CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Si la distinction entre la gauche et la droite trouve fameusement son origine dans la Révolution française, elle en est assez rapidement venue à s’imposer bien au-delà de l’hexagone. Ainsi, dès 1864, on peut lire dans le Dictionnaire général de la politique dirigé par Maurice Block : « Il est maintenant reçu – dans beaucoup de pays – que les conservateurs se placent à droite du président et les libéraux à gauche » (cité par Crapez, 1998, p. 44). Dans un traité canadien de science politique de la fin du XXe siècle, ce clivage est même décrit comme un « espéranto politique » (Laponce, 1981, p. 56). Le succès de cette opposition se manifeste aussi dans les enquêtes internationales dans lesquelles on demande aux enquêtés de tous les continents de se situer sur une échelle allant de la gauche à la droite. Si cette opposition semble ainsi s’imposer très largement, les travaux historiques montrent néanmoins que sa signification a largement évolué au cours du temps. S’appuyant sur le travail de Marcel Gauchet, Marc Crapez (1998) note qu’en France c’est seulement au début du XXe siècle que cette position sur l’axe gauche-droite est passée d’une simple position technique à l’Assemblée à la description d’une identité politique plus substantielle faisant partie du langage courant. Mais, surtout, il montre comment, dans le cas de la France, cette opposition a revêtu diverses significations pour décrire la vie parlementaire et les différents affrontements entre les partis.
D’un point de vue plus quantitatif, certains auteurs ont critiqué les questions d’auto-positionnement sur une échelle gauche-droite, considérant que leur abstraction et leur signification potentiellement variable en faisaient une mauvaise mesure (Evans, 2010)…

Français

Cet article propose d’identifier les variations nationales du rôle de quatre attitudes politiques dans la construction du clivage gauche-droite : l’interventionnisme économique, le libéralisme moral, l’acceptation de l’immigration et la préoccupation environnementale. Au moyen des données de l’enquête European Values Study (EVS) 2017 dans 21 pays de l’Union européenne, l’article montre d’abord l’intérêt de substituer cette description quadri-dimensionnelle des attitudes politiques à la description bi-dimensionnelle usuelle opposant libéralismes économique et culturel. Il montre ensuite comment, selon les pays, chaque attitude politique joue un rôle différent dans la construction du clivage gauche-droite. Dans certains pays, certaines attitudes apparaissent comme particulièrement dominantes, c’est-à-dire comme déterminant quasiment seules ce clivage. Enfin, l’article met en évidence la complexité des relations entre clivages politiques et stratification sociale : selon l’attitude politique considérée, un plus haut niveau de diplôme est associé à un positionnement plus à droite ou plus à gauche.

  • valeurs
  • stratification sociale
  • attitude politique
  • opinion publique
Cyril Jayet
Paris, Sorbonne Université, GEMASS – CNRS
cyril.jayet"at"sorbonne-universite.fr
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Mis en ligne sur Cairn.info le 20/12/2021
https://doi.org/10.4000/ress.7833
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