé a accéléré l’expérimentation de nouvelles formes de rémunération.

5Il est difficile de comprendre les évolutions en cours sans avoir recours à une lecture historique de la médecine. La profession s’est constituée autour de certains principes gravés dans le marbre en 1927 dans la Charte médicale (libre choix du médecin, respect du secret médical, droit aux honoraires, paiement direct et liberté de thérapeutique et de prescription). Paradoxalement, ces principes issus de la guérilla menée par les médecins contre les assurances sociales dans les années 1930 vont accompagner le développement de la socialisation de la médecine à partir des années 1960. Aujourd’hui, la socialisation recule progressivement et les pouvoirs publics tentent de mettre en place de nouvelles formes de rémunération qui vont à l’encontre de certains principes de la Charte (notamment la liberté de thérapeutique). La Charte serait-elle à géométrie variable ? Les praticiens seraient-ils ainsi prêts à abandonner certains principes pour maintenir leur niveau de revenu ?

6Nous organiserons notre propos en deux temps. Nous verrons d’abord, aussi paradoxal que cela puisse paraître, que le développement du paiement à l’acte a accompagné la socialisation de la santé (partie 2). Depuis les années 1980, la marchandisation de la santé est accompagnée par le développement d’une rémunération à la performance qui, d’un certain point de vue, va à l’encontre de certains principes de la Charte médicale (partie 3).

2 – Socialisation de la santé et développement du paiement à l’acte

7La question du mode de rémunération des médecins ne peut être analysée correctement sans avoir montré, préalablement, qu’elle s’intègre dans un processus de longue période. L’évolution est guidée par un mouvement d’opposition dialectique entre marché et socialisation. À chaque étape, ce mouvement se traduit par un gain supplémentaire de prise en charge socialisée. En d’autres termes, les individus sont mieux couverts que pendant la phase précédente. Ce mouvement a permis, aussi paradoxalement que cela puisse paraître, à la médecine libérale de voir le paiement à l’acte favorisé par la socialisation.

8Dans cette perspective, trois grands modes de régulation se dégagent nettement : le stade de la régulation concurrentielle (2.1), le stade de la régulation conventionnelle (2.2) et le stade de la régulation conventionnelle élargie (2.3), chacun étant marqué par un mode de régulation particulier. C’est au cours de cette longue période que le paiement à l’acte s’est développé.

2.1 – Paiement à l’acte et régulation concurrentielle (1803-1890)

9Après la période révolutionnaire, les systèmes professionnels et universitaires sont bouleversés. Il suffit d’une simple patente pour pouvoir exercer sa profession. L’absence de réglementation provoque un afflux de charlatans et autres guérisseurs dans le secteur sanitaire. La peur du développement d’une forme de brigandage médical [Léonard, 1981] incite les pouvoirs publics à intervenir. Deux projets s’opposent à ce sujet. Le premier, celui de Georges Cabanis, propose de sanctionner les études médicales par un examen permettant de sélectionner une élite médicale. Le second, imaginé par Antoine Fourcroy, préfère créer une profession nouvelle (les officiers de santé) afin de résorber la crise du système de soins.

10La solution préconisée assure un compromis entre l’idéal scientifique prôné par Georges Cabanis et l’éradication du charlatanisme demandée par Antoine Fourcroy. La loi du 19 ventôse an XI (10 mars 1803) pose le principe du diplôme médical : « Nul ne pourra embrasser la profession de médecin, de chirurgien ou d’officier de santé sans être examiné et reçu comme il sera prescrit par la présente loi [3]. » La législation établit de facto une hiérarchie entre deux professions : les médecins et les officiers de santé. Les premiers, munis d’un doctorat, ont pour fonction de soigner les élites du pays, alors que les seconds doivent assurer une mission de première urgence auprès des couches sociales les plus défavorisées. La séparation repose sur la formation initiale. Les officiers de santé ne reçoivent que des savoirs pratiques basés sur un « empirisme contrôlé : savoir faire après avoir vu » [Foucault, 1963, p. 82]. Il s’agit donc essentiellement d’une activité répétitive. Le médecin complète l’enseignement qu’il a reçu dans les écoles de santé par une connaissance fine et complexe, assise sur le regard « qui est en même temps savoir ». Il s’agit donc, comme le souligne Michel Foucault d’« un codage du champ d’objets » [ibid.] où la pratique est laissée aux officiers de santé et l’initiation clinique aux médecins.

11Le cadre institutionnel mis en place par la loi du 19 ventôse an XI s’appuie sur une relation marchande, privée et individuelle et propose une mise en concurrence des différents offreurs de soins (médecins et officiers de santé). La régulation professionnelle est absente et aucune règle déontologique n’est fixée pour limiter les effets de la concurrence entre praticiens. Ce fonctionnement nécessite une demande de santé effectivement solvable et s’articule autour du concept de paiement à l’acte. Cette situation est nouvelle à l’époque puisque, sous l’Ancien Régime, des praticiens étaient principalement rémunérés par des institutions collectives [Léonard, 1978]. Le système repose donc sur la négation des besoins de santé dans la mesure où la demande non solvable ne peut pas avoir accès aux soins.

12La sphère de soins des années 1803-1890 fonctionne autour d’une logique libérale à régulation concurrentielle. La prestation sanitaire offerte par un médecin ou un officier de santé repose sur le diplôme qui caractérise un niveau qualitatif et établit la reconnaissance sociale de la valeur d’usage de l’acte. La formation dispensée dans les facultés de médecine et dans les établissements hospitaliers est donc fondamentale dans la mesure où la valeur de l’acte repose sur elle. Dans cette perspective, le système s’articule selon Michel Foucault [1963, p. 82] autour d’une différenciation sociale de l’acte : « Conformément à l’ordre idéal du libéralisme économique, la pyramide des qualités correspond à la superposition des couches sociales. »

13En accueillant les classes sociales les plus défavorisées, les hôpitaux participent à la régulation du marché en prenant à leur charge la demande de soins non solvable. Les praticiens hospitaliers ne sont pas rémunérés pour cette fonction, ils assurent leur service de façon bénévole conformément à l’éthique médicale. Les établissements hospitaliers ont donc une « fonction sociale de redistribution des revenus » [Steudler, 1973, p. 111]. Le praticien hospitalier soigne gratuitement les plus démunis et se rémunère en faisant payer plus cher ses consultations privées : son statut de médecins des hôpitaux lui assure une compétence supérieure qui lui confère une valeur d’usage plus élevée. Il y a donc une réinjection d’argent privé dans une sphère non marchande [Domin, 2008, p. 106-113].

14Le système repose sur la négation des besoins sanitaires et sociaux dans la mesure où la demande non solvable ne peut avoir accès aux soins. Il prend appui sur une relation marchande, privée et individuelle où le prix de l’acte médical constitue un élément régulateur. Dans un système non régulé, toute perturbation se manifeste par une dépréciation du prix qui provoque en retour une tentative de régulation des effectifs médicaux. La chute des prix se fait sentir dès 1845-1846. En 1854, le docteur Guibert constate, dans le Courrier médical, une différence importante entre les régions à forte concurrence où le prix est de 20 centimes et les autres où le prix est de 50 centimes. Progressivement, la profession médicale va s’unifier autour d’une idée : la suppression de la profession d’officier de santé jugée responsable de la chute des tarifs.

15Cette idée commence à se développer au Congrès médical de 1845 et se manifeste dès 1854 par une première réforme de la profession. Elle permet une nette diminution des effectifs totaux (médecins et officiers de santé) qui passent de 18 000 en 1846 à 15 000 en 1872. En 1858, la création de l’Association générale de prévoyance et de secours mutuel des médecins de France (AGMF) marque une nouvelle étape. Elle réclame une révision de la loi de 1803 et une répression plus forte de l’exercice illégal de la médecine. En 1884, la naissance quasi clandestine de la première organisation syndicale professionnelle, l’Union générale des syndicats médicaux de France (UGSMF), accélère la mutation. Dès 1889, la loi rend inintéressant le choix des étudiants pour l’officiat en les obligeant à effectuer un service militaire de trois ans [Arliaud, 1987]. Enfin, la loi dite Chevandier, du 30 novembre 1892, supprime définitivement la profession en exigeant le diplôme de docteur en médecine pour l’exercice légal [Léonard, 1981]. Les médecins ont su faire jouer leurs relais politiques pour faire adopter la loi.

16Le système surmonte tant bien que mal cette première crise, mais il ne peut chercher à se développer durablement dans la mesure où il ne s’adresse qu’à une petite partie de la population. La crise économique qui se manifeste à partir de 1872 renforce le marasme. La chute des revenus médicaux reprend. Ainsi, selon le doyen Brouardel, elle atteint 65 % pour le dernier quart du xixe siècle [Darmon, 2003]. Les principes concurrentiels ne fonctionnent plus. Le marché ne peut enrayer la chute des honoraires dans la mesure où la demande est insuffisante en raison de l’insolvabilité de bon nombre de ménages. L’issue viendra justement de la demande : la crise démographique qui commence en 1890 incite les pouvoirs publics à transférer l’organisation du système de soins.

2.2 – Le stade de la régulation conventionnelle simple (1890-1945)

17À partir de la fin du xixe siècle, la situation sociale va progressivement évoluer. La longue phase de dépression et la stagnation démographique vont accélérer la mise en œuvre d’une politique sociale interventionniste. Une première phase se caractérise par la mise en œuvre de formes primaires de protection sociale (2.2.1) qui se concrétiseront après la Première Guerre mondiale par l’essor des assurances sociales (2.2.2).

2.2.1 – La mise en œuvre des premières formes de protection sociale (1890-1914)

18Les pouvoirs publics vont intervenir progressivement dans deux directions principales. La première se concrétise par le vote de lois d’assistance. Cette solution est tournée vers les personnes sans ressources et permet de leur rembourser intégralement les soins ou les séjours hospitaliers. La loi du 15 juillet 1893 sur l’assistance médicale gratuite en constitue une première forme. Avec elle, la prise en compte de la santé publique s’affirme et se développe essentiellement dans une perspective économique. Elle s’appuie sur un élément nouveau qui remet en cause toute la logique libérale du xixe siècle : l’obligation. Elle affirme ainsi une politique républicaine interventionniste en matière sociale qui va à l’encontre des différentes expérimentations de l’Église catholique [Renard, 1994].

19L’article premier de la loi du 15 juillet 1893 précise que « tout Français, privé de ressources, reçoit gratuitement de la commune, du département ou de l’État, suivant son domicile de secours, l’assistance médicale à domicile où s’il y a impossibilité de le soigner utilement à domicile, dans un établissement hospitalier [4] ». Le territoire est la référence de la loi et le domicile de secours devient la définition institutionnelle du lien social [Renard, 1988]. La relation de proximité entre la personne secourue et le service administratif concerné est bien le vecteur de l’assistance. Cette logique repose sur « la reconnaissance de l’inscription dans une communauté territoriale dont la domiciliation est à la fois le signe, le support et la condition » [Castel, 1995, p. 64]. La loi inaugure donc une phase nouvelle pour les politiques publiques de santé. Les autorités prennent appui sur les collectivités locales pour mener une politique de santé publique. Colette Bec [1996] a montré justement que le sens de ces mesures est d’élaborer un mode de délégation qui permette à l’État de mettre en place une politique qu’il n’est pas en mesure d’assumer. Mais cette intervention publique volontariste s’inscrit également dans une perspective d’intégration des populations les plus défavorisées.

20La loi est diversement appréciée parmi les praticiens. Deux types d’arguments économiques et éthiques sont principalement avancés pour justifier leur refus de ce qu’ils appellent la charité publique. Le premier argument consiste à dire que l’AMG n’est, selon eux, pas en mesure de satisfaire la demande de soins, seule la concurrence est efficace. Le médecin n’a, en effet, aucun intérêt à soigner le pauvre, puisqu’il ne recevra en contrepartie qu’une indemnité sans commune mesure avec ce qu’il aurait reçu si le jeu de la concurrence n’avait pas été faussé par une intervention publique [Guillaume, 1996, p. 101-105]. Le second argument avancé se place sur le terrain éthique. Il repose sur l’idée que l’AMG favorise l’immixtion de l’État dans le colloque singulier et entraîne de facto la rupture du pacte moral existant entre le patient et le praticien [Salomon, 1898]. Un certain nombre de praticiens refusent de devenir des médecins-fonctionnaires. Ils acceptent de pratiquer la charité, mais pas au nom de l’État. Il s’agit selon eux d’une atteinte au caractère libéral de leur profession [Cucarull, 1992].

21La seconde possibilité, l’assurance, constitue une évolution profonde par rapport à l’assistance. Elle consiste à confier à un intermédiaire le soin de protéger les salariés contre certains risques sociaux. Cette approche liée à l’industrialisation du xixe siècle implique une prise en charge collective. Dans cette perspective, la Charte de la Mutualité (1er avril 1898) rénove considérablement le cadre juridique des sociétés de secours mutuels. Elle reconnaît trois types de sociétés (libres, approuvées et reconnues d’utilité publique), abolit leur contrôle politique par les préfets et élargit leur champ d’action à la santé, à la retraite, au chômage et à l’assurance-vie. Enfin, elle leur reconnaît un rôle actif dans la diffusion de la protection sociale [Dreyfus, 1990]. Néanmoins, les relations entre les sociétés de secours mutuels et la profession médicale sont assez conflictuelles et leurs intérêts divergents. Certaines sociétés, conscientes des difficultés de leurs adhérents et soucieuses de leur équilibre comptable, utilisent une formule d’abonnement (forfait annuel). Cette pratique est dénoncée par les praticiens comme contraire aux principes de la médecine libérale [Guillaume, 1999b].

22Cette période est fondamentale dans le processus de transformation du système de soins. En effet, l’avènement de formes sociales nouvelles a pour objectif de favoriser l’accès aux soins d’un nombre plus grand de personnes. Dans les faits, on peut estimer que celles-ci ont partiellement réussi. En 1890, le taux de prise en charge de la population est de 3 %. À la veille de la Première Guerre mondiale, ce même taux est passé à 17 %. De 1890 à 1912, la dépense de santé socialisée est passée de 8 millions à 140 millions de francs constants 1905-1913, soit une évolution de 6,5 à 21 francs constants par personne couverte [Domin, 2014]. La transformation est beaucoup plus importante que l’on croit dans la mesure où les praticiens, opposés par nature au financement collectif de la santé, vont en retirer des bénéfices. En fait les lois sociales de la fin du xixe siècle marquent le début du triomphe du paiement à l’acte.

23La représentation professionnelle évolue également. La loi du 30 novembre 1892 constitue un moment important dans la réorganisation de la profession. Elle autorise la constitution d’associations pour la défense des intérêts du corps médical. Le 19 novembre 1893, l’Union des syndicats médicaux de France (USMF) est créée. Elle va se lancer, comme l’ensemble des organisations syndicales, dans une politique nouvelle de consolidation des revenus et de répartition des patients [Steffen, 1987]. La consolidation des revenus constitue l’un des premiers combats des organisations syndicales légalisées. Ces dernières publient désormais des tarifs minima d’honoraires. Le Concours médical élabore en 1897 un barème national appelé Tarif Jeanne, du nom de son créateur, et qui s’impose pour tous les rapports avec des organisations collectives (mutuelles, collectivités publiques…). Les médecins fortement implantés dans les milieux parlementaires vont imposer une réforme du système d’abonnement, et plus généralement une modification en leur faveur des rapports avec les mutuelles.

24L’élaboration de règles déontologiques constitue le second objectif des organisations syndicales. Celles-ci ont pour objectif d’empêcher les praticiens de se disputer les patients entre eux. Ces bonnes pratiques consistent, pour les médecins membres d’un syndicat local, à ne pas dépasser les tarifs par le bas. La rémunération du praticien est désormais calculée en fonction de la situation financière du malade. La concurrence qui était autrefois totale est maintenant encadrée par une forme primaire de régulation professionnelle. Le système de soins repose sur le principe fondamental du libre choix, il permet une régulation du marché en répartissant équitablement les clientèles sociales et mutualistes [Steffen, 1987]. L’USMF signe en 1995 un accord de principe avec la Ligue de la Mutualité, prévoyant le respect du paiement à l’acte et le libre choix du praticien [Hassenteufel, 1997b]. Les organisations syndicales médicales ont compris l’intérêt qu’elles ont à négocier avec la Mutualité. Le conventionnement est né.

25Cette période est marquée par une contradiction entre la pratique libérale et le financement du secteur de soins. Pour bon nombre de praticiens, la régulation concurrentielle est la seule à pouvoir maintenir la cohésion du marché de la santé. Or, dans les faits, le financement collectif, qu’il provienne de sociétés de secours mutuels, de compagnies d’assurances (dans le cas des accidentés du travail) ou de collectivités locales (pour les malades bénéficiaires de la loi sur l’AMG), assure le bon fonctionnement du système. Le conventionnement simple qui semble s’élaborer constitue un nouveau mode de régulation et favorise le triomphe du paiement à l’acte. Il va être renforcé par le vote des lois sur les assurances sociales. Au début du xxe siècle, l’USMF admet progressivement le concept de médecine sociale. En 1910, elle propose l’instauration d’un dispositif d’assurance maladie obligatoire tel qu’il existe en Allemagne. Après la Première Guerre mondiale, elle va soutenir le projet d’extension des assurances sociales.

2.2.2 – La longue marche vers les assurances sociales (1920-1939)

26En 1920, Alexandre Millerand demande à Paul Jourdain, ministre du Travail, de préparer une extension des assurances sociales. Le 30 juin 1920, il met en place une commission extra-parlementaire dirigée par Georges Cahen-Salvador et chargée de procéder à l’étude d’un projet. Le ministre insiste sur le caractère nécessairement obligatoire de l’assurance sociale sans lequel cette expérience serait un échec [5]. Après examen, la commission donne son aval au texte préparé par Jules Laurent et Jacques Ferdinand-Dreyfus. Celui-ci est déposé le 22 mars 1921 à la Chambre des députés par Charles Daniel-Vincent, alors ministre du Travail. Le texte réaffirme le principe d’une gestion autonome des caisses d’assurance maladie tout en admettant le contrôle des pouvoirs publics. Le projet, selon Étienne Antonelli, emprunte des concepts aux expériences étrangères, mais reste discret sur les réalités existantes [Antonelli, 1928]. Le projet de loi clive la profession en deux camps opposés. Le syndicat des médecins de la Seine y voit un moyen d’aliénation de la liberté individuelle des praticiens. À l’opposé, la Fédération de syndicats médicaux d’Alsace pense que les médecins généralistes ont tout intérêt à voir se développer ce dispositif. Mais les délégués alsaciens ne parviendront pas à se faire entendre à l’assemblée générale de l’USMF.

27Une première version du texte est promulguée le 5 avril 1928 après sept ans de débats parlementaires. Le texte a évolué dans un sens plus favorable aux revendications des médecins par rapport aux versions antérieures. Le libre choix du praticien est garanti dans la mesure où une liste départementale de praticiens est définie d’un commun accord entre les caisses et les syndicats de médecins. Le principe de rémunération forfaitaire à la capitation est également abandonné, ainsi que le ticket modérateur. En revanche, le texte maintient le principe du tiers payant qui autorise les caisses d’assurances sociales à supporter le montant des honoraires. La profession refuse en bloc cette décision et milite pour le paiement direct par l’assuré sur la base des tarifs syndicaux.

28La loi est assez mal accueillie par le corps médical qui craint que les caisses n’imposent, par l’intermédiaire des conventions, les tarifs et l’application du tiers payant. Pour les ultralibéraux, le seul principe acceptable pour la profession est celui de l’entente directe. Ces derniers structurent leur opposition à la loi en s’appuyant systématiquement sur l’opinion publique. L’argument le plus fort est celui qui confond les assurances sociales avec une médecine de second ordre [Guillaume, 1999a]. Les opposants vont ainsi développer une nouvelle conception du rapport praticien-patient assise sur le colloque singulier.

29Les praticiens vont dans le même temps tenter de redéfinir leur espace de représentation professionnelle et politique. Dans une lettre du 13 novembre 1927 adressée au président de la commission d’hygiène, d’assurance et de prévoyance sociales de la Chambre des députés, Paul Cibrie affirme : « Le corps médical syndiqué, représenté par les délégués de l’Union des syndicats médicaux de France, la Fédération nationale des syndicats médicaux de France, le Groupement des syndicats généraux de médecins spécialisés, refuse de collaborer aux assurances sociales telles que les établit le projet de loi voté par le Sénat [6]. » Le 30 novembre 1927, le Congrès des syndicats médicaux de France aboutit à l’adoption de la Charte médicale. Elle réaffirme certains principes fondamentaux de la profession : le libre choix, le respect du secret médical, le droit aux honoraires, le paiement direct et la liberté de thérapeutique et de prescription. L’unification syndicale est consacrée le 6 décembre 1928 par la création de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) qui élit Paul Cibrie comme secrétaire général. L’organisation va alors se lancer dans une guérilla contre les assurances sociales et réussir à infléchir la loi en sa faveur.

30Après de longs débats, une nouvelle version est adoptée le 30 avril 1930. L’essentiel des changements réside dans le quatrième alinéa de l’article 7 qui précise que « les prescriptions médicamenteuses sont laissées à l’initiative des médecins qui conservent la liberté d’ordonner les médicaments conformes aux lois existantes ». En outre, le législateur a supprimé le caractère opposable des tarifs, ce qui permet aux praticiens d’avoir une liberté totale. Le système se montrera d’une efficacité limitée dans la mesure où le montant du reste à charge de l’assuré social est trop élevé. Dans ces conditions, la profession médicale est satisfaite et n’a plus de raison de s’opposer à la législation. En effet, celle-ci entérine les principes libéraux de la Charte. Le 27 juillet 1930, l’assemblée générale de la CSMF vote massivement pour la collaboration aux assurances sociales, mais précise « sa ferme volonté de ne pas laisser déroger aux principes de la Charte » [Guillaume, 1996, p. 197]. Dès le 7 mai 1931, un premier accord est signé entre la Fédération des syndicats médicaux de la Seine et la Caisse interdépartementale des assurances sociales de la Seine-et-Oise. À la fin de cette même année, des conventions ont été signées dans 17 départements [Guillaume, 1999a].

31Le principe le plus important de la nouvelle loi est celui de l’assujettissement. Tous les salariés de l’industrie, du commerce et de l’agriculture sont obligatoirement affiliés à une caisse d’assurances sociales. Dorénavant, le système ne repose plus sur une logique concurrentielle, mais sur un ensemble de conventions qui déterminent les tarifs et les modalités de remboursement des frais. La législation accélère également la mutation des établissements hospitaliers qui s’ouvrent à l’ensemble de la population. Cette évolution suscite de vives controverses avec la CSMF favorable au maintien de l’hôpital dans la sphère non marchande [Domin, 2002]. Quoi qu’il en soit et malgré certaines imperfections, les lois sur les assurances sociales ont accéléré la médicalisation de la société française. Après la Première Guerre mondiale, 15 % de la population est couverte par un régime social. En 1934, le taux de couverture sociale de la population est passé à 46 %, soit 20 millions de personnes [Domin, 2014].

2.3 – La régulation conventionnelle élargie (1945-1980)

32Vers la fin des années 1930, les assurances sociales marquent une évolution dans la mesure où elles permettent une socialisation de la médecine. Mais sur le plan financier, les ressources sont insuffisantes : les cotisations sont calculées sur un salaire de base inférieur aux salaires effectifs. Progressivement, un mode de régulation conventionnel élargi va se mettre en place. Le 4 octobre 1945, une ordonnance institue « une organisation de la Sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs et leur famille contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain ». Celle-ci prend appui sur quatre principes fondamentaux : la généralisation, l’extension, l’uniformisation et la centralisation. La généralisation de la couverture est un principe beveridgien. La couverture ne dépend donc plus d’une activité salariée, mais constitue un droit pour l’ensemble des citoyens. L’extension de la couverture assure à chacun la possibilité d’être couvert pour l’ensemble des risques pouvant affecter le revenu. L’uniformisation des cotisations constitue le troisième principe. Elle permet à l’assuré social et à ses ayants droit de bénéficier de l’ensemble des prestations pour une cotisation unique. Enfin, la centralisation permet une gestion centralisée de l’ensemble des risques. Ainsi, le modèle proposé à la Libération bénéficie-t-il d’un large accord et semble provenir d’une double inspiration beveridgienne et bismarckienne. Le système cherche à atteindre les objectifs de Beveridge et les méthodes de Bismarck [Palier et Bonoli, 1995].

33Le mode de régulation issu de l’ordonnance du 19 octobre 1945 repose sur le conventionnement. La formule retenue prend appui sur des tarifs négociés et soumis à une commission nationale tripartite. Les médecins ne sont pas autorisés à dépasser ces tarifs opposables. Cette réforme est fondamentale, mais il faudra une quinzaine d’années pour que le droit s’inscrive effectivement dans les faits. En effet, le texte de l’ordonnance n’est pas respecté par les praticiens et une série de dérogations prévoient une majoration des honoraires suivant la situation de fortune du patient. La situation des assurés sociaux varie donc d’un département à l’autre suivant les principes de la convention. En 1950, seuls 57 départements sont conventionnés. Ce sont essentiellement des départements ruraux. Dans les régions urbaines où le corps médical a un niveau de vie plus élevé, les praticiens restent hostiles au conventionnement [Steudler, 1977]. Après le protocole d’accord du 18 février 1953, les motifs de dépassement d’honoraires sont admis. En 1956, le projet de réforme du ministre des Affaires sociales Albert Gazier propose de supprimer les dépassements d’honoraires et de donner le contrôle de l’assurance maladie à une juridiction indépendante. Il envisage également la création de centres de soins. Ce projet suscite la vive opposition de la CSMF.

34L’avènement de la Ve République va implicitement favoriser la centralisation des pouvoirs et l’intervention administrative. Le décret du 12 mai 1960 signé par le ministre du Travail Bacon prend acte de l’échec de 13 années de négociation et impose aux praticiens une nouvelle organisation. Il réaffirme les principes du conventionnement et impose une convention-type dont la plupart des clauses sont obligatoires. Il autorise le dépassement des tarifs-plafonds fixés par arrêtés ministériels. Cette innovation est fondamentale, elle est accompagnée d’un relèvement important des tarifs. Le décret offre également aux praticiens la possibilité d’adhérer individuellement aux conventions. Enfin, il organise un contrôle des conventions. À la fin du mois de juillet 1960, la Fédération nationale des organismes de Sécurité sociale (FNOSS) signe un protocole d’accord avec la CSMF. Au sein de cette dernière organisation, certains adhérents refusent l’accord. Pour eux, le nouveau système porte atteinte à la qualité de la médecine, parce qu’il tend à la fonctionnarisation, parce qu’il supprime le facteur d’émulation et réduit à néant le libre choix. L’argument le plus développé est financier : si le médecin ne peut pas augmenter ses tarifs, il ne peut pas accroître ses connaissances pour améliorer ses pratiques. Mais, comme le montre Clément Michel [1960], il est difficile de déceler une corrélation entre le niveau des honoraires et la qualité de la médecine.

35Le décret modifie en profondeur les rapports de force au sein de la profession. Les militants de la CSMF sont très partagés sur la question [Arliaud et Robelet, 2000] et les opposants au conventionnement font scission pour créer le 19 janvier 1961 l’Union syndicale pour la réforme des décrets du 12 mai (USR) transformée en Union nationale des syndicats médicaux de France (USMF), qui deviendra en 1967 la Fédération des médecins de France (FMF). Mais en dépit de ces dissensions, la politique de conventionnement semble se mettre en place. En 1970, près de 88 % du corps médical est conventionné. Dans les faits, le décret ne remet pas en cause le caractère libéral de la médecine, il favorise seulement une entente directe collective et socialisée. La CSMF, après un changement d’équipe dirigeante, va s’engager dans une logique de coopération avec la tutelle.

36Le 28 octobre 1971, la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAMts) et la CSMF signent la première convention. Celle-ci est désormais nationale et s’impose à l’ensemble des praticiens. Elle pose comme principe que le paiement à l’acte n’est pas incompatible avec la socialisation de la dépense. Elle définit également des profils médicaux permettant d’établir des statistiques sur la pratique de chaque médecin. Il s’agit selon l’Ordre d’un instrument d’autodiscipline, une menace pour l’indépendance du praticien. Avec cet accord, les omnipraticiens acceptent d’offrir sur l’ensemble du territoire un service conventionné. En contrepartie, les caisses s’engagent à ne pas favoriser la médecine salariée [Abecassis et Domin, 2009]. Cette solution s’est avérée assez satisfaisante pour l’ensemble des acteurs : les praticiens ont vu leurs revenus augmenter et la CNAMts a pu contenir les dépenses dans certaines limites tout en fixant un taux élevé de remboursement [Arliaud et Robelet, 2000]. Le mode de régulation conventionnel élargi, qui se structure progressivement, repose sur une intervention grandissante de l’État.

37Dès 1974, le cadre de la convention, à laquelle 96 % des praticiens ont adhéré, se révèle inadapté. Un premier point de désaccord entre les caisses et la CSMF porte sur une augmentation des honoraires. Dans le même temps, les caisses tentent d’étendre le tiers payant et de réduire les dépassements d’honoraires. Les négociations s’engagent dans une situation de concurrence entre les deux organisations syndicales, la FMF signe la première, suivie en mars 1976 par la CSMF. La convention innove sur certains points : elle prévoit une procédure limitée de tiers payant, elle autorise la création de centres de santé, organise la concertation pour la révision de la nomenclature et entend sanctionner les pratiques de déconventionnement. Jusque dans les années 1980, un compromis s’établit entre la majorité FO et CNPF de la CNAMts et les deux principales organisations syndicales de praticiens la CSMF et la FMF autour de la préservation de l’exercice libéral [Hassenteufel, 1997a]. La crise économique va progressivement remettre en cause cette logique.

3 – Désocialisation et essor de formes alternatives de rémunération

38La part de la consommation de soins et de biens médicaux (CSBM) a fortement augmenté de 1950 à 2010 passant de 2,6 à 9,1 % du PIB (soit un rythme annuel moyen supérieur de 2,4 points supérieur à celui du PIB). Mais, depuis les années 1980, cette progression tend à diminuer. Avec elle, la part de la Sécurité sociale baisse légèrement passant de 80 % de la CSBM en 1980 (contre 51 % en 1950) à 75,7 % en 2010. La Sécurité sociale finance aujourd’hui un peu moins de 60 % des soins de ville contre un peu moins de 80 % en 1980 [Le Garrec et al., 2013].

39C’est dans cette situation de réduction de la prise en charge qu’il faut appréhender l’essoufflement de la politique de conventionnement. Désormais, les pouvoirs publics prônent une politique de dépassement du paiement à l’acte fondée sur la rémunération à la performance (3.1). Les praticiens, hostiles par principe à un abandon du paiement à l’acte, ont accepté le développement de cette forme de rémunération contre un abandon partiel d’un des principes de la Charte médicale. Celle-ci serait donc à géométrie variable (3.2) ?

3.1 – Contractualisation et dépassement du paiement à l’acte

40Avec la crise économique, la politique de conventionnement s’essouffle. La négociation sur la nouvelle convention est marquée, comme les précédentes, par une opposition entre les deux grandes organisations syndicales, dans un contexte politique difficile où la tutelle souhaite mettre en place une enveloppe globale [Pierru, 2007]. Le 23 septembre 1979, la CSMF entame une grève à propos de l’avenant tarifaire de la convention. La FMF s’y joint. En mars 1980, lors de la négociation, les caisses réclament le droit de créer des centres de santé. La CSMF refuse le développement de la médecine sociale et rompt les négociations. Le 23 mai 1980, la CNAMts et la FMF signent la troisième convention. Elle propose quatre nouveautés principales : l’élargissement du tiers payant, le renforcement de l’autodiscipline, la maîtrise concertée des dépenses, la création du secteur à tarif libre.

41La convention du 23 mai 1980 introduit une nouvelle ligne de partage suivant les conditions mêmes de l’exercice. La possibilité pour le médecin d’opérer un dépassement d’honoraires repose sur une justification marchande. Le praticien qui s’engage dans le secteur à honoraire libre choisit avant tout de lutter contre le carcan tarifaire que représente la convention. Le compromis s’articule autour de l’autodiscipline et du droit à dépassement. L’autodiscipline est renforcée. Tous les trimestres, les praticiens reçoivent leur tableau d’activité et, en cas d’abus, des sanctions sont prévues. La création du secteur à honoraires libres assure une liberté totale, mais les praticiens qui optent pour cette solution sont dans l’obligation de respecter l’autodiscipline.

42La CSMF opposée à la convention reste majoritaire, mais est affaiblie en 1981 par le départ d’une minorité qui fonde le Syndicat des médecins libéraux (SML). Cette nouvelle entité se caractérise par son ultralibéralisme et revendique le maintien d’avantages fiscaux et sociaux pour le secteur 2. La FMF est promue comme partenaire privilégié. Les accords de 1985, 1990 et 1993 n’auront pas permis de résoudre les problèmes du non-conventionnement. Cette situation a accéléré les dissensions au sein du syndicalisme médical [Vergez, 1996]. Le développement de la logique de la maîtrise médicalisée a favorisé la valse des alliances entre d’un côté la CNAMts et son ministère de tutelle, et de l’autre les quatre organisations syndicales représentatives : la CSMF, la FMF, le SML et MG-France (né en 1986 et représentant plus particulièrement la médecine générale).

43Depuis le début des années 1990, la CNAMts a inauguré une nouvelle phase de régulation négociée avec le corps médical en utilisant la convention médicale à des fins incitatives pour faire évoluer le comportement des praticiens. Cette politique comprend des objectifs à atteindre et un dispositif de sanctions et récompenses incitant les médecins à prescrire avec modération [Ferrand-Nagel, 1994]. La convention de 1993 en constitue la première étape, elle s’appuie sur un dispositif de références médicales opposables (RMO), c’est-à-dire des règles de bonnes pratiques s’imposant à tous. Le codage des actes et l’informatisation de l’activité en constituent les fondements [Ogien, 2001]. Les praticiens sont incités à respecter les références par l’intermédiaire d’une contrepartie incitative (paiement d’une partie des cotisations sociales du médecin). Le dispositif prend appui à la fois sur des procédures incitatives et une instance de contrôle coutumière [Mossé, 1998].

44La contractualisation suppose la négociation d’une convention d’objectifs et de gestion. Celle-ci détermine des objectifs à réaliser concernant la maîtrise des dépenses, les moyens de fonctionnement. Elle est accompagnée d’une responsabilisation des acteurs paritaires. Le contrat d’objectif inauguré en 1999 par la CNAMts s’intègre pleinement dans cette logique d’enveloppe globale et de recherche de la qualité. La maîtrise de la qualité ne repose donc plus sur le conventionnement, mais sur la contractualisation sélective des praticiens en fonction de la qualité de leurs prestations. De leur côté, les praticiens anticipent eux-mêmes une mise en concurrence des prestations en définissant des normes de qualité. L’apparition de l’AFNOR dans ce secteur mettrait en évidence une normalisation de compromis [Robelet, 2001].

45La négociation conventionnelle entre les acteurs n’est pas pour autant abandonnée, elle offre de nouveaux modes de coordination entre les partenaires qui partagent les objectifs gouvernementaux de maîtrise des dépenses [Hassenteufel, 1997a]. Une politique similaire est menée en Allemagne depuis quelques années. La réforme Seehofer a introduit des mécanismes de contrôle de la pratique ambulatoire, régule l’accès des jeunes praticiens à la médecine conventionnée et définit des dispositifs de régulation [Döhler et Hassenteufel, 1996]. La stratégie qui semble se dégager s’appuie sur un contrôle quantitatif et qualitatif des praticiens. La définition d’objectifs quantitatifs communs repose sur des revalorisations d’honoraires ou sur des sanctions financières quand les objectifs ne sont pas respectés. Sur le plan qualitatif, l’activité médicale est encadrée par des références médicales opposables qui fixent des pratiques thérapeutiques que les médecins doivent respecter.

46Dans le même ordre d’idées, les Accords de bon usage des soins (ACBUS) ont été mis en place en 2000 afin de promouvoir de bonnes pratiques. Ils prévoient des objectifs d’évolution des pratiques et des contreparties financières. Le protocole d’accord du 5 juin 2002 signé entre les caisses d’assurance maladie et les syndicats représentatifs de médecins, après sept mois de grève et de fermeture des cabinets, repose sur une logique similaire. En échange d’une revalorisation de la consultation à 20 euros (30 euros pour les consultations à domicile), les praticiens s’engagent à établir leur prescription en dénomination commune à hauteur de 25 % en moyenne nationale la première année, de lignes de prescriptions médicamenteuses dont la moitié en génériques. L’accord entend également favoriser les bonnes pratiques afin de contrôler les prescriptions.

47L’Assurance maladie cherche désormais à encadrer les comportements médicaux par des mécanismes financiers incitatifs (aide au démarrage, soutien à l’investissement…). L’exemple du Contrat d’amélioration des pratiques individuelles (CAPI), mis en place en 2009, est assez significatif de l’émergence de nouveaux dispositifs de rémunération. Le CAPI est un contrat de santé publique conclu entre un médecin traitant volontaire et l’assurance maladie. Il repose sur un axe prévention (risques médicamenteux, dépistage, vaccination…), un axe de suivi des maladies chroniques et un volet d’optimisation des prescriptions. À chacun des axes est associé un objectif réalisable en trois ans à compter de la signature du contrat. En contrepartie, une prime de 7 euros par patient est prévue chaque année. Ce nouveau dispositif semble avoir séduit les praticiens, il a été élargi depuis par la convention du 21 juillet 2011 signée par trois organisations (CSMF, SML et MG-France). Le système repose sur un barème de 1 300 points qui, s’il est atteint, rapporte un complément de 9 100 euros (contre 3 300 pour le CAPI).

3.2 – Une Charte médicale à géométrie variable

48Les évolutions récentes du mode de rémunération montrent qu’en échange d’une augmentation du tarif, les médecins sont prêts à accepter de remettre partiellement en cause l’un des principes fondamentaux de la Charte : la liberté de prescription.

49L’indépendance, la liberté et l’autonomie du praticien constituent des valeurs primaires de la médecine. Les deux premiers codes de déontologie médicale, promulgués en 1947 et 1955, reprennent les quatre principes de la Charte médicale du 30 novembre 1927 (libre choix du médecin, liberté de prescription, entente directe et paiement direct) ainsi que le secret médical comme faisant partie des fondements du libéralisme médical. Celui-ci consiste en une défense de l’indépendance de la profession. L’indépendance va de pair avec la liberté et constitue un principe indépassable dans la mesure où il est profondément lié au résultat des soins. Sa remise en cause mettrait donc le patient en danger [Jaunait, 2005]. D’ailleurs, l’indépendance n’est pas appréhendée comme un privilège du médecin, mais comme un droit indiscutable du patient.

50L’indépendance du praticien s’affirme, notamment dans les deux premiers codes de déontologie, vis-à-vis du système institutionnel. Le corps médical se constitue autour d’une activité particulière dont l’organisation serait distincte des autres. Ainsi, la profession se structure-t-elle autour d’un principe fondamental : le système médical est autonome par rapport à l’État social. À titre d’exemple, la mise en place progressive des assurances sociales (lois de 1928-1930), de la sécurité sociale, l’obligation de conventionnement sont appréhendées comme une contrainte supplémentaire qui, in fine, limite l’efficacité de la médecine. Le principe de l’indépendance repose en effet sur deux arguments typiques : la bonne médecine repose sur la confiance du patient qui prend elle-même appui sur le libre choix, la libre entente sur les honoraires et la liberté thérapeutique [Robelet, 2005].

51L’idée de profession libérale s’exprime à deux niveaux. D’abord, elle suppose un degré de liberté qui exige « une intervention grande et perpétuelle de l’intelligence » [Hatzfeld, 1963]. L’activité intellectuelle serait donc le trait principal de la profession libérale. Ce critère la distingue du commerce par exemple, qui exige un apport du capital, mais il n’est pas suffisant dans la mesure où certaines professions intellectuelles relèvent de la fonction publique. Au second plan, le type de revenu (honoraires) permet d’asseoir la liberté du professionnel qui est libre dans les décisions qu’il prend et corrélativement, maître de son jugement et seul juge de la valeur monétaire correspondant à l’acte [Ferrand-Nagel, 1993].

52Lier l’indépendance du praticien au caractère libéral de sa profession paraît être le plus important dans la mesure où il consiste à mettre l’accent à la fois sur une certaine forme d’autonomie intellectuelle, mais également sur la liberté professionnelle. L’autonomie est un trait que partage la profession avec les magistrats ou les universitaires. Mais, ce n’est pas pour autant qu’elle peut être assimilée à une profession intellectuelle. En effet, le médecin doit être appréhendé comme un travailleur intellectuel indépendant à revenus variables. Une profession libérale est donc une profession « chargée de valeurs intellectuelles ou morales qui s’exerce dans le cadre d’une petite entreprise libérale » [Hatzfeld, 1963, p. 271]. Cette logique tend à exclure de facto les médecins salariés qui pour autant n’ont pas renoncé à l’esprit de leur profession, c’est-à-dire à l’indépendance professionnelle [Vergez, 1996, p. 138].

53La liberté est d’autant plus importante pour la profession qu’elle s’impose au niveau interne, mais pas externe. La restriction de la liberté n’est jamais externe et le praticien n’a de comptes à rendre qu’à l’Ordre [Jaunait, 2005]. Ainsi, la profession, contrairement à d’autres professions libérales et commerçantes, s’est dotée d’une institution habilitée à juger les fautes de ses membres. Elle se protège également de la concurrence, notamment en stigmatisant les autres formes d’exercice. La défense du caractère libéral de la médecine et le refus du salariat constituent en effet les traits principaux de l’espace discursif libéral, et notamment de certains syndicats [Abecassis et Domin, 2009]. Ce discours a été le fer de lance du combat contre les assurances sociales dans les années 1920 et a résisté de façon paradoxale à la création de la Sécurité sociale en 1945.

54La mise en œuvre de techniques de rémunération à la performance d’abord par le CAPI, puis par la convention de juillet 2011, met en lumière les évolutions de la profession face au principe de la liberté de prescription. Lors de la mise en œuvre du CAPI, les syndicats et le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) se sont érigés en rempart contre ce qu’ils appelaient une remise en cause de la Charte. La signature de la convention de 2011 a laissé place à un scénario différent. Seul le CNOM s’y est opposé en utilisant trois arguments principaux. Il y a d’abord selon son président, Michel Legmann, une orientation de la prescription par la tutelle qui est contraire selon lui aux principes de la Charte médicale (la liberté de prescription). Il peut exister, ensuite, un conflit d’intérêt entre le médecin et son patient, ce dernier pouvant penser que le premier préfère ne pas prescrire certaines molécules ou prestations pour pouvoir toucher la prime. Enfin, Michel Legmann estime que le paiement à la performance pénalise les patients les moins compliants.

55Les trois syndicats signataires de la convention (CSMF, SML et FMF), conscients de la difficulté d’obtenir une revalorisation du tarif de consultation en période de crise financière de l’assurance maladie, ont préféré un encadrement de la liberté de prescription pour améliorer leur revenu. Les praticiens ont plébiscité cette forme de rémunération complémentaire d’abord en souscrivant au CAPI, puis en acceptant la nouvelle convention. Pourtant, une grande partie d’entre eux restent méfiants quant à la contractualisation. Une analyse lexicométrique sur un échantillon de praticiens généralistes fait apparaître une méfiance de certains praticiens, qui ne porte pas sur les contrats à proprement parler, mais sur leurs implications administratives (discours récurrent de la profession sur le développement de la paperasserie) et aux coûts qu’elles entraînent pour les praticiens. Mais l’étude met également en évidence le malaise de la médecine générale qui se traduit par un discours portant principalement sur les conditions et les modalités d’une éventuelle salarisation. Cette particularité est à mettre en perspective avec la préoccupation croissante des omnipraticiens vis-à-vis des commentaires de leurs patients à propos des revenus [Abecassis et Domin, 2011].

56Quoi qu’il en soit, la profession semble marchander un de ses principes fondateurs contre une rémunération complémentaire. Dans un ouvrage assez contestataire issu de sa thèse en médecine, Guy Caro [1974] montre que si le principe de paiement direct est difficilement négociable pour la profession, les trois autres peuvent être aisément mis de côté contre une revalorisation du revenu. La Charte de la médecine libérale serait donc, selon lui, à géométrie variable : les syndicats de praticiens sont prêts à l’abandonner pour obtenir des revenus supplémentaires. Les médecins ont justifié leur refus des assurances sociales dans les années 1930 et leur opposition au décret dit Bacon du 12 mai 1960 au motif qu’ils remettaient en cause l’un des principes fondateurs de la Charte : la liberté de choix du praticien. Dans les années 1970, ils ont favorisé l’encadrement par la convention de la création de centres de santé, parce que la médecine salariée d’une part était contraire à la médecine libérale et d’autre part remettait en cause le paiement direct. Aujourd’hui, le principe de liberté de prescription est abandonné par les praticiens contre un revenu complémentaire assuré par la tutelle.

4 – Conclusion

57Une analyse de longue période du système de soins a mis en évidence la succession de trois modes de régulation : concurrentiel, conventionnel simple et conventionnel élargi. Chacun de ces trois modes a succédé à l’autre autour d’une logique dialectique : quand un mode de régulation ne répond plus, l’opposition se cristallise autour de la socialisation de la médecine. À chaque étape, l’opposition dialectique entre partisans et opposants à la socialisation constitue le moteur de l’évolution. Le mode de régulation nouveau repose sur une socialisation plus grande des dépenses de santé. Ce phénomène s’inverse au début des années 1980 avec la préférence affichée des pouvoirs publics pour la réduction de la dépense socialisée.

58Depuis le début des années 2000, l’objectif de la politique économique de santé est de discipliner le jeu des demandeurs et des offreurs de santé par le biais d’incitations. Les premiers sont incités à adopter un comportement moins dépensier, notamment par des systèmes de copaiements où l’assurance maladie complémentaire est omniprésente [Batifoulier et al., 2010]. Les seconds sont incités à modérer leurs prescriptions. La tutelle entre dans une phase de négociation avec le corps médical. L’objectif est d’inciter les médecins à prescrire autrement. Les RMO, les ACBUS, le CAPI et la convention de 2011 sont autant d’exemples de contractualisation entre les praticiens et la tutelle. Celle-ci cherche désormais à encadrer les comportements via des mécanismes incitatifs. Cette politique est significative du tournant marchand du système de santé : les praticiens sont prêts à passer outre l’un des principes fondateurs de la profession contre une revalorisation du revenu, alors qu’ils ont refusé pendant la période précédente certaines innovations sociales au motif qu’elles remettaient en cause la Charte médicale.

59Si pendant les périodes précédentes l’opposition dialectique s’est soldée par une amélioration de la socialisation, la phase actuelle semble différente dans la mesure où elle se traduit par un recul des dépenses socialisées. D’une part, les médecins ont réussi à fragmenter leur activité pour bénéficier d’honoraires techniques rémunérant des actes qui, autrefois, étaient pratiqués gratuitement. D’autre part, les ménages sont amenés à participer de façon croissante au financement de la santé. Si le reste à charge a diminué de 1995 à 2004, il est reparti à la hausse à partir de 2005, passant de 9 à 9,7 % de la CSBM en 2008. Plusieurs éléments expliquent cette évolution : la mise en place du parcours de soins en 2006, l’instauration de franchises sur des postes de dépenses assez dynamiques comme les médicaments, les transports et les auxiliaires médicaux. Depuis 2009, le reste à charge se stabilise à ce niveau. Il est de 9,6 % de la dépense en 2012 comme en 2011 [Le Garrec et Bouvet, 2013].

Notes

  • [1]
    L’auteur tient à remercier les referee de la RFSE pour leurs critiques constructives et leurs conseils avisés. Par convention, il reste seul responsable des insuffisances de ce texte.
  • [2]
    La socialisation de la santé correspond à un mécanisme de prise en charge totale ou partielle de la dépense soit par un dispositif de protection sociale, soit par un mécanisme de type mutualiste.
  • [3]
    Article 1 de la loi du 19 ventôse an XI, in J.-B. Duvierger, Collection complète des lois, tome XIV, Éditions Guyot et Scribe, Paris, 1836, p. 12-15.
  • [4]
    « Loi du 15 juillet 1893 sur l’assistance médicale gratuite », Bulletin des lois, n° 1583, Imprimerie nationale, Paris, 1893, p. 841.
  • [5]
    Archives nationales, F22 2056.
  • [6]
    Cité in Picard [1983, p. 258.]
Français

Ce travail propose une lecture rétrospective du système de santé et notamment de l’évolution du mode de rémunération. La profession s’est constituée autour de certains principes gravés dans le marbre en 1927 dans la Charte médicale. Paradoxalement, ces principes issus de la guérilla menée par les médecins contre les assurances sociales dans les années 1930 vont accompagner le développement de la socialisation de la médecine. Aujourd’hui, la socialisation recule progressivement et les pouvoirs publics tentent de mettre en place de nouvelles formes de rémunération qui vont à l’encontre de certains principes de la Charte (notamment la liberté de thérapeutique). Les praticiens seraient ainsi prêts à abandonner certains principes pour maintenir leur niveau de revenu.

Mots-clés

  • désocialisation
  • médecine
  • paiement à l’acte
  • paiement à la performance
  • socialisation

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Jean-Paul Domin
Regards (EA 6292), Université de Reims Champagne-Ardenne
Mis en ligne sur Cairn.info le 25/02/2016
https://doi.org/10.3917/rfse.016.0215
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