Article
La petite maison dans la prairie n’est-elle pas trop fleur bleue ? Et le rêve des cités-jardins décidément utopique ? De quoi est faite la rêverie d’une ville socialement et écologiquement soutenable ? Parce que la crise écologique affecte les conditions de l’habitabilité terrestre, il nous faut prendre au sérieux l’architecture, l’urbanisme et le paysagisme. Ces arts de l’habiter, composant des mondes entre les humains et les autres vivants, y apportent une réplique. Du moins si on les entend comme des arts d’aménagement de territoires et des arts du ménagement des relations entre les établissements humains et les écosystèmes. Car les lieux fabriquent des liens, tant les lieux qu’on occupe sont des lieux dont on s’occupe.
Certes, entre le sauvage et l’artifice, la nature conserve cette part sauvage du monde que la ville artificialise. Modernisation, extraction, urbanisation, accélération, technicisation, métropolisation de la « maison commune » donnent raison à cette idée. Toutes les heures, en France, l’équivalent de quatre ou cinq stades de foot en terres agricoles disparaît pour être « urbanisé ». Et le concept de « ville durable », ou « d’écoquartier » high-tech, loin d’y apporter remède, rend acceptable, par « des solutions techniques », un développement urbain infini. La ville verte cache la réalité de villes grises – l’histoire du ciment, la « matière grise » de l’urbain l’atteste – et la smart city nourrit une douce corrosion des liens.
Pour résister à cette production industrielle de la ville, parler de ville biomimétique, de biodiversité urbaine ou de biorégion indique que la ville devrait se penser en lien avec ses territoires sans les épuiser…
Auteur

Philosophe, Université de Bourgogne, directeur de la chaire « Valeurs du soin ».
- Mis en ligne sur Cairn.info le 29/06/2022
- https://doi.org/10.3917/etu.4295.0073

Veuillez patienter...